Malgré une grave blessure, le plongeur sera à Athènes
Peu importe son résultat, Philippe Comtois réalisera tout un exploit simplement en se présentant au site olympique de plongeon, dans quatre mois, à Athènes.
« Juste ça, ça serait quelque chose! » lance simplement son entraîneur Michel Larouche.
C'est que Comtois revient de loin. Après une participation aux Jeux d'Atlanta, en 1996, il avait tout pour réussir à ceux de Sydney, quatre ans plus tard. « Il était vraiment prêt, se souvient Larouche. Mais la vie ne lui a pas permis d'y aller. »
En effet, à peine quelques mois avant le grand rendez-vous, le drame. Une séance d'échauffement habituelle avant une épreuve, en Angleterre. Un instant d'inattention. « Il me restait deux plongeons à pratiquer, se souvient Comtois. J'ai commis une simple erreur technique et je suis mal retombé sur le tremplin. »
Son pied gauche a basculé sur le côté, puis son genou a cédé.
Immédiatement, son entourage a su que ce n'était pas une blessure ordinaire : en plus de trois ligaments du genou qui s'étaient rompu, le nerf qui alimente l'avant de son pied avait été complètement sectionné. « On était sûr que, pour lui, c'était fini », se souvient Alexandre Despatie.
S'en est suivi une semaine d'hospitalisation en Grande-Bretagne, une opération de plusieurs heures au Québec pour reconstruire son genou, puis une autre, aussi longue que majeure, une greffe nerveuse, qui n'a finalement pas fonctionné.
Larouche impressionné
À ce moment, reprendre le plongeon constituait une ambition un peu poussée puisque Comtois avait peine à marcher. « Il y avait les difficultés à reprendre le sport de haut niveau, mais il y avait aussi toute la question de l'acceptation de sa nouvelle condition, explique Larouche. D'un seul coup, il est passé d'athlète surdoué à quelqu'un qui devait vivre avec un handicap pour la vie.
« Mais Philippe est carrément impressionnant, poursuit-il. Il a eu la force mentale de dire : C'est ma nouvelle condition, c'est tout. Moi-même, je ne pense pas que j'aurais pu réagir comme il l'a fait. »
Encore aujourd'hui, Comtois ne peut soulever le devant de son pied, qui est tombant. « Parfois, je trébuche même en marchant parce que je ne soulève pas assez mon pied et que le bout de mon soulier s'accroche au sol, raconte-t-il. C'est pas plus grave que ça, on rit... »
Pour les bonnes raisons
C'est d'ailleurs exactement ce qu'on ressent en écoutant Comtois parler. Pas une seule plainte, pas même une seule mention qu'il lui manque quoi que ce soit pour vivre sa vie, même sa vie d'athlète.
Officieusement qualifié au plongeon synchronisé à la tour de 10 mètres à Athènes - avec Despatie - et très sérieux candidat à l'un des rares postes disponibles en solo au tremplin de 3 mètres, Comtois se sent au sommet de son art, malgré les problèmes de force, d'équilibre et de symétrie engendrés par les séquelles de sa blessure.
« Je ne voulais pas finir ma carrière comme ça, raconte Comtois, et depuis, j'ai eu de très bons résultats. Même qu'à mon avis, je suis meilleur qu'avant. J'ai plus d'expérience, plus de maturité.
« Avant, je ne suis pas sûr que je plongeais pour les bonnes raisons. Pour moi, c'était un job mais depuis, j'ai réalisé à quel point j'aimais plonger et m'entraîner. »
Et il y a le reste. Son baccalauréat en comptabilité, qu'il est en train de faire à l'UQAM, sa conjointe et sa petite Charlotte, âgée de huit mois et demi.
« J'adore plonger, mais oui, ce sont assurément mes derniers Jeux, tranche-t-il. Il y a autre chose dans la vie.
« Pour ce qui est de mon pied, je ne m'en fais pas avec ça, dit celui qui aura 28 ans durant les Jeux. Ça fait partie de moi maintenant. »
une page mise en ligne le 22 avril 2004 par SVP