L'infarctus du myocarde (crise cardiaque )

Définition

L'infarctus du myocarde est la nécrose, d'origine ischémique, d'une zone plus ou moins étendue du myocarde (au moins 2 cm2) : les cellules musculaires du cœur, asphyxiées, ne parviennent plus à se contracter et meurent en quelques heures.

Mécanisme

Le myocarde ou muscle cardiaque est vascularisé par les artères coronaires. Lorsque celles-ci se bouchent (caillot, thrombose ou spasme), le myocarde ne reçoit plus de sang et donc manque d'oxygène. Il souffre d'ischémie.

La gravité de l'infarctus tient surtout à l'étendue des dommages : plus l'artère obstruée irrigue une zone importante, plus l'infarctus est grave. Si l'atteinte est très étendue, le fonctionnement même de toute la pompe cardiaque est altéré. Il en résulte une insuffisance cardiaque plus ou moins aiguë, des contractions anormales ou anarchiques qui imposent le transfert dans une unité de réanimation.

Causes

L'infarctus du myocarde (IDM) est une des complications majeures de l'athérosclérose des artères coronaires. Il touche un homme sur cinq entre 40 et 60 ans mais la femme et l'individu jeune ne sont pas épargnés.
Les facteurs favorisants sont connus : l'hypertension artérielle, l'hérédité, l'hyperlipidémie, le tabac, le diabète, l'obésité, l'hypothyroïdie, la polyglobulie, le stress...
L'athérosclérose ne résume pas les causes de l'infarctus du myocarde qui peut également être déclenché par :

Symptômes

Le début peut être inopiné et brutal.
Mais on retrouve souvent des signes précurseurs ou syndrome de menace dont la prise en compte et le traitement peuvent éviter la constitution de l'infarctus du myocarde :

L'infarctus du myocarde se manifeste le plus souvent dans la nuit ou au repos par une douleur d'apparition brutale. Cette douleur se situe derrière le sternum. Intense, constrictive, angoissante (le malade a l'impression qu'il va mourir), la douleur irradie vers la mâchoire, le bras gauche, les deux derniers doigts de la main gauche, parfois vers le dos ou le ventre. Cette douleur ressemble donc à celle de l'angor mais ici, elle est durable et résiste à la Trinitrine si le malade a l'habitude d'en prendre lors de ses crises d'angines de poitrine.

En pratique, toute douleur angineuse persistant plus de trente minutes est suspecte. Une gêne respiratoire (dyspnée ), des sueurs, une agitation, des nausées ou des vomissements bilieux, un hoquet, des éructations incessantes (rots) sont souvent associés.

La chute de la tension artérielle, par rapport aux chiffres habituels antérieurs, est constante. Les bruits du cœur sont sourds et rapides (tachycardie). Un galop ou un frottement péricardique sont parfois entendus à l'auscultation par le médecin.

La perte d'efficacité de la pompe cardiaque provoque une stase sanguine en amont et l'infarctus du myocarde peut s'accompagner d'un œdème aigu des poumons (OAP) par insuffisance ventriculaire gauche. Dans ce cas, le médecin note une cyanose et des râles crépitants aux bases pulmonaires.

Une fièvre à 38° apparaît 24 heures après le début des troubles et s'estompe en quelques jours.

Examens complémentaires

L'électrocardiogramme (ECG) permet le diagnostic et de préciser la localisation sur le myocarde des lésions.

Les signes biologiques sont importants :

D'autres examens spécialisés sont utilisés :

Evolution

L'évolution de l'infarctus du myocarde est en général favorable.

Une fois l'infarctus constitué, le muscle cardiaque va cicatriser en remplaçant la zone détruite par une plaque de fibrose ou tissu cicatriciel très dur et solide. Cette cicatrisation prend en général un mois. Elle laisse une portion du cœur non contractile, immobile. Parfois, cette cicatrice est bombée, boursouflée réalisant un "anévrisme cardiaque". Cette poche non contractile gêne le fonctionnement du cœur et peut entraîner des extrasystoles.

Dans ces cas d'infarctus du myocarde peu étendus, seule une partie limitée du cœur est atteinte et celui-ci peut continuer son travail de pompe presque normalement. Pendant la cicatrisation de l'infarctus du myocarde, autour de la partie de l'artère coronaire occluse ou très rétrécie, va se développer une circulation artérielle collatérale. Les branches des artères non intéressées par l'occlusion vont se développer et prendre en charge la partie du muscle cardiaque qui était irriguée par l'artère qui vient de se boucher.

Malgré ces données rassurantes, le malade n'est pas à l'abri de complications, parfois mortelles, surtout lors des trois premières semaines.

Dans l'immédiat, avec le traitement et le repos absolu au lit, la douleur s'amenuise et la tension artérielle reste stable. La fièvre disparaît en quelques jours de même que le frottement péricardique s'il existe.

Le lever peut se faire dès le 2è jour, la marche dès le 5è jour dans les cas simples.

La phase aiguë est terminée après 2 ou 3 semaines. L'hospitalisation dure une semaine, le travail peut être repris après 3 mois.

La modification des signes ECG est variable mais l'onde Q de nécrose est définitive et signe l'infarctus.

Complications

Les complications plus tardives sont nombreuses:

formes graves d'emblée de l'infarctus du myocarde

le choc cardiogénique (collapsus)

Si l'infarctus atteint une zone étendue de myocarde (40 à 50% de la masse myocardique), il peut provoquer la déchéance totale de la fonction cardiaque (10 à 15% des cas): c'est la forme majeure de l'insuffisance cardiaque.

Le principal problème pour le médecin confronté à cet état gravissime est de s'assurer qu'il s'agit bien d'un choc cardiogénique et non d'un trouble du rythme cardiaque tout à fait curable si le traitement adapté est institué en urgence.

l'insuffisance cardiaque

les troubles du rythme cardiaque

Ils sont extrêmement fréquents puisqu'on les note dans 90% des IDM.

Tous les troubles du rythme peuvent se voir au cours de l'infarctus du myocarde :

les accidents thromboemboliques

Les embolies artérielles ou pulmonaires sont fréquentes et justifient le traitement anticoagulant à la phase aiguë de l'infarctus. Les signes de phlébite (douleurs dans les mollets etc) sont attentivement recherchés tous les jours.

En cas de fibrillation auriculaire, des embolies artérielles sont possibles, favorisées en outre par l'immobilité et la réduction du débit cardiaque : artères cérébrales (hémiplégie) etc...

Autres complications :

Les ruptures musculaires au niveau du myocarde sont rares (0,5 à 1%) mais graves car le traitement chirurgical est très aléatoire.

La constitution d'un anévrisme ventriculaire quelques semaines après l'infarctus du myocarde est possible. Il peut provoquer des troubles du rythme, une insuffisance cardiaque et des embolies.

Diagnostic différentiel

La douleur peut prêter à confusion dans certains cas avec :

Certains infarctus du myocarde ne s'accompagnent pas de douleur thoracique et sont découverts par l'électrocardiogramme lors d'un OAP, d'un collapsus ou d'un accident vasculaire cérébral.

Traitement

Dans l'immédiat

Le premier objectif du traitement est d’essayer d’obtenir à nouveau et le plus vite possible le passage du sang dans l’artère coronaire bouchée. Pour cela deux techniques sont utilisables : la thrombolyse consiste à administrer dans la circulation des thrombolytiques, capables de " dissoudre " le caillot qui bouche l’artère.

l’angioplastie consiste à introduire une sonde à ballonnet dans les artères, pour dilater mécaniquement la coronaire bouchée.

Si la deuxième technique est très efficace, elle n’est pas utilisable partout et par tous, et la thrombolyse reste la technique d’urgence de base, à administrer le plus précocement possible.

Le traitement doit être mis en route d'extrême urgence au domicile du malade, qui doit par ailleurs être évacué le plus vite possible vers une structure hospitalière. Si le transport doit durer plus de 60 minutes, on administre des thrombolytiques (streptokinase): ce traitement dans l'heure qui suit le début de l'infarctus permet de réduire la mortalité de moitié. A défaut l'administration d'aspirine améliore le pronostic.

Par ailleurs, il est possible d'administrer un sédatif contre l'anxiété, un traitement contre la douleur et de l'oxygène

Ces soins, l'oxygène, permettent le transfert dans les meilleures conditions dans une unité de soins intensifs cardiologiques.

Ce transfert doit se faire en ambulance médicalisée (SMUR) avec un médecin qui pourra surveiller la perfusion et le tracé ECG permanent du malade. En cas de trouble du rythme, le malade pourra ainsi être soigné dans l'ambulance.

A l'Unité de soins intensifs cardiaques, un traitement complexe sera mis en place :

dans un deuxième temps

Une surveillance régulière et une hygiène de vie sont indispensables.

Le traitement au long cours associe bêtabloquants (ou vérapamil) et un anti-agrégant plaquettaire (aspirine par exemple).

La convalescence débute à la sortie de l'hôpital et dure 2 à 8 semaines. Durant cette phase, le patient devra retrouver progressivement une certaine activité physique, se réadapter à l'effort. Cette réadaptation peut se faire à domicile, en externe à l'hôpital ou dans un centre de rééducation spécialisé.
Des exercices gradués constituent le programme d'entraînement physique : gymnastique, bicyclette, tapis roulant sous surveillance continue ECG au besoin.

Ces mesures permettent souvent au patient d'atteindre une forme physique bien supérieure à celle qu'il avait avant son infarctus. La réadaptation cardiaque à l'effort va permettre de diminuer le travail du cœur dans la vie quotidienne. En effet, l'exercice physique diminue la fréquence cardiaque au repos et pour un même effort, après entraînement, la fréquence cardiaque monte beaucoup moins.

La lutte contre les facteurs de risque existants doit être menée parallèlement :

Il existe des associations de cardiaques dont le but est d'aider les malades à échanger des conseils utiles .

l'environnement : le séjour prolongé en altitude supérieure à 1500 mètres est à éviter. La marche en montagne n'a cependant aucun inconvénient sur le cœur s'il est stable et s'il n'y a ni essoufflement ni angor.
Le séjour en bord de mer est bénéfique. Les baignades sont toutefois interdites si la température de l'eau est inférieure à 20°. Il faut éviter de nager au large et rester parallèle à la côte pour des raisons évidentes de sécurité.
L'exposition au soleil ne présente pas plus d'inconvénient que pour un sujet sain sauf pour les patients traités par certains médicaments pouvant provoquer une hypersensibilité de la peau aux rayons solaires.
Le séjour à la campagne est tout à fait conseillé : il apporte calme et détente.

Le climat : le froid peut déclencher des crises d'angor. Il faut éviter les efforts brusques ou les faire précéder d'un échauffement préalable. Il est parfois nécessaire de prendre un comprimé de Trinitrine avant de sortir. Le vent froid est mal toléré. Les climats torrides sont déconseillés.

Le repos et le sommeil : si l'absence d'activité physique est très préjudiciable, il ne faut pas tomber dans l'excès inverse. Le repos est important : au moins 8 heures de sommeil.

L'alimentation : Perdre les kilos en trop et équilibrer son alimentation sont une priorité. Eviter les graisses cuites, les plats et boissons sucrés, l'alcool et l'excès de sel. L'arrêt total du tabac doit être définitif et absolu.

Il faut éviter tous les efforts physiques après les repas et surtout pendant la digestion car à ce moment l'apport d'oxygène au cœur est diminué au profit des intestins. Une courte sieste est conseillée après le déjeuner.

La sexualité: l'activité sexuelle peut reprendre sans inconvénient lors de la convalescence. On considère que l'activité sexuelle peut être reprise dès que le patient est en état de monter deux étages sans symptôme.

Les déplacements : la conduite automobile constitue une source de stress. Après la sortie de l'hôpital, il ne faut la reprendre que progressivement en étant accompagné. Il faut conduire prudemment, sans agressivité et boucler sa ceinture. Les longs trajets sont déconseillés : des arrêts fréquents et prolongés sont recommandés. Il convient d'éviter les repas copieux avant de prendre le volant. Le coronarien ne doit pas changer sa roue crevée lui-même ; soit il le fait faire par un garagiste, soit il utilise les bombes de regonflage du commerce.

le cardiaque et l'avion : en général, le voyage aérien est un moyen de transport pratique, rapide et bien toléré qui convient bien aux patients cardiaques.

La pressurisation dépend du type d'appareil et de l'altitude. Dans les avions pressurisés il existe une "altitude cabine" artificiellement maintenue autour de 800 à 1500 mètres.

La rapidité de variation de la pression barométrique joue un rôle.
L'hypoxie entraînée par le voyage aérien est discrète. Elle est compensée par une tachycardie et une augmentation du débit cardiaque. Une vasodilatation coronaire est associée.

D'autres facteurs que la dépression barométrique sont importants:

Il existe des contre-indications aux transports aériens :

Le patient cardiaque doit voyager avec sa dernière ordonnance, son dernier ECG, les résultats des derniers examens biologiques (taux de prothrombine en cas de prise d'anticoagulants) et le numéro de téléphone de son médecin.

Des anxiolytiques sont nécessaires en cas d'appréhension.
Les porteurs de pacemakers doivent prévenir les services de contrôle avant de passer devant les détecteurs électroniques d'armes à feu.

Le coronarien doit avoir sur lui de la Trinitrine. S'il a déjà présenté des poussées d'insuffisance cardiaque, il doit avoir sur lui un diurétique d'action rapide (Lasilix).

Durant le vol, en cas de douleur angineuse, le patient doit prendre de la Trinitrine. Si la crise ne passe pas, ou en cas d'oppression thoracique, l'inhalation d'oxygène par masque s'impose.
En cas d'antécédent de phlébite, le patient doit se lever régulièrement et faire quelques pas dans l'avion.

Avant de partir en voyage, il est utile d'adhérer à un organisme d'assistance capable d'effectuer un rapatriement en cas de problème.

Les exercices physiques : il est important pour le patient de savoir reconnaître les efforts qui déclenchent les crises (montée d'une côte, marche contre le vent, rapports sexuels etc.) ; il peut ainsi croquer une dragée de trinitrine auparavant et empêcher la survenue de la crise.

Les efforts dynamiques sont bénéfiques mais doivent être progressifs. L'esprit de compétition doit être évité. Les sports d'endurance permettent d'améliorer les capacités cardio-vasculaires sans imposer d'efforts trop violents au cœur :

Parmi les sports à éviter :

La reprise du travail : tout doit être fait pour une reprise rapide du travail antérieur, sauf en cas de travaux musculaires lourds incompatibles avec l'état cardiaque. La reprise du travail est plus facile lorsqu'il s'agit d'une activité sédentaire et intellectuelle. L'aptitude au travail peut être évaluée en fonction des résultats de l'épreuve d'effort. Une reconversion professionnelle est parfois nécessaire et pose de nombreux problèmes.