(fev./aout 2008)



Experiences faites au cours du travail de construction du parti communiste révolutionnaire en Autriche 2002 – 2007:
Progrès, défis, difficultés

Extraits d’un document de l’Initiative pour la Construction d’un Parti Communiste Révolutionnaire (IA.RKP), l’ancienne komak-ml, publié dans le magazine „Proletarische Revolution“ („Révolution prolétarienne“) en mars 2008.
(Komak-ml (Action communiste marxiste-léniniste) fut fondée en 2002 en fusionnant trois groupes, à savoir l’Action communiste Vienne, l’Initiative marxiste-léniniste et les militants (turcs et kurdes) de Bolshevik Partizan à Vienne. La „Plateforme Révolutionnaire“ était un organisme de coordination entre les trois groupes, à partir de 2000. Avant comme après la fondation de l’organisation unifiée et jusqu’à présent, le coeur de l’organisation et le „noyeau dur“ marxiste-léniniste restait le même.)

Ci-après,  il s’agit de faire le bilan de notre travail de construction du parti tel que vécu au cours des dernières années, en particulier, depuis la fondation de la „Plateforme révolutionnaire“. A l’époque, on se fixa comme objectif l’unification de toutes les forces communistes révolutionnaires en Autriche. Pour nous, cependant, il était évident dès le départ de l’initiative, que les années suivantes seraient très difficiles étant donné que nous nous engagions à ce regroupement en partant d’une position très faible (et il faut dire qu’une partie de l’ancienne organisation s’est opposée, à ce moment-là, au projet d’ unification, comme d’ailleurs aussi le MLPÖ).

Au cours des années, même nos espoirs et nos attentes les plus  timides d’ une véritable unification ne  se sont pas matérialisés . Au fil des ans, nous avons étendu les activités de l’organisation vers plusieurs provinces,  établi des contacts internationaux, élaboré notre plateforme et nos  positions sur les sujets politiques importants etc. Mais au niveau  de l’organisation des forces à  rassembler nous n’avons pas réussi à introduire des structures fonctionnant selon le centralisme démocratique et  à atteindre ainsi un niveau supérieur d’organisation indispensable au processus de la construction du parti. Evidemment, au moment de la fondation, il ne s’agissait point d’une fusion entre trois organisations  qui, toutes les trois, se seraient trouvées  au même niveau de développement,  et, sans vraiment y réfléchir, on ne se rendait pas compte du fait que, sur plusieurs questions, le consensus n’était que superficiel. Même après l’unification, la lutte de ligne ne fut  pas menée de façon approfondie. Par contre, dans la prise de positions, la majorité a accepté maintes fois des compromis boiteux en reculant – avec pour seul argument de ne pas mettre en danger le processus d’unification. Ce qui n’était qu’une illusion. (...)

Sans vouloir miser, de manière plus détaillée, sur les problèmes d’organsation, nous tenons à constater qu’on  n’a réussi ni à imposer une organisation de type centralisme démocratique ni à assurer des  positions politiques fermes qui auraient été acceptées  par l’ensemble de l’organisation. (...)

C’est pourquoi, fin 2007, la 7ème conférence de komak-ml a déclaré que le projet de l’année 2002  avait échoué. En même temps, comme dejà envisagé depuis quelque temps, il fut décidé de changer de nom d’organisation. Nous sommes d’avis que le nouveau nom est maintenant plus approprié pour exprimer nos intentions de façon claire et distincte:  Initiative pour la Construction d’un Parti Communiste Révolutionnaire.(…)


1. Sur quelques difficultés

(…)
Pour développer une organisation solide, opérationnelle et suffisamment stable, le défi principal, c’était, et c’est toujours, la formation de dirigeants révolutionnaires.

Il s’agit  d’une connaissance du socialisme scientifique et donc du mouvement international communiste, à savoir que la classe ouvrière a besoin d’un parti communiste pour exécuter la révolution socialiste. Voilà notre point de départ. Inévitablement, ce parti n’est pas un „parti des masses“, mais un „parti de révolutionnaires“; il constitue l’avant-garde de la classe, il a le devoir de guider, de marcher devant, muni d’une stratégie et d’une tactique, d’un programme et d’un plan pour la révolution socialiste. C’est dans les combats, en premier lieu, que ce parti gagnera la confiance des masses ouvrières.

Tant qu’un tel parti n’existe pas encore, les communistes, tout en sachant qu’il est un outil indispensable, doivent faire avancer sa construction ou, au moins, y contribuer par des activités préparatoires. (...)

Dans une période de luttes de classe très faibles, il se pose le problème que la véritable raison d’être du parti, à savoir de diriger etc, ne puisse pas vraiment se matérialiser, nous ne sommes donc  pas vraiment en position de vérifier si notre activité est juste ou non. (…)

C’est vrai que le développement du mouvement ouvrier et celui de l’organisation dont il a besoin se déroulent d’une manière dialectique. Il est aussi évident qu’il y a des rapports étroits entre l’évolution de la société et les conditions pour construire le parti. Par contre, toujours est-il qu’il serait erronné d’attendre que le mouvement „se développe“ au point de trouver aussi en son sein les formes d’organisation appropriée. Il est donc indispensable et à l’ordre du jour, dès aujourd’hui, que nous nous attaquions à l’objectif de construire le parti. Le parti ne naîtra pas spontanément, pas plus que la conscience révolutionnaire de la classe ouvrière.(...)

Aujourd’hui, il s’agit donc de savoir si la construction du parti est possible et jusqu’à quel point. Nous sommes d’avis qu’il est tout à fait possible de nous rapprocher de la forme requise, du style de travail et du rôle de cet outil indispensable qu’est le parti, et nous disposons d’expériences qu’il faut évaluer et prendre comme point de départ.

Aujourd’hui, nous nous trouvons dans une situation bien fâcheuse, où, notamment, le mouvement communiste international est dans un état déplorable et il n’y a pas de parti communiste en Autriche. A cela, il y a des causes qu’il faut examiner. Nous comprenons que l’histoire évolue de manière autant évolutionnaire que révolutionnaire ce qui inclue de brusques changements. Conscients de la nécessité du parti, nous cherchons donc à nous préparer à des situations de changements aigus.(...)

Aussi insistons-nous sur le fait qu’il est possible, d’ores et déjà, et même aujourd’hui, de construire de façon systématique une base opérationnelle (un „appareil“). En plus, c’est vrai qu’ à partir d’expériences faites lors des combats de la classe ouvrière nous avons des idées assez claires d’une telle structure. En même temps, il faudra vérifier en permanence dans quelle mesure cette structure est utilisable et conforme à notre but. (...)

Se faire confiance est une condition indispensable à tout rassemblement politique.
Sans engagement dans les structures de l’organisation, il n’ y aura pas de centralisme démocratique. Toutefois, le centralisme démocratique, c’est la responsabilité de tous les camarades, non seulement des dirigeants, ni d’un seul individu. Le centralisme démocratique ne fonctionne que s’il s’applique du bas en haut. (...)

En construisant le parti communiste révolutionnaire, un des défis les plus grands qu’existent aujourd’hui, c’est sans doute de gagner, à long terme, des adhérents qui soient convaincus de la nécessité de se soumettre à une formation de dirigeant. Et voilà la conséquence d’une telle décision: Je suis prêt(e) à organiser ma vie de révolutionnaire! (...)

Au cours du 20 ème siècle, le mouvement communiste et ouvrier international a vecu une période flambante et triomphante. Il a ensuite atteint son apogée qui a longtemps masqué les problèmes cachés. Aujourd’hui, nous, en tant que révolutionnaires, nous nous trouvons devant les décombres de ce mouvement. Le défi est énorme. Il nous faut énormément de sagacité et de clairvoyance, pour trier, rejeter, réparer et intégrer, etc. Entre autre, il faut absolument que nous éclaircissions comment a pu se produire une aussi grave défaite du mouvement ouvrier.

Pour notre activité actuelle, il est autant important d’identifier quels sont les idées et les acquis qui ont fait leurs preuves et sont valables pour une longue période et quels sont ceux qui représentent des erreurs et des déviations. Bref, des erreurs qui ont fait capituler pas mal de camarades devant leur mission révolutionnaire, non seulement en Europe, mais presque partout dans le monde, et qui les ont poussés et ne cessent de les pousser, à se laisser dévoyer vers le réformisme et se limiter à des combats pertiels. (...)

L’échec qu’on a subi est vraiment de grande envergure. Aujourd’hui, il ne s’agit pas de réctifications et d’amendements, mais d’un véritable nouveau départ. (...)

Nous sommes bien conscients du fait que notre intention n’intéresse pas du tout „la vie moderne“. Les projets de grande envergure ne sont pas en vogue, et cela depuis des décennies. L’éclecticisme fleurit, mais ces fleurs n’ont même pas de parfums séduisants. Nous ne voulons pas nous épuiser dans des combats partiels. Il s’agit de la lutte pour le tout. Nous nous sommes décidés à relever le défi. Nous voulons poser la première pierre pour un nouveau parti.

La fondation de komak-ml en 2002 fut un essai, pas le premier, ni le dernier. A l’époque, trois organisations se réunirent avec l’intention d’avancer vers cet objectif. Aujourd’hui, il faut que nous disions: Cet essai a échoué. Pour des raisons diverses. Nous ne nous croyons pas importants pour penser que toutes ces raisons puissent être généralisées. Mais il y en a, à notre avis, certaines qui sont d’importance générale.

2. Ligne révolutionnaire et opportunisme de droit

Dans une période, où les luttes des classes sont faibles et la vie politique en berne, il va falloir à une organisation communiste se donner la priorité à la propagande.

Pour un petit groupe de communistes, bien formés et munis de certaines expériences pratiques, il n’est pas trop difficile, même pendant des années, de diriger leur travail vers les  déclarations fondamentales et théoriques et les activités limitées à la propagande. Un tel groupe, cependant, va repousser tôt ou tard tous ceux qui ont une vue différente sur les activités pratiques à entamer

Dans la variante „plutôt positive“, en étudiant les oeuvres historiques ainsi que des oeuvres contemporains d’idéologie bourgeoise un tel groupe peut réussir à contribuer à l’avancement de la théorie marxiste et son application aux conditions contemporaines. De cette manière, les acquis théoriques pourront ensuite être utilisés par d’autres organisations dans leurs activités au sein des luttes des classes.

La variante „plutôt négative“ limitera leurs études à enfiler des citations prises dans les  oeuvres marxistes d’autrefois pour énoncer ensuite que c’étaient déjà Marx, Engels, Lénine, Staline etc. à constater que seule, la révolution socialiste serait en mesure d’apporter un véritable changement radical.

Ces deux variantes, cependant, ne sont que des formes de propagande pure et exclusive, pratiquées par des groupes qui se prennent tout à fait communistes et révolutionnaires. En Autriche, les deux variantes existent depuis des décénnies, au moins comme tendances, sinon comme organisations.

Aussitôt qu’un tel groupe tente de „faire de la politique“, c’est à dire d’intervenir dans les mouvements quotidiens de (ou avec participation de) la classe ouvrière pour gagner de l’influence, il est menacé de plusieurs dangers. Tant qu’il se limite à la propagande pure, les dangers d’opportunisme de droite ainsi que de gauche resteront à l’arrière-plan parce qu’il n’y aura pas de vrai débat sur la pratique des militants participant à ces mouvements. Essentiellement, il s’agit de „dire des vérités“, que ce soit dans les brochures, des banderoles ou des mots d’ordre.

En fait, les problèmes commencent à se poser quand il s’agit de formuler des revendications précises et de prendre position au sujet d’ évènements actuels dans un débat avec les militants du mouvement, comme, par exemple, à l’occasion d’actions unitaires.  

En intervenant dans les mouvements de la classe ouvrière et de ses alliés, le but d’un groupe communiste révolutionnaire doit être celui de faire en sorte que partie du mouvement se rassemble autour de slogans et revendications révolutionnaires, c’est à dire d’aller au-delà d’une prise de position ferme sur l’évènement actuel et notamment se situer dans la perspective de la révolution prolétarienne.

Dans ce contexte, il s’agirait donc d’une déviation de gauche si l’on poussait la propagande pour la révolution comme étant primordial tout en rélégant à l’arrière-plan l’évènement et le combat actuels. D’une telle façon, on ne réussira pas à gagner les militants les plus lucides pour la cause du communisme. Par exemple, s’il s’agit de gagner une personne qui sympathise déjà à sa façon avec le communisme, au moment où elle s’engage en premier lieu  dans la lutte contre l’impérialisme de l’UE, les communistes révolutionnares ne vont pas la gagner en proclamant seulement (soit en bloc au milieu d’une manifestation, soit dans leurs publications): „peu importe ce combat partiel, il s’agit de la lutte pour la dictature du prolétariat!“ Ils vont ainsi nuire à la construction du parti. Il en est, d’ailleurs, des camarades qui après avoir cultivé une telle attitude bien longtemps, enfin changent d’avis vers l’extrême opposé.

En Autriche, aujourd’hui, ce sont les déviations de droite, les multiples formes de l’opportunisme de droite qui prédominent dans presque tous les mouvements quotidiens, et cela dû à l’influence de l’idéologie petit-bourgeoise et de celle de l’aristocratie ouvrière. Les courants de la petite-bourgeoisie radicalisée ont toujours des impacts sur le mouvement ouvrier et aussi sur les organisations communistes, et, par conséquent,  l’opportunisme de droite penètre même dans ces dernières. Chez nous, chez l’IA.RKP, actuellement, avec la construction du parti comme chaînon principal, l’opportunisme de droite s’exprime le plus nettement sur la question même de la construction du parti. Un parti serait nécessaire, bien sûr, mais sa construction ne serait pas possible dans les conditions actuelles. Elles ne seraient pas assez mures, il faudrait choisir certains détours qui – à long terme – meneraient au  parti envisagé, etc.

Souvent l’opportunisme de droite se manifeste par du fayotage permanent vis à vis de la conscience limitée des militants du „mouvement social“ ou des „travailleurs moyens“. Au lieu de s’adresser systématiquement aux militants les plus conscients et les plus avancés, la propagande opportuniste se conforme aux „ masses“. Tout en déplorant que „les masses“ soient tellement léthargiques et passives, la propagande devient encore plus insipide et très éloignée de tout intérêt communiste. (...)

Bref, il ne s’agit que d’une déviation de droite où la perspective de la révolution prolétarienne – la raison d’être de notre rassemblement – n’est plus visible. (...)

3. La pression révisionniste et le courant de liquidation

(…) Aujourd’hui, il y a deux types principaux du révisionnisme, c’est-à-dire deux types de refus du communisme révolutionnaire. Tous les deux aboutissent au réformisme, même si les personnes concernées refuseront vivement cette critique ( …). Il s’agit d’une part de la „construction du parti à petit pas et à partir du bas“, et de l’autre part du „particularisme“.

Dans une situation où, dans un pays, il n’y a pas de parti communiste révolutionnaire, c’est le devoir de chaque militant d’orientation communiste de constituer et de développer un groupe qui, en tant que noyau pour la construction du parti, puisse s’attaquer aux tâches qui s’avèrent nécessaires. Ceci dit, il faudra, au fur et à mesure du nombre et des capacités d’un petit groupe de camarades, mettre l’accent sur la construction d’un centre capable de regrouper ces noyeaux.(...)A toutes les tâches, qui se posent, à savoir la propagande, la participation à des combats ouvriers et travailleurs, le travail avec les militants et les sympathisants, l’étude du marxisme-léninisme, son utilisation et son développement en l’appliquant à la situation spécifique dans son propre pays et au développement de la ligne politique et du programme, les cours de formation, tout en mettant l’accent sur les militants les plus lucides, le contact avec le mouvement communiste international et avec les organisations anti-impérialistes,
notamment, celles ressortissant des pays qui souffrent de l’oppression et de l’exploitation par l’impérialisme du pays propre, à toutes ces tâches-là faudra-t-il que l’on s’attaque. Même s’il n’y a qu’une poignée de communistes et quelle que soit la situation politique et le niveau de combats dans le pays, on pourra s’y attaquer. Si l’on repartit correctement ses forces, on pourra progresser sur une longue période dans l’ensemble des domaines sans en négliger aucun. Ce qui est important, c’est d’envisager à chaque instant un parti vraiment combatif et de mettre l’accent sur les activités qui nous en rapprocheront de plus en plus.

Les représentants de la „construction du parti à petit pas et à partir du bas“ se font, eux aussi, une idée bien élaborée du parti communiste. Mais ils agissent comme si le parti existait déjà,  tout à fait achevé, bien implanté. Ils ne cessent de donner leur points de vue communiste sur n’importe quel évènement politique, de participer dans n’importe quelle union d’action, de bricoler pour créer des cellules en entreprise ou des organisations intermédiaires;  ils distribuent des prises de position d’organisations communistes étrangères sans commentaires, etc – et cela comme s’il y avait déjà, dans leur propre pays, un noyau dur communiste révolutionnaire ou le parti lui-même.

Le travail systématique de la construction du parti au niveau de l’idéologie, de la théorie et de l’organisation ne leur importe pas trop. Pendant des années, ils se contenteront à bricoler par ci, par là,  tout en se disant communistes, et, toutefois, sans achèvement durable. L’enlisement dans le travail quotidien „de fourmi“ les conduit à des positions petit-bourgeoises, à  l’opportunisme de droite et au réformisme pendant que l’ensemble intégral, c’est-à-dire la tâche concrète de construction du parti, est reporté à un avenir toujours plus éloigné. (...)

Une forme particulière de ce comportement artisanal s’exprime dans le refus, à l’intérieur de l’organisation communiste,  d’assumer des responsabilités individuelles, à savoir dans le rejet de toute tâche qui serait à accomplir d’une manière responsable et efficace. (…) Autre façon de „faire de la politique communiste“, sans faire avancer les choses, c’est le particularisme, la concentration sur un domaine ou un élément partiels dans la lutte des classes ou bien sur un aspect des contradictions de l’impérialisme. (…)

Il y en a du particularisme spécifique, jumelant la „sincère conscience communiste“ au courant de liquidation en se dédiant à la révolution – dans un pays étranger. Aussi ardent, aussi dévoué que soit un tel engagement, au niveau physique et matériel, pour la lutte révolutionnaire dans un pays autre que celui où tu vis et travailles, il ne représentera qu’un courant de liquidation. Car en tant que communiste, tu ne contribueras rien ou presque rien à la contruction du parti, tu ne te regrouperas pas vraiment avec les camarades qui essaient de faire avancer la cause de la révolution dans le pays qui représente ton domicile, là où tu pourras vraiment et en réalité faire avancer quelque chose, où toutes tes activités représenteront des petits pas en avant, autant qu’elles fassent partie d’un plan intégral menant à la construction du parti. (…)

4. Problèmes de la construction d’un parti multinational

Quand une forte proportion d’ouvriers et militants révolutionnaires se préoccupent d’abord des pays étrangers, cela nuit à l’évolution politique dans le pays même où ils vivent et travaillent. Cela nuira aussi au mouvement communiste révolutionnaire international parce qu’en tant que communiste révolutionnaire, tu fais mieux avancer la cause révolutionnaire là, où tu vis et travailles et où tu peux donc intervenir directement dans les luttes. L’attitude d’„inaction révolutionnaire dans son propre pays en se dévouant entièrement à la lutte révolutionnaire dans un autre pays“ ne se limite pas à des camarades immigrés, mais se retrouve également chez d’autres camarades et sympathisants. En fait, en Autriche, parmi pas mal de gens qui se disent – au moins de façon subjective – fortement attirés par la révolution socialiste, qui se sont même  familiarisés avec certains oeuvres communistes révolutionnaires ou en partagent au moins les acquis fondamentaux , on trouve, même sans aucun aspect de migration, un grand nombre qui s’occupe bien d’avantage des pays éloignés (tels que, par exemple, le Vénézuéla ou la Bolivie) qu’avec la révolution en Autriche.

Donc, des immigrants révolutionnaires, dès leur arrivée en Autriche, se trouvent en face d’une situation où ceux qui s’occupent de la lutte des classes en Autriche sont surtout des réformistes de toutes couleurs, sinon pires, tandis que les quelques militants révolutionnaires s’occupent primordialement du Vénézuéla, de la Colombie, du Kurdistan, de la Turquie, du Pays basque ou autre. Toutefois, ces derniers ne savent pas grand-chose au sujet des relations de classe en Autriche et n’ont pas la moindre idée comment y faire avancer le mouvement révolutionnaire.

Ceci dit, il est bien nécessaire et utile, quant au développement de la ligne politique (et, notamment, de sa rectification au cours de la lutte de ligne), de faire le point et de discuter les experiences faites par d’autres organisations communistes dans d’autres pays. (...)

Toujours est-il qu’il y a danger qu’on applique à l’Autriche de manière plutôt schématique et sans trop y réfléchir, des expériences et analyses d’origine étrangère.
Et c’est vrai que depuis longtemps déjà, la mauvaise attitude d’assumer des positions sans faire sa propre analyse n’est pas inconnue au mouvement revolutionnaire. Elle peut s’exprimer, surtout quand il s’agit d’une organisation assez petite, à travers une attitude où les immigrés s’orientent d’abord vers les positions politiques du parti de leurs pays d’origine et non vers celles de l’organisation dont ils sont adhérents. Au-delà de quelques liens émotionnels c’est dû au fait que leurs connaissances de la situation dans leurs pays d’origine sont d’autant plus profondes que celles concernant le pays où ils vivent et travaillent, parfois même depuis des décénnies. En tout cas, il faut dire qu’après dix ans ou plus de vie en Autriche sans avoir développé la moindre relation avec la lutte des classes dans ce pays même, de tels camarades et sympathisants immigrés s’illusionnent et manquent de sens des réalités. (...)

Ce sont certaines positions de la „théorie des trois mondes“, et notamment celles qui ne voient surgir, à long terme, les centres de la révolution mondiale que dans les pays dépendant du néo-colonialisme, qui ont fait dangéreusement vacciller la théorie de la révolution et de la construction du parti. Elles vont jusqu’à celle position, ouvertement soutenue par certains partis communistes révolutionnaires dans les pays dépendants, qui prétend impossible à moyen terme une révolution dans les pays impérialistes et qui voit donc la tâche des communistes de ces derniers pays à mettre tout l’accent au soutien des révolutions dans les centres de la révolution mondiale. Par conséquent  il serait de la plus haute importance d’y développer des mouvements de solidarité anti-impérialistes au lieu de s’attaquer à la construction d’un parti révolutionnaire dans les pays impérialistes eux-mêmes.

Quant à nous, nous rejetons vivement cette position, de s’organiser en tant que partisans du mouvement communiste révolutionnaire international dans n’importe quel pays, et cela en dehors des tâches principales de la lutte des classes dans ce même pays, est vivement rejetée.
Par contre, nous tenons à souligner qu’il est le devoir de tous les communistes à s’organiser au sein de l’avant-garde du mouvement révolutionnaire dans le pays où ils vivent.  Cela implique également de mettre l’accent principal sur la révolution prolétarienne dans le pays où l’on vit et travaille – indépendamment du lieu de naissance et de la langue maternelle. Quant à nous, nous envisageons la construction d’un seul parti communiste révolutionnaire en Autriche en rassemblant tous les communistes révolutionnaires qui y vivent et travaillent, indépendamment de leur nationalité. Bien entendu, cela implique que l’agitation et la propagande soient non seulement en allemand, mais aussi dans les langues les plus importantes des immigrés et – à la rigueur – de travailler dans certaines cellules concernées de manière bilingue ou même dans une seule langue, à savoir étrangère. (...)

5. La construction du parti dans une situation de lutte de classes faible et l’importance de l’organisation des jeunes

C’est à maintes reprises que se retrouvent des ouvriers, mais aussi des gens appartenant aux couches petit-bourgeoises, et parmi eux  surtout les jeunes, en conflit avec les conditions de vie quotidienne et les contradictions du système impérialiste. (...) En particulier, ce sont les jeunes ressortissant de familles immigrées qui ressentent de manière très aigue l’hostilité du système capitaliste. (...) Tôt ou tard, à travers des débats théoriques et sur la pratique, beaucoup d’entre eux font la connaissance du communisme révolutionnaire. (…)

Du fait qu’en Autriche, le révisionnisme petit-bourgeois est beaucoup plus puissant,  au niveau de la politique ainsi que de l’organisation, que le communisme révolutionnaire, la plupart des militants seront tout d’abord  séduits par des organisations qui se disent „marxistes, révolutionnaires, socialistes, communistes“ tout en étant, en réalité, rien d’autre que révisionnistes et réformistes. Principalement, il s’agit ici du PC autrichien et des groupes idélogiquement proches de lui d’une part, et des courants trotskystes d’autre part.
(...) En fait, avant de se rapprocher des communistes révolutionnaires pas mal de camarades auront déjà fait connaissance avec des organisations réformistes. (...)

Même si la situation actuelle de la lutte des classes en Autriche se montre moins développée
ce sont les évènements internationaux tels que les émeutes des jeunes à Paris ou les manifestations combattives contre les conférences G8 qui ne manquent pas d’évoquer clairement les perspectives et la nécessité d’un changement radical de la société. (…)
Et il faut dire, que même en Autriche, et en particulier à Vienne, il y en a des possibilités où les jeunes prêts à l’engagement politique puissent apprendre la pratique et la propagande communistes révolutionnaires.  Cela ne va pas suffire à la construction d’une organisation de Jeunes Communistes Révolutionnaires mais, c’est vrai qu’y naîtra l’importante connaissance que l’engagement  pour ce changement radical de la société doit être de long haleine et de manière systématique.

L’histoire du mouvement ouvrier communiste révolutionnaire, son développement et la construction de ses organisations nous ont fait comprendre qu’il est primordial de gagner la „prochaine génération“ à la cause du communisme. D’après ce que l’on sait, en Autriche comme à l’échelle internationale, la plupart des dirigeants des partis et organisations communistes révolutionnaires sont quinquagénaires ou sexagénaires et il faut dire, qu’avec cette génération seule, on n’a jamais pu réussir une révolution.  Il s’agit donc à notre avis de concentrer les activités de l’ensemble de nos adhérents vers une de nos tâches prédominantes, à savoir le développement et l’encouragement de l’Organisation des Jeunes Communistes Révolutionnaires.