| Beatrice Mary Victoria Feodore est née le 14 avril 1857. Elle était le neuvième et dernier enfant de la reine Victoria. La princesse Beatrice n'avait que 4 ans lors du décès de son père, le Prince Albert, le 14 décembre 1861. À la fin de cette terrible journée, la reine Victoria se rendit dans la nurserie où la petite Beatrice dormait et, elle amena l'enfant dans sa chambre. Elle l'enveloppa ensuite dans les vêtements d'Albert et, ne pouvant s'endormir, attendit que le jour se lève. Malgré son jeune âge, Beatrice, comme ses frères et soeurs, dut s'habiller de deuil. Vivante et éveillée, la petite fille souffrit grandement de l'atmosphère triste qui régnait à la cour et, ce fait contribua à en faire une jeune fille timide et réservée.
À 16 ans, Beatrice rencontra Louis Napoléon, prince impérial de France et fils de l'empereur exilé Napoléon III et de son épouse Eugénie de Montijo. Une histoire d'amour faillit éclore entre les deux jeunes gens mais, Victoria avait d'autres plans pour sa fille, elle souhaitait la garder près d'elle jusqu'à la fin de sa vie.
En 1874, on permit à Beatrice d'assister aux audiences qu'accordait sa mère en compagnie du Premier Ministre Benjamin Disraeli. Celà aurait pu être difficile pour cette jeune princesse gênée et solitaire mais, Disraeli se montra plein d'égards et de gentillesse envers elle de façon à lui rendre cette expérience plus agréable.
En avril 1884, alors qu'elle était âgée de 27 ans, Beatrice et sa mère se rendirent à Hesse Darmstadt pour assister au mariage de sa cousine Victoria, la fille aînée de la princesse Alice. Le garçon d'honneur de la princesse Victoria était Louis de Battenberg, le plus âgé des 4 fils du prince Alexander de Hesse, oncle du père de Victoria, le grand-duc Louis IV de Hesse Darmstadt. Le prince Alexander avait épousé morganatiquement une princesse polonaise, Julia Theresa von Hauke, une demoiselle d'honneur de la soeur d'Alexander, la tsarine de Russie, Maria Alexandrovna qui avait épousé le tsar Alexandre II.
Étant issus d'un mariage morganatique, les 4 fils du Prince Alexander et deJulia Theresa étaient exclus de la succession de Hesse Darmstadt. Leur mère reçut toutefois le titre de Princesse de Battenberg qu'elle transmit à ses fils. Les 3 frères de Louis s'appelaient: Alexander, Franz Joseph et Henry. Quand Beatrice arriva à Darmstadt, elle rencontra le cadet des frères Battenberg, Henry, qui était différent d'elle sous tous les aspects, alors que Beatrice était grande et plutôt bien enveloppée, Henry était athlétique, musclé, et de figure très agréable. Contrairement à Béatrice qui était timide, le jeune Henry dégageait beaucoup de charme et démontrait de la gentilesse envers tout le monde. Il n'est pas étonnant qu'il ait fait une si forte impression sur Beatrice. Il est difficile d'imaginer ce qui attira le prince chez Beatrice à part le fait qu'elle fut la fille de la reine d'Angleterre. Beatrice et Henry se fiançèrent en secret à Darmstadt et, dès son retour en Angleterre, la jeune princesse avoua à sa mère qu'elle était amoureuse d'Henry. La reine était furieuse, elle ne pouvait permettre ce mariage qui la priverait de sa compagne et de sa secrétaire. Après 8 mois de querelles sur le sujet, Victoria accepta finalement grâce à l'intervention de Bertie (le Prince de Galles) et de son beau-fils Louis de Hesse qui lui firent comprendre l'étrangeté de son attitude en vers sa fille cadette. Elle imposa une seule condition à cette union, le couple allait devoir vivre avec elle jusqu'à sa mort. Beatrice accepta immédiatement et Henry, qui n'avait rien à perdre entérina cette décision.
Le prince Henry de Battenberg et la princesse Beatrice de Grande-Bretagne s'épousèrent le 23 juillet 1885 à Whippingham sur l'île de Wight. La robe de la princesse était très ajustée, elle portait par-dessus une tunique de dentelle qui avait appartenu à Catherine d'Aragon, la première femme d'Henry VIII. C'est la seule de ses filles à laquelle la reine Victoria permit de porter son voile de dentelle Honiton.
Une fois marié, la seule tâche d'Henry consista à faire des enfants. En 1886, le premier Battenberg fit son entrée dans le monde, on l'appela Alexander ou Drino. Il fut suivi d'une fille, Victoria Eugenia en 1887. Le troisième enfant, un autre garçon fut prénommé Leopold et, malheureusement, on diagnostiqua chez-lui de l'hémophilie. Comme sa mère et sa soeur Alice, Beatrice était porteuse du gène de la maladie et, elle le transmit à son fils.Le quatrième et dernier enfant, Maurice, est né en1891, certains auteurs affirment qu'il était aussi atteint d'hémophilie alors que d'autres le nient.
En 1889, la reine honora son beau-fils en l'appointant gouverneur et capitaine de l'île de Wight. Ce n'était pas un travail assez ardu pour faire émerger Henry de son oisiveté. Il passait son temps à éduquer et à instruire ses enfants. En 1890, Beatrice commença à traduire en anglais 'The adventures pf Count George Albretch or Erbach' de Emil Kraus, le livre fut publié plus tard dans l'année.
Au fil du temps, Louise duchesse d'Argyll et soeur de Beatrice, devint très amie avec Henry, elle écrivit même que Henry était le meilleur ami qu'elle eut jamais eu; après la mort de celui-ci en 1896, elle avoua à sa soeur qu'elle avait été la confidente de son époux. Ce fait jeta un froid sur les relations entre les deux soeurs.
En 1895, dans le territoire africain d'Ashanti au Ghana alors que régnait le roi Prempeh, les sacrifices humains étaient devenus une habitude et des raids étaient effectués parmi les tribus natives de la Côte d'Or afin de se procurer des esclaves qui seraient vendus au plus offrant. En 1874, le gouvernement britannique demanda à Prempeh d'adhérer au Traité pour la paix et l'ordre en Afrique. Devant le refus du roi africain, on décida d'envoyer une expédition à Ashanti pour y restaurer l'ordre, cette expédition était plaçée sous le commandement de Sir Francis Scott. Un jour, alors que la reine Victoria, la princesse Beatrice et le prince Henry terminaient leur petit-déjeûner, le prince Henry demanda subitement à sa belle-mère la permission de se joindre à l'expédition d'Ashanti. La reine répondit que c'était hors de question, Beatrice appuya le requête de son mari et dit à sa mère qu'Henry était décidé à partir, qu'il était las de son inactivité et souhaitait faire quelque chose pour l'Angleterre. Quand Henry écrivit à la reine: 'J'espère, en me portant volontaire pour une affaire nationale, prouver ma dévotion à mon pays d'adoption', elle accepta finalement de lui accorder sa permission.
Avant de s'embarquer, le prince Henry dit à Lord Harris: 'Je suis un anglais et je veux démontrer au peuple anglais que je suis prêt au pire comme au meilleur. Je sais que je n'en retirerai aucune gloire et je connais les dangers potentiels pour ma santé, la mort due à la malaria peut-être, maladie si courante dans ce pays'.
Le 6 décembre, il alla dire aurevoir à la reine. Il s'agenouilla devant elle et lui embrassa la main, elle le serra dans ses bras. Le jour suivant, le 7 décembre 1895, il monta à bord du HMS Coramandel et, du Royal Albert Dock, il prit la mer pour l'Afrique. Une fois au Ghana, le prince Henry se joignit à la colonne principale de la Force Expéditionnaire en route pour Kumasi, la capitale d'Ashanti. Quand ils atteignirent le fleuve Pra, le 4 janvier, quelques cas de fièvre s'étaient déclarés parmi les membres de la troupe. À Prashu, le prince Henry et le major Ferguson sortirent pour faire une promenade nocturne, Henry s'aperçut que le major présentait les premiers symptômes de la fièvre. Deux jours plus tard, il était mort. Le prince Henry et le reste de la troupe continuèrent leur avance vers Kwisu situé à 40 milles de Kumasi. Ils y arrivèrent le 10 janvier. C'est là que le prince Henry tomba malade, frappé par la malaria et que son docteur lui ordonna de retourner sur la côte. En dépit de ses protestations, on le fit monter à bord du HMS Blonde pour le renvoyer en Angleterre. Quand le bateau atteignit la Sierra Leone, le lundi 20 janvier 1896, le prince Henry mourut. Le même jour, à Kumasi, le roi Prempeh se soumit à l'autorité du gouverneur de Cape Coast.
Avant sa mort, le prince Henry avait laissé un message pour la princesse Beatrice: 'Si je meurs, dites à la princesse que je ne suis pas venu ici pour la gloire mais par sens du devoir'. Quand Beatrice appris la mort de son mari, elle dit seulement: 'Toute vie m'a quitté'.
Après la mort d'Henry, Beatrice se rendit dans le sud de la France pour récupérer. C'était la première fois qu'elle avait la permission d'être séparée de sa mère. Après quelques temps, elle décida de retourner à ses activités normales. Elle passa les 5 années suivantes à servir de secrétaire et de compagne à sa mère. Son frère Bertie, le Prince de Galles lui garda toujours rancune parce qu'elle était la confidente de la reine alors que lui, bien qu'héritier du trône, avait toujours été tenu à l'écart des affaires du royaume.
À la mort de sa mère en 1901, Beatrice n'avait aucune propriété personnelle. Toutes les propriétés de la reine passèrent à Bertie qui devenait le roi Edward VII par droit souverain. Le roi décida donner Osborne House, où Beatrice et sa famille avait passé tant de temps et à laquelle elle considérait avoir droit, au gouvernement qui en ferait un musée. Beatrice s'opposa à la décision de son frère mais, elle dut finalement accepter de déménager à Osborne Cottage sur les terres de Osborne.
En 1906, sa fille,Victoria Eugenia, épousa le roi Alfonso XIII d'Espagne. Beatrice l'accompagna, tout d'abord à Biarritz, où le couple allait être officiellement fiançé, puis, en Espagne où allait avoir lieu la cérémonie de mariage. Comme sa mère, Victoria Eugénia était aussi porteuse du gène de l'hémophilie qu'elle allait introduire dans la Maison Royal d'Espagne.
Quand la Première Guerre Mondiale éclata, Beatrice établit son propre hôpital, le Princess Henry of Battenberg Hospital for Officers. Pendant cette guerre, elle eut à subir un grand malheur, le 27 octobre 1914, son fils cadet Maurice, fut tué sur le front belge. Beatrice demanda qu'il fut inhumé parmi ses camarades en Belgique. En 1922, son autre fils, Leopold mourut pendant une intervention chirurgicale à cause d'une hemorragie causée par l'hémophilie.
Beatrice passa les deux dernières décades de sa vie atteinte de rhumatismes. En 1931, elle fit une chute à Kensington Palace où elle demeurait et se brisa deux os dans un bras, elle allait passer le reste de sa vie sous médication. Elle occupait son temps en éditant les journaux intimes et la correspondance de sa mère, éliminant les passages qui pourraient se montrer embarassant pour la mémoire de la reine et pour ceux à qui elle écrivait. Beatrice réécrit 111 volumes à partir des originaux de sa mère. Ils sont conservés aux Archives Royales de Windsor. Parmi les documents que Beatrice a éliminé, se trouvaient 30 volumes contenant les lettres de Victoria à ses enfants Alfred et Alice. Le dernier ouvrage de Beatrice fut une traduction de l'allemand à l'anglais des journaux de son arrière-grand-mère Augusta de Reuss (grand-mère maternelle de Victoria). Elle transforma ces journaux en un livre intitulé 'In Napoleonic Days' qui fut publié en 1914.
Après la mort de son frère Arthur en 1942 (il avait 91 ans), Beatrice se retrouva seule survivante des enfants de Victoria. Elle passa ses derniers jours à Brantbridge Park dans le Sussex, loin de la vie publique. Ses nièces Helena Victoria et Marie Louise, les filles de la princesse Helena, l'y rejoignirent. Beatrice mourut pendant son sommeil à 5:10 du matin le 26 octobre 1944, elle avait 87 ans. Sa fille Victoria Eugénia arriva juste en temps pour recueillir son dernier souffle. Son fils Alexander demanda au roi la permission de déposer le corps de sa mère à Whippingham Church sur l'île de Wight aux côtés de son époux. La permission fut accordée.
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