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 La rivière exhume chaque année les cadavres des fosses communes d'Hargeisa



Yahoo! Actualités Monde
jeudi 17 mai 2001, 9h48

HARGEISA (Somalie), 17 mai (AFP) - Au sommet d'un
monticule de terre, la moitié d'un crâne fait surface,
entouré de fémurs et clavicules, sous le regard des
chameaux qui broutent les épineux: à moins d'un km
d'Hargeisa, capitale du Somaliland, s'étendent
toujours les fosses communes des victimes de l'armée
de Mohamed Siad Barre.

En mai 1988, la guérilla du Mouvement national
somalien (SNM), chassée de ses bases arrières de
l'Ethiopie voisine par le colonel Mengistu qui vient
de conclure un pacte avec Siad Barre, a réussi à
s'emparer de l'est de l'ancien Somaliland britannique
et d'une partie importante d'Hargeisa.

Aussitôt, les pilotes mercenaires sud-africains des
chasseurs-bombardiers gouvernementaux ont rasé
entièrement la ville et pilonné les colonnes de
quelque 400.000 habitants fuyant vers l'Ethiopie. En
même temps, les troupes de Siad Barre ont raflé des
milliers de civils dans les rues pour les exécuter
sommairement.

Au total, cette campagne de terreur à Hargeisa a fait
quelque 40.000 morts.

Les fosses communes se trouvent, selon les jeunes
pensionnaires d'une école primaire qui monnayent
volontiers leurs services de "guides", sur des
centaines de mètres le long du lit d'une rivière,
asséchée pour l'instant. Chaque année, à la saison des
pluies, ses eaux exhument et charrient, des dizaines
voire des centaines de cadavres.

Cette lande aride parcourue de tranchées naturelles
creusées par l'eau était le lieu idéal pour les basses
besognes de la très redoutée 26ème division de l'armée
somalienne, dont la caserne de Malka Durduro, à la
sinistre réputation, étire ses longs murs à une
centaine de mètres de là.

En 1994, tout juste revenu d'un camp de réfugiés en
Ethiopie, "j'ai vu des centaines de corps quand la
rivière débordait", raconte Ahmed Mohamed Wajale, dont
la hutte de branchages et de toiles de plastique est
plantée sur les lieux. Les squelettes restés entiers
avaient les bras attachés dans le dos avec des fils de
fer, affirme-t-il.

Derrière l'école, des pierres signalent la présence de
tombes collectives où ont été enterrées de nouveau les
victimes exhumées par les eaux.

Selon le gouvernement du Somaliland, qui commémore
vendredi les dix ans de sa sécession, quelque 200
fosses communes ont été recensées autour d'Hargeisa ou
d'autres villes comme Berbera (nord) ou Burao (sud).

La Commission des droits de l'Homme de l'ONU y dépêche
depuis 1998 des enquêteurs en vue d'éventuels procès
pour crimes de guerre ou génocide, explique le
porte-parole de la présidence du Somaliland, Abdi
Idiris Du'aleh.

A Hargeisa, où des centaines de milliers de réfugiés
d'Ethiopie sont rentrés dès 1991, certaines maisons
portent encore les stigmates des bombardements et des
affrontements à la mitrailleuse.

Les mines - plus de 2,5 millions laissées par l'armée
en 1991 selon le gouvernement - continuent chaque
mois, en particulier près de l'aéroport, de tuer ou
mutiler des éleveurs, malgré le travail acharné de
cinq ONG internationales spécialisées dans le
déminage.

Le souvenir des massacres est vivace. C'est l'une des
raisons pour lesquelles l'indépendance est chère aux
habitants d'Hargeisa et qu'ils ne veulent plus
entendre parler de Mogadiscio et "ceux du sud",
empêtrés dans leurs combats entre milices de chefs de
guerre rivaux quand Hargeisa est devenue depuis 1995
l'une des villes les plus paisibles et les plus sûres
d'Afrique.

voir
:
  1. Le Somaliland
  2. La rivière exhume chaque année les cadavres des fosses communes d'Hargeisa

 

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