![]() |
- Ca fait bien six fois qu’on se la tape c’te chanson! Y’en a marre! S’énerve H. - C’est moi qui conduis, donc c’est moi qui décide de ce qu’on écoute. Réplique R. - J’vois pas l’rapport! - Putain de merde! C’est qui qui conduit? C’est qui qui conduit là? - C’est toi, mais... - C’est moi! C’est moi qui conduit bordel de merde! Alors c’est moi qui décide de ce qu’on écoute pendant que je conduis! Hurle R. - Ben t’énerve pas comme ça. Moi ce que j’en dis c’est juste pour... - C’est juste pour me faire chier oui! Juste pour me foutre les boules comme si c’était le moment! J’ai déjà bien les nerfs alors tu t’es dit «ben tiens! Y’a qu’à en rajouter une couche!» C’est ça que tu t’es dit! H soupire et décide de ne plus rien dire jusqu’à ce qu’ils arrivent. Pour la septième fois, l’intro tonitruante de Viens te faire chahuter jaillit des baffles. Quelques minutes plus tard, la voiture se poste devant la banque et les quatre occupants enfilent leurs masques. H met son masque de Spiderman, L celui de Catwoman et R sa perruque blonde et ses lunettes noires à montures blanches. Les portières s’ouvrent et ils se précipitent au pas de course vers la banque, un fusil mitrailleur Uzi à chaque main. A l’intérieur ça se met à hurler dans tous les sens. Et que ça lève les bras au ciel, et que ça fond en larme, et que c’est sur le point de faire sa crise cardiaque. - Coucou me revoilou! S’exclame R en grimpant sur un comptoir. Le fisc m’a bien fait chier alors je viens récupérer mon bien! - Tous à terre! Allez! Hop! Hop! Hop! Tous à plat ventre les bras écartés et le sourire aux lèvres! Ajoute L. H fait glisser les canons sous la vitre blindée du guichet central. - Tente quelque chose. S’il te plaît, tente quelque chose que je puisse tisser ma toile d’araignée sur ta gueule! - Par pitié... - Par rien du tout face de pet! Et il tire sur l’homme qui se retrouve plaqué contre le mur, le corps criblé de balles. - Maintenant que vous avez compris que ça ne rigole pas, vous allez nous faire don de l’argent qui se trouve dans le coffre dont notre ami là-bas à la clé! Le type à l’autre bout du guichet bafouille quelque chose mais finit par s’exécuter. - Pendant que mes confrères font leur boulot, je vais vous chanter une petite chanson! Et R d’entamer le premier couplet de Goodbye Marilou en fixant les caméras de surveillance, sa voix résonnant comme au cœur d’une cathédrale. - Quand l’écran s’allume je tape sur mon claaaavier.... Derrière la porte blindée entrouverte, on entend des cris suivis de coups de feu. Imperturbable, R poursuit en s’accompagnant de grands gestes. - Gooooooodbye!...... Maaaaaaariiiiiiiiilou! Le soir même au journal de vingt heures, on voit une vieille visiblement traumatisée qui répète d’une voix incrédule : "On s’est fait braqué par Michel Polnareff." Puis c’est le journaliste qui reprend : "Les trois malfaiteurs, dont une femme, se sont donc emparés de plusieurs millions de francs, en pleine journée, et à quelques rues seulement des Champs-Elysées! Rendez-vous compte! Ils ont par ailleurs froidement abattu un membre de la banque, père de deux petites filles de quatre et sept ans. La police a reconnu n’avoir pour l’instant aucune piste sérieuse, d’autant que les braqueurs étaient masqués." Et la caméra de s’orienter sur un témoin qui confirme fièrement: "Oui oui! En Spiderman, Catwoman et en Michel Polnareff!" De l’autre côté de l’écran, vautrés autour d’une table basse recouverte de billets, H, L et R, complètement ivres, fêtent dignement leur braquage réussi autour de bouteilles de vodka et de toasts au saumon fumé. - A moi! Heu... attendez... voyons... ah oui! Heu, j’ai besoin d’L! - Pas mal! Fait L. Mais j’ai mieux! J’ai besoin d’R! - Et avec H? Demande H. Z’avez kek chose avec H? - Attends voir... Dit R. J’ai besoin d’H ça veut rien dire... hum... ça y est! Ha! Ha! Ecoute ça : j’ai besoin d’une H! Ha! Ha! D’une H! T’as compris? - Mais pour quoi faire t’as besoin d’une hache? - Oh! Chié qu’il est con lui! - J’suis pas con! C’est clair? - Mais non t’es pas con. Répond L en souriant. Pas con du tout, du tout. - Ouais... J’suis pas con et en plus maintenant j’suis riche! - Ouais!!!! S’exclament L et R en riant. Yeeepeee! - Eh! Fait H en regardant R. Tu pourrais peut-être enlever tes lunettes maintenant! - Nan. J’aime bien les porter moi ces lunettes. - Alors pourquoi t’as ôté la perruque? - Parce qu’elle me gratte, connard! - Hi! Hi! Parce que là tu ressembles plus à Obispo qu’à Polnareff avec ta calvitie! - Me parle pas d’Obispo! Et puis j’ai pas de calvitie! Combien de fois faudra te le répéter! C’est mes cheveux qui poussent comme ça. - Mais quels cheveux? R attrapa le fusil mitrailleur qui traînait à ses pieds et en fourra le canon dans la bouche de H qui resta interdit. - Et là connard? Tu vois de quels cheveux je parle? Parce que moi je manque peut-être de cheveux mais toi tu vas bientôt manquer de dents si tu continue à me chercher! - Mmmmfff! Mmmmfff! - Qu’est-ce que tu dis? J’comprends rien! - Mmmmfff! Mmmmfff! - Arrête... Soupire L. Laisse-le. Tu vois bien qu’il regrette. - Mais non! J’vois rien du tout moi! Faudrait qu’il articule! C’est alors que R qui s’appuyait à moitié contre la table basse la fit basculer et en voulant se rattraper, appuya malencontreusement sur la détente. La tête de H vola en éclats de chair sanguinolente qui éclaboussèrent R. - Et merde! Marmonna-t-il en se redressant comme il pouvait, libérant un rot de vodka. - Putain tu fais chier! Hurla L. Regarde un peu la moquette! - J’ai pas fait exprès merde... Marmona R. - Non mais regarde un peu la moquette! - Il est mort? Il articula avec difficulté. - Putain mais j’en ai rien à foutre! Je veux pas le savoir, tu vas me nettoyer cette moquette! Et t’as intérêt à faire vite parce que des tâches pareilles ça ne s’enlève pas comme ça! - Mais j’la nettoie avec quoi moi la moquette? - J’en sais rien! Tu te démerdes! - Il est mort là? Demanda-t-il en pointant du doigt la tête explosé de H. - Mais non voyons! Il a juste la migraine! A ton avis ducon? Il s’est juste pris une balle en pleine tête et à bout portant! - Oh merde... - Ah ben ça c’est sûr! Et puis attends, parce que une fois que tu m’auras nettoyé la moquette, tu vas me le découper en morceaux qu’on fera disparaître! - Oh merde... - Faut assumer tes conneries mon gars! - Pfff... N’empêche qu’avec tout le pognon qu’on a je devrais pas avoir à nettoyer quoi que soit et à découper qui que soit! - Bien sûr! T’as raison! On a qu’à appeler une entreprise de nettoyage qui se chargera de ramasser les morceaux de sa tête! Avec un petit pourboire ça sera sans problème! - Et merde. - Eh oui. C’est alors que la porte fut enfoncée et qu’une dizaine de flics armés et cagoulés firent irruption dans l’appartement en hurlant comme des fous. - A terre! Couché! A terre! Plus vite! - Eloigne-toi de cette arme! Allez! Mais R tenta malgré tout de s’emparer du Uzi alors un nuage de balles alla se nicher dans son corps. L resta figée, la bouche entrouverte, les yeux révulsés et les membres saisis de tremblements. - C’est pas de veine hein ma cocotte! Préférant sans doute y rester, L fit mine de vouloir s’emparer d’un fusil mitrailleur et reçu une vingtaine de balles en pleine tête. |