Miguel Indurain

15 décembre 2000

La discrétion, la sérénité et la sagesse

Michel Crepel

Il s'est retiré comme il est arrivé, dans la discrétion. Il a construit sa carrière et son palmarès avec la sérénité et la sagesse d'un "Sphinx". Miguel Indurain, est le prototype du champion préparé, usiné, poli durant des années par un directeur sportif "papa poule" à l'extrême.

Jose Miguel Echavarri, puisque c'est de lui qu'il s'agit, a façonné le Basque de Villava saison après saison (sept), afin de l'affiner, tant physiquement que moralement, pour en faire le monstre de puissance qui a terrorisé les pelotons pendant cinq longues années (pour ses adversaires s'entend).

Au départ, Miguel Indurain ressemblait plus a un troisième ligne de rugby, qu'à un coureur cycliste. En effet sa morphologie compacte (188 cm pour 89 kg) le prédestinait à briller dans les courses en ligne et lors des chronos.

Toutefois, une victoire dans le Tour de la CEE en 1986, à l'âge de 22 ans va orienter sa carrière dans une toute autre direction.

C'est là que le rôle de Echavarri va être déterminant. Petit à petit le "Grand" va s'amincir, afin d'acquérir une relative souplesse nécessaire à la haute montagne. José-Miguel lui confectionne un calendrier approprié dont il s'accommode à merveille.

Il commence son apprentissage par des succès dans le Tour de Catalogne 88, le Critérium International 89, il s'offre, même, la seule classique qui figurera à son palmarès, en triomphant chez lui lors de la Clasica San Sebastian en 90.

En 1991, après trois abandons programmés dans la Grande Boucle, Echavarri juge le nouveau leader de la Banesto mûr, pour les premiers rôles.

Après une seconde victoire en Catalogne, il triomphe dans son premier Tour de France, et entame une série de cinq victoires qui le fera rejoindre au palmarès des "Grands", Anquetil, Merckx et Hinault.

Un plus cependant, ses cinq victoires ont été acquises consécutivement !

Ses cinq succès ont été construit, si je puis dire, de la même manière, un premier contre-la-montre assassin où il écrase, lapide, ses adversaires de toute sa classe, puis la traversée des massifs montagneux où inexorablement sa science du train, sa puissance dévastatrice asphyxie ses adversaires (grimpeurs ou non).

Ses récitals lors des contre-la-montre lui ont valus des pseudonymes évocateurs, bien que glacial.

En 91 à Alençon c'est Robocop
En 92 lors du chef-d'oeuvre du Luxembourg c'est l'Extraterrestre
En 94 à Bergerac c'est encore Tyrano de Bergerac
Il s'est vu ainsi affublé de tous les titres imaginables tels le Grand, le Roi Miguel ...

Son hégémonie sur les Grands Tour traversera les Alpes à la faveur de deux succès dans les Giro 92 et 93, mais hélas il ne sera jamais roi en son royaume car la Vuelta, dont il porta pourtant le maillot amarillo à vingt ans, se refusera toujours à ses ambitions.

Qu'à cela ne tienne, il devient, normalement, recordman du monde de l'heure en 1994 sur la piste de Bordeaux-Lac, en parcourant 53,040 km dans l'heure.

Enfin pour parachever son oeuvre il s'appropriera les titres de champion du monde de contre-la-montre en 95 avant de devenir champion olympique de la discipline en 96 à Atlanta, ce qui s'avérera être sa dernière levée, ainsi que son ultime grande victoire internationale.

Il quittera les pelotons, après son échec du Tour 96, et l'ombre de Miguel planera sur le Tour suivant. Ce Tour 97 où un nouveau phénomène, Jan Ullrich, ayant les mêmes caractéristiques, s'imposera à la manière du Grand, avec peut être un soupçon de panache en plus (victoire à Arcalis).


une page mise en ligne le 17 décembre 2000 par SVP