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26 novembre 2005

2005, l’année du dopage

Les vainqueurs des grands tours ont, peu ou prou, tous été rattrapés par des rumeurs de dopage. Gérad Guillaume, médecin de la Française des jeux, tire le signal d’alarme.

Frédéric Sugnot

Année chargée pour le cyclisme avec, en vedette, l’affaire Lance Armstrong en août dernier, semaine chargée aussi avec l’ouverture jeudi en Haute-Savoie du procès de l’ancien troisième du Tour 2002, le Lituanien Raimondas Rumsas, suspecté de trafic d’EPO.

L’EPO encore et toujours au centre des débats à Madrid où on réexaminait les échantillons positifs du dernier vainqueur du tour d’Espagne Roberto Heras. Bref, rien ne va plus et Gérard Guillaume, médecin de la Française des jeux, tire la sonnette d’alarme.

À l’heure des bilans, 2005 restera pour vous l’année du dopage ?

Gérard Guillaume Oui, pour moi, elle est pratiquement du même acabit que les années Festina en 1997-1998. Il est évident que tout le monde ne marche pas avec le même carburant dans le vélo. Les vainqueurs des grands tours de ces dernières années ont tous été rattrapés par des affaires de dopage. C’est plus qu’inquiétant.

Quels indices vous permettent d’avancer une telle accusation ?

Gérard Guillaume Une chose est extraordinaire aujourd’hui dans le cyclisme : moins un coureur s’aligne sur des compétitions, plus il est performant. Cela va à l’encontre de toutes les données physiologiques. Certains ne font rien une grande partie de la saison et reviennent pour quelques courses à fond de charge. Roberto Heras, par exemple, lors du Dauphiné - libéré en juin, n’avançait pas plus vite que notre jeune néopro de dix-neuf ans, Rémy di Gregorio. Trois mois plus tard, sur le tour d’Espagne, nos coureurs sont incapables de suivre Heras et quelques autres. Soudain, ils n’ont plus le même vélo...

Le constat est donc toujours le même, les contrôles ne servent à rien ?

Gérard Guillaume Oui, un contrôle antidopage aujourd’hui ne permet en rien de dire qu’un athlète ne se dope pas.

Comment les coureurs contournent-ils les contrôles ?

Gérard Guillaume Sur l’EPO qui reste le produit phare, les coureurs ont différentes stratégies. Ils se chargent pendant l’hiver, ponctionnent leur sang en fin de stage, le conservent dans des poches qu’ils se transfusent lors des courses après le passage des contrôleurs antidopage. Certains poussent même le vice à se faire enlever le sang le soir de l’étape si d’aventure un nouveau contrôle avait lieu le lendemain matin.

C’est techniquement possible de faire cela sur une course à étapes ?

Gérard Guillaume Oui, tout à fait, à l’hôtel ou dans un mobil-home médicalisé garé non loin de l’hôtel. Discrètement...

Face aux ruses des tricheurs, y a-t-il encore des solutions ?

Gérard Guillaume Il faut d’abord multiplier les contrôles inopinés pendant les stages, se donner aussi la possibilité de réaliser des contrôles sanguins sur des coureurs suspects juste avant le départ des courses. Une petite piqûre au doigt ou à l’oreille peut suffire pour prélever un échantillon sanguin.

Concernant le cas Armstrong, une publication médicale vient d’établir que les survivants d’un cancer voient leur résistance physique diminuée...

Gérard Guillaume Même si cette étude porte sur des sujets plus jeunes que Lance Armstrong au moment de son cancer des testicules, elle montre quand même que tous les adolescents ou enfants qui ont souffert d’un cancer en gardent des séquelles au niveau de la résistance physique et de la fatigabilité. C’est une pièce de plus à verser dans le dossier de l’Américain.

Quel discours tenez-vous à vos coureurs sur le dopage ?

Gérard Guillaume Moi, je les engueule ! Je leur en veux beaucoup de ne pas s’exprimer. Ce sont eux les premières victimes. Ils sont volés, ils sont spoliés par les tricheurs, ils sont les dindons de la farce. Si quelqu’un venait piquer du fric dans le tiroir-caisse de leur maison, ils porteraient plainte... Là, ils ne disent rien...

Je rêve qu’un jour les coureurs propres partent trois minutes derrière les autres en signe de protestation. Le cyclisme est moribond, il a besoin que les coureurs propres sauvent sa dignité.


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Guy Maguire, webmestre, SVPsports@sympatico.ca
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