Note du webmestre :
Mais Mathieu ne fait pas que faire courir ses doigts sur le clavier. Il aime bien, lui aussi, enfourcher sa monture.
Tard hier soir il faisait parvenir aux amis un récit coloré de son aventure du week-end.
Il nous a aimablement permis d'en partager des grands bouts avec vous
Les habitués de
VÉLO NOUVELLE
lisent régulièrement les écrits de Mathieu Laberge, rédacteur à Sportcom, qui non seulement nous raconte les courses de nos meilleurs Québécois, mais qui rédige également nombre d'articles d'avant-course pour nous expliquer les enjeux.
Une belle et longue journée
J’étais de retour en action, dimanche dernier, dans ce que j’appelle « mes grandes niaiseries » en participant au Raid Bras du Nord. Au menu, le « Gros Bras », c’est-à-dire 97 kilomètres de vélo de montagne dans la région de St-Raymond de Portneuf. Pourquoi Bras du Nord ? Parce que une partie de la région se nomme la vallée du Bras du Nord.
Dimanche matin, j’étais prêt à me mesurer à ma plus longue course à vie en terme de distance. Même si je n’avais pas roulé autant que je l’aurais voulu dans la semaine qui précédait la course (rénovations oblige dans la nouvelle maison), j’avais tout de même suffisamment d’endurance pour me rendre jusqu’au bout. Tout ce que j’avais à faire, c’était de ne pas répéter les mêmes erreurs qu’en juin au Raid Vélo Mag et de ne pas partir trop vite.
9h30, le départ est donné et c’est parti pour 12 km sur une piste cyclable en garnotte. Tout ce qu’il y a de plus tentant pour tomber « overpace », mais je résiste à la tentation. C’est quand même un peu dur pour l’égo de voir des gars en shorts, et non en cuissard, avec des pédales à cale-pieds te dépasser. Qu’importe, je fais ma course à moi, les pulsations cardiaques sont stables. Je ramasserai les cadavres de ceux qui seront partis trop vite plus tard comme on dit. « Si jeunesse savait… » - ben quoi, j’ai quand même 30 ans ! ;-)
On entre enfin dans le bois et ça roule très bien. On s’enfonce dans la forêt dans de petits chemins forestiers et des sentiers de 4 roues et on aperçoit des chalets. Mais quand on dit chalet, ne pensez pas à St-Sauveur ou à Tremblant. Pensez à « shack » (comme dans « Love Shack », la chanson des B-52’s). Si ma mémoire est bonne, c’est Louis-José Houde qui disait que les chalets étaient comme une maison de retraite pour les vieux meubles. Eh bien, dans ce cas-là, j’ajouterais que ce l’était aussi pour les matériaux de construction. Maudit qu’il y en a qui faisaient dur ! Avoir su, j’aurai apporté quelques morceaux de vieux stucco (que j'ai démoli plus tôt cette semaine dans ma salle de bain) avec moi pour les leur donner et ils s’en seraient sûrement servi pour faire le mur du cabanon à bûches de bois.
Les kilomètres passent et on arrive à une section très technique surnommée la descente du matelot (aucune idée pourquoi, pas de traces du barbu des cigarettes Players à l’horizon). C’est simple, il n’y a pas de terre, que des roches qui sont grosses comme des ballons de basketball empilées les unes sur les autres. Je suis de près un gars, mais me garde assez de distance pour ne pas lui foncer dedans au cas où il se planterait. À un moment, nous n’avons pas le choix de déclipper et de faire le reste à pied, tellement c’est fou. « Y’en a combien qui sont passés ici sur le vélo ? » lance un coureur au bénévole situé tout près. – « Cinq ! » Ouin, y’a pas à dire, ils sont forts.
Par la suite, nous arrivons à la traversée de la rivière. Nous avons une centaine de mètres à faire, vélo sur l’épaule et les pieds dans l’eau. Heureusement, ce n’est profond que d’une cinquantaine de centimètres. Le plus drôle dans tout ça, c’est qu’il y a plusieurs personnes en canoë qui doivent attendre que les cyclistes passent avant de passer à leur tour.
Imaginez la scène : un bénévole debout en plein milieu d’une rivière qui fait le trafic où les cyclistes ont priorité sur les canoéistes ! Ceux-ci ne chialent pas vraiment et sont plutôt amusés de la situation et en profitent pour nous prendre en photo.
Vient alors un long 8 km sur un chemin forestier. C’est difficile de garder une vitesse élevée, car c’est assez raboteux et l’accotement est sablonneux, ce qui diminue considérablement la vitesse. Je garde mon rythme en prévision de la difficulté majeure du raid : la fameuse côte à Ti-Oui.
« Ti-Oui », un surnom inoffensif à première vue, mais pour les marathoniens du vélo de montagne québécois, c’est leur Alpe d’Huez. Pour avoir fait l’Alpe en vélo, l’Alpe est quand même plus dur que la côte à Ti-Oui. Le nom vient du Snack-Bar Ti-Oui, une institution culinaire de St-Raymond, et le propriétaire de ce haut lieu gastronomique a un chalet au sommet de ladite côte. La légende veut que la première année du raid (en 2004), monsieur Ti-Oui payait le lunch à ceux qui montaient la côte au complet sans marcher à côté du vélo… et que ça ne lui avait pas coûté cher.
Pour vous donner une idée, la Ti-Oui a un dénivelé d’environ 500 mètres sur 2 kilomètres de long. J’ai monté environ 90% de la côte sur le vélo, mais la qualité de l’adhérence (grosses roches et sable) a fait en sorte que j’ai dû marcher à quelques occasions. Oui c’était long, mais avec l’altimètre sur mon cardiofréquencemètre, j’ai pu bien doser mon effort. J’avais hâte d’arriver en haut, mais j’avais encore bien du jus.
Suit alors une longue, mais ô combien longue descente dans un chemin forestier des plus raboteux avec de nombreuses grosses roches et caches de chasseurs qui longent le parcours. Descendre devrait normalement être le fun après une telle montée, mais le sol est sablonneux et mou par endroits, ce qui veut dire que la roue avant peut virer à n’importe quel moment. Je décide de jouer de prudence, même si je me fais dépasser à quelques occasions. J’arrive à un coin et je réalise que j’ai pris la bonne décision. Un coureur est traité par des secouristes. Il est couché sur une planche dorsale et on lui a installé un collet cervical. Le pauvre, il a dû prendre toute une fouille. Ayoye !
De retour dans le bois et les champs de lin, le parcours est surtout plat et je réussis à résister aux crampes pour finir de justesse sous la barre des 6 heures, soit à 82% du premier chez les maîtres sport 30-39 ans (4h50 pour le gagnant). Mon résultat : 39e de ma catégorie sur 66 inscrits.
Un gros merci aux organisateurs et bénévoles qui avaient l’air très heureux d’aider les 600 fous de vélo qui ont participé aux différents épreuves.
Au compteur : 1575 mètres d’ascension et 5275 kilocalories de brûlées. Question de refaire le plein après la course, nous sommes allés manger, eh oui, chez Ti-Oui. Au menu, une poutine et un pogo (la galvaude, ça sera pour l’an prochain), question de se refaire des forces pour la prochaine course, le Raid Jean d’Avignon, dans deux semaines, à East Hereford dans le grand Coaticook métropolitain. Ça sera ma première course de deux étapes (2x75 km). Un autre beau défi en perspective !
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