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Un Monde Sans Argent : Le Communisme
VI. Au-dela de la politique



FIN DE L'ÉTAT

Le culte de l'état est fondamentalement anticommuniste.

Il naît et se renforce paradoxalement de tous les défauts, de toutes les défaillances, de tous les conflits qu'engendre la société capitaliste. Il est le sauveur suprême. Le dernier recours de la veuve et de l'orphelin. Accessoirement, et bien qu'il se prétende au-dessus des classes, qu'il se présente comme le garant de l'intérêt général contre les excès particuliers, il s'occupe de défendre la propriété et les privilèges.

Il y a eu une époque où la bourgeoisie ascendante manifestait des sentiments anti-étatiques. Aujourd'hui elle n'a plus que des bouderies. L'époque est révolue où les révolutionnaires bourgeois prétendaient que les peuples les plus heureux étaient les peuples sans état. La montée du péril prolétarien, le développement des impérialismes concurrents, l'ampleur des crises économiques ont montré tout l'intérêt de disposer d'une machine d'état puissante et d'abord d'un bon appareil de répression.

Les partis politiques se disputent pour conquérir, au nom du peuple, cette machine d'état qu'ils présentent comme un instrument neutre. Les léninistes conséquente proclament le caractère de classe de l'état et l'impossibilité de le contrôler par une simple victoire électorale. Ils en déduisent la nécessité de son démantèlement mais c'est alors pour lui substituer un "état ouvrier".

C'est à l'honneur des anarchistes d'avoir maintenu un anti-étatisme fondamental.

Pourtant, encore plus que contre l'argent, tout un chacun se fait un devoir de pester contre l'état. L'on proteste contre la lourdeur de l'administration, le poids des impôts, l'arrogance des policiers, l'ambition des politiciens, la bêtise des électeurs... Mais la disparition de l'état, voilà qui dépasse les limites de l'imagination. Et c'est celle-ci que l'on se propose, sans imagination, de porter au pouvoir.

L'état est intervenu de plus en plus ouvertement dans la vie sociale depuis quelques décennies. L'avènement du stalinisme et du fascisme n'ont été que des étapes plus visiblement marquées de ce processus. Là où certains ont cru voir l'état devenir populaire il faut voir l'accentuation du contrôle de l'état sur les populations.

A remarquer notamment la prise en main ou l'intégration à l'appareil d'état d'organismes de défense et de solidarité ouvrière. Par divers biais les assurances sociales, les appareils syndicaux se sont soumis à l'état. Cela leur permet d'agir plus ou moins comme des groupes de pression. Leurs déclarations d'indépendance et d'opposition ne doivent pas illusionner. C'est dans leur rôle.

Evidemment cette intégration de la lutte et cette officialisation du partenaire social ont été présentées comme de grandes victoires de la classe ouvrière. Les luttes des travailleurs profitent à une couche de spécialistes de la contestation et se traduisent par une institutionnalisation accrue des organisations "ouvrières". Souvent ces "acquis" ne se traduisent même pas par une redistribution des ressources vers les couches les plus défavorisées mais contribuent à leur soutirer encore de l'argent. Malgré ce que prétendent hypocritement syndicats et gouvernements.

L'étatisation grandissante ne doit pas être considérée uniquement comme un affaiblissement du prolétariat. Elle correspond au contraire à la nécessité de contrôler sa puissance grandissante. Cette étatisation compense la fragilité des sociétés modernes. Mais elle-même n'échappe pas à cette fragilité. L'encadrement étatique de la population n'est possible qu'avec la complicité de cette population. La révolution anti-politique montrera le caractère finalement superficiel de cet encadrement.

Contrairement aux politicards de tous les bords les révolutionnaires se gardent bien d'en appeler à la responsabilité de l'état dès qu'un problème survient. Ils mettent systématiquement en avant l'autonomie et l'auto-organisation de la classe prolétarienne. Invoquer la faiblesse du prolétariat pour justifier le recours à l'état c'est justifier et poser cette faiblesse comme éternelle.

La société révolutionnaire aura des organes de coordination et de centralisation. Souvent même elle permettra une centralisation plus a poussée, plus planétaire que ce que permet le capital. Mais elle n'aura pas besoin d'un état où se concentre le pouvoir, de toute cette machinerie à réprimer, identifier, contrôler, éduquer. L'administration des choses y remplacera le gouvernement des hommes.

Le problème est dans une phase insurrectionnelle et intermédiaire de ne pas recréer d'état, tout en assurant des fonctions administratives et répressives donc étatiques. Ceux qui ne veulent pas régler ce problème, comme les anarchistes, ne peuvent qu'être cocufiés par les étatistes ou contraints de se faire étatistes eux-mêmes. La participation de ministres anarchistes à la junte gouvernementale durant la révolution espagnole a montré ce que cela pouvait donner.

La solution au problème, à cette contradiction a été esquissée par les insurrections prolétariennes depuis la Commune de Paris. C'est le conseil ouvrier, l'organisation conseilliste de la vie sociale.

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