B anlieue
Un banal contrôle de police ponctué d'outrages et rébellion a dégénéré, hier en début de soirée au quartier niçois de l'Ariane, pour déboucher sur une série de violences urbaines qui se sont soldées par trois policiers légèrement blessés et par plusieurs voitures incendiées (à minuit le compte s'était arrêté à six) et quelques autres lapidées.
Les cris du jeune mis en cause, qui venait de monter dans un fourgon de police posté en surveillance devant la future caserne de CRS après avoir insulté les fonctionnaires présents, ont alerté des gamins et adolescents du quartier qui alors ont tout fait pour le délivrer en encerclant le véhicule, à l'intérieur duquel un gardien de la paix et deux jeunes adjoints de Sécurité devaient être superficiellement touchés par des éclats de verre et par un cocktail-molotov qui n'a pas explosé.
Au chat et à la souris...
Il était 20 heures, et le coup d'envoi d'actes de violences
qui allaient durer pendant un peu plus de quatre heures en divers
secteurs du quartier venait d'être donné. En dépit
de l'intervention rapide de la Section d'intervention, les policiers
accueillis par des jets de pierre nourris, se voyaient contraints
de repousser les jeunes « sauvageons » en
lançant des bombes lacrymogènes.
Pendant que les fauteurs de troubles, au nombre d'une centaine, se disséminaient, le commissaire divisionnaire Georges Rolland, voyant que la situation prenait une ampleur encore jamais vue dans ce quartier, demandait le renfort d'une demi-compagnie de CRS. Avec les brigades anticriminalité et la section d'intervention, ce sont près de quatre-vingts hommes casqués et munis de boucliers qui se déployaient autour du boulevard Emile-Ripert et du boulevard de l'Ariane, partiellement plongés dans l'obscurité par le fait des meneurs qui avaient coupé l'alimentation au niveau des armoires électriques et commencé à mettre le feu.
« On se laisse faire
par une bande de c... »
Un drôle de jeu du chat et de la souris démarrait
alors pour les fonctionnaires, sous les yeux ébahis de
riverains tantôt soumis, tantôt excédés
par un spectacle qui tranchait avec le nom de rues (Bleuets, Pâquerettes,
etc.) « Oh ! Vous savez, on en prend l'habitude,
il n'y a pas un soir où il ne se passe quelque chose, et
où une voiture ne brule », commentait un homme
âgé, résigné sur le pas de la porte
de sa maison, tandis qu'un peu plus loin une jeune femme explosait
littéralement, sous les yeux de son fils en larmes :
« Regardez les belles choses qui se passent ici ! Mes parents ont trimé toute leur vie pour acheter une maison qui non seulement elle ne vaut plus rien, mais dans laquelle on n'est même plus en sécurité. On se laisse mener sans réagir par une ou deux bandes de petits c... qui ne veulent pas d'une caserne de CRS. On est dans un état de non droit ! »
Ici et là, profitant de la nuit et de la protection des platanes du boulevard de l'Ariane, les groupes se déplaçaient d'un point à un autre pour retourner une voiture et y mettre le feu, puis une autre. Les policiers tentaient de suivre en se tenant au courant par radio de l'évolution de la situation.
Cailloux et camescopes aux
balcons !
Le bruit des bombes lacrymogènes perçait la nuit
agitée. « Ce n'est pas évident car nous
sommes caillassés aussi depuis les balcons »,
indiquait le commandant Darmon, patron de la SI (Section d'intervention).
Des balcons où certains se sont même munis de caméscopes,
comme pour immortaliser le « spectacle ».
Une autre auto brulait rue Georges-Picard, face au théâtre Lino-Ventura.
A minuit, plusieurs adolescents de l'Ariane étaient encore à l'affut ; le concert public de la place Masséna - protégé, il est vrai, par un escadron de gendarmes mobiles - s'achevait dans le calme alors qu'on en redoutait le pire.
Des policiers évitaient de justesse des projectiles au 182 boulevard de l'Ariane. Les pompiers intervenaient un peu plus bas pour secourir deux riverains légèrement intoxiqués par des gaz lacrymogènes.
Tard dans la soirée la situation que l'on croyait maitrisée, restait tendue.
Michel BARELLI.
Dimanche 29 Avril 2001