CE QUE LA PRESSE PENSE DU
LIVRE D'ERIC DUPIN "LE DISCIPLE"
(PLON)
244 pages - 118 francs
1/ L'article de Gérard Courtois
publié par "le
Monde" du 25 septembre 1998:
JOSPIN OU LA COMPLEXITE
Voilà bien un livre susceptible d'agacer
le premier ministre. Ce titre, d'abord, Le Disciple, assortti de
ce sous-titre appuyé, Les dix leçons que Jospin apprit
de Mitterrand... Après plus d'un quart de siècle d'engagement
politique, des fonctions éminentes, une campagne présidentielle
prometteuse, la reconstruction d'une « gauche plurielle »,
une victoire qui le conduit à Matignon et fait de lui, sans conteste,
le chef de gouvernement le plus puissant de la Vème République,
bref, à soixante ans, cessera-t-on enfin - doit-il s'exaspérer
- de lui rappeler ce pairrainage ? N'a-t-il pas démontré,
«droit d'inventaire » à l'appui, qu'il avait su s'émanciper
de l'ombre tutélaire de François Mitterrand?
C'est pourtant sur cette corde sensible que joue
Eric Dupin avec insistance. Certes, Lionel Jospin a soigneusement construit,
lors de l'élection présidentielle de 1995 et depuis, l'image
d'« un homme qui a su rompre avec l'ancien chef de l'Etat»,
note-t-il. De même, « à Matignon, la stratégie
de communication jospinienne est basée sur le contraste supposé
avec la pratique mitterrandienne du pouvoir », la personnalité
et le style du nouveau premier ministre ayant «fortement contribué
à asseoir cette différence ». Sa probité et
sa sirnplicité ne tranchent-elles pas avec les louvoiements et les
opporturnismes de son ancien mentor ? Pourtant, assure Dupin, «Jospin
est tout sauf un anti-Mitterrand. Au-delà des apparences, dont il
joue habilement, le premier ministre est même le meilleur élève
de celui qui a dominé la gauche française » depuis
1971. Il en veut pour preuve, notamment, le respect par Jospin du «postulat
stratégique de l'union des gauches », une belle capacité
d'évolution, un art similaire de jouer des faiblesses de la droite
ou une même règle de « ne faire confiance qu'aux siens
».
Les limites de l'exercice comparatif sont vite atteintes,
cependant. Dupin lui-même souligne que Jospin a « si bien digéré»
les leçons prodiguées par Mitterrand qu'il « n'hésite
pas à prendre le contre-pied de certaines d'entre elles »,
par stratégie autant que par caractère. Même s'il est
chaleureux et sans complaisance, le portrait croisé du maître
et du « disciple émancipé» est donc loin d'épuiser
l'intérêt du livre. Plus riche, bien souvent, est l'analyse
du Jospin en action à l'hôtel Matignon, étayé
par de nombreux témoignages et un décryptage des temps forts
et des décisions-clefs depuis juin1997.
L'auteur, en effet, pointe avec beaucoup de pertinence,
la complexité, les cohérences autant que les ambivalences,
du premier ministre. Voilà un Jospin « méfiant»
mais « utilitariste », qui a appris « à utiliser
les compétences de chacun »; un Jospin « solitaire par
tempérament», mais doté d'un « esprit d'équipe
dans l'action »; un Jospin qui « ne pratique pas l'exercice
solitaire du pouvoir», mais, expert ès synthèses, "le
concentre dans un processus d'intériorisation personnelle des positions
de chacun" et cela dans un «profond respect des formes démocratiques
»; un Jospin, enfin, vigoureux avocat de ses propres évolutions,
mais qui écarte l'idée même de pouvoir se renier. Et
Dupin fait cette remarque très juste: « Parce qu'il est moins
cynique que Mitterrand, Jospin est intimement préoccupé par
la cohérence de son action et de sa pensée. Car il n'a pas
la naïveté de croire que la première n'est que l'application
de la seconde. Cette intelligence de l'inconfort politique s 'accompagne
d'un lancinant sentiment de culpabilité. Comme si Jospin avait toujours
besoin de se prouver à lui-même qu'il reste fidèle
à ses convictions. »
Son attitude à l'égard de l'extrême
droite est ainsi des plus révélatrices. «Je suis l'un
des hommes politiques français à qui, sur ces vingt dernières
années, on ne peut pas reprocher d'avoir joué avec l'extrême
droite », Iance-t-il. Dont acte. Pourtant sa décision, au
cours de l'été 1997, de bloquer la réforme du mode
de scrutin régional a indéniablement donné au Front
national, au lendemain des élections du printemps 1998, l'occasion
d'enfoncer les défenses de la droite modérée contre
la tentation lepéniste. « Si l'on doit reprocher quelque chose
à Jospin, dans cette affaire, c'est sans doute son inébranlable
bonne conscience », note Dupin. Et il ajoute: «Jospin ne favorise
pas le FN par un cynique calcul politique. Mais il en tient compte pour
mieux affaiblir l'adversaire. »
Reste l'obsession revendiquée par le premier
ministre et qui explique l'efficacité actuelle de sa "méthode":
la recherche permanente du «point d'équilibre » entre
des jeux de forces antagonistes. Cela vaut pour l'économie, où
il entend éviter à la fois les « illusions »
du premier quinquennat socialiste (1981-1986) et les « enlisements
» du second (1988-1993), mais de la même façon pour
la politique, où « les discordances mêmes de la "gauche
plurielle" lui donnent un précieux degré de liberté
et l'autorisent à se poser en arbitre ». Cet « art de
l'équilibre » n'apparaît pas comme une «ruse»,
pour la bonne raison qu'il est « en phase avec l'état de la
société » et ses aspirations contradictoires. «
Mais comment Jospin réagira-t-il le jour où la réalité
se chargera de faire éclater ces multiples contradictions ? »,
interroge Eric Dupin. Bonne question.
GERARD COURTOIS
2/ L'article d'Eric Aeschimann
publié par "Libération"
du 7 octobre 1998
JOSPIN ET SES MAITRES
Au faîte de sa popularite, plus que jamais
à l'aise dans ses habits de Premier ministre, Lionel Jospin garde
une part de mystère. Socialiste «première gauche»,
il mène une politique d'inspiration nettement «deuxième
gauche», parfois franchement centriste. Obsédé de l'axe
PS-PCF, il dirige une équipe plurielle plus marquée, dans
son image et son fonctionnement,par la présence des Verts et la
forte féminisation que par la présence de ministres communistes.
Chantre de la modestie, de l'intégrité et du dialogue, il
est, dans la réalité, orgueilleux et autoritaire, dissimulateur
si besoin est et peine parfois à retenir «son tempérament
de cogneur».
C'est ce noeud de contradictions et de contrastes
que s'attache à décrypter Eric Dupin. Ancien journaliste
à Libération, jospinologue émérite,
l'auteur étudie les quinze premiers mois d'activité du chef
du gouvernement et en extrait de précieuses clés pour articuler
les facettes du personnage. Il croque Lionel Jospin en "psychorigide pragmatique",
lui reconnait «une lucidité peu contestable» et se demande
si le principal danger qui le guette n'est pas «de glisser d'un comportement
moral à un discours moraliste». Il analyse, de façon
éclairante, le stress que provoque chez le Premier ministre les
traditionnelles tensions entre les aspirations de la gauche et les réalités
du pouvoir. «Parce qu'il est moins cynique que Mitterrand, Jospin
est intimement préoccupé par la cohérence de son action
et de sa pensée. Il n'a pas la naïveté de croire que
la première n'est que l'application de la seconde. Cette intelligence
de l'inconfort politique s'accompagne d'une lancinant sentiment de culpabilité.
»
Car, on l'aura compris, l'un des deux termes de
l'équation jospinienne - sa part d'habileté, sa façon
de s'afficher à gauche pour gouverner au centre- s'appelle Mitterrand.
Mais, à cet égard, le titre du livre est trompeur. Pour Dupin,
Jospin n'est pas que disciple, il est aussi celui qui a su occuper un espace
politique en prenant le contre-pied de son ex-mentor sur des points aussi
essentiels que les promesses qu'il faut tenir ou la transparence du mode
de décision. «Jospin aurait-il pris le meilleur des deux principaux
rivaux du socialisme récent, l'écoute de la société
chez Rocard et l'art du pouvoir chez Mitterrand?» s'interroge l'auteur,
qui rechigne à répondre par l'affirmative, mais qui souligne
la «mixité idéologique fondamentale» du jospinisme.
Une sorte de composé chimique, sûrement instable, et qui permet
de comprendre pourquoi l'action gouvernementale s'apparente parfois à
un trop savant numéro d'équilibriste.
On regrettera néanmoins que, tout à
son étude de caractère politique, Eric Dupin passe trop rapidement
sur les grandes options économiques et de société
de Lionel Jospin - et notamment sur les présupposés sociologiques
de mesures telles que les 35 heures, les emplois-jeunes ou la réforme
de l'immigration. Mais, précisément, analyser une action
politique essentiellement en termes de pratique du pouvoir est on ne peut
plus jospinien -et également mitterrandien. A cet égard,
le Disciple est un livre réellement politique, et de la meilleure
facture.
ERIC AESCHIMANN
3/ Extraits d'autres critiques de presse
"France-Soir" du 29 septembre
1998:
"Tel
père spirituel, tel disciple de fils. Lionel Jospin a beau jeu d'occulter
son embarrassante filiation, l'enfant rebelle du mitterrandisme (...) a
tout appris de son père. (...) C'est ce que démontre avec
brio Eric Dupin, ancien journaliste de Libération dans Le
Disciple"
C.B.
"L'Evénement du Jeudi"
du 1er octobre 1998
"Après un an et
demi d'exercice du pouvoir, il est maintenant acquis que cet homme "modeste"
s'est révélé un formidable tacticien, l'héritier
insoupçonné de François Mitterrand, un fils rebelle
mais aussi le meilleur de tous, comme le décrit Eric Dupin dans
son excellent livre le Disciple (Plon)"
Georges-Marc Benamou
"L'Express" du 1er octobre 1998
"Il est courageux de traquer
aujourd'hui le mitterrandisme caché de Lionel Jospin, alors qu'il
fit du "droit d'inventaire", ce reniement poli, le secret de sa résurrection
politique en 1995".
Christophe Barbier
"Les Dernières Nouvelles
d'Alsace" du 1er octobre 1998
"Lui c'est lui; moi, c'est
moi. Dans un livre qui tient de la chronique autant que de l'essai, Eric
Dupin propose une interprétation qui nuance la formule célèbre
(...) Son ouvrage substanciel et ingénieux rend justice à
la personnalité singulière du Premier ministre. Ni le rôle
que tient Lionel Jospin, ni l'influence qu'il exerce ne sont usurpés".
Pol Vandromme
Si
après avoir lui tout cela, vous n'êtes toujours
pas décidé à acheter
mon livre, je ne sais plus quoi faire
;-)
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