Né à Cacouna, le 1er octobre 1837, fils de Pascal Dumais, premier député de Rimouski, Emile Dumais étudia au collège de Sainte-Anne-de-la- Pocatière. En septembre 1858, Emile Dumais était nommé professeur d'agriculture et allait, aux frais du collège, suivre des cours d'études agricoles chez M. Joseph Perreault, directeur de la ferme-essai de Varennes et ancien élève de l'Ecole impériale de Grignon et du Collège royal de Cirencester. L'ouverture de la section agricole avait été rendu possible par l'octroi, à l'été 1858, d'une somme de 250 louis de la députation de la Législature et 75 louis de la Société d'agriculture de Kamouraska. L'organisation de la formation agricole comprenait trois dégrés. Les écoles du premier dégré étaient destinées à la formation des agronomes et de professeurs pour fermes-écoles. Celles du second dégré devaient former des cultivateurs. Les écoles du troisième degré ne devaient être autre chose que nos écoles primaires avec quelques notions d'agriculture.
Il réussi à faire entre dans le programme du gouvernement, un cour pratique qui a été adopté avec succès, quelques années plus tard par une grande compagnie pour l'exploitation de la betterave à sucre dans le Colorado. Puis est venue "La Gazette des Campagne" un succès, dit-il dans une de ses lettres, qu'on m'a envié. Aux Etats-Unis où il alla demeurer, sa marmotte de colon l'a toujours suivi, partout dans l'Est, dans l'Ouest, au Maine, à la Floride, dans la Basse Californie et dans l'Orégon.
Le premier numéro, numéro spécimen est daté du 21 septembre 1861, imprimé à l'imprimerie de la Gazette des Campagnes, St-Louis de Kamouraska. Emile Dumais en est le directeur et propriétaire. On pouvait y lire: "Si la guerre est la dernière raison des peuples l'agriculture doit être la première" et un autre slogan "Emparons-nous du sol, si nous voulons conserver notre nationalité". Il en resta propriétaire jusqu'au 3 avril 1862, acquise par Monsieur Firmin H. Proulx, le journal sera alors publié a partir de Sainte-Anne-de-la-Pocatière.
Ajoutons qu'Emile Dumais est allé au Lac St-Jean alors qu'il n'y avait pas un seul colon, en 1855. M. L. Kain, de la Compagnie de la Baie d'Hudson est le seul homme qu'il y ait vu. En 1862, c'est lui qui a fait ouvrir le premier chemin du gouvernement.
En 1879, il fonde le "Murmure", journal qui vit le jour pour ne durer que l'espace d'un jour. C'était un mince pli de quatre pages, portant cette en-tête charmante:
Pointe Bleue, Lac St-Jean MURMURE DU LAC ST-JEAN
Journal des Colons
Murmure du Lac St.Jean (1879)
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Ce journal est le plus ancien de notre région dont nous
connaissons l’existence. Publié par Émile Dumais
(fondateur de la Gazette des Campagnes), il est imprimé
à Québec par les ateliers du Nouvelliste. Mort-né,
ce journal des colons, vise à contrer l’exode des Canadiens
français vers les Etats-Unis. Le numéro prospectus nous
présente le futur journal et la lutte qu’il veut mener
afin de promouvoir les valeurs agricoles. Le lieu de publication est
la Pointe Bleue, juste à côté de Roberval, où
habite le frère de Dumais, l’arpenteur Pascal-Horace. Il
faut attendre en 1882, pour finalement assister à la publication
d’un journal régulier dans la région, le Saguenay
(Chicoutimi).
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"Pourquoi ce nom ?" se demande-t-il lui-même. C'est à cause des trois millions d'arpents de terre qui attendent... Pourquoi murmurer? Parce que cette terre promise est abandonnée au seul courage des habitants de notre Vallée. Le Murmure sera le porte-parole de colons, il apportera dans les bureaux des hommes politiques la senteur de la forêt et de la terre fraîche, il leur portera le soupir du grand lac, si loin, si loin!... Nous allons donc murmurer mais, le plus souvent comme notre beau Lac, nous l'espérons, bien légèrement. Et ce murmure partira de Pointe Bleue ou de Notre- Dame du Lac St-Jean, la paroisse de curé Lizotte, celle que la Providence semble déjà désigner, en 1879, comme le futur Québec de cette future province...
L'unique édition du Murmure est daté, en effet, de samedi, le 15 novembre 1879.
Dumais avait déjà lancé le projet d'un journal régional à Chicoutimi en 1864, journal qu'il aurait appelé l'Echo du Saguenay. Tout se borna cependant à quelques souscriptions et à quelques démarche pour l'achat d'une presse. Mais comme le premier journal chicoutimien date de 1882, le Murmure se trouve occuper la première place dans la liste des journaux de la région.
Nous y trouvons un éditorial de deux pages et demie, gonflé de patriotisme, le reste étant occupé par le texte officiel d'un projet de société de colonisation et l'annonce d'un commerçant de Québec. Le journal était imprimé à Québec, comme bien l'on pense, au Courrier du Canada. C'était un fruit du premier grand mouvement de colonisation et de rapatriement vers le Lac St-Jean, à cette époque précise où le chemin de fer préoccupait Québec et où la classe bien pensante se prenait d'engouement pour cette région. Le Murmure signale justement le ralliement patriotique de 1880, qu'il salue comme l'occasion d'un examen de conscience des Canadiens français, décimés par l'émigration aux Etats-Unis.
A l'époque du Murmure, il était hanté par l'avenir de Lac St-Jean, non seulement il en exagérait beaucoup l'étendue de son territoire arable, comme ses contemporains. Il préconisait une grande société de colonisation saguenéenne. tout comme les petits Etats de la Gaspésie, de la Matapédia, des Bois Francs et du Témiscamingue. Savoir que la province de Québec a encore au-delà de 200 millions d'acres de terre à défricher tandis qu'un million et demi de ses enfants sont à courir la prétentaine à l'ombre du drapeau étoilé, et de rester les bras croisés, est quelque chose qui frise la mostruosité. A quoi pensons-nous donc? Dites-moi, mon jeune ami, n'êtres-vous pas tentés de lever la tête un peu et de vous élancer dans cette carrière grande ouverte de la colonisation? Songez que moi, qui suis votre devancier d'un bon demi-siècle, je n'ai pas perdu l'espérance de voir nos gens se remettre à défricher la forêt avec l'entrain de mes grand'pères. Il en fonda même une à Québec avec quelques citoyens et Pères Oblats, qui ne put avoir ses franchisses.
Dumais passera sa vie à découvrir le sol et à parcourir la terre.
L'Amérique n'a pas suffi à notre vieil ami. Il voulut goûter non seulement de l'Europe, mais aussi de l'Afrique et des Indes. Pendant plusieurs années, il fut correspondant du "Times" de Londres en Inde et en Afrique du Sud, où il se lia d'amitié avec le fameux président Paul Kruger, défenseur du Transvaal durant la guerre des Boers et président de cet Etat. Certain nous dirons qu'il était devenu son commensal.
De retour d'Afrique, il alla se fixer au Manitoba ou il y fonda une petite école d'agriculture.
Il allait se reposer en Floride quand la mort l'enleva, à Washington, en 1910. Il préparait alors un ouvrage en anglais dont il disait: "Ce n'est qu'un aperçu sur la situation économique de notre petit peuple. Il me faudra bien faire quelque bouts d'histoire, mais la plus grande partie du travail se fera à coup de chiffres." Et, en effet, ce travail dont a paru dans un Magazine américain, promettait beaucoup, si la mort ne fut venue arrêter la main de notre vieil écolier qui, à 73 ans pensait que ses études agronomiques ne fessait que commencer.
Notes:
- Paul Kruger, homme d'Etat sud-africain (Vaalbank, près de Colesberg, colonie du Cap, 1825 - Clarens, Suisse, 1904) Descendant d'un immigré berlinois, il participa avec Prétorius le Vieux à la fondation du Transvaal (1852). Commandant en chef de l'armée du Transvaal et vice-président (1864) son opposition au président T.F. Burgers provoqua des luttes intestine, origine de l'intervention des Anglais. Après l'annexion du pays (1877), il organise avec Prétorium le Jeune et Joubert l'insurrection de 1880, qui aboutit à la paix de Prétoria (1881) et à la création de la République du Transvaal. Quatre fois président de celle-ci (1883, 1888, 1893, 1898).
Son ultimatum au Anglais entraînera la guerre des Boers, le 9 octobre 1899.
- The New York Times. N-Y Friday, December 2, 1910. WAR CORREAPONDENT DEAD - Dumais, Found Exhausted in Washington, kept his identity Secret. Washington. Dec. 1 - Picked up on the street five weeks ago in an exhausted condition, Emil Dumais, 73 years old, once war correspondent in India and South Africa for The London Times, died to-day at a local hospital. He kept his identity a secret until the last moments of his life.
Dumais had stopped here on his way to Florida, where heped to recuparate from general to health. He had been interested in
agricultural problems. ... being the founder of the Manitoba Agricultural College, and the prupose of this visit here was to study the methods of the Departement of Agriculture.
- L'Evènement, Vendredi le 2 décembre 1910. - Olysée d'un pionnier Canadien de l'agriculture et du journalisme. - Emile Dumais après une vie de 73 ans remplie de travaux de toutes sortes, meurt seul, dans la solitude, à Washington. - Monsieur Emile Dumais qui a été le fondateur du premier journal du "Saguenay" et de la "Gazette des Campagnes" meurt à Washington.
Il est gradué de l'Univertsité de Toronto.
On le ramassait il y a quelques jours, privé de connaissance dans une rue de Washington, et il mourrait hier dans un hopital de cette ville.
Dumais est l'un de nos compatriotes qui pu se vanter d'avoir eu la carrière la plus mouvementé et la plus varié.
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