Origines de St-Antoine de Padoue, de Kempt.

Note de la rédactrice : Texte de M. l’abbé Alphonse Beaulieu, sur l’histoire de Métis, terre de prospérité, publié à l’ occasion du centenaire de St-Octave de Métis, en 1955.

Quelques paragraphes ont cependant été retranchés afin d’en raccourcir l’ histoire, mais l’essentiel y est.

Nos paroisses canadiennes n’ont pas toujours été ce qu’elles sont aujourd’hui. A leur début, elles ne présentaient pas cette force ni cette vitalité qu’on leur reconnaît de nos jours.

Pouvait-il en être autrement ? une paroisse dont les avantages se perdaient dans l’espace, ne pouvait assurer à sa population disséminée, les avantages d’une agglomération bien cantonnée dans des cadres définis.

Le temps cependant a fait son œuvre, la détermination des premiers colons a permit de voir se concrétiser, petit à petit, les cadres de nos belles paroisses, joyaux de la province de Québec.

Partis de l’Ile d’Orléans et de la côte de Beaupré, le petit noyau de Canadiens-Français essaima et finit par coloniser et occuper toutes ces belles fermes de Lévis à Gaspé; Les unes après les autres, surgissent ces belles paroisses tout au long du St-Laurent, dans la Vallée de la Matapédia et le Témiscouata.

Aussi s’intégra dans la grande famille, la prospère et attrayante paroisse de St-Octave de Métis.

Le 6 mai, 1675, le comte de Frontenac, gouverneur de la Nouvelle-France, concède au Sieur Jean-Baptiste de Poiras, conseiller au Conseil Souverain de la Nouvelle-France, une lisière de terre, le long du fleuve St-Laurent, s’étendant de l’embouchure de la Rivière Métis, vers l’est sur une distance de deux lieues, par deux lieues de profondeur.

Le 29 mai, 1802, Antoine Joubin dit Boisvert, et Madeleine Pinguet, son épouse, agissant pour les héritiers de feu Sieur Charles Lambert, vendent la seigneurie de Métis à Mathew MacMider. Par la suite, Archibald Ferguson et David Ferguson, son fils, deviennent les co-propriétaires et co-seigneurs de la dite seigneurie. On comprend alors que les premiers établissements soient des établissements écossais.

On peut prendre pour acquis que, dès 1818, Métis comptait déjà quelques familles canadiennes-françaises. En 1842, les établissements canadiens-français sont déjà nombreux dans la seigneurie Métis, dans le canton Cabot, son voisin à l’ouest et dans la seigneurie Lepage et Thivierge, puisque l’Evêque de Québec établit une mission à Métis, en 1855.

Les cadres de la paroisse de St-Octave de Métis sont formés. Par la suite, des lisières de terrain seront détachées de son territoire, pour former, à elles seules ou avec l’apport des missions avoisinantes, les paroisses de Baie-des-Sables, Ste-Angèle de Mérici, Price, Padoue et les Boules.

 

La paroisse de Padoue (St-Antoine de Padoue de Kempt).

La paroisse de St-Antoine de Padoue est relativement jeune (l’écrit qui me sert de référence est signé en 1955); elle ne date que de 1912. Il est donc facile d’en retracer l’origine et les débuts, d’autant facile que sa naissance n’a été ni prématurée, ni violentée.

Comme un fruit mûr, elle s’est détachée de l’ arbre et elle se présenta attrayante et succulente. Petite, il est vrai, mais viable et possédant tous les éléments nécessaires à la vie d’un peuple.

Fille privilégiée de la paroisse-mère, elle n’eut pas à faire des conquêtes pour assurer son existence puisque toutes ses terres lui furent données en patrimoine par la paroisse de St-Octave de Métis dont elle est issue.

Située à l’intérieur des terres, loin des grandes routes isolées par la forêt et des terrains incultes, la coquette paroisse de Padoue est comprise dans le canton Cabot.

Ce canton a été ainsi appelé en l’ honneur de Jean-Sébastien Cabot, explorateur vénitien au service des Rois d’Angleterre, venu à Terreneuve avant Jacques-Cartier, et que certains historiens anglais regardent comme le véritable découvreur du Canada.

Le canton Cabot comprend cette partie détachée des Terres de la Couronne, le long du Chemin Kempt (chemin pour la milice) par proclamation du 22 décembre, 1881.

Au nord, il est borné à la Seigneurie de Métis; à l’ ouest, au Canton MacMider; au sud, au canton Avantguish; et à l’ ouest, à la Seigneurie Lepage-Thivierge.

Il appartenait à des âmes généreuses d’ouvrir cette région à la colonisation et cette noble mission était réservée aux fils de la paroisse de St-Octave de Métis. Paul Thériault fut parmi les premiers; à juste tître, il est considéré par plusieurs, comme le père de la paroisse de Padoue.

Les préoccupations religieuses hantaient l’esprit des premiers colons. " Que faire en un gîte, à moins que l’on ne songe ". Et Paul Thériault songea à une paroisse pour ces colons du Chemin Kempt.

Il en parla, avec Joseph Jean, et tous deux résolurent de soumettre leur projet à Monseigneur. Ils amenèrent avec eux le père Gagnon. Monseigneur trouva la requête justifiée et décréta une mission séparée sous le nom de la Mission de St-Antoine de Padoue du Chemin Kempt.

Monsieur l’abbé Adéodat Beaulieu en était nommé missionnaire. C’ était en 1910.

Après une si belle victoire, on ne s’arrêta pas en chemin. Nos valeureux colons étaient prêts à tous les sacrifices pour hâter l’organisation de leur paroisse, et " pour avoir un prêtre et une église " comme ils le disaient eux-mêmes.

Ils prêtèrent donc main forte au missionnaire pour la construction du presbytère. En attendant la construction de l’ église, ils voulurent loger Dieu dans leurs demeures.

M. Emile Gagnon était à se construire une grande maison pour sa nombreuse famille; il mit donc sa maison au service du culte. Et pendant une année ou presque, il alla demeurer avec la famille de Thomas Thériault. On se tasse pour faire de la place à Dieu.

Comme on le pense bien, la brave population de Padoue ne mit pas de temps à construire son église – une église qui devait durer et qui, après 45 ans, sert encore au culte.

On ne s’arrête pas là. Une requête pour l’érection canonique de la paroisse, portant la signature de cinquante franc-tenanciers et contre-signée par MM E. Moreaut, Auguste Girard et Paul Thériault, fut présentée à Mgr. Blais.

Le décret de l’érection canonique de la paroisse de St-Antoine de Padoue est signé du 18 juin, 1912.

La nouvelle paroisse comprend un territoire de huit milles de front par sept milles de profondeur, et est bornée, à l’est, au canton McMider; au sud, par le rang dix, limite de St-Octave; à l’ouest, à la paroisse de Ste-Angèle; au nord, à la paroisse de St-Octave, soit entre les fronteaux des rangs 4 et 5 jusqu’au lot 524, puis de là jusqu’à des rangs C et D du Canton Cabot.

La paroisse de Padoue a donné, jusqu’en 1955, trois prêtre et dix religieuses.

Les fondateurs de la paroisse de Padoue eurent tôt compris l’importance de l’éducation. Sans tarder, et au fur et à mesure des nécessités, des écoles furent construites dans chaque rang.,

Il va sans dire que l’école du village reçut beaucoup d’attention. M. Paul Thériault s’était donné à cette œuvre. Le succès ne se fit pas attendre, et dès 1914, on pouvait admirer une magnifique et spacieuse école devenue le couvent depuis le 10 octobre, 1938.

L’ organisation civile de la paroisse de Padoue est menée de pair avec l’ organisation religieuse,. Sitôt émis le décret de l’ érection civile de cette paroisse, en 1911, on procéda à la formation du premier conseil municipal.

M. Jean Dumas fut nommé maire et MM Eustacle Desrosiers, Joseph Caron, Moïse Bérubé, Johnny Béland et Joseph Ouellet furent nommés conseillers. M. le notaire Paul Gagnon, de St-Octave agissait comme secrétaire-trésorier

Le maire actuel (en 1955) est M. Paul Ouellet, tandis que M. Wilfrid Bérubé remplit la charge de secretaire-trésorier. Le curé en 1955 est le Révérend Elisée Roussel.

La paroisse de Padoue doit forcément vivre de l’agriculture, mais ça ne semble pas suffisant pour assurer l’avenir de sa population. Il nous faut bien admettre les faits, l’agriculture et l’industrie forestière sont à l’origine de la paroisse de Padoue.

Quand un peuple s’adonne totalement à l’agriculture, il parvient toujours à une aisance suffisante. Mais si plusieurs de ses éléments n’ont pas la vocation agricole, sitôt la foret disparue, les cadres se rétrécissent et la paroisse n’est viable que pour les véritables terriens.

Nous avons là, l’explication du déclin de la population de cette paroisse qui est passée de 1,000 à 800 âmes récemment. (1955)

Ne commettons pas l’ erreur de croire cependant que cette paroisse est en régression. Loin de là ! Si certaines scieries jadis renommées ont fermé leurs portes, le rendement agricole n’a pas cessé de faire des progrès, et certains établissement commerciaux accusent de très bonnes affaires.

En 1950, un incendie spectaculaire a consumé une grande partie du village – dont l’ancienne maison de J. Napoléon Laflamme – déménagé depuis 1947, à St-Romuald d’Etchemin, et père de Gilles.

Avec du courage et énormément d’espoir en l’avenir, le village est sorti de ses cendres rapidement.

D’abondantes sources de renseignements sur la paroisse de Padoue ont été fournies par la Révérende Sœur de Louis-Louis,r.s.r. et par le curé Roussel.

 

Dans le dictionnaire des noms propres québecois, publié en 1993 par Jean Cournoyer, on peut y lire, à la fiche " Padoue " :

Municipalité de 400* habitants. On les appelle Padovien (ienne) . La municipalité de 67.57 km carrés est située à une quarantaine de kilomêtres à l’est-nord-est de la ville de Rimouski, et fait partie de la Région administrative du Bas St-Laurent.

C’est dans le cimetière de Padoue qu’est enterré M. Laflamme. Décédé en 1950, à St-Romuald, sa famille avait toujours ses racines profondément ancrées dans ce petit coin de la Vallée de la Matapédia, et le père de Gilles a été conduit à son dernier repos, près de cette église pour laquelle avait eu tant de dévouement.

 

** Vous aurez noté : 400 habitants – c’est donc dire que Padoue a considérablement rappetissé au fil des ans. Une des raisons majeures semble être la scolarisation des jeunes qui trouvent des emplois plus lucratifs dans les grands centres urbains.