Vue de l’emplacement de la Seigneurie de Lauzon, à Saint-Romuald en 1832.

Histoire de Saint-Romuald

Ecrite en 1975 et revisée en 1998.

Alors que la plupart des gens rêvent d’habiter une maison centenaire, pleine de charme et d’histoire, voilà que nous nous rendons compte que la nôtre, située à 1108 rue Commerciale, Saint-Romuald, compte déjà plus de 130 ans.

A la lumière des recherches effectuées un peu partout, j’en suis venue à la conclusion qu’elle a été construite vers 1840, ou tout près ; libre à celui ou celle qui voudra prouver le contraire, de le faire, il ou elle éclairera ma lanterne sur ce que je n’ai pu trouver.

C’est grâce à la collaboration bienveillante de bons amis, de précieux collaborateurs, tel : le notaire Aimé Demers, qui m’a prêté un livre sur l’histoire de Saint-Romuald, écrit par son oncle, l’abbé Benjamin Demers, en 1906 ; à madame Olivette Roy, de Québec, une bien charmante personne, amie de ma mère et nièce des grands historiens de la province, MM J.Edmond et Pierre-Georges Roy, qui m’a laissée puiser dans ses trésors littéraires ; au notaire Georges Laflamme, qui possédait la généalogie des Laflamme ; aux bibliothécaires de Saint-Romuald, qui m’ont patiemment fait des photocopies et qui m’ont conseillée sur des choix de livres ; à monseigneur Charles-Eugène Parent, cousin de maman, qui m’a aidée pour la généalogie des Caron et des Lavoie;  enfin à toute cette parenté qui m’a donné les renseignements nécessaires à mon " œuvre "…

On me pardonnera une distribution assez libérale des renseignements, l’important étant d’avoir les faits.

Commençons par l’histoire de la Seigneurie de Lauzon qui était située en face de la capitale.

Elle était bordée par un rivage admirablement adapté pour les fins du commerce de bois d’exportation et creusé comme il était, avec des anses spacieuses et de facile accès, partageait avec Québec, la bonne fortune qu’apportent les hasards de la guerre. (extrait S.de L.- J.E.Roy).

Le territoire d’Etchemin " entre les deux rives " devait avoir sa bonne part du gateau, et avec le temps, devait connaître une activité que la seule culture de la terre n’aurait jamais pu lui donner.

C’était en 1802.

Henry Cadwell , alors Seigneur de Lauzon, n’était pas homme à laisser dormir les immenses ressources qu’il possédait dans les forêts de sa seigneurie.

Aussi, en 1804, on le voit donner des ordres pour abattre des grandes quantités de chênes sur les bords de la rivière Etchemin.

Au coté de ses moulins à farine, situés où est actuellement la communauté des Frères de l’Instruction Chrétienne, terrain qu’on appelle communément " la pointe ", il va installer des scieries perfectionnées et s’emparer de tous les terrains, de toutes les grèves, de tous les abords de rivières. (Sous le régime féodal, le Seigneur avait le droit de reprendre du censitaire, moyennant compensation, tous les terrains qu’il avait concédés). Cadwell usa abondamment de ce privilège.

C’est à l’embouchure de l’Etchemin qu’il avait résolu de fixer le centre de ses opérations, et il commença de suite, sans compter, à reprendre des habitants, toutes les pièces de terres qui lui semblèrent utiles. En 1806, il était déjà en possession de tous les ilôts qui gisent à l’entrée de l’ Etchemin et de la plus grande partie des terrains qui bordent cette rivière, près du fleuve St-Laurent.

Les propriétaires du bas, coté ouest de la rivière, ne perdirent que leurs grèves et leurs ilots jusqu’au bord du " rigolet " coulant à quelques pieds du Chemin du Roy.

La grand-mère de l’abbé Demers avait raconté qu’au jour de son mariage, en 1803, il n’y avait à Etchemin que : cinq maisons en pierres ; les autres étaient bâties pièces-sur-pièces, c’est–à-dire, avec des troncs d’arbres d’épinettes équarries, posés les uns sur les autres, avec un toit pointu à la façon normande, recouvert de bardeaux. (Notre maison est ainsi bâtie, mais l'absence de documents rend la tâche difficile quant à sa naissance).

En 1822, le 7 février, Sir John Cadwell, grand Seigneur de Lauzon, obtint des lettres patentes de la Couronne afin de permettre de se mettre en règle avec ses censitaires et il nomma ses agents : Pierre Lambert, arpenteur, et Félix Têtu, responsable de la confection d’un papier terrier, lequel fut fait en trois parties, livrées en 1824, 1826, 1827.

Le Seigneur de Lauzon était receveur-général du Bas-Canada, mais il se trouve qu’il frauda le gouvernement, en utilisant l’argent perçu à des fins personnelles.

Pris entre l’écorce et l’arbre, (c’est le cas de le dire…) d e peur de perdre sa seigneurie, il vendit à sa fille Ann, en 1828, toute cette belle pièce de terre qui s’étend depuis l’embouchure de la rivière Etchemin, jusqu’en plein centre de Saint-Romuald. Il loue en 1828, à son beau-frère, John Davidson, pour 10 ans, les moulins de la seigneurie avec dépendances, chemins, magasins, boulangerie, quais, avenues, et le droit des eaux qui font tourner le moulin. (extrait de la S.de L.)

Le Seigneur de Lauzon régla que la route ou chemin de grève serait élargi jusqu’à 18 pieds, entre les dits bâtiments et enclos et qu’il serait tenu de 20 pieds de large, ne se trouvant aucune nécessité pour des fossés.

Ainsi donc, ce chemin si tortueux, si étroit, qui longe le fleuve et que tout voyageur doit parcourir pour se rendre n’importe où sur la rive sud et que l’on appelle, aujourd’hui : rue Commerciale, ce ne fut pas à la faute du Seigneur de Cadwell qu’il faut l’attribuer, mais à l’habitant,. toujours revêche, de peur de perdre quelques pouces d’un terrain sans valeur et dont il n’était même pas le maître.

John Cadwell résolut de faire fonctionner les moulins à pleine capacité pour ramasser les fonds nécessaires au remboursement. Il engagea alors Patrick Shaughnessy, un écossait bien honorable, pour travailler à ses moulins,

M. Shaughnessy se bâtit une bonne maison, en bordure du chemin du Roy (maison habitée aujourd’hui, en 1975, par André Lemelin, fils de Paul, située au 1139 rue Commerciale), elle date de 1830 ou à peu près.

Il érigea sur le coté sud du petit étang, une rangée de maisons destinées à recevoir les familles irlandaises ; c’est ce que les canadiens-français appelaient " le faubourg à Paddy ". Mlle Berthe Toussaint, qui a demeuré dans notre maison, de 1894 à 1935, raconte qu’elle a vu flamber cette grande rangée de maisons, qui s’étendait à partir du magasin Olivier, soit au 1155 rue Commerciale, jusque chez les demoiselles Lambert, 1185-87-89 Commerciale.

Durant des années, quelques maisons à deux logements s’élevèrent du coté sud du chemin du Roy, tout près de la demeure de Pat Shaughnessy, pour y loger les familles dont le père travaillait aux moulins Caldwell.

La nôtre serait de ce groupe.

L’Eglise de Saint-Romuald a été bâtie en 1854 sur un promontoire magnifique.