Un alligator dans mon sac à main

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Une des dernières photos qu'on a pu prendre - à mains nues -

Il mesurait à ce moment, en 1962, environ 55 centimêtres. Par

la suite, il a fallu le manipuler avec des gros gants, et encore,

il n'écoutait pas beaucoup ! Ça ne s'apprivoise pas du tout !.

( Note de l'auteur: Reportons-nous en 1960, alors que, comme jeune journaliste, je faisais, à Miami, un reportage à l'école de formation des hôtesses de l' air de la compagnie Eastern Air Lines).

Il y avait près de l’établissement hôtelier où j’ étais reçue par Eastern Air Lines, quelques boutiques de touristes où on vendait les souvenirs habituels, cependant, dans la vitrine d’un de ces petits commerces sympathiques, quelque chose me fascinait: un grand bassin dans lequel pataugeaient des petites tortues à peine grosses comme des piastres rondes, et surtout des bébés-alligators d’environ 6 pouces de long (15 cm)

Après quelques hésitations, j’ai décidé de prendre une chance et d’essayer de rapporter chez nous, un de ces petits alligators. Juste avant mon départ,j’en ai acheté un pour la modique somme de 2.50$ et je l’ai mis dans le fond de mon sac à main, de la dimension d’une trousse de médecin pour les visites à domicile. Le montant était si peu élevé que je pouvais bien me permettre de tenter de le rapporter à la maison, à tître d’expérience.

Aux douanes, rien n’y a paru, et lorsque j’ai mis le pied dans la maison de mes parents, il était bien vivant. En vitesse, nous avons sorti un aquarium qui dormait quelque part au sous-sol, nous avons déposé des cailloux et des coquillages dans une couple de pouces d’eau fraiche, et l’alligator a été installé dans sa nouvelle demeure nordique.

Comme nourriture, le vendeur m’avait recommandé de lui donner de la viande rouge seulement. A l’air sceptique que cet homme avait, je suis certaine qu’il était convaincu que ce caïman (c’était son vrai nom) ne résisterait pas au voyage. Erreur!!!

Très vite, il a fallu le changer d’ habitacle, il grossissait rapidement et ne se laissait pas approcher facilement.

A deux ans, il avait deux pieds (60 cm) et n’était plus confortable dans sa maison de verre. Papa a donc décidé de l’installer dans son magasin de chaussures situé au premier étage de la résidence familiale. Avec ses contacts, il a fait faire au chantier naval de la Davie Shipbuilding, deux bassins en acier inoxydable qu’il a placés dans un comptoir vitré, bien en évidence. La bête venait d’emménager dans ¨des locaux plus spacieux¨.

Evidemment, cette bibitte sauvage était un point d’attraction au commerce de papa, et les enfants se collaient souvent le nez contre la vitre pour la voir de plus près. J’ai même fait l’objet d’un reportage dans un magasine d’information, à ce moment-là.

Mais, il était de plus en plus dangereux - jamais nous n’avons pu l’apprivoiser - on le nourrissait au bout d’un bâton et lorsqu’on devait l’approcher, il fallait mettre des gants de cuir. Il était toujours prêt à ouvrir sa grande gueule sur quiconque arrivait près de lui Je me souviens d’un jour où il avait réussi à s’évader. Il était allé se cacher derrière des boîtes de chaussures et ce n’avait pas été une sinécure que d’essayer de le saisir pour le retourner dans sa ¨maison¨. Je m’étais même fait mordre un pouce et ses crocs avaient transpercés l’ ongle...... ayoe!.

Nous l’avons gardé 4 ans! un beau jour de printemps,1964, il semblait malade,ses yeux se couvraient d’ une substance purulente et nous commencions à avoir de la difficulté à le manoeuvrer lorsqu’ absolument nécessaire. Il faut dire qu’il était rendu, à ce moment-là, à plus de 48 pouces (120 cm) et que ça pouvait représenter un danger si jamais il se sauvait encore.

Comme je me mariais dans les jours qui suivaient, je ne nourrissais pas du tout l’idée de l’amener avec moi,...... nous avons donc convenu de l’ offrir à l’Aquarium de Québec qui - en l’acceptant, nous rendait un grand service.

Au cours de cet été-là , je suis allée le voir dans son pensionnat - croyez-le ou non, je ne pouvais même pas savoir lequel c’était parmi les 4 ou cinq bêtes qui lézardaient dans leur cage.

Je n’y suis jamais retournée pour m’informer de ce qu’il en était advenu, cependant, j’ai eu toute une frousse, l’an dernier, lorsque le Gouvernement du Québec a annoncé qu’il avait l’intention de fermer l’Aquarium.

Je me suis dit - Pourvu qu’il ne me le retourne pas!..