Avec enthousiasme je me présente devant la boîte aux lettres, rempli de l'espoir d'y trouver peut-être, venant de toi et  écrites pour moi, des phrases pleines de tes idées, des gestes entre des lignes faites de mots que tu auras inventés tout simplement pour le plaisir de me les donner et pouvoir avec eux, dans ta langue me faire connaître les choses et les gens qui sont chers à ton coeur... Les saisons, le vent, la neige, les nuages avec leur tristesse et ce printemps prochain que tu sens déjà venir.

Des mots tout choisis pour parler sagesse, de renaissance d'existence, d'affection et de plus que beaucoup de gestes muets mais remplis de sincérité. Plume au vent, tu les as étendus sur la peau d'un ancien bouleau que les hommes ont déroulé pour le faire devenir feuille de papier et pouvoir y laisser glisser  tout plein d'idées pour faire voir et sentir à quelqu'un d'autre, ses fleurs, ses oiseaux et ses émotions, pour permettre aussi de partager son amitié, son arc-en-ciel et le bleu de son ciel.

Papier où mettre toutes ces phrases qu'il fait à la fois, mal et bon, de dire, mais qu'au fond de l'âme, on craint... Sans doute a-t-on peur de leur grandeur et se dit-on aussi qu'il vaut peut-être mieux ne pas les prononcer, dans la crainte qu'à la fin on y prenne goût et qu'on en vienne à les pleurer ensuite, si jamais ils cessaient d'être vrais et ne devenaient plus que de vulgaires bouts de papier, que l'on veuille déchirer, ou que l'on doive effacer et ne plus vouloir presser sur son coeur pour y puiser une petite part de bonheur.

Ecrivez-moi donc des silences ou des soupirs, si les mots ne semblent pas vouloir venir. Je les comprendrai sans difficulté car en les lisant je saurai que c'est pour moi que vous les aurez enfantés...

Malherbe DesChamps