Chirac

L'entrée en campagne de M. Chirac

Comment peut-on être chiraquien ?

La droite recomposée. Mais comment?

 

Le RPR mobilisé derrière Jacques Chirac
Le 25e anniversaire du RPR, hier, à Paris, a rassemblé des milliers de militants Dans un message, Jacques Chirac a appelé la droite à l'union dans la perspective des batailles électorales de 2002

Réunis Porte de Versailles, là-même où Jacques Chirac fonda le RPR en décembre 1976, plusieurs milliers de militants, encouragés par leurs dirigeants, ont scandé le nom de leur champion pour la prochaine élection présidentielle.

Et si, pour l'heure, le chef de l'Etat ne dit mot en public de ses intentions, il ne surprendra aucun des quatre-vingt mille adhérents revendiqués par le RPR lorsqu'il se déclarera.

Hier, dans un message lu par la présidente du parti, Michèle Alliot-Marie, Jacques Chirac a du reste sonné la mobilisation de ses troupes et en a appelé à l'union de l'opposition, officialisant du même coup sa stratégie en vue d'une réélection, au soir du 5 mai prochain.

« Ces combats exigent l'union, l'union entre vous d'abord (...), l'union au sein de l'opposition ensuite », a-t-il écrit aux quelque neuf mille militants réunis Porte de Versailles. Pour Jacques Chirac, « Le débat démocratique est une richesse mais les divisions, les querelles au sein d'une même famille sont une faiblesse, une faute et un danger pour l'avenir. »

Son épouse, Bernadette, est venue à la fin du déjeuner découper le gâteau d'anniversaire. Elle a été ovationnée par les militants.

Porte de Versailles, Jacques Chirac était omniprésent. Dans le montage vidéo préparé par les organisateurs - toutes les grandes dates, victoires ou échecs, émaillant l'existence du RPR lui sont liées - mais aussi dans les esprits et les discours.

De Michèle Alliot-Marie l'interpellant - « Nous avons besoin de vous, Jacques Chirac » - à Alain Juppé, pour lequel « il n'y a qu'un homme qui ait la stature internationale pour faire respecter la voix de la France en Europe et dans le monde », et à Nicolas Sarkozy, pour lequel « le RPR n'a pas fini d'être utile à la France et à notre candidat Jacques Chirac », les ténors du RPR ont relayé les « Chirac président ! » scandés par la salle.

« Fiançailles » à droite
Tous ont également accumulé les critiques sur le bilan de Lionel Jospin.

Sécurité, retraites, pouvoir d'achat, enseignement, fiscalité, « usine à gaz » des 35 heures : tous les orateurs ont martelé ce que la droite considère comme autant d'échecs pour la gauche plurielle.

La présidente du RPR a brocardé au passage les engagements financiers pris par le gouvernement face aux divers mouvements sociaux de l'automne. « M. Jospin a inventé un nouveau titre de paiement, la carte visa spéciale élections, avec droit de tirage illimité et date d'expiration le soir de l'élection présidentielle », a-t-elle ironisé.

Avant le « temps de la mobilisation », quelque cinq mille cadres du RPR ont participé dans la matinée à des échanges sur le projet, teintés de doutes sur l'avenir de la formation gaulliste.

Un quart de siècle après sa fondation, le Rassemblement pour la République s'interroge en effet sur son avenir dans la perspective de la création d'un grand « parti présidentiel ».

« Cette idée de la mort du RPR, en vingt-cinq ans, ce doit bien être la douzième ou la treizième fois qu'on en parle. Elle est toujours pour le lendemain ou la semaine suivante. Eh bien ! nous sommes toujours là, et nous y serons encore longtemps », a affirmé Michèle Alliot-Marie.

Mais la présidente du RPR, que l'on disait réticente à toute fusion des partis de droite, a, dans le même temps, reconnu l'importance de l'union de l'opposition et évoqué l'organisation de « fiançailles ».

Pour les partisans de l'Union en mouvement (UEM), « espace politique » voulu par Jacques Chirac et piloté par Alain Juppé et Jérôme Monod, la droite devra de toute façon se doter d'un grand parti, comme c'est le cas en Espagne, autour de José Maria Aznar, ou en Allemagne, autour de la CDU.

Lundi 17 Decembre 2001
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Chirac : « Restaurer l'autorité de l'Etat »
Jacques Chirac a affirmé hier que « la France va devoir restaurer l'autorité de l'Etat », dans un discours devant le 84e Congrès de l'Association des maires de France (AMF) à la Porte de Versailles.

« Les Français attendent de l'Etat qu'il exerce pleinement sa fonction d'autorité et de régulation. Ils craignent par-dessus tout les risques d'ankylose qu'induisent la lourdeur des procédures, la trop grande inertie des moyens et la lenteur avec laquelle l'Etat assimile les changements dès qu'ils concernent sa propre organisation », a déclaré le chef de l'Etat.

« Pour répondre aux exigences des Français, notamment en matière de sécurité, d'environnement, de solidarité, de logement, d'éducation, d'emploi, pour ouvrir de nouvelles capacités d'action à chacun de nos concitoyens, pour améliorer le service de tous, la France va devoir restaurer l'autorité de l'Etat, le renforcer dans ses missions essentielles », a dit Jacques Chirac.

Pour cela, elle devra « le réformer et redistribuer les responsabilités entre les collectivités de la République », a-t-il dit. « Une nouvelle architecture des pouvoirs devra être dessinée pour les rapprocher des citoyens » en application « du principe de subsidiarité » qui « implique que les décisions soient prises au niveau le plus favorable à l'efficacité de leur mise en uvre ».

Mercredi 21 Novembre 2001
Tous droits réservés - © Nice-Matin
Chirac à l'abri. Pour l'instant
BERNARD DELATTRE - Mis en ligne le 10/10/2001

La Cour de Cassation arrête les juges aux portes de l'Élysée, mais pas ailleurs

EPA

CORRESPONDANT PERMANENT À PARIS

La plus haute juridiction française, la Cour de Cassation, a enfin réglé mercredi le problème du statut pénal du Président de la République : un sujet qui, depuis des années, empoisonnait la vie politique, fâchait les constitutionnalistes et divisait jusqu'aux plus hauts magistrats du pays.

Jusqu'à mercredi, ce statut était très flou. En effet, l'article 68 de la Constitution se borne à stipuler que le chef de l'État n'est responsable de ses actes que devant la Haute Cour (composée de parlementaires) en cas de haute trahison. Mais le Président peut-il être entendu comme témoin par un juge ? Est-il irresponsable aussi pour des faits sans rapports ou antérieurs à ses fonctions ? Bonnes questions, a fortiori quand le locataire de l'Élysée s'appelle Jacques Chirac, ex-maire de Paris et ex-président du RPR dont le passé intéresse certains magistrats

Jusqu'à présent, pour répondre à ces questions, les juristes n'avaient sous la main qu'un avis du Conseil constitutionnel de janvier 1999 conférant de facto une immunité pénale au chef de l'État. Un avis controversé : pris sous la présidence de Roland Dumas, il a été assimilé, à tort ou à raison, à un aimable renvoi d'ascenseur de ce dernier à un Jacques Chirac qui, à l'époque, l'avait défendu face à ses accusateurs. L'arrêt de la Cour de Cassation sur le statut du chef de l'État ­ historique : jamais sous la Ve République, la Cour ne s'était prononcée sur cette question ­ était donc extrêmement attendu.

Et il a subtilement fait la part des choses. Il en ressort que, pendant son mandat, le chef de l'État ne peut en aucun cas être mis en cause par la justice, y compris pour des actes antérieurs ou détachables de sa fonction, ce qui interdit sa mise en examen et son audition en tant que témoin assisté d'un avocat. Selon la Cour de Cassation, une telle mise en cause enfreindrait les principes constitutionnels de continuité de l'État et de séparation des pouvoirs. Le Président "ne pourrait plus exercer sereinement et librement sa fonction s'il était à la merci du harcèlement judiciaire de ses adversaires", dixit l'avocat général. Dès lors, tout au plus le chef de l'État peut-il être entendu comme simple témoin, pour autant qu'il y consente et que les magistrats y mettent les formes (pas de mesures de contrainte, pas de convocation formulée en des termes accusatoires, etc.).

L'arrêt de la Cour de Cassation va évidemment ramener un peu de sérénité dans la maison Chirac. Désormais, le Président ne doit plus craindre de trouver des convocations judiciaires dans sa boîte aux lettres. Surtout, cette décision convaincra le locataire de l'Élysée, si besoin en était, de se représenter aux élections présidentielles du printemps prochain.

UN DES MIEUX PROTÉGÉS AU MONDE

En effet, dans son arrêt, la Cour précise que la prescription est suspendue pendant le mandat présidentiel. Lorsqu'il quittera son poste, en 2002 ou en 2007, M. Chirac pourrait donc devoir répondre de son passé, à supposer que des procédures aussi tardives soient compatibles avec le droit de chaque justiciable à être jugé dans un délai raisonnable. La Cour de Cassation ayant restreint la compétence présidentielle de la Haute Cour à la seule haute trahison ­ une notion non définie dans la Constitution mais qui n'englobe tout de même pas la corruption et les détournements de fonds ­, ce serait même la justice "ordinaire" qui serait compétente pour juger les faits reprochés à M. Chirac.

Dans l'immédiat, le Président français est depuis mercredi un des chefs d'État les mieux protégés au monde sur le plan institutionnel. Et les choses ne sont pas prêtes de changer. Certes, un projet de révision constitutionnelle créant un statut présidentiel moins confortable (rendant possible la mise en cause du chef de l'État pour des délits antérieurs ou détachés de ses fonctions) a été concocté dans la majorité. Il a même été approuvé par les députés. Mais, on le verra encore ces prochaines semaines, il ne franchira pas le cap du Sénat, dominé par la droite.

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Chirac n'avait pas le choix
PAR BERNARD DELATTRE - Mis en ligne le 11/02/2002

Le Président ne pouvait laisser les choses continuer à se dégrader mais devait reprendre la main, au risque de donner l'impression de succomber à l'affolement

ANALYSE

CORRESPONDANT PERMANENT À PARIS

Comme en 1995 - il avait alors annoncé sa candidature dans un quotidien régional -, Jacques Chirac a choisi lundi de dévoiler ses intentions présidentielles depuis la province. Son choix de la ville d'Avignon n'a rien d'innocent, dans la mesure où cette cité est emblématique de ce qui se veut être une `nouvelle chiraquie´ : gérée par la `génération terrain´, féminine, concrète et proche de `la France d'en-bas´, par opposition à l'Hexagone technocratique des cabinets parisiens. Le moment choisi pour officialiser cette candidature a-t-il, tout autant, été prémédité ou a-t-il été accéléré par les événements? On ne le saura sans doute jamais, les deux versions circulant évidemment, selon que leur origine soit de droite ou de gauche.

C'est bien sûr un des inconvénients auxquels s'expose le candidat Chirac en se dévoilant de la sorte. Ses adversaires ont désormais beau jeu de l'accuser d'agir exclusivement sous la pression. Une pression triple: celle des sondages (qui devenaient de plus en plus mauvais pour l'Elysée), des médias (qui faisaient leurs choux gras de la méforme chiraquienne) et des `affaires´ (qui monopolisaient l'actualité et imposaient à tout prix une diversion). Bref, en partant au front aussi rapidement alors que de fortes présomptions indiquaient tout de même qu'à l'origine, la mi-mars était privilégiée pour son départ en campagne, le locataire de l'Elysée court le risque d'accréditer une image d'improvisation et d'affolement. Il perd aussi l'avantage lié à l'aura accolée au statut de chef d'Etat. Il devra en outre gérer au quotidien une schizophrénie désormais officielle entre ses deux casquettes de chef de l'Etat et de candidat, ce qui pourrait susciter des accusations de confusion de rôle et/ou d'intérêts. Enfin, en se lançant aussi tôt, il court évidemment le risque d'arriver essoufflé.

Si Jacques Chirac a néanmoins choisi la tactique de l'attaque, c'est que celle-ci comporte nombre d'avantages. D'abord, ce faisant, le poulain du RPR contribue à calmer l'aigreur des Français frustrés par la non-campagne et, dans la foulée, peut espérer peaufiner son profil d'homme politique souple et à l'écoute de l'opinion - loin de la raideur distante prêtée à un Jospin. Ensuite, son grand retour dans l'arène politique ne permettra plus à ses rivaux de continuer à monopoliser le terrain. Le débat politique que la candidature de Jacques Chirac permet désormais va également, sinon occulter, du moins rendre moins assourdissante l'actualité moins reluisante des `affaires´. Accessoirement, le Président-candidat étant tenu à un devoir de réserve moindre que le Président `tout court´, l'intéressé pourra plus facilement de défendre contre d'éventuelles et `abracadabrantesques´ accusations à venir - contenues dans le prochain livre du juge Halphen par exemple.

DU PAIN SUR LA PLANCHE

Le même Président-candidat pourra encore gérer dorénavant sa campagne sans craindre les faux pas qui l'auraient immanquablement émaillée si celle-ci avait continué à être non-déclarée (voir le récent `couac´ autour des réunions de notables de la droite à l'Elysée). Enfin, en rebondissant, Chirac reprend la main et met son rival Jospin sous pression - quoi que ce dernier en dise - de lui-même accélérer le tempo.

Sur le plan de la stratégie, donc, le pari avignonnais peut parfaitement se défendre. Il était d'autant plus impératif que - entre `actualité des affaires´ et engagements internationaux - le calendrier des semaines à venir offrait finalement à Chirac peu d'autres `fenêtres de tir´ à même d'accueillir un déclenchement des hostilités.

Surtout, il était d'autant moins évitable que, si l'on en croit les sondages, il y a bel et bien le feu à la `maison Chirac´. Un feu à deux étages. D'une part, l'intéressé y plafonne à moins de 25 pc des intentions de vote, ce qui est très peu pour un Président sortant, a fortiori qu'aux précédentes élections, la cote de Chirac a toujours été surestimée de 3 points environ par les sondeurs. D'autre part, ses `collègues´ de droite Madelin, Bayrou et autres Pasqua tardent à décoller, ce qui (outre de traditionnelles difficultés avec l'extrême droite) augure de maigres reports de voix au second tour et rend assez lointaine la barre fatidique des 50 pc. Chirac a donc du pain sur la planche.

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© La Libre Belgique 2002