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C'est un échec pour Le Pen

La déclaration de Jean-Marie Le Pen



C'est un échec pour Le Pen
BERNARD DELATTRE - Mis en ligne le 05/05/2002

Le Pen n'est parvenu ni à rallier à sa cause d'autres électorats protestataires, ni à séduire les abstentionnistes d'extrême droite, ni à dévier les électeurs ayant voté pour un candidat démocratique au premier tour. Mais son étiage électoral reste impressionnant

CORRESPONDANT PERMANENT À PARIS

C'est un échec pour Le Pen. Après le premier tour, le candidat du FN avait estimé qu'un résultat sous la barre des 30 pc constituerait une défaite. Quelques jours plus tard, à mesure que s'amplifiait la mobilisation contre lui, il a revu de 5 pc ses ambitions à la baisse. Et dimanche soir, quelques minutes avant que tombent les premières estimations, Jany Le Pen déclarait qu'elle se contenterait de 17 à 18 pc. Finalement, selon les résultats partiels circulant vers 22 heures, Le Pen a recueilli quelque 18,7 pc des voix. Avec entre 5,5 et 5,9 millions suffrages, selon les estimations, M. Le Pen ne fait pas beaucoup mieux qu'additionner son score du premier tour (4,8 millions de suffrages, 16,8 pc) et celui de son rival du (MNR) Bruno Mégret (665.000 voix, 2,3 pc).

Si elle a confirmé son assise, l'extrême droite n'est donc parvenue ni à rallier à sa cause d'autres électorats protestataires (l'extrême gauche, les chasseurs, etc.), ni à séduire les quelque 43 pc des sympathisants frontistes (2 millions de votants environ) qui, d'après les sondages, s'étaient abstenus le 21 avril dernier - doutant sans doute des chances des candidats de l'extrême droite -, ni à dévier des électeurs qui, le 21, avaient voté en faveur d'un candidat démocratique.

C'est un motif de désillusion pour le leader du FN. Une des principales raisons de cet échec - outre la mobilisation quasi-unanime contre lui - réside sans doute dans le positionnement adopté par M. Le Pen entre les deux tours. Alors que, avant le 21 avril, il avait pris un ton plus populiste qu'extrémiste, après le premier tour, il est revenu à ses fondamentaux. On peut notamment imaginer que ses déclarations incendiaires sur les camps et les trains de clandestins ont joué en sa défaveur.

Cela dit, l'échec de Le Pen doit être relativisé. Comme l'intéressé n'a pas manqué de le souligner dès hier soir, avec un étiage électoral tournant autour de 20 pc, l'extrême droite reste tout de même une des plus grandes familles politiques du pays. En outre, la comparaison avec les précédents résultats électoraux de Le Pen témoigne de la progression lente mais constante de son audience. Pour mémoire, avant son record du 21 avril (4,8 millions de voix, 16,8 pc), le FN avait séduit 4,5 millions d'électeurs en 1995 (15 pc) et 4,4 millions en 1988 (14,8 pc). En 15 ans, il a donc gagné un bon million de voix.

Selon de premières estimations, le taux d'abstention devrait osciller autour des 18 pc. Cette estimation est conforme aux observations faites en milieu d'après-midi, qui établissaient la participation à 67,6 pc, soit un bond de dix points par rapport à la participation enregistrée au même moment au premier tour (58,5 pc).

UNE MOINDRE ABSTENTION

Ce taux d'abstention limité à quelque 18 pc est beaucoup moins élevé que celui du premier tour (28,4 pc). Une grosse partie des 11,6 millions de Français qui s'étaient abstenus le 21 avril ont donc été voter dimanche. C'est un phénomène traditionnel: toutes les élections présidentielles tenues sous la Vè République (sauf celle de 1965), ont connu un second tour plus couru que le premier. Cette fois, évidemment, le sursaut civique prend un relief particulier, résultat de l'appel de la plupart des formations de l'échiquier politique à faire barrage au candidat de l'extrême droite en votant pour Jacques Chirac.

Le bond de la participation a été défavorable à Le Pen pour deux raisons. Pas sa nature même, d'abord: le nombre de votants étant supérieur, le score du FN a naturellement été dilué. Par la ventilation de cette plus forte participation, ensuite. En effet, elle s'est moins fait sentir dans les zones rurales que dans les villes (Paris, Marseille, Toulouse, Lille, Valenciennes, etc.) qui avaient été le cadre de manifestations anti-lepénistes et dans les régions où le candidat frontiste avait réalisé un bon score le 21 avril (Vaucluse, Var, etc.).

Il ne faudrait pas en déduire, pour autant, que l'on a battu cette année des records de mobilisation pour un second tour. Certes, l'abstention est moindre que celle enregistrée lors du second tour de la présidentielle de 1995 (20,3 pc). Mais elle reste tout de même beaucoup plus élevée que celles ayant caractérisé les seconds tours des élections de 1974 (12,7 pc), 1981 (14,1 pc) et 1988 (15,7 pc) : autant de scrutins dont l'enjeu avait pourtant été nettement moins dramatisé. A noter enfin que le nombre de bulletins blancs ou nuls devrait s'établir autour des 6 pc. C'est près de deux fois plus qu'au premier tour (3,4 pc). Cela correspond, globalement, à l'étiage électoral d'Arlette Laguiller et de Daniel Gluckstein, les deux leaders trotskistes qui avaient refusé d'appeler leurs sympathisants à voter Chirac, leur avaient recommandé de voter blanc ou nul, et ont donc été suivis dans leur consigne.

© La Libre Belgique 2002

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La déclaration de Jean-Marie Le Pen
Mis en ligne le 05/05/2002

Voici l'intégralité de la première réaction de Jean-Marie Le Pen, candidat du Front national battu dimanche soir au second tour de l'élection présidentielle française par Jacques Chirac :

EPA

«C'est une défaite cuisante de l'espérance française. Cela étant, nous sommes au-dessus de notre chiffre du premier tour. La victoire de Jacques Chirac est une victoire équivoque acquise à la méthode soviétique avec l'ensemble de toutes les forces sociales, politiques, économiques, médiatiques, etc.

Je voudrais simplement dire à Jacques Chirac ce soir que la roche tarpéienne est près du Capitole (NDLR : une grande victoire peut être suivie d'un échec). Je me félicite en tout cas que le bloc national soit resté solide et il est prêt comme d'habitude au service du pays.

Nous regardons l'avenir avec beaucoup de confiance et nous nous retrouverons aux élections législatives car dans les 81% de Jacques Chirac combien y a-t-il de gens qui voteront RPR aux élections législatives? C'est un autre problème.

L'ensemble des moyens audiovisuels, radiophoniques, de presse ou d'influence sont au service de la même cause, d'un grand honnête homme que tout le monde appelait Supermenteur il y a peu de temps. Mais tout cela va se dissiper dans très peu de temps. J'ai de la patience, je n'aurai pas à attendre longtemps avant de voir se déchirer les alliés de cette coalition morbide.

(Le score du Front national) est six fois le score du parti communiste, alors je me sens assez solide ce soir. J'ai l'habitude des désillusions, par conséquent je considère que c'est une victoire des nationaux. Ils ont bien tenu le coup malgré les menaces, les violences, les injures, les insultes, les tombereaux de purin qui ont été déversés sur eux pendant quinze jours. Je leur dis bravo et à demain ». (AFP)

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