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ROYALISME, VERS UN REVISIONNISME POLITIQUE ?
 


Les événements survenus à Saint-Denis ont marqué des clivages qui, pour ne se recouper complètement ni dans les personnes ni dans les motifs qui les firent naître, présentent des similitudes remarquables. 

Lors des manifestations devant la basilique pour exiger que cesse l'occupation de celle-ci par des immigrés clandestins réunis en un «collectif des sans papiers» nous avons entendu certaines critiques : aller manifester cela ne se faisait pas, exposait ceux qui le feraient à se faire ficher et même servait peut-être en sous-main des intérêts qui n'étaient pas les nôtres. pire, ce ne serait pas de la vraie politique (la vraie était faite dans quelques salons ou universités d'été) ! 

Lors de l'attentat pâtissier contre le père Berger - entartage qui n'est toujours pas revendiqué à ce jour - on entendit dire que cela desservait la cause royaliste, que de telles pitreries, au choix, n'avaient aucun sens ou en avaient un trop clair. 

Dans les deux cas, il faut remarquer que ce qui est en cause, c'est une manière de faire de la politique qui n'est pas celle policée à laquelle les grandes organisations royalistes nous ont habitués depuis des décennies. Toutes sans exception respectent un certain nombre de règles tacites entre les partis politiques républicains : par exemple une manifestation doit être déclarée, on ne s'en prend pas aux personnes, et l'on préférera toujours écrire un beau texte à se rendre soi-même physiquement face à d'autres personnes physiques. D'une manière générale il faut savoir rester en deçà d'un point où l'affrontement se fait pour de rire, ne surtout pas mettre en cause les intérêts véritables de l'adversaire, et ne pas déborder d'un terrain que l'on appelle le « débat d'idées » et qui présente toutes les garanties d'anodinerie possibles : ce qu'on y dit - et beaucoup plus rarement ce qu'on y fait - n'a pas vraiment d'importance, et est bien compris comme cela par «l'adversaire» (en anglais l'on dirait plutôt partner dans ce cas). Il répond de même en sachant rester dans les limites d'une bonne éducation politique. Pour ces gens là, que ce soit filouterie ou imprégnation involontaire, on fait de la politique comme on joue au cricket sur une pelouse bien rase et bien drue : avec des règles. 

De fait le quasi-monopole des grandes organisations royalistes depuis plusieurs décennies a lentement anesthésié tout ce qui ne rentre pas dans ce cadre.  Si bien que l'on peine à trouver ailleurs que dans des discours d'ailleurs inaudibles des différences éclatantes entre la manière de faire de la politique de ces organisations royalistes et celle des partis républicains. Comme si singer les détenteurs du pouvoir pouvait donner du pouvoir, comme si la réalité du pouvoir n'était pas dans les mains des partis républicains « de gouvernement », face auxquels les autres mouvements tiennent leur rôle de partis qui n'ont aucune chance de participer au gouvernement ou de l'infléchir d'une autre manière qu'anecdotique. Et cette manière de faire, puisqu'elle a été longtemps prônée comme la seule « responsable » ou « légitime » s'est imposée dans bien des esprits. 

Face à cette situation, certains refusent ces règles, décident d'agir autrement, tiennent en un mot de rôle de sales galopins farceurs et parfois cruels : ils vont déployer des drapeaux devant une basilique occupée en se disant qu'un peu de publicité pour sortir de la naphtaline vaut bien quelques risques, ou vont entarter un ecclésiastique indigne. 

Sont-ce seulement des galopineries sans importance, comme beaucoup ont intérêt à le faire croire pour ne pas perdre leur rang virtuel dans des cours irréelles, et comme d'autres sont tout prêts à le croire, souvent pénétrés d'une importance doctrinale d'emprunt ?

Autrement dit : font ils cela comme des têtes brûlées ou le font-ils en sachant pertinemment qu'ils brisent ainsi un tabou de la politique française en général et du royalisme en particulier ? 

Entendons-nous : les actions d'éclat ont toujours existé. Mais les revendiquer comme moyen privilégié, leur donner une autonomie qui les fait comprendre autrement qu'un simple défouloir à étudiants un peu turbulents, cela répond-il à une vision politique ? Et cette vision politique peut-elle revendiquer de concurrencer les pontifiants colloques ou sessions de formation d'où il ne sort rien (avec une constance qu'il faut d'ailleurs souligner et saluer) ? 

Refuser des règles tacites qui faussent le jeu au profit de ceux qui y participent et au détriment de ceux qui n'y participent pas, refuser les tabous sans vouloir prendre en compte ce que les bonnes âmes ont à en dire pour justifier leur existence, lorsque cela arrive à des historiographes, on parle alors de « révisionnisme historique ». C'est une démarche cohérente et efficace, tellement qu'on en interdit l'expression sous peine de prison ou d'amende au lieu de chercher à lui répondre par des arguments raisonnables. 

Cette même démarche dans la vie de la cité, on peut l'appeler parallèlement « révisionnisme politique ». Il n'y a pas de raison de croire à priori qu'elle est moins cohérente et moins efficace. 

Toussaint Glinglin pour C&R


 

 

 

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