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PORNO-GAUCHISME cet étrange "réseau Voltaire" Franck Herriot - Valeurs Actuelles n°3433 du 13 septembre 2002 |
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Joli coup de marketing ! En publiant l'Effroyable Imposture, ce best-seller qui prétend, entre autres rumeurs, qu'aucun avion ne s'est écrasé sur le Pentagone, le 11 septembre 2001, et qu'il s'agirait en réalité d'un complot ourdi par des militaires américains d'extrême-droite, Thierry Meyssan a réussi à sortir de la confidentialité le Réseau Voltaire qu'il préside depuis sa création, en 1994. Jusqu'alors cette officine n'attirait qu'épisodiquement l'attention de la presse. Ce fut le cas notamment en 1996 lorsque Thierry Meyssan et ses amis s'étaient mobilisés contre la venue du pape Jean-Paul II en France. Ils se feront encore remarquer en publiant la lettre de soutien de l'abbé Pierre à l'écrivain Roger Garaudy, mis en examen pour négation de crimes contre l'humanité. Mais en fait d'informations ou de révélations, la méthode consiste à amplifier des rumeurs ou à empiler des faits bien réels sur d'autres invérifiés ou. invérifiables. A l'origine, le Réseau Voltaire, qui revendique quelque cinq cents correspondants bénévoles dans les administrations et autres institutions internationales, s'était donné pour mission la "défense de la liberté et de la laïcité". A l'époque, les cibles privilégiées étaient l'extrême-droite, l 'Eglise en général et l'Opus Dei en particulier, sujet qui relève chez Thierry Meyssan de l'obsession. A croire que ses années passées chez les jésuites puis au séminaire d'Orléans l'ont entraîné à vouer une partie de son existence à chasser la calotte. Autre bête noire : le FN. Thierry Meyssan est à l'origine d'une commission d'enquête parlementaire sur le DPS, le service d'ordre du Front national, qui a valu au Réseau Voltaire un procès en diffamation : le FN a finalement été débouté par la cour d'appel de Paris en septembre 2001.
Qui trouve-t-on autour de Thierry Meyssan ? Des écologistes, comme Yves
Frémion et Jean-Luc Bennhamias, ancien directeur de campagne du candidat à
la présidentielle Noël Mamère, l'ancien dirigeant des radicaux de gauche
Jean-François Hory, le président du Mrap, Alain Calles, ou encore Christian
Terras, animateur du réseau chrétien contestataire Golias (lire page 29). La
"bande à Meyssan" a même bénéficié de quelques relais dans la police
grâce à
la présence de Jean-Louis Arajol, syndicaliste haut en couleur, ancien
secrétaire général du SGP-FO (Syndicat des gardiens de la paix et gradés
parisiens) jusqu'en 1999. A l'époque il avait rejoint le RPF de Charles
Pasqua qui l'avait investi à Paris lors d'une législative partielle. On ne peut pas reprocher au bailleur de fonds du Réseau Voltaire, en homme d'affaires avisé, de ne pas savoir défendre ses intérêts. Il l'a prouvé il y a une dizaine d'années lorsque Michel Charasse, alors ministre du budget de François Mitterrand, envisage de taxer les messageries du Minitel rose. Devant cette insupportable "tentative de retour à l'ordre moral", Michel Sitbon contre-attaque en créant dans un premier temps le Syndicat de la télématique avant de se lancer à l'assaut des hommes politiques de droite comme de gauche. « Après plusieurs échecs, j'ai enfin compris comment cela marchait, explique-t-il : au départ, il faut un groupe ou un réseau défendant un intérêt collectif. Puis, fort de ce réseau, on fait levier et l'on est reçu dans les ministères. » CQFD. Michel Sitbon dit s'être converti au lobbying le jour où il a entendu le président de la Commission supérieure des postes et des télécommunications rendre un avis identique à celui qu'il lui avait préconisé ! Le projet de Michel Charasse sera finalement enterré. Un petit voyage au sein du groupe Sitbon s'impose. Si le comparse de Thierry Meyssan a un goût prononcé pour la provocation, il a aussi le sens des affaires, bien qu'elles aient été un peu moins florissantes ces derniers temps. Deux sociétés exercent un rôle clé dans le groupe Sitbon, à commencer par le holding Agora International, où Michel Sitbon dispose d'un important compte courant correspondant à la somme qu'il a avancée à sa société : 10 millions de francs en 1998, ramenés à la fin 1999 à un peu plus de 6,8 millions. C'est la seconde société, la NSP, qui dégage la majeure partie du chiffre d'affaires (41 millions de francs en 2000) et des ressources du groupe. Elle permet de verser des salaires et/ou de faire remonter des bénéfices vers Agora International, et du même coup de rémunérer le compte courant de Michel Sitbon. Quelques "bizarreries" apparaissent si l'on se penche sur les comptes de la NSP. Exemple : en 1998, le PDG Michel Sitbon a trouvé le moyen de distribuer 4 859 000 francs de dividendes, soit dix fois le bénéfice net de l'année. Les dettes à la même époque s'élevaient à plus de 10 millions de francs pour des capitaux propres équivalents. Le Réseau Voltaire n'est pas le seul à bénéficier des conseils financiers de Michel Sitbon. Ce dernier est aussi trésorier du Circ (Collectif d'information et de recherche cannabique), qui prône la légalisation du cannabis, et membre de l'Observatoire des libertés publiques, une lettre qui entend recenser les abus de pouvoir commis par la police. Deux ouvrages, signés par le très à gauche Syndicat de la magistrature, et publiés par l'Esprit frappeur, ont ainsi récemment déclenché la colère des policiers et d'une majorité de magistrats. Le dernier en date, intitulé Vos papiers ! Que faire face à la police ? ridiculise les policiers représentés en couverture par une tête de cochon avec moustaches à la Hitler. Une plainte fut même déposée par l'ancien ministre de l'Intérieur Daniel Vaillant, et deux membres du Syndicat de la magistrature mis en examen pour diffamation envers la police. Dans la même veine, l'Esprit frappeur avait publié la Machine à punir, dénonçant la "prétendue" explosion de l'insécurité dans les banlieues qui n'aurait servi qu'à justifier la répression et les discours sécuritaires. C'est dans cette mouvance que l'on retrouve tous les collectifs anti-loi Perben.
Grâce aux bénéfices qu'elle dégage, la littérature porno vient au secours d'une autre littérature, gaucho-libertaire celle-là, plus confidentielle et d'une rentabilité incertaine. Cela va des analyses sur la guerre en
Yougoslavie à une histoire du mouvement zapatiste en passant par un
plaidoyer pour les sans-papiers et contre l'énergie nucléaire. Mais s'il est
une spécialité dans laquelle Michel Sitbon s'est taillé une solide
réputation, c'est bien dans la publication de livres consacrés aux drogues,
"pour rompre avec l'hystérie et le dogmatisme ambiants". Le catalogue
des
Editions du Lézard comprend une quarantaine de titres : Fumée clandestine,
Cannabis nouvelles du front, Les très riches heures du cannabis, Psychoactif
guide du LSD et autres univers psychédéliques, Culture en placard, E comme
ecstasy, le mythe de la drogue, ouvrage dans lequel un psychiatre américain
explique en quoi la guerre contre la drogue tient davantage du combat
religieux que d'un réel souci de santé publique, LSD mon enfant terrible,
par le Dr Hofmann, "scientifique génial et rigoureux qui expose les
innombrables facettes de sa trouvaille qui fit redécouvrir à l'humanité un
continent intérieur oublié" (sic).
On comprend mieux le sens de la lutte que mènent Michel Sitbon et ses amis
du Réseau Voltaire "contre les puritains, les cathos et la censure".
Ce n'est donc pas un hasard si l'un des premiers combats du Réseau Voltaire, en
1994, fut de tenter d'obtenir l'abrogation de l'article L227-24 du code
pénal permettant de poursuivre toute publication incitant à la perversion
des moeurs. Quant à l'intéressé, il nie les faits, parle de faux témoignages, mais ne conteste pas les outrages bien qu'il affirme ne pas avoir traité les policiers de fascistes ou de racistes : « J'ai évoqué la Gestapo, en référence à une autorité sans borne qui s'exerce sans donner de réponses. » Jugé à la fin mai, celui que les policiers présentent comme un agitateur professionnel a été condamné le 2 juillet par le tribunal de Paris à deux mois de prison avec sursis, 1 500 euros d'amende et 300 euros de dommages-intérêts à verser à chacune des deux personnes insultées. Ce n'est pas la première fois que Michel Sitbon vient enrichir la chronique judiciaire. Son dossier contient une dizaine d'affaires : vol à la roulotte, outrage aux bonnes moeurs, diffusion de l'image à caractère pornographique d'un mineur, fausse publicité, infraction à la réglementation d'une profession, exhibition sexuelle ou encore provocation à l'usage illicite de stupéfiants. Qualifier Michel Sitbon et ses amis de porno-gauchistes n'est donc pas une insulte. C'est le sens qu'ils ont donné à leur activisme, contre toutes les censures et pour toutes les libertés. « Quand Libération sort un dossier pour condamner la pornographie, ils n'ont rien compris, explique Michel Sitbon. Le porno, cela détend. Leur dossier, c'est pour pouvoir mettre plein de photos de cul dans leur journal et parler de cochonneries qui les émoustillent. Ils sont restés les maoïstes qu'ils étaient lorsqu'ils accablaient le notaire de Bruay-en-Artois parce que c'était un pervers de la secte pornocrate. » Les animateurs du Réseau Voltaire ont décidément une vision du monde qui relève d'une. "effroyable imposture". |
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