Introduction générale




Les sites villages de Makari et de Maladi, anciens lieux d’habitations sao, sont situés dans le département du Logone et Chari, aux abords du fleuve Serbewel. Ces sites d'anciens villages sont riches en vestiges archéologiques dont les buttes anthropiques. Témoins d'anciens villages abandonnés, aujourd’hui récupérés par les Kotoko, ces sites confirment à travers les sondages archéologiques, une ancienne occupation, dense et progressive.

Aujourd’hui, ce sont des sites qui sont en parties saccagés. Les kotoko qui sont les habitants actuels des sites pensent que les vestiges archéologiques doivent être préservés. Ce sont des sites qui se représentent sur des grandes buttes en dessous desquels se cachent les richesses archéologiques.

En effectuant une étude sur ces sites nous pensons apporter des éclaircissements sur la culture matérielle de la localité. Cette étude pourrait nous permettre d’infirmer ou de confirmer la problématique du terme sao, aujourd’hui tant combattu. Cette étude pourrait également nous donner des informations sur les différents groupes ethniques qui ont eu à s’installer dans la région connue aujourd’hui sous le nom de Logone et Chari.

Les sao auraient habité la région jadis. Dans cette étude, nous pourrons vérifier si effectivement ces peuples ont habité la région et ils ont réellement développé une civilisation aussi riche que cela le paraîtrait. L’origine de ces peuples est aujourd’hui combattue. Comme nous le disons tantôt, ces peuples auraient habité l’actuelle région du Logone et Chari. C’est à ces derniers que les Kotoko attribuent les immenses buttes anthropiques. Mais nous rappelons que les techniques de datations pouvant nous permettre de dire avec certitude que c’étaient des Sao qui ont pour la première fois peuplé les lieux.

Certains ouvrages se sont révélés fondamentaux pour notre étude. Nous pensons aux multiples ouvrages de Jean Paul Lebeuf[1] qui, a parcouru pratiquement toute la région par les fouilles archéologiques. Ces ouvrages nous ont permis d'identifier certains objets, de localiser certains sites, et de pouvoir faire une tentative d'interprétation des vestiges. L'ouvrage dirigé par le professeur Joseph Marie ESSOMBA[2] nous a permis d'avoir une idée sur les techniques de sondage et de prospection. A ces documents écrits, de nombreuses informations orales sont recueillies. Matérielles recueillies par Jean Paul Lebeuf sur certains sites étaient jusque là fragmentaires. Il était ainsi très difficile de faire une étude exacte sur les sites. Les chercheurs tels que Augustin Hall, Léon Pales ont fournis des travaux sur ces peuples. A travers les données initiales recueillies par Jean Paul Lebeuf, et Masson Detourbet dans leurs multiples ouvrages à savoir ; La Civilisation du Tchad dans lequel nous avons des données sur les phases migratoires sao et aussi kotoko. Ce livre nous a également fourni des éléments sur une collection des objets de la civilisation sao. L’ouvrage de Jean Paul Lebeuf intitulé Les arts des sao nous a donné des éléments sur la classification des sites à base des morphologies et des caractères des buttes. Nous avons essayé d'approfondir les recherches en nous basant sur deux sites: celui de Makari et celui de Maladi. Cette étude archéologique, vise à faire des sondages sur les immenses buttes anthropiques constituant les sites. Les témoins du passage humain sont ces débris de vestiges qui sont présents sur ces buttes remaniées par l'érosion, ces cimetières à jarres- cercueils de Maladi. En 1977 quand Lebeuf écrivait son ouvrage intitulé les arts des Sao, plus de 680 sites leurs appartenant ont été identifiés aussi bien au Cameroun qu’au Nigeria et au Tchad.

Cette étude est celle d'une civilisation des peuples disparus des sites de Makari et de Maladi. Il est très difficile de donner une fourchette chronologique à cette étude vu que le matériel archéologique collecté n'est pas daté. Notre problématique vise à appréhender à travers les vestiges archéologiques l’histoire culturelle des anciens habitants des deux villages aujourd’hui récupérés en partie par les Kotoko. A cette approche archéologique, qui permet d’écrire l’histoire de la région vient se greffer l'approche historique qui tente de reconstituer l'histoire de ces deux sites en les reclassant dans leur temps et dans leur espace.

De nombreuses autres questions sont posées sur ces sites. Depuis quand sont-ils occupés? Qui sont les habitants passés et actuels des sites? Quel était le milieu écologique? Y a t- il diversification ou homogénéité des cultures? Ce sont là quelques préoccupations auxquelles nous chercherons des réponses. Nos sous- objectifs ou hypothèses sont celles qui consistent à écrire l’histoire locale avec des documents matériels ; celle de saisir la dynamique culturelle d’ un ou deux peuples à travers le lithique, la poterie,les ossements ou les métaux. Nous allons comparer ces données à celles existantes conférées aux Sao ; dégager l’apport à la connaissance des sciences et techniques de l’Afrique ancienne.

Le problème de chronologie reste posé. Il est ici nécessaire de signaler que nous évoluons selon la chronologie proposée par Lebeuf dans son ouvrage intitulé Les arts des sao. Il classe les sites en quatre types : les types Sao I, qui sont des sites avec des buttes peu élevées et de petites dimensions, avec un diamètre d’environ 100 mètres, toujours inhabités et ne comportant pas de muraille d’enceinte avec des noms souvent oubliés. Les sites de types Sao II qui sont des sites plus élevés et étendus, dominant parfois les plaines environnantes. La configuration générale du terrain montre que les buttes naturelles sont remaniées et le relief accentué par la construction d’un mur d’enceinte dont on ne voit que des ruines. Le plan du site est sensiblement circulaire avec un diamètre moyen de 650 mètres. Les sites de type Sao III sont des sites moins importants que les précédentes. Ils sont dépourvus de murailles d’enceintes et sont plus récentes. Le type de site qui nous intéresse dans cette étude est celui de type Sao II. Makari et Maladi en font partie.

Pour ce qui est de la méthodologie, nous avons effectué des prospections archéologiques à partir des observations sur le terrain ou des lectures. Nous avons également consulté des ouvrages relatant des anciens habitants de la région. Les méthodes de prospection étaient basées d’abord sur les questionnements en vue de la localisation des lieux où ces anciens habitants étaient éventuellement installés. Il y’a ensuite les techniques de sondages qui étaient incontournables. A l’aide du décapeur, du pinceau, de la truelle, de la pelle, d’une pioche, d’un mètre dépliant et d’un mètre roulant, d’un appareil photo nous avons effectué les sondages. L’étude des objets quant à elle a fait appel à de nombreux ouvrages que nous avons cité en revue de littérature. Nous avons également eu recours à certains objets exposés au musée national de Ndjaména au Tchad. Il y’a également les données iconographiques qui ont été incontournables à notre étude. Ces dernières, tout comme l’oralité qui nous a permis de localiser les sites sont des éléments qui complètent la pratique, qui est une source de l’histoire. Ces documents écrits étaient insuffisants pour conforter notre étude, nous avons eu recours à d'autres types de source. Pour cela, les traditions historiques orales qui permettent la validation ou la contradiction des interprétations archéologiques, et les travaux de terrain, ont été incontournables. Il a été question de mêler l'archéologie à l'histoire pour bien étudier les anciens villages Sao. Le sultan de Makari nous a été aussi d’une importance dans la mesure où il nous a recommandé son fils. Des lettres de recommandation nous ont été remises par le sous- préfet de l’arrondissement de Makari, nous autorisant ainsi à faire nos recherches sans difficultés. Ce travail a été réalisé avec le concours de Aladji Djarma et de Saleh Abamet qui nous ont assisté aussi bien physiquement que moralement, nous donnant des informations sur certains objets retrouvés, nous aidant à identifier les lieux d’occupations anciennes et nous aidant souvent à creuser. Il faut aussi signaler l’assistance morale des enfants qui, tout en examinant le travail ne cessaient de poser des questions relatives à l’archéologie. Ces enfants et adultes nous ont permis de reconnaître les objets appartenant aux Kotoko et ceux appartenant à d’autres. A Maladi lors du second sondage, nous avons délimité la coupe vers l’Extrême -Nord parce que nous avons découvert le squelette humain à 50cm de profondeur. Evitant de profaner les tombes, nous avons recueilli quelques ossements et nous nous sommes arrêtés à ce niveau pour le côté Extrême- Nord. C’est un sondage qui a été effectué avec Aladji Djarma et Mbourna.

Au cours de nos recherches, nous avons rencontré de nombreuses difficultés qui sont liées à certains points essentiels. D’abord il y’a le problème lié à la liberté de fouiller. Les recherches que nous avons mené sont très coûteuses. Le véritable problème est celui de datation. Il est très difficile de faire les datations des objets que nous avons recueilli. Ces difficultés ne nous ont pas empêché de parvenir aux résultats qui constituent notre plan de rédaction.

Des ouvrages ont par ailleurs été consulté dans les centres de documentation. Nous pensons ici à la bibliothèque centrale de l’Université de Ngaoundéré. Au Tchad nous avons consulté des ouvrages au CEFOD (Centre d’Etude de Formation pour le développement), au CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique.) Il faudra néanmoins préciser que le sultan nous a recommandé un informateur principal du nom de Abali Kingui. D’après le sultan se serait lui qui pourrait nous donner des informations crédibles sur les anciens habitants de la région qui seraient des Sao.

Dès avril 2000, les sondages ont été entrepris sur deux sites: Makari et Maladi. Ces sondages ont fourni une masse de vestiges. Nous avons essayé autant que possible à l'aide de l'écologie, de faire une étude sur la stratigraphie. Le matériel archéologique récolté que se soit en surface ou en profondeur est très important.

A partir des ouvrages parcourus et de notre problématique, nous avons adopté un plan structuré en quatre chapitres:

Le premier chapitre traite de l’histoire du peuplement des sites et du contexte géographique de la région.

Le deuxième chapitre quant à lui met en exergue l’étude et l’interprétation des vestiges archéologiques du site de Makari, en s’attardant sur les techniques de sondages et les problèmes de pillages des objets du site.

Le troisième chapitre répond aux exigences méthodologiques qui nécessitent un traitement approprié des matériels recueillis. Il consiste à étudier les objets recueillis à Maladi, tout en s’attardant sur les techniques de sondages.

Le quatrième chapitre lui traitera d’une comparaison entre la culture matérielle de Makari et de celle de Maladi afin de voir s’il y a une ressemblance ou une différence.

Chapitre 1

Notes infrapaginales

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[1] Lebeuf J-P. , Les arts des sao, Paris, Chêne, 1977.

[2] Essomba J-M.,(éd.), L’archéologie au Cameroun, actes premier colloque international de Yaoundé, Paris,

khartala, 1992.