LA CHENILLE

LE GRAND PAON DE NUIT

"Qui ne connaît ce superbe Papillon, le plus gros de l'Europe, vêtu de velours marron et cravaté de fourrure blanche ? Les ailes, semées de gris et de brun, traversées d'un zig zag pâle et bordées de blanc enfumé, ont au centre un tâche ronde, un grand œil à prunelle noire et iris varié, où se groupent, en arcs, le noir, le blanc, le châtain, le rouge amarante".

Jean-Henri FABRE, "Souvenirs Entomologique

Le Grand Paon-de-nuit, Saturnia pyri, insecte de l'ordre des Lépidoptères, famille des Saturniidae.

Espèce répandue en Europe méridionale et dans le sud de l'Europe moyenne. Assez commune en France mais absente du nord. On trouve le Grand Paon-de-nuit dans les bois clairs, les broussailles et les vergers. Plantes nourricières :  Frênes, Prunelliers, Pommiers, Poiriers et de nombreux autres feuillus, sur lesquels il tisse ses cocons très fibreux.

Ce très grand Papillon peut mesurer plus de 15 cm d'envergure. Il possède un corps trapu et velu, d'un brun roussâtre, et de grandes ailes brunes ourlées de gris, ornées de motifs roses.

D'après vous, d'où vient le nom du Grand Paon-de-nuit ? Regardez bien ses ailes : que remarque-t-on dès le premier coup d'œil ? Et oui ! Il a des "yeux" sur les ailes !! En effet, le Grand Paon-de-nuit, comme tous les Saturniidae, possède ce qu'on appelle des ocelles sur chacune de ses ailes, comme la queue du Paon, justement, qui lui donne son nom.

Ces ocelles, qui ressemblent parfois à des yeux de Hibou, servent à effrayer et tromper les prédateurs éventuels. Et oui ! Si vous étiez un petit oiseau croqueur de Papillons, vous ne vous risqueriez pas à attaquer un Hibou !

Comment reconnaît-on Monsieur de Madame ? Chez les Paons-de-nuit, comme chez la plupart des Papillons de nuit, les mâles se distinguent des femelles par la forme de leurs antennes, beaucoup plus développées.

Le Grand Paon-de-nuit est fortement attiré par la lumière ! On peut ainsi parfois les voir tournoyer autour des réverbères, certains les prennent alors pour des Chauves-souris ! Le jour, on les trouve parfois au repos, les ailes entrouvertes, posés sur un mur ou un tronc.

Au régime !
Dépourvu de trompe, l'adulte ne se nourrit pas ! Il vit en effet des réserves de graisses, accumulées durant sa vie de chenille.

"Langage de séduction"...
Chez beaucoup de Papillons nocturnes, l'émission de parfums chimiques (phéromones) reste le moyen le plus sûr pour se reconnaître et se rapprocher : en effet, dans le noir de la nuit, les Papillon ne peuvent pas se reconnaître par la vue !

D'ailleurs, observez bien les antennes des Papillons de nuit mâles : vous pourrez constater qu'elles sont très développées, ressemblant un peu à des plumes ou des peignes. Cette forme très caractéristique d'antenne est dite quadripectinée... Ces messieurs Papillons de nuit s'en servent ainsi pour repérer les femelles, de très très loin !

Ces antennes comptent en effet plusieurs milliers de cellules sensorielles ; une seule molécule du parfum de la femelle parvient à stimuler une de ces cellules ! Pour attirer ses prétendants, une femelle vierge diffuse des substances volatiles sexuellement attractives, les fameuses phéromones. Grâce à ses antennes, le mâle va pouvoir remonter le vent jusqu'à localiser la source "parfumée", à plusieurs kilomètres de distance !

Ainsi, Jean-Henri FABRE, le célèbre entomologiste, a montré que les cages ayant contenu une dame Paon-de-nuit vierge gardent leur pouvoir d'attraction pendant des mois, parfois même jusqu'à une année !

Les œufs, pondus en mai-juin, éclosent un quinzaine de jours plus tard. La chenille nouvelle née du Grand Paon-de-nuit est noire avec des verrues rouge orangé. Au dernier stade, elle peut atteindre 12 cm de long ; elle arbore alors une robe d'un magnifique vert pomme, ornée de verrues bleu turquoise portant une couronne d'épines disposées en étoile et de longs poils à l'extrémité spatulée. Lorsqu'elle est effrayée, cette petite courageuse darde ces fausses épines, pour paraître plus menaçante.

Cette chenille se développe sur divers feuillus et arbres fruitiers, à condition qu'ils ne soient pas traités chimiquement.

Vue de coupe d'une chenille

La nymphose a lieu en août, dans un gros cocon que la chenille fabrique en sécrétant un fil de soie long de plus de 1 kilomètre ! Le cocon, tissé généralement à l'intersection de deux branches, abrite la nymphe (ou chrysalide) en pleine transformation. A l'issu de cet état nymphale, qui dure fréquemment 2 à 3 ans, le Papillon adulte émerge, généralement en mars, pour mourir à la fin du printemps (en juin).

Extrait : "Or, le 6 mai, une femelle quitte son cocon en ma présence, sur la table de mon laboratoire aux bêtes. Je la cloître aussitôt, tout humide des moiteurs de l'éclosion, sous une cloche en toile métallique. Bien m'en prit. Vers les 9 heures du soir, grand remue-ménage dans la chambre voisine de la mienne. A demi déshabillé, petit Paul va, vient, court, saute, trépigne, renverse les chaises, comme affolé.

- Viens vite, clame-t-il ; viens voir ces Papillons, gros comme des oiseaux ! La chambre en est pleine !

J'accours. C'est une invasion sans exemple encore dans notre demeure, une invasion de Papillons géants. A cette vue, la séquestrée du matin me revient en mémoire. On redescend pour se rendre dans mon cabinet. Dans la cuisine, je rencontre la bonne, ahurie elle aussi des évènements qui se passent. De son tablier, elle pourchasse de gros Papillons, qu'elle a pris d'abord pour des Chauves-souris.

Que sera-ce là-haut auprès de la prisonnière, cause de cette affluence ! Une bougie à la main, nous pénétrons dans la pièce. Ce que nous voyons est inoubliable. Avec un mol flic-flac, les Papillons volent autour de la cloche, stationnent, partent, reviennent, montent au plafond, en redescendent. Ils se jettent sur la bougie, l'éteigent d'un coup d'aile ; ils s'abattent sur nos épaules, s'accrochent à nos vêtements, nous frôlent le visage. C'est l'antre du nécromancien avec son tourbillonnement de vespertilions. Pour se rassurer, petit Paul me serre la main plus fort que d'habitude."

Fait par Mylène le 11 novembre 2002

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Mis à jour le 18 novembre, 2002