1968 - Ickx replace Ferrari dans la course.
D'apres "L'Equipe" du 8/7/1968
Rouen-les-Essarts : Il venait de connaître la plus grande joie de
sa vie : prendre, enfin, le départ d'un Grand Prix de F1 au
volant d'une "vraie" voiture. Moins de dix minutes plus tard, Jo
Schlesser avait cessé de vivre, prisonnier des flammes de sa
Honda
Ainsi donc, le préssentiment, nourri de superstition, qui
rongeait l'âme de tous les spécialistes avant ce Grand
Prix s'est tristement réalisé. Jim Clark a disparu le 7
avril, Mike Spence le 7 mai, Lodovico Scarfiotti le 8 juin. Il
apparaissait écrit que nous perdions, le 7 juillet, un autre de
nos héros et amis. On en parlait à voix basse depuis
jeudi sous les frondaisons des Essarts. Mais on ne voulait croire
à une stupide fatalité des dates.
Mais la course continue, cruelle comme peut être la vie, prompte
à substituer les larmes de joie aux pleurs les plus amers. Jo se
serait réjoui, hier soir, du triomphe de Jacky Ickx, un grand
gosse qui aurait pu être son fils, avec un sourire très
large, ses boucles épaisses, son intelligence et sa finesse. Le
benjamin de la F1, qui en est à sa première
véritable saison de Grands Prix, a donné à Ferrari
une victoire que le Commendatore attendait depuis qu'à
Monza, deux ans auparavant, Lodovico Scarfiotti avait fait
triompher ses couleurs rouges pour la dernière fois.
Une superbe victoire, dès sa 2e saison en F1
( Magnifique dessin de ©Daniel Picot )
En fait, l'équipe Ferrari avait décidé de partager
les risques : pneus pluie pour Ickx, pneus secs pour Amon. Les voitures
avaient à peine pris la piste qu'une bruine légère
, suivie bientôt de véritables trombes d'eau, s'abattit
sur le circuit : Ickx avait gagné !
Le circuit, au demeurant, est de ceux qu'il affectionne. Ickx
apprécie les longues courbes. A Rouen, il était sur son
terrain. Et il a suffisamment roulé à Spa pour que la
pluie soit un élément qu'il ne redoute pas, à la
condition que sa voiture soit chaussée en conséquence.
Le jeune Belge se dégagea immédiatement. Dès le
troisième tour, il comptait 8 secondes d'avance sur Surtees,
Rodriguez et Stewart qui allaient être ses uniques adversaires.
Il ne creusa pourtant pas immédiatement l'écart. Il
dût même perdre la première place, suite à un
tête à queue au dix-neuvième tour, où
Rodriguez le dépassa avec Surtees dans sa roue.
Mais Jacky Ickx n'allait pas tarder à revenir (Il menait
à nouveau au tour suivant) et à construire sa victoire de
manière irrésistible. En 3 tours, alors que l'eau tombait
à verse sur le circuit, il allait prendre la bagatelle de 30
secondes à Rodriguez ! A mi-course, son avantage
dépassait la minute. A l'arrivée, La Ferrari de
tête comptait près de 1 tour d'avance (soit 6,542 km) sur
la Honda de Surtees !