Des noms qui font sens

Rien en principe n'est gratuit en écriture, jusque dans les noms donnés aux personnages.

Il y a quelque temps je demandais à quelqu'un qui disait se prénommer Bill s'il s'appelait en fait William. J'ai ensuite renchéri en faisant valoir la beauté du nom William, dans lequel j'entends Will I Am, soit de façon littérale La Volonté, Je Suis.

J'aime à rappeler aux gens à quel point les noms donnés aux personnages et aux lieux, dans les romans, sont significatifs de ce qu'ils représentent. Prenons Germinal de Zola par exemple :

• Voreux évoque “ vorace ”, littéralement gourmand, qui engloutit ;
• Bonnemort évoque “ bonne mort ”, personnage qui explique lui-même le sens de son surnom ;
• Chaval rappelle “ cheval ”, docile et à l'ouvrage, inépuisable ;
• Maigrat résonne comme “ maigre / gras ”, sous-entendant le paradoxe dans sa fonction (faire crédit aux ouvriers en temps maigre) ;
• Souvarine évoque “ souverain ”, en état d'autarcie, de suffisance — celui qui (se) fait justice à la fin ;
• Montsou résonne comme “ mon sou ”, et non pas “ mon franc ”, ce qui évoque la misère ;
• & cætera.

Rappelons aussi ce que disait Humpty Dumpty à Alice, à propos de son nom (Alice) :

It's a stupid name enough ! […] With a name like yours, you might be any shape, almost.
Lewis Carroll, Through the Looking Glass

…sans oublier des personnages célèbres tels que Hyde (Stevenson), c'est-à-dire celui qui est caché (hide) ; et Scapin (Molìère), qui englobe deux idées :

• Scappare (ital. s'enfuir) ;
• Scapito (ital. au détriment de quelqu'un).

(2007)