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La préposition “ de ”

En poésie, dans le poème, il est tentant de faire appel à la préposition “ de ” pour marquer l'appartenance de x à y.

L'effet poétique recherché n'est cependant pas toujours spectaculaire, peu importe les mots adjoints par la préposition, peu importe s'il s'agit de chiqué-bidon de type “ le silence de mes nuits ” ou de style plus recherché. L'emploi de la préposition “ de ” serait donc à proscrire en poésie, car il s'agit d'un procédé stylistique sur-employé qui n'impressionne plus personne.

L'un des moyens pour adjoindre deux termes en contournant la préposition consiste à succéder ces termes comme s'il s'agissait d'une abstraction indissociable.

Pour reprendre l'exemple cité plus haut, écrire “ le silence nuit ” a plus d'impact parce que le terme “ nuit ” peut aussi être interprété comme le verbe “ nuire ” à l'indicatif présent, ce qui créé un lien entre le silence et la nuisance, laquelle peut être ou ne pas être nocturne ; ou bien un lien entre le silence et la nuit, qui peut être nuisible ou ne pas l'être.

Dès lors commence le travail poétique. En versification, il serait commun de trouver cette proposition en un vers unique :

Bla bla bla
Le silence nuit
Bla bla bla

…qui signifierait à la fois :

• Le silence de catégorie “ nuit ” (propre à la nuit) ;
• Le silence nuit à quelque chose qui apparaît au vers suivant.

…ou bien, pour les plus audacieux, intercalé en une phrase, avec des jeux de sons et de sens, ce qui doublerait aussi les interprétations possible, selon le travail de l'auteur et la réceptivité du lecteur, admettons :

Le silence nuit en s'unissant à nous attriste plus qu'il n'apaise.

…où l'absence de ponctuation de surcroît permet d'interpréter la proposition des façons suivantes :

• En s'unissant à nous, le silence nocturne attriste ;
• En s'unissant à nous, le silence se révèle nuisible en ce qu'il attriste.

J'ai choisi l'apaisement en finale pour répéter la consonne [p] qu'on retrouve dans le terme “ plus ”. Il s'agit d'un choix personnel, puisque j'aime à répéter les consonnes de même famille au sein d'une même proposition. Ç'aurait pu être :

Le silence nuit en s'unissant à nous attriste plus qu'il ne trompe.

…ce qui ouvre la porte à d'autres interprétations, en raison du lien créé entre la tristesse et la tromperie… et la nuisance nocturne du silence, qui n'en demeure pas moins intéressant.

Quoi qu'il en soit, l'objectif étant de contourner la préposition, il convient à mon sens d'essayer ces combinaisons directes, ne serait-ce que pour explorer d'autres sentiers que ceux battus par les bottines de nos avant-coureurs défricheurs.

(2007)

 

©  Yann Ropers, 2003-2008

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