Les débuts des choses

Il y a quelque temps, il y a eu une panne d'électricité dans mon quartier. Au moment ou cette panne est survenue, je mangeais dans le salon la soupe que je venais de terminer de préparer. Tout s'est éteint, nous avons allumé les bougies. Cela semblait beau.

Cependant, écrivant à la chandelle, je me demandais comment on faisait dans “ l'ancien temps ” pour écrire sans s'abîmer les yeux. Cela dit, j'adore les pannes, surtout les débuts de pannes, ces moments précieux où l'on s'empresse de sortir de (ou chasser) l'obscurité, où il n'y a que le silence et peut-être une forme d'inquiétude : “ forme ” car tout se présente sous une forme quelconque. Cela me rappelle les premières amours, les débuts de relations, rempli(e)s de promesses, où il est permis de croire. Considérez ceci : les débuts, moments forts de toute(s) forme(s) brève(s). Début d'une relation amoureuse donc, ou d'une fréquentation à l'avenir incertain, scandée par une succession de moments intenses mais brefs, à tout le moins charmants. Au premier baiser de notre existence, ou au premier avec une personne nouvelle, il y a de quoi trembler. Voilà ce que j'entends lorsque je parle des tremblements d'un individu.

Dans le bref, il y a quelque chose dont on ne se lasse pas, à ce bémol cependant : ce fait de n'avoir jamais le sentiment d'aller au bout des choses, et encore…  C'est ainsi que je conçois l'ouverture, ce fait de laisser un texte, par exemple, en état de dis-continuité virtuelle, toujours avec l'assurance d'un recommencement, d'un renouvellement de l'expérience du bref.

(2003)