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Mécanismes de la machine

J'ai toujours de la difficulté à formuler ce pour quoi il n'y a que des mots — pas de phrase(s). Cette rubrique, comme d'autres, en constitue un exemple. La voix, toujours nette, marque le point de départ de cette réflexion. Ce qui surtout m'intéresse sont les mécanismes (verbaux / langagiers) de la voix. J'ai déjà cité pour exemple l'interjection, avec prudence cependant, pour ne pas considérer ce procédé de façon exclusive, mais bien en corrélation avec d'autres mécanismes, dont certains s'expliquent mal.

Prenez cet exemple (considérant la voix en tant qu'entité narrative et / ou lyrique et / ou réflexive qui habite le texte, quelle qu'en soit la forme) : avez-vous déjà eu cette impression, lorsque vous vous trouvez en un lieu désert — une vieille maison, un parc, un entrepôt, une ancienne manufacture, & cætera — que ce lieu vous raconte (à tout le moins qu'il vous inspire) son histoire ?  En un sens, c'est (un peu) votre propre imagination qui travaille à partir de la matière. Nous participons à la (re)construction — ou (re)constitution — de ce qui nous est donné à… expérimenter. Nous faisons partie de la machine créatrice qui nous habite et qui nous entoure à la fois.

Bien entendu, comment ne pas établir le pont entre la voix et les “ mot's ” ?  Dans la lecture comme dans l'écriture, il y a la matière qui stimule, à tout le moins qui remplit notre imaginaire. Un certain travail sur la matière s'exécute / s'accomplit, une machine se met en marche. Pour moi, tout se (re)constitue en langage, cependant que pour d'autres tout est musique, formes, textures, couleurs… mais encore, il y a un peu de tout ça dans le travail artistique, quelle qu'en soit la nature.

Je me suis demandé à plusieurs reprises si les “ mot's ” répondaient à un ou des stimuli, comme une matière brute en effervescence, un vin de Champagne : tant que la bouteille n'est pas ouverte, la matière demeure latente là-dedans. Il faut enlever le muselet, retirer le bouchon. Certes, le remuage peut causer l'éjection d'un bouchon sans muselet ou, pire, l'explosion de la bouteille, bien que cela relève d'une autre époque.

La question demeure : est-ce bien la matière qui stimule le psyché au point d'en arriver aux “ mot's ” ou l'inverse : les “ mot's ” qui stimulent la matière latente pour en arriver au corpstexte ?  Peut-être aussi la stimulation brute en soi, épurée (si l'on veut), qui cause le remuage de la matière jusqu'à l'effercescence, le débordement ou l'explosion. Peut-être que, dans cette mesure, les “ mot's ” ne seraient que pour éviter les dégâts, préserver l'ordre.

Il y a peut-être tout à la fois.

(2003)

 

 

©  Yann Ropers, 2003-2008

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