Le dialogue dans la lecture active

Comment en vient-on à une lecture active ?  Comment cela se passe-t-il ?  Je vous explique comment je procède. D'abord, je dois être disposé à m'ouvrir, sinon la résistance empêche l'abandon voire toute tentative d'abandon. Dans les faits, pour moi, le signal qu'un dialogue se passe, que je performe une lecture active et participe au texte, se voit (ou se lit) dans les marges. J'écris dans mes livres, je commente, j'interroge.

Comment cela commence-t-il ?  Qui fait le premier pas ?  Ça dépend. Tantôt je réponds à un appel, tantôt c'est moi qui… teste le dialogue par une forme de contact phatique, notion très connue dans le schéma de communication. « Allô ? »

À l'ère d'Internet, sans doute avez-vous déjà remarqué qu'il arrive parfois que le téléchargement d'une page Web s'interrompe soudain. Il ne se passe plus rien, du moins il semble ne plus rien se passer. C'est que, pour une raison quelconque, le contact avec un serveur a été interrompu, perdu. Votre ordinateur envoie alors quelques octets de données. Si le serveur répond, le téléchargement reprend. Sinon vous êtes contraint(e) de “ rafraîchir ” la page incomplète, c'est-à-dire recommencer le téléchargement du début. Là encore, quelques octets sont envoyés au serveur. Lorsque la réponse tarde à venir, ou encore qu'elle ne vient pas, un message apparaît, vous invitant à « réessayer plus tard ».

Quand je lis, je me comporte un peu comme un ordinateur. Lorsqu'il n'y a pas d'invitation à dialoguer, je “ teste ” la communication par un contact phatique. J'encercle un mot, j'écris dans la marge. Je cherche une ouverture, une réponse à mon appel dans les deux ou trois premières pages. Si le… texte (ou la voix du texte) répond, un dialogue (ou un échange) commence : ce qu'il y a là m'alimente, je remplis l'espace disponible. Autrement, si le dialogue n'a pas lieu, il se peut que je ne sois pas disposé à l'échange, ou encore que le texte ne m'y invite pas. Alors je n'insiste pas. Je range le livre. Peut-être y reviendrai-je un autre jour. Peut-être jamais.

(2003)