“ Mot's ” et mysticisme

Je pensais un matin avoir en tête quelque révélation quant aux “ mot's ”, le pourquoi des choses. Je me rends compte, en fait, à force d'en discuter avec des gens — et bien que l'on soit conscient d'écrire (ou de “ faire ” de l'art, quelle qu'en soit la forme) par besoin, désir, envie, & cætera, que l'origine des “ mot's ” demeure obscure.

Dans une perspective peut-être plus religieuse, disons, j'admets sans trop de honte qu'il s'agit là d'un des mystères de la création. Or, accepter le mystère, c'est aussi avoir (et faire acte de) foi, du moins d'une certaine forme de foi, de fiance. Puisque l'expérience spirituelle de l'écriture est unique à chaque individu, ce serait peut-être un sacrilège de démystifier… non pas le processus créateur mais bien les “ mot's ” originels.

Peut-être est-ce pour cette raison que je me heurte à des spéculations, même en ramenant vers moi l'expérience d'écriture. Le mystère me dépasse. En un sens, c'est peut-être en quête de compréhension, d'effleurement, de rapprochement d'une certaine forme de mysticisme artistique — pour ne pas dire divin — que nous nous acharnons à répéter les mêmes gestes : mots, couleurs, formes.

Bien entendu, j'ai toujours eu pour opinion que c'est ce qui nous habite que nous mettons en forme à travers la création artistique. Mais est-ce bien vrai ?  Est-ce qu'au fond cela ne constitue pas (seulement / simplement) les traces de notre passage ou de nos propres pas devant, les marques de notre apprentissage, de notre évolution vers une forme de sagesse divine, d'élévation mystique ?  S'agirait-il de tout cela, les “ mot's ” de toute création artistique ?

Dans cette optique, nous ne ferions que répondre à un appel au-delà de nous-même, et, en même temps, en (ou par) nous-même : de l'intérieur, à l'intérieur, vers l'extérieur.

(2003)