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Fruit d'une période chaotique héritée d'une révolution paysanne à connotation libérale (La révolution française de 1789), le régime de Napoléon Bonaparte s'imposa en tant que libérateur des peuples et, à l'apogée de l'Empire, comme maître de l'Europe continentale durant près de 15 ans.
S'engageant dans une guerre militaire et économique ambitieuse contre l'Angleterre et la Russie tsariste, emprisonné dans la dynamique centralisatrice des régimes impérialistes et conquérants, le gouvernement de Napoléon Bonaparte s'épuisa et perdit progressivement ses alliés et son auréole de cavalier de la Révolution en raison de ses revers militaires et de ses méthodes de gouvernement autoritaires contraires aux principes libéraux qu'il défendait théoriquement.
Particulièrement, la guerre d'Espagne (1808-1814) montra les limites de l'Armée impériale. Constituées de Français, mais par ailleurs de soldats originaires de plusieurs nations alliées du régime de Napoléon, les troupes impériales formaient un ensemble hétérogène démoralisé par les épidémies, la corruption et la résistance acharnée des Espagnols. La pratique des tactiques de guérilla par ces derniers mit en échec le succès de l'occupation française. De plus, l'image de libérateur des peuples et de cavalier de la Révolution du gouvernement napoléonien fut ternie par les pillages et les massacres qui étaient imputés aux troupes impériales.
En 1810, l'entente de Tilsitt de 1807 conclue entre Napoléon et l'empereur russe Alexandre s'effrita. On assimilait la France à l’irréligion et on l'accusait de favoritisme économique en utilisant le blocus économique continental contre l'Angleterre à son avantage. En somme, les pays d'Europe de l'est étaient les premiers à subir les effets négatifs du blocus. L'industrie étouffait en raison du manque de matières premières.
Ce blocus, entre autres, encouragea la contrebande du tabac et du sucre qui constituait des produits très en demande pour les classes populaires. La nouvelle méthode de transport empruntait les voies terrestres afin de contrer le blocus. L'économie s'en ressentait. La haine des autres peuples européens pour la France impériale était exacerbée par le blocus et provoquait une montée du nationalisme chez les voisins de la France.
De plus, certains historiens affirment que le rejet par Napoléon d'une femme russe après son divorce avec son épouse Joséphine, qui était stérile, constitue une des causes de l'irritation de la Russie envers la France.
La situation se dégrada à un tel point que la Russie ouvrit son économie aux pays neutres et taxa fortement les produits français (décembre 1810). Le même jour, Napoléon riposta en annexant le grand-duché d'Oldenburg dont le prince était le beau-frère du tsar. La guerre était proche.
Napoléon rassembla ses forces au printemps 1912. Appuyé par une armée de 700 000 hommes, dont seulement un tiers de Français, il désirait frapper rapidement et fortement afin de remettre le tsar dans le droit chemin.
La stratégie russe consistant à brûler les terres agricoles (tactique de la terre brûlée) devant l'adversaire amputa à l'armée impériale une partie du ravitaillement dont elle avait besoin pour remporter une victoire définitive. L'armée russe tenta d'arrêter l'ennemi aux portes de la capitale, mais en vain. Le constat fut lourd des deux côtés: 20 000 morts chez les Français et plus du double chez les Russes. Sans plier, le tsar refusa de s'avouer vaincu.
Après plusieurs semaines d'occupation, un hiver précoce frappa Moscou. Les troupes de Napoléon, fatiguées et mal préparées à de telles conditions, ont dû opérer un retrait hâtif. Napoléon voulait emprunter les routes du sud pour éviter le froid hivernal, mais les forces russes leur en empêchaient.
En un mois, l'armée française perdit le quart de ses effectifs, dont la quasi-totalité de l'artillerie et de la cavalerie, et fut de retour sur le territoire français le 18 décembre 1812.
Napoléon écrit plus tard ces paroles au sujet de cet échec cuisant: "J'ai cru obtenir en un an, ce qui ne devait être exécuté qu'en deux campagnes. J'ai fait une grande faute mais j'ai les moyens de la réparer...".
Encore à cette occasion, l'histoire révéla les faiblesses inhérentes des troupes impériales françaises: hétérogénéité rendant l'armée difficile à contrôler ; corruption se traduisant par du pillage qui ternissait aux yeux des peuples l'image de la France révolutionnaire. La guerre d'Espagne aurait pu apprendre à Napoléon à contrer de telles faiblesses, mais il n'en prit pas considération.
Par ailleurs, les affaires internes commencèrent à être perturbées par la défection de pays alliés de Napoléon. En raison du manque à gagner de troupes qui suivit, la conscription s'étendit. L'économie connut un marasme, les récoltes furent désastreuses, les anciens alliés cessèrent leur contribution financière et l'État français se vit contraint d'augmenter drastiquement les impôts pour combler les pertes de la cessation de sa domination sur l'Europe continentale. La coalition antifrançaise gagna en force et en influence tandis que le France napoléonienne déclinait.
En 1813, le général anglais Wellington repoussa les Français hors d'Espagne et l'armée napoléonienne perdit du terrain sur tous les fronts, malgré un regain de vitalité en mars par les reconquêtes de l'Allemagne du nord, du Danemark et de la Saxe. À l'appel de l'Autriche, un cessez-le-feu fut instauré, laissant aux belligérants le temps de reprendre des forces.
On tenta de régler une paix négociée, mais Napoléon refusa de traiter en position de faiblesse : "Ma domination ne survivrait pas du jour où j'aurais cessé d'être fort et par conséquent d'être craint...".
Mais l'équilibre des forces était très inégal. Les troupes françaises durent retraiter et protéger ce qui restait de l'Empire au début de 1814, c'est-à-dire la mère patrie. Épuisée par des défaites militaires successives, l'armée française ne put empêcher l'occupation de Paris par les coalisés le 12 avril 1814.
Le gouvernement provisoire, monté par le sénat conservateur, les royalistes et Talleyrand, ancien ministre des affaires extérieures de Napoléon, accepta les conditions des alliés. Napoléon dut s'exiler sur l'île d'Elbe, la France était ramenée à ses frontières de 1792 et les Bourbons prirent les rênes du pouvoir.
Devant l'anarchie en Europe qui suivit la défaite française et le congrès de Vienne, Talleyrand fit de son pays le protecteur des petits États contre les plus grands et s'efforça par des déclarations de soutien à gauche et à droite de redorer l'image de la France. L'Europe paraissait divisée. On recherchait un équilibre. Même à l'intérieur des frontières, le régime de Bourbons ne parvenait pas à maintenir le calme.
Conscient des divisions de ses ennemis, Napoléon revint sur le continent. Il voulait reprendre les opportunités qu'il avait manquées dans les campagnes passées. En mars 1815, il rentrait à Paris avec l'aide de certains régiments toujours fidèles pendant que les Bourbons fuyaient aux Pays-Bas. Mais ses soutiens n'étaient plus ce qu'ils étaient. Une majorité des classes moyennes et paysannes regardaient cet événement avec scepticisme. Seuls l'armée et les nostalgiques de la Révolution l'appuyaient sans critique.
Afin de séduire ses opposants, il promulgua un "Acte additionnel aux constitutions à l'Empire" qui implantait des institutions politiques à tendance libérale. Il fit par ailleurs des assurances pacifiques aux coalisés qui n'en crurent pas un mot. Ces actions ne dissipèrent pas les réserves des sceptiques et des coalisés.
Les coalisés renouèrent alors leur consensus d'antan et déclarèrent la guerre à l'évadé et à ses disciples. Les Anglais et les Prussiens furent les premiers à s'entasser sur la frontière rhénane de la France, formant une armée de plus de 100 000 hommes, dans l'attente des renforts russes et autrichiens. De son côté, Napoléon put constituer une force de frappe de 250 000 hommes.
Mais les fonds manquaient pour le chef militaire français. Les meilleurs éléments de l'ancien état-major des beaux jours étant morts, la qualité des opérations tomba à un moindre niveau. Il fallait, pour la réussite de la campagne, vaincre rapidement et sans appel avant l'arrivée des troupes russes ou autrichiennes.
L'Empereur français avait planifié d'attaquer Vienne pour briser le congrès, mais le combat final se tint à Waterloo en Belgique en juin 1815. Par sa défaite, le sort avait été jeté pour Napoléon.
Napoléon se replia par la suite sur Paris, mais tous ses appuis sur place avaient fondu comme neige au soleil. La bourgeoisie et les autorités le pressèrent d'abdiquer à nouveau.
On s'empressa alors de traiter avec les coalisés qui envahissaient le pays de tous côtés (voir carte 2). Le deuxième traité de Paris imposait des conditions plus radicales que celui de 1814. Napoléon s'éclipsa en la résidence de Longwood, sur l'île Sainte-Hélène. Les Bourbons retrouvèrent leur pouvoir. La France dut payer d'énormes indemnités (700 millions de francs) de guerre et, de plus, subissait l'occupation des alliés. Sur l'initiative du tsar, on créa la Sainte-Alliance qui symbolisait la solidarité des peuples chrétiens contre les montées révolutionnaires.
L'alliance de Chaumont conclue entre les coalisés spécifie dans deux de ses clauses que plus jamais la France ne pourra être gouvernée par un Bonaparte et que les nations européennes se réunissent pour discuter de la situation politique de l'Europe. Malgré la défaite, la France conserva sa prédominance économique en Europe continentale et, pour signifier son bon vouloir politique devint membre de la Sainte-Alliance.
L'Europe fut stimulée économiquement par ces guerres qui la firent entrer dans la révolution industrielle.
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