DE
CELLATEX A MOULINEX, UNE EXPLOSION DE VIOLENCE SOCIALE ? |
De délocalisation en
délocalisation
Deux générations de travailleurs ont connu des transferts d’activités et les déménagements qui s’ensuivaient. Les premiers, il y a plus de 40 années concernèrent les activités industrielles qui quittèrent les grandes villes, essentiellement Paris, pour gagner la campagne. Pendant toute une période, bien des sociétés y trouvèrent un profit : la mécanisation de l’agriculture “ libéra ” des masses d’ouvriers agricoles ( en 1945 plus de 30% de la population française vivait de la production agricole, 10% 20 ans plus tard et moins de 5% aujourd’hui). Les salaires y étaient bien plus bas ( alors légalement les salaires minimaux dans les petites villes pouvaient être jusqu'à 30% inférieurs à ceux de la région parisienne) et les collectivités locales donnaient des avantages divers pour attirer les industries qui, disait-on alors, se “ décentralisaient dans la chlorophylle ”. De plus, ces mêmes sociétés pouvaient spéculer sur les terrains qu’elles abandonnaient et souvent, on y vit fleurir, selon les concepts architecturaux spéculatifs de l’époque, cette profusion de tours dortoirs à prolétaires et futurs ghettos des plus pauvres d’entre eux. Dans les usines ainsi décentralisées, la main d’œuvre peu adaptée au départ au travail industriel était, relativement et pour un temps plus facilement exploitable. Mais, même si les conditions de travail et les salaires n’étaient pas reluisants, c’était souvent préférable à la condition de travailleur agricole. Et plus important, ces travailleurs et leur famille pouvaient rester près de leur pays d’origine. Ces transferts économiques ne soulevèrent guère de résistance dans les villes désertées par l’industrie parce qu’alors, il était facile de trouver un autre emploi et le taux de chômage était très bas. Economiquement ce mouvement correspondait à la recherche d’une productivité plus grande par des coûts de production plus faible pour faire face à la compétition nationale et mondiale en raison de la mondialisation des échanges qui se précisait. Dans les décades qui suivirent, à partir des
années 70, alors que ce mouvement de transfert de poursuivait, un autre
mouvement vint se greffer sur cette première évolution des structures du
capital en France. Ce dernier mouvement vit la disparition des industries de
base dans les vieilles régions industrielles en raison de la même
mondialisation des échanges : les mines de charbon fermèrent
progressivement, la sidérurgie et l’industrie métallurgiques connaissaient
des restructurations drastiques. L’emploi d’une main d’œuvre locale peu mobile
supposait autant que possible l’implantation d’industries nouvelles avec les
mêmes incitations qui avaient été proposées pour les délocalisations à la campagne. Ce qui garantissait, en
partie tout au moins une certaine paix sociale tout en offrant, même si cela
signifiait pour les travailleurs concernés la perte d’avantages, la
possibilité de rester dans sa région d’origine. Il est important de considérer cet aspect
particulier des usines ayant été construites à partir des années 50, dans de petites villes, soit de la
campagne, soit de vieilles régions industrielles : elles sont souvent la
seule usine et la seule possibilité d’emploi dans la région environnante et
la fermeture devient une catastrophe locale, pas seulement pour les
travailleurs directement concernés mais pour les sous-traitants et pour une
bonne partie de la population ( secteurs de la distribution et
administratif). On doit aussi considérer
qu’une bonne partie des français sont très attachés à leur origine et
n’aiment guère émigrer hors de leur terroir d‘origine. Ce qui renforce une
résistance éventuelle à des mutations réside dans le fait ( corroborant cette
sédentarisation) que, trouvant du travail quasiment sur place, ils u ont bâti
leur foyer - maison, jardin, une sorte de confort relatif, acquis au prix
d’un certain endettement, pensant,
après des décades d’existence de ces industries locales que cela
durerait quasi éternellement. La fermeture de l’usine locale dans une
région où souvent à des kilomètres à la ronde il n’y a pas d’autres industries
signifie donc bien plus que la perte d’un emploi et constitue un mélange
plutôt explosif de réactions complexes contre un pénible bouleversement de la vie des travailleurs
concernés. La même évolution du capitalisme qui avait
procuré du travail aux ouvriers agricoles expulsés par la mécanisation des
fermes vers les industries délocalisées était déjà la conséquence d’une
pression capitaliste mondiale. Dans les années 80, les mêmes possibilités
s’offraient dans les pays dits sous-développés et le développement énorme de moyens de transports à bas
prix autorisaient les mêmes sociétés
à chercher d’autres délocalisations dans le monde entier. Elles y étaient
d’autant plus contraintes que les productions de ces pays “ en
développement ” pouvaient venir
facilement concurrencer les productions locales : nous l’avons déjà
évoqué pour les matières premières et les industries de base et cela touchait
maintenant l’ensemble des produits industriels. Les firmes françaises ne
pouvaient échapper aux conséquences de cette évolution du capitalisme qui
inondait le marché national de produits bon marché et les concurrençait
victorieusement sur le plan international : ou bien elles devaient
chercher une main d’œuvre bon marché ou bien elles devaient investir en capital
fixe dans des machines plus modernes. C’était souvent pour les capitalistes
une situation impossible : ils ne pouvaient imposer à leurs travailleurs
les conditions de production des pays “ pauvres ” en raison des
régulations et des résistances ouvrières et il leur était difficile
d’investir dans de nouvelles techniques ( avec lesquelles l’augmentation de
productivité n’était pas forcément suffisante pour soutenir la
compétition et pour lesquelles, en raison précisément de leur situation
délicate du fait de cette compétition, il leur était difficile de trouver un
financement). Cela signifiait aussi souvent passer sous le contrôle des
banques et/ou être contraint de fusionner avec d’autres sociétés. D’une
manière ou d’une autre, les solutions, en termes capitalistes signifiait ce
qui est devenu dans les dernières décennies une des clés de la rentabilité
capitaliste : la restructuration c’est à dire pour les travailleurs le
chômage et la fermeture des usines les moins productives et les moins améliorables ; cela pouvait
aussi signifier la faillite et la fermeture de toutes les usines. De toute
façon, les travailleurs étaient totalement soumis aux impératifs
capitalistes. En face de telles situations, la seule issue est de tenter de
défendre les conditions de travail et le niveau de vie, avec d’autant plus
d’acharnement dans le cas de ces premières usines délocalisées en France
rurale. Ce n’est pas par hasard si
toutes les menaces de recours à la violence ou de violence dans les conflits
industriels sont survenus dans des
sites industriels isolés ou déjà touchés par la disparition d’industries de
base. Une prise de conscience des réalités capitalistes
Un autre point doit être souligné pour expliquer
un nouveau phénomène dans l’évolution des méthodes de lutte dans les conflits
de classe est l’évolution parallèle des mentalités parmi des ruraux qui
traditionnellement étaient plutôt conservateurs ; lors des premières
délocalisations vers les campagnes les capitalistes escomptaient trouver une
main d’œuvre docile et respectueuse procédant des traditions agricoles. Cette
situation était particulièrement recherchée dans l’Ouest de la France, là où
s’étaient implantées la plupart des usines Moulinex ( ustensiles ménagers et
électroménagers). Comme les politiciens nationaux et locaux pouvaient se
targuer d’avoir joué un rôle dans ces transferts industriels “ en
douceur ” et en garantir quelques bénéfices sociaux - principalement la
possibilité de trouver du travail dans sa région d’origine et ainsi d’y rester,
il y persistait une croyance dans la possibilité que les politiques et les
syndicats puissent influer sur l’évolution économique. Mais cette croyance
s’est érodée peu à peu lors des tentatives successives d’adapter le procès de
production à la pression économique mondiale, ce qui signifiait pour les
travailleurs la perte progressive de certains avantages, de plus dures
conditions de travail et finalement différentes façons de diminuer les
effectifs (non-remplacement des partants, retraites anticipées, utilisation
des travailleurs temporaires ou à temps partiel, etc...) d’où un sentiment
croissant d’insécurité. Toutes les explications se référant à la construction
de l’Europe ou au commerce mondial étaient comprises comme un mal extérieur
inévitable contre lequel le “ pouvoir ” politique ou syndical
se dévoilait pour ce qu’il avait toujours été : impuissant devant
les “ réalités ” économiques et n’étant que les agents des
mutations capitalistes. Toutes les
possibilités antérieures de médiations
dans les conflits de classe résultant des activités économiques
n’étaient plus vues, à l’aune de l’expérience concrète accumulée pendant des
années, comme complètement inutiles et sans efficacité et la plupart des
travailleurs pris dans ces bouleversements sociaux se trouvaient contraints
de se battre jusqu’au bout, le dos au
mur, avec des moyens beaucoup plus radicaux. C’est ce qu’une ouvrière de Moulinex exprimait
avec de simples mots : “ Pour les élections présidentielles,
je ne voterai pas. Je renverrai ma carte d’électeur barrée en rouge avec
l’inscription Moulinex. De toute façon rien ne peut aller comme ça. A près nous, d’autres suivront. Un jour, ça
pétera. Et alors mai 68 ressemblera à une promenade ”. Cela ne sonne pas
comme une menace mais plutôt comme la constatation d’une situation qui n’est
pas du tout exceptionnelle en France depuis plusieurs années et qui s’est
accélérée dans la période récente. On peut penser que cette sorte de violence
ouverte a commencé en juillet 2000 avec l’usine textile Cellatex (1)dans une région isolée du Nord de la
France : c’était pour une bonne part l’oeuvre de médias qui jusqu’alors avaient ignoré un grand nombre de faits similaires
survenus auparavant et se trouvaient alors contraints de révéler les nouveaux
soucis de la classe dominante et de ses auxiliaires confrontés à ce soudain
accès de violence d’un degré supérieur à ceux qui s’étaient produits
auparavant. Au cours des années précédentes, déjà spontanément ou plus ou
moins organisés avec bien des réticences par les syndicats, les réactions
ouvrières contre les fermetures d’usines ou les restructurations et les
licenciements qui en résultaient impliquèrent un certain niveau de violence (
occupation d’usines ou de bureaux, piquets barrant l’entrée des usines pour
empêcher le déménagement des machines ou des marchandises, séquestration de
dirigeants ou de responsables politiques, blocage des voies de communication,
invasion de comités d’entreprise ou de conseils d’administration ou de
réunions officielles destinées chercher des solutions,...). Même contrôlées
par les syndicats, quelquefois organisées préventivement par eux avec des
équipes soigneusement sélectionnées, parfois spontanées mais rapidement
reprises en mains, toutes ces actions révélaient que l’emploi des moyens “ légaux ”
de lutte restaient inopérant contre
les conséquences économiques du commerce mondial dans ce “ libre
marche ” dont les pouvoirs nous rabattaient les oreilles. La pression
d’une telle violence visait à contre les sociétés, les autorités locales ou
nationales, l’Etat à “ faire quelque chose ” soit contre la
fermeture soit par obtenir de meilleures conditions en cas de licenciement ( plus d’argent au-delà de la stricte
légalité, meilleures conditions de formation, reclassement dans d’autres
sociétés...) La dérive des restructurations et des fermetures d’usines et
l’évolution des luttes
Si pendant la période antérieure existèrent de
telles possibilités d’amortir les conséquences des restructurations avec
l’aide de l’Etat ou des collectivités
territoriales, peu à peu cela
devint de plus en plus difficile comme les récessions économiques successives
d’une part augmentaient énormément les postulants à ces mesures et d’autre
part tarissaient quelque peu les ressources qui pouvaient y être affectées (
par exemple une réforme drastique de l’assurance chômage qui réduisaient
considérablement les indemnisations en vigueur dans les années 70). Souvent
qui se trouvaient placés dans ces situations avaient été contraints
auparavant d’accepter, bien qu’à contre - cœur les conditions imposées par
les “ plans sociaux ” déjà évoqués, sous la menace soigneusement
distillée de mise en faillite : cela créait un perpétuel sentiment
d’insécurité entraînant un mécontentement croissant qui pouvait aisément se convertir en une violence plus
radicale. La finalité de ces combats ouvriers comme ils finissaient par
l’apprendre avec toutes ces mesures dilatoires visant à affaiblir leur
combativité n’était pas de lutter contre une fermeture
“ inévitable ” mais d’obtenir des indemnités de licenciement plus
substantielles. Comme les travailleurs de Cellatex, ceux de Moulinex de l’une
des usines condamnées menaceront de la faire sauter avec pour seul
slogan : “ Du fric ou Boum ”. En France, habituellement, un travailleur licencié
peut obtenir de son employeur une
indemnité fixée le plus souvent dans les conventions collectives, sinon par
le Code du Travail. On peut résumer ces droits légaux comme suit, qui
constituent un minimum, ce qui est le cas le plus fréquent : §
rien pour les
travailleurs temporaires, à temps partiel, saisonniers ou les travailleurs
permanents n’ayant pas deux ans d’ancienneté dans l’emploi ; une masse
de travailleurs non négligeables d’autant plus que les entreprises en
difficulté ont souvent tenté de réduire leurs coûts de production en
accroissant les effectifs de ces catégories. §
1/10 du salaire
mensuel par année d’ancienneté pour les travailleurs ayant plus de deux ans
d’ancienneté. §
1/15 du salaire
mensuel en sus de l’indemnité précédente
pour les travailleurs ayant plus de 10 ans d’ancienneté. §
quelques
conventions collectives peuvent souvent accorder d’autres indemnités plus
favorables. Comme les travailleurs de Cellatex après leur
menace de faire sauter l’usine en juillet 2000 avaient obtenu une indemnité
de 80.000 F en sus des indemnités
légales pour tous les travailleurs de l’usine quelque soit leur statut, ce
montant ( environ une année du salaire minimum), ce montant devint en quelque
sorte - illégalement - la référence standard des revendications des
travailleurs licenciés. Depuis l’aventure Cellatex, il y a environ un an et
demi, plus de dix petites usines utilisèrent les mêmes sortes de menaces pour
obtenir à la fois des indemnités de licenciement plus substantielles, des
promesses plus sérieuses de reclassement ou de formation. La dernière de
cette série fut une usine textile près de Lille ( filature Mossley à
Hellemmes, 123 travailleurs) (2) où une partie de l’usine fut incendiée et où
les grévistes occupant l’usine commencèrent à brûler du matériel dans la rue.
Après 71 jours de lutte et d’occupation, ils obtinrent à peu près ce que les
“ Cellatex ” avaient obtenu une année auparavant. Moulinex, c’est beaucoup plus important
Si la situation chez Moulinex était plus ou moins
la même que dans les exemples précédents, c’était néanmoins beaucoup plus
complexe et beaucoup plus important. Les conflits les plus récents de ce
genre sur les restructurations ou les fermetures d’usines touchant des firmes
de plus grandes dimensions avaient été traités soit à l’intérieur du trust
lui-même ( par exemple la multinationale de l’alimentation Danone fermant
certaines biscuiteries sous la marque Lu avec un plan social interne) ou avec
l’intervention de l’Etat garantissant un nouvel emploi ( par exemple pour les
travailleurs de AOM - Air liberté
pris dans la tourmente de la déroute de la compagnie suisse Swissair)
ou par le rachat total par une autre firme ( tous les magasins de France de
Marks et Spencer rachetés par le trust de la distribution Galeries Lafayette
avec une promesse de réemploi sans licenciement) (3). On pouvait voir ainsi
la différence de solution en cas de fermeture d’usines selon l’importance de
la firme ( et sans aucun doute la crainte de réaction semblable à celle de
Cellatex mais d’une autre dimension) où s’offrait la possibilité de contenir la lutte dans le cadre de la
légalité pour autant qu’une solution était envisageable pour les travailleurs
concernés leur évitant le chômage quoiqu’ils pouvaient être contraint
d’accepter des conditions de travail moins bonnes que ce qu’ils avaient
auparavant. Moulinex n’était ni une petite compagnie ni une
multinationale, la plus grande partie des usines se trouvant en France. Tout
d’abord une firme familiale fondée il y plus de 70 ans et s’étant développée
dans les tentes années de prospérité capitaliste ( les fameuses trente
glorieuses) après les années 50 et qui devint le leader dans les appareils
ménagers, électroménagers et les divers équipements de cuisine. La firme
avait utilisé les possibilités mentionnées au début de cet article pour localiser ses usines dans les petites
villes de campagne et principalement dans l’Ouest de la France, précisément
dans une région très conservatrice avec en arrière plan une forte influence
catholique.(4) Il y a eu lors du développement des difficultés économiques
des discussions reprochant à cette firme familiale de ne pas avoir été
capable de se moderniser à temps pour faire face à la concurrence mondiale
principalement asiatique, en d’autres termes d’être de mauvais gestionnaires
capitalistes. Même si Moulinex avait récemment établi des filiales aux Etats - Unis (Krups), au Mexique
(Vistar), en Espagne et en Egypte, l’essentiel de ses activités restait en
France, en termes de production et en termes de marché. D’autre part,
soutenir la concurrence nécessitait plus de capital, plus d’emprunts auprès
des banques c’est à dire de se plier aux impératifs des banques qui, à
l’instar du FMI vis à vis des Etats, exigent des restructurations pour délier
leurs bourses. Il y avait eu ainsi pour Moulinex lors de différences
tentatives de surmonter les problèmes qui s’accumulaient avait dû procéder
aux sempiternelles restructurations génératrices d’inquiétudes pour les
travailleurs et finalement, beaucoup plus inquiétant, de fusionner avec un
concurrent Brandt société elle - même filiale d’un holding italien ElFi, le
quatrième groupe européen de l’électroménager ( les frères Novicelli) qui à
la fin de cette opération en l’an 2000 détenait 74% du capital du groupe
Brand - Moulinex. Apparemment, la situation du groupe n’était nullement
catastrophique : d’avril à décembre 2000, le chiffre d’affaires avait
progressé de 5,50% par rapport à l’année précédente ; mais ces résultats
dissimulaient une distorsion entre le chiffre d’affaire fait en France qui
chutait de 6,7 % alors que celui des usines extérieures s’accroissait de 18%.
En 2001, cette tendance se renforçait alors que les pronostics pour les
Etats-Unis s’avéraient plutôt sombres. Dès lors, la multinationale intéressée
uniquement par la rentabilité globale considérait Moulinex comme le mouton
noir de son empire qu’il fallait restructurer ou dont il fallait couper le
bras malade. Les
grandes manœuvres du capital et de ses auxiliaires
Les travailleurs de Moulinex avaient déjà été alertés par moult plans sociaux et par la fusion avec Brandt furent laissés
pendant sept mois dans une incertitude très angoissante, sachant
qu’ils devraient faire face à une inévitable restructuration mais
laissés dans l’ignorance totale de ce que serait sa nature et sa dimension.
Le 25 avril 2001, la sentence
tombe : le groupe Moulinex - Brandt propose le regroupement total des 16
usines françaises (11.000 travailleurs sur un total de 22.000 travailleurs européens)
avec la fermeture définitive de trois usines les deux plus importantes en
Normandie et l’autre dans le Nord de la France : §
Alençon (Orne),
1100 travailleurs, l’usine mère, la première à avoir été en activité
fabriquant du petit électroménager dont la production serait en partie
transférée au Mexique ( fers à repasser) §
Cormelles le Royal
(Calvados) 1.100 travailleurs fabriquant des fours à micro ondes dont la
production serait totalement abandonnée parce que perdant de l’argent et ne
pouvant soutenir la concurrence asiatique. §
Lesquin (Nord), 700
travailleurs fabriquant des frigidaires dont la production serait transférée
en Pologne. Les syndicats ne pouvaient faire autre chose que
refuser ce plan de restructuration car les travailleurs des usines condamnées
se mirent aussitôt en grève avec occupation. Jusqu’aux vacances du 21 juillet
toutes les usines Moulinex connurent une production chaotique et quelques-uns
unes d’entre elles : Alençon, Bayeux, Cormelles, Falaise, toutes en
Normandie étaient souvent totalement fermées et occupées.. A la fin des
vacances, la situation ne s’était guère améliorée même si les syndicats
tentaient de reprendre le contrôle de la luttez avec par exemple une grève de
2 heures le 25 août. Mais bientôt le mouvement échappait leurs tentatives de
régulation : durant la nuit du 29 août l’équipe de nuit à l’usine
d’Alençon recommença l’occupation érigeant des barricades pour bloquer
l’entrée de l’usine. Les occupations recommencent ailleurs dans la plupart
des usines Moulinex dont la
production est alors totalement bloquée. La réplique du groupe Moulinex - Brandt, suite au
refus du holding italien de mettre plus d’argent dans la restructuration
envisagée avant les vacances, fut de se mettre en faillite avec la
désignation d’un administrateur séquestre. Certains accusèrent les banques
d’avoir condamné Moulinex en refusant d’accorder un nouveau prêt mais
apparemment la responsabilité était partagée pas seulement entre les vrais
propriétaires (les frères italiens et le milieu financier mais certainement avec d’autres industriels intéressés par
le démantèlement du groupe Moulinex pour acquérir une position dominante dans
cette branche d’activité. Naturellement les travailleurs étaient totalement
abandonnés dans cette opération avec les syndicats et les autorités locales
tentant de présenter des plans alternatifs pour maintenir les usines en
activité, tous ces plans plus ou moins viables principalement parce que ni
les uns ni les autres n’avaient de pouvoir de lever les contributions
financières nécessaires pour les mettre une œuvre et certainement allaient à
l’encontre de visées financières plus importantes. Il était bien évident,
considérant les interventions étatiques ou multinationales dans les
restructurations déjà évoquées qui se déroulaient au même moment à grand
renfort de publicité ( précisément parce que les médiations politiques ou
syndicales pouvaient prétendre avoir trouvé une solution pour les
travailleurs), que les possibilités d’action des travailleurs, étaient assez
limitées si toutes les usines devaient être fermées en cas de faillite. La
situation chez Moulinex risquait de devenir explosive. Au même moment, dans
une opération bien concertée le bruit était répandu, un peu partout dans les
médias relayant les syndicats et les allées du pouvoir que l’entreprise
pouvait être vendue, en tout ou en détail et que bien sûr il importait pour
les travailleurs de ne pas “ décourages un éventuel repreneur :
cela paraissait “ raisonnable ” et, à l’appel des syndicats, toute
grève et occupation cessait le 10 septembre 2001. C’était pourtant le seul
but de l’opération d’amener les travailleurs à baisser les bras et d’accentuer leur angoisse démoralisante en
les embarquant dans des spéculations sans fin sur la “ confiance ”
qu’on pouvait avoir envers les prétendants à la reprise, alors qu’ils
n’avaient en fait aucun moyen de juger de la solidité des dites
propositions. Sauf de faire confiance
à la parole des syndicats et des autorités qui n’avaient d’ailleurs pas plus
de moyens d’en juger malgré leurs prétentions mais ce qui leur permettait de
se remettre en selle dans un rôle qu’ils tenaient parfaitement dans cette
tragicomédie. Ainsi depuis le 10 septembre et pendant plus d’un
mois toutes les usines Moulinex étaient supposées travailler “ normalement ”
mais pourtant avec des arrêts dus à de problèmes d’approvisionnement ou avec
une production réduite ; le travailleurs réduits ainsi au chômage
technique restaient indemnisés. Ils restaient, peut être sans trop y croire,
persuadés qu’ils ne devaient pas troubler le “ jeu de la reprise ”
même s’ils suivaient les sempiternelles manifestations de rue appelées et
contrôlées par les syndicats pour “ faire pression ” en vue d’un
règlement ( sur lequel ils n’avaient pourtant aucun pouvoir). Ils
“ informaient ” régulièrement, avec commentaires, les travailleurs
sur les hauts et les bas des négociations en cours pour donner aux
travailleurs un nouvel exploiteur ( seulement d’ailleurs les miettes que les
négociateurs voulaient bien leur jeter en pâture). Après maints et maints
palabres c’est à dire de spéculations financières, l’administrateur
provisoire accepta la dissociation des deux firmes Moulinex et Brandt et le
reprise de Moulinex par son principal concurrent en France, le groupe SEB,
Brandt restant dans le holding italien El,Fi. L’annonce de cette “ fin
heureuse ” précisait que SEB
était plus intéressé par les filiales étrangères de Moulinex, ce qui lui
permettait d’avoir des bases de pénétration en Amérique du Nord et en
Amérique du Sud ; comme SEB avait déjà des usines en France opérant dans
les mêmes secteurs que Moulinex il n’était pas difficile de prévoir ce
qu’étaient les non - dits de l’accord de reprise. Pour les travailleurs de
Moulinex c’était un nouveau plan de restructuration, plus ou moins la copie
conforme de ce qui avait provoqué l’explosion de grève le 27 avril : ils
avaient seulement changé de patron pour la mise en œuvre de la
guillotine. Les deux principales
usines du groupe, Alençon et Cormelles restaient définitivement fermées et
les autres devaient subir des “ dégraissements “ plus ou moins
conséquents. La révolte des laissés pour compte
Il était évident que les travailleurs de Moulinex
avaient perdu six mois de lutte et avaient été menés en bateau uniquement pour émousser leur combativité
et les amener à avaler la pilule. Il ne leur restait plus qu’une seule issue
alors qu’il était évident qu’ils ne pourraient plus empêcher la dislocation
du groupe et les fermetures d’usines. Tout comme les travailleurs de
Cellatex, leur seule lutte se résumait maintenant à se battre pour obtenir
des indemnités de licenciement plus substantielles et des promesses plus
sérieuses de reclassement. Le jour
même de l’annonce de la reprise et des intentions du repreneur, les usines
condamnées d’Alençon et de Cormelles étaient de nouveau occupées et bloquées.
Les revendications étaient exactement ce qu’avaient obtenu les
Cellatex : 80.000 F en sus des indemnités contractuelles légales pour
tous, quel que soit le statut. Comme les discussions menées par les syndicats et les actions
ponctuelles légales ne conduisaient nulle part après 20 jours de palabres,
les travailleurs de Cormelles le Royal prirent le mors aux dents et mirent en
place spontanément ce qui dans leur esprit était dans la ligne de ce qu’avaient
fait les Cellatex. Cette méthode radicale de lutte ne s’étendit pas à Alençon
où ma CFDT pouvait se prévaloir d’une plus grande influence qui lui
permettait un plus grand contrôle et
le maintien de la lutte dans ses limites légales. Cormelles allait bien
au-delà de ces limites. Le 13 novembre, les travailleurs de Cormelles ( leur
usine devant être fermée définitivement avec plus de 1100 licenciements) qui
occupaient déjà l’usine empilèrent à différents endroits stratégiques de
l’usine des produits inflammables (bouteilles de gaz, bidons d’essence,
autres produits chimiques inflammables, etc..) et affichèrent clairement
leurs intentions à la porte de l’usine avec une banderole proclamant
fièrement : “ Du fric
ou Boum ! ”. Et pour montrer leur bonne volonté, exactement ce
qu’avaient fait les Cellatex en déversant
de l’acide sulfurique dans la rivière
ou comme ceux de Mossley incendiant une partie de l’usine, ces
travailleurs de Moulinex mirent le feu à certains bâtiments de
“ leur ” usine. Naturellement cette action fut immédiatement
dénoncée notamment par le ministre socialiste des Affaires Sociales. Mais en
même temps un sondage effectué parmi la population montrait un soutien à 90%
de l’action des travailleurs de Moulinex. Personne
ne tenta de les arrêter alors que les discussions continuaient avec
les autorités pour tenter de régler
“ le problème ”. Les différences dans les méthodes de lutte
à Alençon et à Cormelles peuvent être vues dans le fait que la police n’intervint nullement à
l’usine de Cormelles alors que dans le même temps, les mêmes forces de
l’ordre intervinrent brutalement pour empêcher les travailleurs
d’Alençon entraînés par la CFDT d’envahir le siège du MEDEF à Paris ( c’était dans ce dernier
cas, le type même d’objectif traditionnel de la part des syndicats).
N’importe comment c’est l’action des travailleurs de Cormelles et
certainement la crainte que leur méthode de lutte ne s’étende aux autres
usines Moulinex qui accéléra le
règlement du conflit, lequel intervint dans la semaine même. Mais également,
comme d’habitude, comme cette forme de lutte restait circonscrite à une seule
usine, cette solution était prise de manière à diviser les travailleurs
concernés d’une façon sensiblement différente de Cellatex. Cet ultime “
plan social ” accepté par tous les syndicats, à l’exception de la CFDT
qui ne voulait pas perdre la face à Alençon pour avoir modéré les troupes,
autorisait SEB, le nouveau patron de Moulinex de licencier 3.700 travailleurs
sur 5.600 avec la fermeture
définitive, entre autres, des usines d’Alençon et de Cormelles et des coupes
sombres dans les autres usines. Les travailleurs devaient, en cas d’accord,
évacuer immédiatement les usines occupées pour que la production puisse
reprendre. Le montant des indemnités supplémentaires, contrairement à
Cellatex, n’étaient pas les mêmes pour tous les travailleurs, variant en
fonction de l’ancienneté de 30.000 à 80.000 F. Comme le “ plan
social ” devait être accepté par les travailleurs en grève, cette
division en fonction de l’ancienneté, fut accentuée par un vote par usine et
non par un vote global. Le résultat du vote était en quelque sorte connu
d’avance. Comme la CFDT avait refusé de signer le “ plan social ”
en raison de sa position dominante à Alençon, elle ne pouvait faire dans
cette usine autre chose qu’un baroud d’honneur sous peine de perdre la
face ; ils maintinrent pendant quelques jours l’occupation tout en ne
changeant rien à ses méthodes légales de lutte et continuant d’exercer le
strict contrôle de cet ultime combat. Une forme d’action directe pour une revendication immédiate
Par pure coïncidence, les menaces des travailleurs de l’usine de
Cormelles intervinrent alors que se développait l’offensive guerrière
“ contre le terrorisme ” qui suivit les attentats du 11 septembre
contre les tours du World Trade Center à New York. Mais personne ne se risqua
pour faire des parallèles et de qualifier ces menaces et leur commencement
d’exécution de “ terrorisme ”. De nouveau, comme pour Cellatex,
quelques commentaires dans des milieux divers parlèrent de luddisme et de
luddites, plus ou moins considérant ces actions comme des combats contre la
technologie et l’utilisation des techniques par le capitalisme. Comme nous
l’avons déjà souligné dans des articles précédents, le combat des luddites
n’était nullement idéologique : c’était une lutte de classe contre les
exploiteurs utilisant sélectivement la destruction des machines pour obtenir
de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail, destructions
visant non pas tous les patrons ( ce qu’aurait été une logique
anti-technique) mais seulement ceux qui refusaient d’appliquer de meilleures
conditions déjà concédées ailleurs. Le courant de violence qui se manifeste
ne France depuis près de deux années
maintenant, seulement dans le cas de fermetures d’usines en vue d’obtenir
plus d’argent est très similaire à ces actions des luddites mais n’a rien à
voir avec l’idéologie que l’on essaie d’y plaquer. C’est seulement, et
seulement cela, un moyen de lutte, plus radical et naturellement plus
efficace que les moyens légaux, les seuls que peuvent préconiser et tenter
d’imposer les syndicats, quels qu’ils soient à cause précisément de leur
existence et activité légale. Naturellement, il serait complètement faux de
considérer ces actions comme une sorte de poussée révolutionnaire. Mais tout
aussi naturellement, le recours à des méthodes de lutte violentes a une
signification. Si ces luttes transgressent les formes de médiation et brisent
avec les méthodes traditionnelles préconisées par les syndicats, ces derniers
sont encore reconnus comme capables de discuter et de fixer avec les
représentants du capital pour fixer les conditions d’une solution du conflit.
Pas n’importer quelles conditions bien sûr. Les solutions doivent être soumises
au vote des travailleurs concernés, mais les syndicats, même contraints
d’endosser d’une certaine façon les revendications de base défendues par des
méthodes qu’ils réprouvent, ont toujours comme on vient de la montrer pour
Moulinex des possibilités de
manipulation à la fois pour prévenir quelque extension du conflit hors des
sentiers battus et pour imposer des solutions bâtardes. Mais ils sont, ce
faisant sur une corde raide, les propos d’une ouvrière de Moulinex citée plus
haut montre que cette possibilité d’extension n’est pas pure utopie. Il est nécessaire de replacer de tels événements dans le processus
dialectique des relations capital - travail. Sur le plan économique d’un tel
conflit, si l’on considère ce que le capitalisme ( firmes et différentes
instances gouvernementales) doivent payer pour une solution des problèmes
actuels au-delà de ce qui est considéré comme tolérable pour le maintien du taux de profit, le fait qu'ils soient contraints par la lutte de classe
de verser d’importantes sommes pour
le maintien de la paix sociale peut être vu comme un frein aux tentatives
permanentes pour enrayer le déclin du taux de profit du capital. Il n’y a pourtant aucune raison de pavoiser. Si, dans les limites dont nous venons de parler, cette violence peut être considérée comme une manifestation de l’autonomie ouvrière, celle - ci n’est, pour autant qu’elle reste dans certaines limites qu’une partie du processus dialectique entre l’action ouvrière et la constante répression du capital. Que ce soit dans l’intervention des syndicats ou de la police, cette répression essaie de faire face à une situation globale ( dans la mesure où chacune de ces actions peut être considérée comme le témoignage d’un rapport de force plus général) et pas seulement l’action ponctuelle dans le cas spécifique de Moulinex ou d’autres actions du même genre : la fin du conflit Moulinex avec ses ambiguïtés ne fait que refléter les ambiguïtés du rapport de forces au niveau national. D’une part, si l’action chez Moulinex avait été au-delà d’une simple menace et s’était étendue localement, régionalement ou dans d’autres usines ou dans des actions réelles de solidarité ( on peut rêver ) la répression aurait montré son véritable visage dans l’ampleur des moyens mis en œuvre. Bien sûr avec le risque de voir surgir un mouvement plus vaste et des forces de répression tentant d’éviter une répression trop directe génératrice d’extensions ultérieures.. D’autre part, la première ligne de répression de l’autonomie ouvrière, l’intervention syndicale pouvait, comme elle a pu le faire dans le passé “ organiser ” quelque action prétendument autonome pour garder le contrôle du mouvement (5)( comme elles ont pu le faire par exemple dans les grèves de 1995 en France) (6). Vus sous cet aspect des rapports syndicats - travailleurs dans la lutte, les “ nouveaux ” syndicats bâtis dans la foulée de ces conflits en opposition précisément à l’action des syndicats “ reconnus ” établis, peuvent jouer un rôle crucial en canalisant l’autonomie vers une autre sorte de légalité car leur existence juridique même leur interdit sous peine de disparition de se fondre dans le mouvement autonome. Ce qui fait que de toute façon, dans ce processus dialectique action/répression, il est parfois très difficile de séparer ce qui autonomie et ce qui ne l’est pas. Nous ne pouvons que considérer que des choses évoluent et changent sous la pression de la lutte de classe échappant aux formes précédentes dans lesquelles le système capitaliste tente d’emprisonner l’exploitation du travail. H.S. 11/2001 (1)
sur
Cellatex et les discussions qui ont suivi, voir Echanges n° 94 p. 3, 95 p. 3,
96 p. 44, et 98 p. 7 (2)
sur cette grève à Mossley, voir Echanges n°
98, p. 10 (3)
ces restructurations, Lu, AOM et Marks and
Spencer coïncidant dans le premier semestre 2001 bénéficièrent d’une
médiatisation importante en même temps que d’une exploitation politique sans
commune mesure avec d’autres conflits. Cette “ popularisation ” permettait
aux pouvoirs politiques et syndicaux de se réintroduire dans le circuit de
médiation d’autant plus facilement qu’ils n’ignoraient pas que des solutions
existaient leur permettant de se targuer de la réalité d’un pouvoir dû
seulement à des circonstances spécifiques et que dès lors, les risques d’une
irruption de violence style Cellatex étaient particulièrement faibles. (4)
voir carte jointe, sur les implantations
des usines Moulinex et Brandt (5)
Un
exemple de cette “ violence organisée ” a été donné récemment par
ce qu’un journal a appelé “ le coup de force des Bata ” le saccage
de trois magasins parisiens de la marque de chaussures Bata par des travailleurs de l’usine de
Lorraine à Moussey qui doit être fermée partiellement avec 530 licenciements
sur 830 travailleurs ; les chaussures furent déversées sur la chaussée.
Ces travailleurs se battent depuis juillet dernier et au début de leur lutte
plus ou moins sauvage, lors de l’annonce de la mise de l’usine en règlement
judiciaire, avaient saisi un stock important de plusieurs dizaines de
milliers de paires de chaussures. Ils auraient pu utiliser ce trésor de
guerre comme monnaie d’échanges ou de récupération mais furent persuadés par
les syndicats de les restituer on ne sait sur quelle fallacieuse promesse. Mais
cette restitution n’a rien résolu et comme la pression de base augmente par
la conscience d’avoir été roulés, les syndicats ne peuvent faire autrement
que d’organiser des actions comme celle qui vient d’être mentionnée qui, pour
spectaculaires qu’elles soient sont soigneusement contrôlées et ne peuvent se
répéter. (6)
Sur les grèves de 95/96 voir la brochure
d’Echanges “ La lutte de classe en France, novembre et décembre 95,
témoignages et discussions sur un mouvement social différent ” ( mars
1996) |