|
![]() |
Depuis 20 ans, Gilles Maheu et sa troupe Carbone 14 ont tourné avec succès dans plus de 26 pays et remporté une trentaine de prix nationaux et internationaux. En 1985, Gilles Maheu reçoit le Prix de la meilleure scénographie pour Le Rail et en 1987, le Prix de la meilleure conception scénique pour Hamlet-Machine dans le cadre du Festival de théâtre des Amériques. En 1990, Le Dortoir obtient le prix de la meilleure choréraphie de l'année au 11th Dora Mavor Moore Awards de Toronto, de même que le Prix spécial accordé à l'unanimité par le jury du Cercle des critiques de la capitale (Ottawa). En 1991, on lui décerne, à New York, le Fipa d'or pour le film Le Dortoir.
En 1990, l'Association québécoise
des critiques de théâtre lui décerne le Prix spécial
pour la saison 1989-1990 pour sa trajectoire expérimentale qui a
marqué les années 80. En 1992, Gilles Maheu et Carbone 14
sont lauréats du Prix du Gouverneur Général, pour
les arts de la scène. En 1995, le Conseil des arts de la communauté
urbaine de Montréal décerne son Grand prix à Carbone
14 pour l'ensemble de son oeuvre de création depuis bientôt
20 ans d'existence, pour son apport exceptionnel à la vie théâtrale
sur notre territoire, et pour la notoriété internationale
qu'il a acquise. En 1997, il remporte, avec Les Ames mortes, le
Masque de la meilleure production théâtrale de l'année
au Québec.
Après
20 ans d'un parcours très personnel, comment en êtes-vous
arrivé à la comédie musicale ?
Quoique venant d'univers différents (la chanson et le théâtre d'avant-garde), il s'est établi entre Luc Plamondon et moi une très grande complicité. J'ai toujours aimé le spectacle musical, et lorsque Luc m'a proposé de mettre en scène Notre-Dame de Paris, ma réponse fut celle d'un enfant émerveillé devant un beau cadeau. Dès la première écoute de l'oeuvre, j'ai été ému par la pureté lyrique des musiques et la charge émotive des paroles. Avez-vous mis longtemps à imaginer comment vous monteriez ce spectacle ? J'ai tout de suite pensé que la
mise en scène devait être dépouillée, sans artifices,
pour être au service du livret et des interprètes, en toute
simplicité. Tout mon travail avec l'équipe de création
et les auteurs est allé dans le sens de cette épuration.
Dans une grande beauté formelle, donner à voir et à
entendre, à travers la sensibilité fragile du poète
|
de Quasimodo "le laid" pour
cette beauté gitane, de la jalousie puérile de Fleur-de-Lys,
de la révolte rageuse de Clopin contre l'ordre établi, de
l'amour aveugle d'Esmeralda pour un Phoebus-Casanova et de la désinvolture
de Phoebus, dandy gâté du pouvoir.
Comment voyez-vous le théâtre évoluer à l'aube de l'an 2000 ? Il faut retrouver l'art de troubler, de bouleverser. Je crois à un théâtre de l'émotion, à un théâtre du corps. La scène est le foyer d'un incendie, d'un ouragan, d'une tempête où s'affrontent des forces vives et dangereuses. Les objets, les acteurs, leurs mouvements et leurs textes ne sont que le medium extérieur d'un discours caché, d'un mystère plus profond qui est au coeur de toute création théâtrale et qui est le vrai texte d'une représentation. Le metteur en scène a le double rôle de Méphisto et de Faust aux portes de ce mystère. Quel est votre titre préféré ? "Tu vas me détruire", parce que c'est l'expression du désir blessé. |
Martino Muller, né en Suisse allemande il y a 35 ans, a étudié le ballet à la Theatertanzschule de St Gallen. En 1982, il gagne le Prix suisse du concours international de Lausanne. Il débute comme danseur au Staatstheater de Kalsruhe en Allemagne, puis passe au Stuttgart Ballet pour deux ans.
Il danse ensuite
pendant neuf ans avec le Nederlands Dans Theater sous la direction de Jiri
Killian. C'est pour cette compagnie qu'il crée sa première
chorégraphie en 1992 (Who's Watching Who ?) qui lui vaut
le prix de la Fondation pour les arts d'Amsterdam. Il y donne un autre
ballet en 1994 (Heidi). En 1995, il reçoit le prix Jacob
Burckhardt de la Goethe-Stiftung à Bâle. Muller met fin à
sa carrière de danseur en 1995. Il a chorégraphié
depuis pour le Donau Ballet de Zagreb, le Ballet de l'Opéra de Lyon,
le Ballet de Berne, le Stuttgart Ballet et pour l'Opéra de Berlin.
Comment
Gilles Maheu vous a-t-il choisi comme chorégraphe de Notre-Dame
de Paris ?
Après avoir visionné en vidéo quelques-uns de mes ballets. Notre première rencontre a duré neuf heures! Nous avons "cliqué" tout de suite. Gilles souhaitait du mouvement plutôt que des pas de danse. Et ça tombait bien. Je savais qu'en danse on ne pouvait pas lever la jambe plus haut. J'avais besoin du mélange des genres. J'avais déjà travaillé avec des acteurs en montant Hamlet en Hollande. Sur Notre-Dame de Paris, quel genre de troupe dirigez-vous ? Je travaille avec douze danseurs (six filles et six garçons), deux acrobates (deux "Yamacassi", des rappeurs-danseurs-cascadeurs du nom de leur groupe) et sept chanteurs-acteurs. Depuis le 1er juillet, nous avons répété sept heures par jour avec |
une grande discipline. L'essentiel
de mon travail consiste à savoir comment occuper l'espace en valorisant
chacun. Mon défi est de créer avec eux. J'essaie de ne pas
rendre les choses trop dangereuses pour que chacun puisse tenir le rythme
sans risque d'accident.
Quel est votre relation avec les autres concepteurs du spectacle ? Nous nous inspirons les uns les autres : la mise en scène, le décor, les lumières, les costumes, le livret et la musique. Et cela, c'est très rare. De cet état de grâce se dégage une incroyable énergie. Et au-delà de la performance, nous privilégions l'émotion. Quel est votre titre préféré ? "La monture", parce que ça me rentre dans l'estomac. |
Née à Marseille en 1966, Fred Sathal, star montante de la mode, a déjà présenté neuf collections à Paris, les quatre premières au Trianon : en 1994 A ma zone urbaine et Etoile de vie filante, en 1995 Nomades Land et Métamorphoses articulées, en 1996 Vie artificielle puis Contre nature au Carrousel du Louvre, en 1997 Appel d'air à l'Académie d'architecture et Instincts génétiques à la Galerie Paradis puis à Tokyo, et en 1998 Aura minérale au 56è étage de la tour Montparnasse.
Le Musée de la mode de Mamrseille acquiert en 1994 deux vêtements de Fred Sathal intitulés Signal d'amour et lui consacre une exposition photographique en 1995. La même année, elle expose au Musée d'art moderne de Paris huit anatomies dans l'espace sous le titre Etant donnée, et Bendel à New York présente une vitrine Fred Sathal. Elle conçoit et réalise le costume de la Ice Queen pour la publicité Perrier. Elle est lauréate du concours de l'A.N.D.A.M. et de la Vénus du "futur grand" pour sa collection Métamorphoses articulées, dont elle présente onze personnages aux Trophées de la mode. En 1996, le Fonds national d'art contemporain lui commande le concept "T-shirt thématique SFS" pour l'exposition Monuments et modernités. En collaboration avec Enki Billal, elle crée les costumes de Roméo et Juliette pour le ballet d'Angelin Preljocaj. Elle est nominée aux Trophées de la mode 1996. Elle expose, en 1997, trois oeuvres à l'Espace Laurence Hazout à Paris : Frontière Anonyme, Erosion et Welcome On The Limpid Earth.
L'imaginaire fantasque de Fred Sathal se transforme chaque saison en vêtements, à la construction complexe, et auxquels une réalisation, le plus souvent artisanale, donne poésie et sophistication. Formée à la rigueur technique du costume de théâtre et de danse, sa mode accompagne le corps, sans jamais le contraindre. Les 120 costumes de Notre-Dame de Paris sont pour elle comme une très grande collection, qui vient s'inscrire dans la suite logique de son travail.
A l'écoute des voix, elle a construit
un à un les personnages, afin de rendre aisément identifiable
leur rôle spécifiques, afin de rendre aisément identifiable
leur rôle spécifique, tout en leur donnant à tous "un
air de famille". Loin de toute reconstitution historique, les costumes
évoquent des archétypes d'un quotidien rêvé.
Cette crédibilité contemporaine des caractères s'est
élaborée au plus près du corps de chacun, avec de
nombreux essayages comme en couture. Les amateurs de mode reconnaîtront
les patronages très élaborés en pièces articulées
les unes aux autres et le goût du décor et de la teinture
artisanale, caractéristiques du style de Fred Sathal. Seconde peau
de chaque acteur, le costume se fait oublier en devenant la peau véritable
du personnage.
Quel est votre
titre préféré ?
"La monture", parce que j'aime ce qui est dit dedans, ça me touche.
En constante évolution technique
et artistique, il diversifie ses expériences auprès de différents
metteurs en scène de la danse et du théâtre, dont les
chorégraphes Marie Chouinard et Edouard Lock, chefs de file de la
danse montréalaise, et le metteur en scène Robert Lepage,
avec qui il collabore à la création du spectacle multimédia
Elsemeur, et auprès de qui il travaille sur le show US de Peter
Gabriel en 1993. C'est cette même année qu'il crée
les éclairages pour Starmania
de Berger-Plamondon, monté par Lewis Furey au théâtre
Mogador. Sa collaboration avec Gilles Maheu date de
plusieurs années : il est devenu le complice de toutes ses créations,
dont Les Ames mortes pour laquelle il reçoit le Masque 1996
du meilleur éclairage. En 1997, il se tourne vers l'opéra
avec le Nabucco de Verdi à Munich et l'Oedipus Rex
de Stravinski à Toronto, pour lequel il reçoit le Dora Mavor
Moore Award 98.
Comment
définissez-vous votre longue collaboration avec Gilles Maheu ?
Gilles Maheu est un metteur en scène de l'image comme un grand maître devant sa toile. Gilles Maheu peint des tableaux où la poésie, l'énergie et l'émotion touchent le spectateur. Moi, j'ai la chance d'être un outil de sa création. Comment différenciez-vous votre travail entre le théâtre, le tour de chant et la comédie musicale ? Le travail du concepteur des lumières reste à la base toujours le même. Dans un art "mathématique", avec une technologie de pointe, transmettre toutes les gammes d'émotion en appuyant sur un bouton... |
Qu'est-ce
qui vous a motivé dans Notre-Dame de Paris ?
Le plaisir de travailler avec plusieurs artistes que j'avais connu sur différentes créations, maintenant réunis pour un grand coup ! Entre Starmania et Notre-Dame de Paris, votre vision des lumières est-elle aux antipodes ? Oui car tout est toujours à refaire, à réinventer. La création est ce magnifique malaise de la peur et du risque. Quel est votre titre préféré ? "Florence", parce que c'est une chanson écrite uniquement avec des faits qui suggèrent tout une époque mieux que des images. |
Il collabore régulièrement avec le théâtre du Préau de Vire sur des spectacles pour jeune public. Il signe les décors de nombreux opéras : Le songe d'une nuit d'été et L'Enfant et les sortilèges pour l'opéra de Lyon, Didon et Enée, L'Histoire du soldat, Le Couronnement de Poppée, Werther et La Flûte enchantée à Lausanne, Salomé, Rusalka au festival de Spoleto USA, Iphigénie en Tauride à Francfort et au Welsh National Opera, Seraglio et Jenufa à Tel Aviv, La Belle Hélène au Scottish Opera.
Récemment, il réalise les
décors d'un cycle Gluck à l'Opéra de Strasbourg :
Iphigénie en Tauride, Orphée et Euridice, Alceste. Actuellement,
il est chargé de cours de scénographie à l'Ecole supérieure
d'art dramatique du Théâtre National de Strasbourg.
La
comédie musicale est-elle éloignée du monde de l'opéra
où vous évoluez ?
Avoir l'occasion de travailler sur la création d'un spectacle musical de cette envergure était pour moi une aventure sans précédent. Ce spectacle a été l'occasion de réunir des personnalités très diverses venant d'horizons artistiques différents. Une grande complicité de travail est née petit à petit de cette alchimie. Depuis combien de temps travaillez-vous sur ce projet ? Les toutes premières rencontres autour de Notre-Dame de Paris remontent déjà à plus d'un an. Sur les décors, le processus a été assez long, fait de projets très différents, de critiques de maquette, de remises en question pour aller toujours vers une simplicité, un équilibre, une efficacité. Y'a-t-il une hésitation entre l'historicité et l'actualité du sujet ? L'objectif était de bâtir un univers poétique, sans fioritures, libéré de toutes références historiques et réalistes, de mettre en avant la théâtralité en s'éloignant du spectaculaire "cinématographique", sans avoir peur d'utiliser des espaces dépouillés et de s'appuyer sur des images abstraites permettant de mieux mettre en valeur la richesse des rapports entre les personnages de l'histoire. |
Est-ce
que des matériaux se sont imposés à vous ?
La pierre, le métal et la transparence ont été très vite les matériaux et les thèmes vers lesquels je me suis tourné, en référence à certains textes chantés particulièrement par Gringoire. Comment l'oeuvre vous a-t-elle inspirée ? Mon souci permanent était de mettre en valeur la force des textes et la beauté de la musique en offrant un maximum de possibilités scéniques au metteur en scène et au chorégraphe. Pour moi, le décor doit servir à répercuter et à amplifier l'émotion qui jaillit de la scène. Un projet comme celui-ci est rare et fragile. Il était important pour nous tous de faire en sorte que le public se retrouve dans l'histoire de Victor Hugo, mais aussi qu'il puisse établir des liens avec notre époque, notamment sur le droit à la différence. Quel est votre titre préféré ? "Vivre", parce que... |