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Chapitre 4: Douter
Joey sortit de la chambre, la feuille toujours à la main. Il la porta à ses yeux mais ne pu que déchiffrer que quelques mots… « Et… contre sa … peau… le vam…pire se… colla… », Il lui était quasiment impossible de lire sans ses lunettes. Non qu’il en a vraiment besoin dans la vie de tous les jours mais lire, écrire ou même regarder la télé lui paraissait comme une image floue et assez dure à débrouiller. Alors il la plia soigneusement et descendit l’escalier jusqu’au hall d’entrée. Là il entendit des rires et des exclamations dans le salon… L’une de ses voix lui était familière mais l’autre… Marianne conversait avec un homme. Joey ne se laissa pas désirer (même si on ne l’attendait pas vraiment…) et entra franco dans le salon. Marianne et le mystérieux inconnu stoppèrent net leur conversation et lui jetèrent des yeux médusés. Ils étaient tout deux assis sur le divan et se tenaient presque la main. Marianne semblait offusquée, honteuse… L’individu, lui, prenait des airs de grands hommes… Joey remarqua ses habits bien faits et ses cheveux « magnifiquement » bien plaqués sur son crâne par quelques dizaines couches de laque. Brun, les yeux noisette, ressemblant fort à ses conquêtes les plus jeunes et les plus riches et snobinardes.
- Que faîtes-vous ? Je ne vous ai pas fait demander à ce que je sache !!!Lança Marianne.
- Je sais. Je voudrais simplement les clés de votre chambre pour me reposer un peu.
Marianne se mit à rire aux éclats.
- Mais bien sûr… J’ai entièrement confiance en vous !
Joey se contenta de sourire et de secouer légèrement la tête. Il mit ses mains dans ses poches et attendit que Marianne se calme.
- Allez dormir autre part ! Ma chambre n’est ouverte qu’à moi seule.
- Ce n’est pourtant pas ce que vous sembliez penser cette nuit même.
Il se tourna vers l’inconnu.
- Puisque vous ne paraissez pas vouloir acccéder à ma demande, peut-être pourrirez-vous nous présenter tout les deux.
Marianne rie de plus belle et se leva, tendant une main chaleureuse vers l’homme assit sur le divan.
- Mais avec plaisir. Prosper, je te présennte Joey… heu…
- Daho, termina Joey en souriant sans touttefois quitter le dit Prosper des yeux.
Ce dernier se leva et lui serra la main. Il a de la poigne, se dit Joey, la poigne d’un dominateur. Fier… Arrogant… Voilà comment Prosper le regardait, comme un insecte. Ils faisaient la même taille mais Prosper semblait vouloir se grandir, le dépasser comme il savait qu’il le dépassait en classe, en rang… Leur main se touchait, se serrer l’un à l’autre, voulait savoir qui serait le plus apte à mette un terme à la douleur. Les yeux dans les yeux, ils se scannaient du regard… Joey ressentait un degré de perversion qui le fit presque frémir. Il en avait connu quelques uns comme lui, qui avait voulu le posséder jusqu'à ses moindres faits et gestes, jusqu’aux plus profonds recoins de son âme. Prosper le regardait, un sourire comparable au sien. Moqueur mais perfide aussi.
- Bien, dis Marianne, je vais vous laissezz. Faîtes plus ample connaissance.
Elle s’approcha de Joey.
- Vous êtes invité au repas de ce soir. Ett après, je voudrais que vous dormiez dans la chambre d’ami. Elle se trouve au troisième étage, en face de la chambre d’Emma. Elle vous y conduira.
Elle se tourna enfin vers Prosper qui avait fini par lâcher la main de Joey et l’avait mis à son tour dans sa poche.
- Je vais me préparer. A tout à l’heure. <
Elle sort. Laissant Prosper et Joey… seuls.
- Vos vêtements sont prêts. Je vous les pose sur le lit… Théo ?
Théo se regarda dans la glace. Ses cheveux étaient mouillés. Il prit une serviette sur le radiateur et se frotta vigoureusement le cuir chevelu puis reposa ses yeux sur le reflet qui lui renvoyait une image pratiquement hilarante de lui-même.
- Théo ! Pourquoi ne répondez-vous pas ? Vociféra Emma derrière la porte.
- Je sors, lui répondit-il si bas qu’il cru pendant un moment qu’elle ne lavait pas entendu. Mais un long soupir et des pas lourds sortant et s’éloignant de la chambre lui assurèrent le contraire.
Lui aussi soupira en tentant tant bien que mal de coiffer ses cheveux noirs en bataille. Mais c’était peine perdue, et ce depuis dix-sept ans. Il reposa le peigne et regarda ses mains, fines, blanches... si blanches que l’on pouvait voir les infimes petites veines violettes qui en couraient le long. Ses doigts se posèrent sur sa joue baissée, et lentement il releva les yeux vers le miroir.
Théo contempla son visage, ses yeux verts, ses joues blanches, ses lèvres minces et roses. Il se sentait presque aussi gêné que s’il avait été devant un étranger… Comme si il se voyait pour la première fois… Quelle sensation bizarre… Celle de sortir de cette enfance où l’on ne se souci pas vraiment de soi-même, de son apparence… Et de se retrouver face à son reflet comme devant la personne la plus incongrue que l’on ait pu rencontrer. D’essayer aussi de trouver une infime trace de beauté en soi… De se dire que l’on pourrait plaire à quelqu’un…
Mais il plaisait à Prosper et d’après ce qu’il avait pu en juger… c’était aussi le cas de Joey. Il était jeune, il voulait prendre conscience de son apparence, de celle qu’il renvoyait et de celle qu’il cachait à tout prix. Le prenaient-ils pour un idiot ? Parce qu’il était assez frêle et fragile, peut-être pensaient-ils qu’il était aussi un « coup » facile que l’on pouvait se permettre d’avoir ? Prosper était bien amoureux de lui… mais l’amour ne changeait pas vraiment ses manières de vivre comme il pourrait le faire sur d’autres personnes. Prosper était un homme possessif, jaloux, hautain, égoïste, méchant, irascible, violent aussi s’il n’avait pas ce qu’il voulait et d’ailleurs, il voulait tout, tout de suite, sans attente qui lui ferait perdre son temps, impatient, mégalomane…
Théo esquissa un petit sourire. La liste était longue. Non, Prosper n’était décidément pas l’homme idéal. Il pouvait aimer… bien sûr, son cœur n’est certainement pas en pierre… comme celui de Joey.
Joey… Lui, il était vraiment beau. Comment pouvait-il encore en douter. Théo en rougissait presque. Oui, il trouvait Joey physiquement à son goût… Non, non, qu’est-ce qu’il raconte !!! Joey était peut-être beau mais son cœur… il ne peut pas aimer lui !!! Comment le pourrait-il ? En passant d’un corps à l’autre sans se soucier que du nombre de pièces qu’il recevra après ses performances !
Mais comment ne peut-on pas aimer ? Aimer la chair… Voilà ce que Joey préférait… Mais aimer de cet amour éternel, idiot, ridicule, ce sentiment dont on ne parle que dans les livres… Théo pourrait-il lui aussi ressentir un tel sentiment ? Pourrait-il être réciproque ? Si c’est le cas, cela ne doit pas arriver très souvent. Juste quelques âmes dans le monde doivent bien en profiter mais… pas tout le monde. On a beau dire que « chacun a quelqu’un qui l’attend sur la Terre », peu de gens la trouve. On ne vit pas dans un monde aux réalités toutes blanches et toutes noires… Tant de gens sont malheureux, tant d’enfants n’ont jamais eu l’occasion de se poser les mêmes questions… Son histoire, à côté de la leur, ne vaut rien. Mais il se les posait ces questions qui germent à l’adolescence. Les premiers signes d’un désir certain envers un autre corps… Physiques seulement peut-être, certainement.
Théo savait, il le ressentait au plus profond de lui-même, qu’il ne résisterait pas très longtemps. Même s’il se disait que ce ne serait qu’une relation sans lendemain. Il faut bien une première fois non ? Une première fois à tout. Et tant qu’il désirait Joey… ce serait plutôt réussi…
Mais écoutez-moi ! « ce serait plutôt réussi » ! Ce mur que j’ai construit autour de moi, ces silences que mes parents m’ont obligés à renforcer… ce n’est pas pour que le nouvel amant de ma mère vienne les faire s’écrouler ! J’ai toujours voulu attendre le vrai, le grand amour pour me lancer… et pas une simple relation physique avec un homme que je connais à peine ! … Un homme rencontré il y a… HIER !!!
Théo se prit la tête entre les mains et se tira les cheveux comme pour chasser toutes ces idées qui hantaient son esprit.
Et voilà ! Si quelqu’un entre à ce moment-là, il te croira complètement fou.
Il se calma. Regardant une dernière fois son reflet dans le miroir il soupira. Puis se résigna à aller s’habiller pour… la soirée.
Joey s’avança vers le guéridon près de la fenêtre et prit une des cigarettes du paquet qui s’y trouvait posé. Derrière lui il entendit Prosper prendre une grande bouffée d’air. Attention, se dit-il, premier round.
- Vous avez demandé avant de prendre une de ces cigarettes ? demanda Prosper sur un ton faussement poli.
Joey se tourna vers lui, sortit son briquet de la poche arrière de son jean, alluma d’un geste sûr sa clope et inspira une longue bouffée qu’il soupira lentement quelques secondes après. Puis il pointa ses yeux gris sur Prosper qui le regardait de son air… enfin, vous voyez.
- C’est mon paquet, avoua enfin Joey dans un sourire moqueur.
Prosper soupira.
Et 1 pour moi, se dit Joey. Je sens que l’on ne va pas beaucoup s’aimer monsieur.
- Vous venez d’où ?
Joey écarquilla les yeux, la question avait été posé si vite qu’il n’avait compris qu’une partie.
- Pardon ?
Prosper sourit à son tour comme s’il venait de gagner une manche. Doucement mon vieux, tu vas croire maintenant que je suis inculte juste parce que tu ne sais pas articuler ?
- D’où – venez – vous - ? répéta-t-il lentement en ouvrant bien la bouche.
Très bien, je vais jouer à ton jeu.
- De la chambre de votre tante.
Prosper rie dans ses dents mais son sourire s’effaça vite lorsqu’il vit les yeux moqueur que Joey braquait sur lui. En toussant (ce qui n’était qu’un prétexte pour mettre sa main devant sa bouche et ne plus voir le regard de Joey) il s’assit sur le canapé et croisa les jambes.
- Et c’est bien là-haut ?
Oh la la, on ne va pas aller très loin comme ça… Si tant est que monsieur est envie d’y aller.
- Très bien, vous venez visiter ?
Prosper lui lança un regard offusqué !
Mais bien sûr, ne me dis pas que tu n’y a pas pensé…
- Non, dit-il presque en le criant pour que Joey sache que, et bien, c’était Non !
Ce dernier se pencha un peu en gardant sa cigarette près de sa bouche.
- Je plaisante bien entendu.
Prosper s’affala d au fons du divan et étendit ses bras sur le dossier.
- Je la savais, mais un … comment dire… unn homme qui vend… enfin
Comme si tu ne te gênerais pas pour le dire.
- Prostitué ! C’est bien cela que vous cheerchez ?
Mais Joey n’allait pas être vexé pour si peu. Au contraire, cela le faisait plutôt rire qu’autre chose. Ce Prosper était décidément un être de grande bourgeoisie. Le simple fait de le « traiter » de prostitué lui faisait croire qu’il lui était supérieur. Et bien si ça lui faisait plaisir, pourquoi l’en priver ?
- Oui, c’est cela. Donc…
- Donc, vous saviez que je plaisantais maiis un prostitué comme moi…
- Oui, un homme de votre… rang doit cherchher tout les moyens pour… vivre. Alors…
- Vous n’êtes pas mon genre désolé.
Prosper sembla encore plus offusqué. Tiens, tiens ! Quel idée d’être offusqué lorsqu’un homme vous dit que vous n’êtes pas son genre… alors comme ça monsieur Prosper, vous ne diriez pas non, non plus ?
Intéressant… mais c’est définitif, vous n’êtes vraiment pas mon genre.
- Et…
La porte s’ouvrit soudain. Joey se tourna vers l’intrus, désolé de ne pouvoir continuer cette conversation si plaisante, mais fut saisit en voyant entrer… Théo ! Plus beau que jamais ! Il était vêtu de noir, ce qui faisait encore plus ressortir ses magnifiques yeux de jade et son teint si blanc… Ses cheveux étaient un peu mouillé et luisait sous la lumière du jour déclinant, il dégageait un agréable parfum de menthe… Comme il était beau ! Joey failli laisser tomber sa cigarette mais se ressaisit.
Théo avait l’air surpris de les voir tous les deux dans la même pièce.
Joey… et Prosper… ensemble dans le salon ?
Théo avait ouvert la porte avec élan mais s’était soudain immobilisé… Il était inévitable qu’ils se rencontrent un jour ou l’autre mais Son regard croisa celui de Joey. Ce dernier le regardait calmement comme perdu dans ses pensées… On se demande lesquels. Mais Théo chassa cette phrase aussi vite de sa tête et lui sourit légèrement. Joey parut surpris par ce soudain élan de gentillesse puis sourit à son tour.
- Théo !!! fit soudainement une haute voix qui le fit sursauter.
Prosper s’était levé et se tenait devant lui, un rictus étrange sur les lèvres. Théo se demanda s’il s’agissait d’un sourire ou d’une grimace de jalousie face au sourire qu’il avait jeté à Joey.
- Comme je suis heureux de vous voir.
Il voulu poser sa main sur l’épaule de Théo qui se recula, faisant mine de fermer la porte.
- Moi aussi, murmura-t-il faiblement entree ses dents.
Il regarda à nouveau Joey…
- Vous dînez avec nous ce soir ?
Joey fit mine de réfléchir.
- Hummmm… Si je suis le bienvenu bien enteendu…
Comme si vous alliez refuser d’assister à ces scènes de « famille » si… chiantes…, lui dit Théo par pensées. Joey scruta son regard et sourit, pendant un moment le jeune homme crut qu’il avait compris ses pensées.
- Votre mère l’a invité… Je me demande bieen pourquoi d’ailleurs ! lança une voix derrière eux.
Théo se tourna vers Prosper.
- Tout simplement parce que C’EST un invitté ! dit-il avec tout le calme qu’il pu.
- Un bien drôle d’invité… ironisa Prosper..
Joey rie doucement.
- Je peux tout aussi bien dîner dans la cuisine avec Emma…
Prosper sauta sur l’occasion.
- Vous pensez ? C’est un repas de famille… Je ne sais si…
- Il en est hors de question !
Théo lança un regard de reproche à Prosper qui baissa les yeux de mécontentement. Puis il se retourna vers Joey :
- Vous dînerez avec nous. Je ne vois pas pourquoi Mère vous aurez invité si elle pensait qu’il s’agissait d’un repas de famille. Et puis je pense que votre présence sera la bienvenue.
- Comme animal de foire sans doute… Comme à chaque fois que…
- Prosper !! Si cela ne vous convient pas, ne venez pas nous rejoindre !
Le jeune homme se dirigea vers la petite bibliothèque et prit l’un des livres dont elle était pourvu. Sans regarder les deux hommes, il sortit du salon.
Joey et Prosper restèrent de nouveau seuls.
- « Très cher Prosper… Si cela ne vous convient pas… ne venez pas… » répéta Joey avec un demi sourire inscrit sur le visage.
- Ne vous moquez pas de lui ! lui lança Prosper en haussant le ton
Joey prit son paquet de cigarette et se dirigea vers la porte.
- Ce n’est pas de lui que je me moque, dit-il d’une voix des plus calmes.
- Vous ne méritez pas sa clémence !
- Je le sais fort bien. Vous non plus d’ailleurs.
Prosper se tourna vers lui.
- Que voulez-vous dire ?!!!
- Comme si je n’avais pas remarquer votre manège.
Joey sortit à son tour. Laissant Prosper seul face à ses réflexions douteuses.
A suivre...
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