Vesticulations
27 septembre 1999. Alors qu'il vient juste d'être enjoghourté par nos soins, Christoph Blocher déclare, avec la bonhommie qui fait tout son charme: "ce sont les risques d'un politicien". Et le lendemain, la presse relève avec une belle unanimité que le Zurichois a réagi à l'attentat avec philosophie et bonne humeur, tandis que la veste maculée était prise en charge par le service de nettoyage du Lausanne-Palace. Youpie. Puis la veste est retournée et le masque tombe. Le jovial philosophe milliardaire dépose plainte pénale pour "dommage à la propriété", soit les dégâts subis par sa veste (dimanche.ch du 19.12.99). Eloquente en soi, la démarche appelle encore deux commentaires (au moins): 1) La prétendue "recrudescence de criminalité liée aux abus de l'asile" ne doit pas être très préoccupante si Blocher, pourtant sensible à la question, pense que la Police lausannoise doit consacrer son temps et son énergie à traquer des farceurs coupables d'avoir taché une veste. 2) Plus grave: la plainte du milliardaire zurichois jette le discrédit sur le Lausanne-Palace, dont tous les médias ont annoncé qu'il avait pris la veste en charge. Le Service de nettoyage du prestigieux établissement ne serait-il pas parvenu à faire disparaître totalement les traces de joghourt? Nos propres essais en laboratoire démontrent pourtant que la chose est facile. Ou pire, le Palace aurait-il eu l'indélicatesse de facturer le nettoyage au malheureux Blocher? On n'ose le croire. Quoi qu'il en soit, c'est la réputation du Lausanne-Palace qui est en jeu. Il ne reste plus à sa Direction qu'à déposer une plainte pénale contre Christoph Blocher, pour diffamation. L'affaire, on le voit, peut prendre des proportions gigantesques. On ignore si la veste, à la fois enjeu et pièce à conviction cruciale, est versée au dossier pour les besoins de l'enquête. Si tel est le cas, Christoph Blocher peut toujours en porter une autre en attendant: celle, somptueuse, qu'il a obtenue le 15 décembre 1999 à Berne, lors l'élection au Conseil fédéral. |