‘ Car l’amour et la mort n’est qu’une même chose.’
(
Pierre de Ronsard)
Oui,
cette réflexion semble avoir surpris l’essence de la poésie ronsardienne,
parce que nous ne rencontrerons jamais, ni dans la littérature française, ni
même dans la littérature universelle un si profond culte pour l’amour
charnel, presque désesperée, un sentiment si fort, si dolouresement doux, que
nous serions tentés à le confondre avec un poison. Alors, ce particulier
détail c’est cel qui paraît nous chuchoter que l’amour ronsardien est si
intense que nous le prenons par la mort. La mort de la raison, surtout la mort
de l’égoisme, de la solitude et si l’amour n’est pas partagé, la mort
même, la mort de l’ésprit humain. Douleur et souffrance, béatitude et joie,
toutes sont merveilleusement décrites par la plume de ce peintre renascentiste
qui fait naître des images par les mots, par la plume.
Qui est au fond Ronsard?
Est-il un poète comme tous les autres, un écrivain de la Renaissance qui
a seulement en la chance d’être le premier à apporter le sonnet
pétrarquiste en France? Ou est-il celui qui a fait de la femme le thème idéal
de al littérature française, qui a créé pour la première fois le prototype
féminin chanté à partir de lui par tous les écrivains français? Est-il le
premier chantre de la beauté féminine?
Nous ne pouvons pas parler de Ronsard sans décrire la période historique et le courant littéraire don’t il fait partie. C’est vital donc que nous présentions le mouvement de la Renaissance, qui nous a donné tant d’artistes universels, qui ont fait presque naître le concept d’art, comme nous le concevons de nos jours.
Le courant renascentiste répresente le retour de l’humanité aux valeurs de l’antiquité grecque et latine, considérées par els curés de l’époque médievale profanes et interdites pour le public. À commencer par Italie, toute l’Europe a été subjuguée par ce nouveau concept de vivre. Et la France a été entre les premiers pays à renjoindre cette mentalité.
Né en 1524 au château de la
Possonière et faissant partie d’une noble famille, le poète a aimé la
beauté ravissante des femmes de Cour (Cassandre
et Hélène) et la douce simplicité de la beauté paysanne (Marie). Il n’a
pas regardé les origines, le cisèlement de l’aspect extérieur, mais la
femme, la féminité qui reverberait dans toutes. Nous rencontrons dans ses
poésies, et particulièrement dans "les Amours",
qui sont son chef d’oeuvre, la préférence pour ce motif, la femme idéale:
"fit présence des beautés les plus belles", "votre age
fleuronne en sa plus verte nouveauté", "ta grâce enfantine",
"les
rayons de ta vue", "la terre et le ciel honoraient ta beauté",
"de ciel à peine elle était descendue", "vous êtes pareisseuse"
Alors, la femme aimée par Ronsard était
jeune, d’une jeunesse presque éternelle, avait un regard vif, comme si les
yeux étaient les plus important détail de sa figure, elle était grâcieuse,
mais il s’agit d’une grâce naïve, enfantine, la grâce d’une pucelle, et
elle avait aussi un corps fait pour donner et recevoir l’amour.
Cette femme semble être la beauté même, la perfection physique, l’un des éléments primordiaux, créés par le ciel et la terre au début de monde. Elle est une déesse, une fée, celle qui souvent donne aux humains une raison d’être.
Pour Ronsard
le corps est le plus important. Il chante par excellence l’amour physique,
profane, passionant et non pas comme les écrivains romantiques, le sentiment de
l’amour, l’amour spirituel. Alors, ce n’est pas la vertu, la raison, les
pensées qui comptent, mais les yeux, les lèvres, les cheveux, les mains, la
peau: "un main si soigneuse", "son bel oeil", "ta belle
main blanche", "ta vive lumière", "déchirent la peau".
La femme conçue par l’auteur n’est pas Minèrve, ni Artémise, elle est
Venus. Une Venus belle, pleine d’amour, de désirs et passions, quelque fois
une Venus cruelle: "êtes-vous
si cruelle de ne vouloir aimer?", autrefois virtueuse: "tout ce qu’Amour
concevoit de chaste et d’honeur",
mais 0tousjours charnelle, physique, réelle.
Les mots utilisés pour decrire cette beauté fantastique sont ceux qui ont tousjours caractérisé l’amour. Mais c’est Ronsard même celui qui les a consacrés comme symbols de ce sentiment doux et amer, doulourreux et joyeux, sacré et profane, céleste et terrestre. Premièrement la rose, et surtout la rose rouge deviendra par excellence le méssager d’amour: "allons voir si la rose", "qui les roses effacent", "ton corps ne soit que roses", "cueillez.. les roses de la vie", "votre beau rosier". Puis, les fleurs en général: les oeillets: "vos oeillets aimés", "les fleurs d’oranger", "les fleurs des rivages", "l’herbe fleurie". Tous ce monde floral est évoqué pour souligner l’importance de la matière, du physique, adns l’amour ronsardien. La beauté qui intéresse l’auteur, la beauté charnelle, est éphémère, et il utilise la rose pour nous le rappeler. Nous voyons maintenant la faiblesse de ce prototype féminin créé par Ronsard: l’éphémèrité de tous qui est physique et de l’amour profane aussi. Mais comme aucune chose créé par un être humain ne peut pas être parfaite, cette faiblesse nous fait voir la femme ronsardienne encore plus vive, plus réelle.
Les oiseaux sont ausii un élément souvent rencontré dans les sonnets. Le rossignol: "le rossignol frisquement jargonné", "le gentil rossignolet", la tourterelle, les colombeaux –destinés aussi à symboliser l’amour-, le ramier, "les amoureaux oiseaux" sont les créatures qui nous montrent l’amour comme une libération, comme un vol incertain vers le ciel, mais comme le seul sentiment qui puisse donner à l’homme l’impression d’élèvation.
Ses
poésies sont dediées à Cassandre,
Marie ou Hélène. La première est "une maîtresse belle, inaccessible,
insensible et il l’en estime et s’en désespère" (Y. Bellenger).
Elle devient son soleil, sa seule nourriture, sa vie même et nous y voyons
clairement la valence de femme idéale que Ronsard
lui donne: "ses dents sont perles, ses lèvres corail, ses cheveux sont
des rayons de soleil aussi bien que de liens, ses yeux sont des pierres
précieuses, des astres." (Y. Bellenger) Surtout dans ces premiers
sonnets on voit l’influence pétrarquiste qui était très en vogue au ses
temps. C’est pour ça que plus d’une personne ont vu en Cassandre
une nouvelle Laure. Mais tandis que Pétrarque a aimé Laure jusqu’au fin de
sa vie et puis l’a aimée morte, l’écrivain français a aimé plusieurs
femmes et seulement des femmes vivantes. On se demande aussi si le poète a
vraiement aimé cette jeune et riche dame. Faut-il conclure qu’elle fut
surtout un prétexte littéraire? Sa perfection et son amour iréel nous font
croire que le poète n’a pas aimé la personne réelle mais ce qu’il a vu
dans cette personne. Elle est tousjours présentée avec "un teint de
lis et de roses, d’une poitrine blanche comme le marbre et de cheveux
blondement dorés" (H. Weber).
Oui, Cassandre
représente un nouveau idéal de beauté féminine, different de celui imposé
par Pétrarque: "la beauté de Cassandre
formée par la réunion de tous les éléments de la nature, emporte le poète
<<jusqu’au giron des plus belles idées>>; la contemplation
amoureuse lui fait cannaître le Beau et le Bien"
(H. Weber). Dans toutes les poésies de 1552-1553 se sent "la présence
d‘un corps glorieux pareil au marbre" (R. Laffont).
Marie n’est qu’une jeune paysanne de Borgueil et elle est l’opposé de la première. Elle inssuflait à Ronsard un amour simple, naturel, naïf, contraire à celui complexe et précieux qu’il a senti pour la belle Italienne. Il nous semble que "le poète dialogue avec une jeune fille qu’il voudrait convaincre et pas forcer" (R. Laffont) et ses sonnets représentent ce combat intérieur, parce que cette Marie nous paraît ne pas avoir non plus grand-chose en commun avec la réalité. Elle devient un nouveau prétexte, cette fois pour que l’auteur puisse se détacher de l’image pétrarquiste. Robert Laffont dans son "Dictionnaire des oeuvres" nous explique que Ronsard "sait que, même en combattant, la femme aspire à rendre les armes". C’est pour ça alors qu’il veut convaincre Marie? Parce qu’elle était déjà convaincue? Alors, c’est clair qu’elle n’est qu’un autre prototype féminin, plus innocent, vierge et simple que le premier.
D’Hélène nous savons moins encore. Quoi que les uns disent qu’elle fût une des filles qui avaient fait partie de "l’escadron volant" de la reine-mère ; d’autres qu’elle s’appellât Hélène de Fonséque. Ce qu’il est certain est que le poète revient à l’image initiale de femme riche, somptueuse, sensuelle et fascinante. Ronsard nous aparaît brûlant, gélant, espérant et désespérant, malgré qu’il ne s’agisse pas d’un amour à première vue, comme dans les autres cas, mais d’un amour "par élection": "J’ai par élection et non à la volée aimé votre jeunesse".
Toutes
ces femmes, non pas réelles, mais la femme à l’état pur, sont d’une
beauté ravissante, charnelle, languissante, frémissante. Après plusieurs
années, Rubens peindra ce genre de beauté féminine et le rendra célèbre
tout autour de monde, mais la femme ronsardienne
restera un idéal difficile à toucher, parce qu’il représente la pefection
même. En effet, l’écrivain devient un nouveau Pygmalion, parce que la femme
qu’il a créé est si charnelle, que nous avons l’impression de la voir
devant nos yeux. Alors, Ronsard
a reussi même de donner vie à ses personnages, qui transcedent le rêve et
prennent forme matérielle.
L’amour a tousjours été un sujet universel pour les écrivains, n’important pas de quel courant littéraire ils ont fait partie, ou de quel pays ils proviennent. Mais les Français ont particulièrement cultivé ce sentiment profondément humain, le sentiment primordial, qui a déterminé le Demiurge de créer le monde. Ils ont inventé même un art pour spécial: l’art galant, pour conquérir leurs femmes. Et Ronsard est le créateur de l’idéologie typique française de l’amour, celui qui, dans ses poésies, a mis le fondements de ce art. Il est par excellence le chantre de l’amour, des joies et des douleurs, mais surtout l’initiateur de l’adoration éternelle avec laquelle les Français ont tousjours regardé la femme.