Extrait de Instincto Magazine n° 34, octobre 1990, Chronique par G.-C. Burger
Il subsiste encore, dans nos connaissances, bien des inconnues. Depuis 26 ans, nous pratiquons l'instinctothérapie, sans faire la moindre exception. Les règles de base se sont manifestées dès les premières années, puis lentement perfectionnées au fil des observations. Que d'erreurs on peut faire, d'ailleurs, en marge de ces règles ! II s'est avéré que la redécouverte de l'instinct est plus qu'une affaire de compréhension ou de rééducation : ce sont en définitive les structures psychiques mêmes de l'individu qu'il faut rebâtir. Comme je viens de l'exposer dans Meta III, ce fameux ego qui nous condamne à tant de souffrances, est la production directe d'une mauvaise intégration des instincts alimentaire et sexuel dès la plus jeune enfance. Retrouver une structure "naturelle" représente un travail de fond qui n'est pas possible sans la remise en place de ces deux instincts, et cela va bien audelà de ce que propose la psychanalyse. Mais c'est d'un phénomène d'un tout autre ordre que je veux vous entretenir aujourd'hui.
Le principe n° 1 de l'instincto consiste à se nourrir d'aliments auxquels notre génétique est adaptée. Cela signifie justement des aliments sauvages. Or il nous a été impossible, jusqu'à ces dernières années, de réaliser cette expérience. Nous avons pu éviter les autres artifices : toute dénaturation thermique et mécanique, ce qui est capital, le lait et ses dérivés dont la nocivité s'est largement confirmée, le blé et son gluten, également dignes de soupçons, la chimie, bien entendu, et l'on peut déjà se réjouir des résultats obtenus. Nicole et moimême, nous avons retrouvéet conservé une forme et une endurance que beaucoup nous envieraient à notre âge. Cela ne veut pas dire que nous aimons le surmenage ! Mais nous le supportons d'une manière qui nous surprend parfois nousmêmes. Un point, en revanche, n'était pas résolu. Depuis l'âge de douze ans, je trainais ce que les ophtalmologistes appellent une blépharite, avec une tendance permanente à la conjonctivite. En bon français, j'avais constamment les bords des paupières rouges avec formation de petites croûtes, et l'inflannmation s'étendait à l'intérieur des yeux pour la moindre irritation. Faciès peu favorable à la promotion de la méthode, qui m'était, évidemment, reproché à chaque occasion. Il y avait effectivement de quoi s'étonner du maintien d'un trouble inflammatoire de cet ordre, après un quart de siècle d'alimentation naturelle, alors que la méthode faisait par ailleurs systématiquement ses preuves : des états inflammatoires singulièrement plus graves se résorbaient en quelques jours... Petite observation significative: j'avais, il y a une dizaine d'année, essayé une crème pour les yeux d'Yves Rocher. Non pas par coquetterie, rassurezvous ! Tout simplement pour tester le produit. Le résultat avait été surprenant : disparition des rougeurs et des petites croûtes, mais à quel prix : j'avais l'impression de perdre mon acuité cérébrale, comme si les toxines antérieurement évacuées par le canal des yeux m'encombraient soudain les méninges. Aprés plusieurs tentatives terminées sur le même mode, j'avais abandonné, me disant que les canaux de détoxination ouverts dans l'enfance se maintiennent toute la vie, et qu'il valait mieux avoir la tête claire que les paupières normales...
Et voilà que cette année, le miracle s'est produit : au mois de février, tout signe inflammatoire a disparu, pratiquement du jour au lendemain. S'il y a eu transition, elle a été si rapide que je ne l'ai pas observée. Depuis cette période, aucune récidive. Je craignais, bien sûr, qu'il ne s'agisse que d'un sursis, d'une période où le trouble s'interrompait pour une cause mystérieuse. Mais rien à faire : surmenage, nuits blanches, excès d'insolation, forçage de l'instinct, rien n'a été capable, jusqu'ici, de ramener le tableau classique. Même le sable et la poussière ne me valaient qu'une inflammation passagère de la conjonctive, comme chez tout sujet normal. Avec maintenant six mois de recul, j'ai nettement l'impression que la rémission est stable. Bin sûr il ne faut pas vendre la paupière de l'ours avant de l'avoir tué...
Quoiqu'il en soit, il faut déjà se demander ce qui a permis d 'obtenir une telle rémission. Non pas que je ramène tout à mes petits problèmes, ou que je fasse d'un trouble mineur le centre de mes intérêts. Mais il y a certainement une leçon d'ordre général à tirer du fait particulier. Une inflammation quelle qu'elle soit est toujours une inflammation, et derrière le symptôme se cache une cause. Si nous trouvons cette cause, nous comprendrons mieux le processus inflammatoire en soi et les phénomènes attenants. Pour la médecine, l'inflammation est un mécanisme d'ordre immunitaire, où interviennent plusieurs hormones, des leucocytes et plus particulièrement les macrophages, grands éboueurs de l'organisme, ainsi que toutes sortes de facteurs connus et inconnus... En principe, comme tout phénomène immunitaire, l'inflammation est déclenchée par des antigènes, par exemple un corps étranger, une bactérie, des cellules lésées, etc. Bien des inflammations restent cependant inexpliquées, c'était le cas de ma blépharite. L' ophtalmologiste que le consultais il y a une trentaine d'année, me disait: "aucune bactérie, aucune cause apparente, on observe juste des incrustations." Incrustation pour dire formation de petites croûtes jaunes, le terme me parut, à l'époque déjà, impropre : je constatais que ces petites croûtes venaient de l'intérieur. Chaque soir, je me lavais les yeux, le matin également pour enlever les croûtes formées pendant la nuit, et je les voyais réapparaître en quelques heures, sans qu'aucune larme ou autre humeur ait pu les apporter. L'ophtalmo resta perplexe devant mes explications... C'est que nous touchons là à l'un des grands points obscurs de la médecine : la présence dans l'organisme de substances étrangères, d'origine alimentaire. Toute à ses illusions de chimie et d'antibiotiques, notre médecine moderne a négligé là une évidence que reconnaissaient implicitement les médecines plus anciennes. Les purges, les saignées, les abcès de fixation, les diètes, tout cela découlait immédiatement de la conviction que quelque chose, où l'alimentation jouait un rôle non négligeable, s'accumulait dans le corps et devait en être extrait. L'avantage insigne de l'instincto, c'est que, sans théorie, ni diagnostic, ni prescription, les voies d'élimination s'ouvrent toutes grandes. Encore fautil que les conditions adéquates soient réunies. Le corps ne lâchera pas les molécules accumulées au fil des ans sans qu'un facteur stimule cette élimination. Et l'observation semble montrer régulièrement que c'est l'apport d'une substance alimentaire nouvelle et correcte qui déclenche l'extraction des molécules indésirables.
Voici toujours comment les choses se sont passées. Pour la première fois, grâce aux nouveaux circuits d'approvisionnement de"la société de vente des produits naturels", nous avons enfin pu disposer d'un fruit sauvage dont raffolent les primates : le cempédak. Un fruit qui, à certains dont moimême, a paru meilleur que le durian, et ce n'est pas peu dire... Les aléas de l'importation et les difficultés de conservation me valurent d'en faire une cure prolongée, au point qu'à la fin, quelques bouchées du fruit me déclenchaient une irritation du palais. Une irritation qui me rappelait avec précision les démangeaisons que je ressentais dans la cavité buccale justement à l'époque où s'installait ma blépharite, et qui s'accompagnait comme par hasard d'une rougeur accrue des paupières. Puis, changement de scénario: des boutons d'un genre nouveau, rappelant l'impétigo en plus corsé, apparurent en divers endroits de mon corps, pour la plupart cachés par les habits d'hiver (les virus font bien les choses...). Une sensation qui allait du pincement à des démangeaisons rappelant étrangement celles que je ressentais dans mon palais. Cellesci disparaissaient juste en même temps. L'hypothèse la plus simple : les molécules accumulées dans ma jeunesse, qui entretenaient l'inflammation chronique des paupières, étaient enfin libérées par l'arrivée en masse de molécules mieux adaptées présentes dans le cempedak, puis évacuées par l'émonctoire spécialisé que constituaient les éruptions. Une fois le nettoyage effectué, l'ancienne inflammation, vieille de 44 ans, n'avait plus de raison d'être...
S'il faut vingtcinq ans d'instinctothérapie pour guérir d'une blépharite, me direzvous, autant recourir aux expédients du pharmacien... Justement, la panoplie de remèdes que me proposaient les ophtalmologistes consultés au long de cette longue et disgracieuse carrière, s'étaient révélés inefficaces, voire aggravants. Je me tenais prêt à affronter la tombe avec des yeux plus rouges que si j'avais pleuré sur mon propre sort... L'expérience, quoique désespérément longue, confirme au contraire toute une série d'hypothèses que contredisait le maintien de l'inflammation. D'abord, l'explication moléculaire, qui coïncide de manière étonnamment précise avec les faits observés. Ensuite, le fait que des molécules étrangères peuvent séjourner dans um organisme pendant de longues années.,voire la vie entière. Et surtout le rôle que jouent les aliments vraiment "originels", ceux qui faisaient partie de notre plage alimentaire primitive et que nous avons oubliés au fin fond des forêts tropicales à force de surcharge alimentaire. Ces ancêtres lointains de notre alimentation apportent des substances auxquelles notre programmation génétique est particulièrement adaptée ; nous éprouvons de ce fait à leur consommation des phases Ðparticulièrement extatiques, et les molécules absorbées sont aptes à déclencher des réactions que peut-être aucun autre facteur ne saurait déclencher. Il est vrai qu' on ne peut rien conclure d'une expérience unique. Mais cette expérience s'ajoute à une liste déjà très coséquente d'observations du même ordre. Elle me touche simplement de plus près, non pas que ma beauté m'importe particulièrement, mais parce que j'ai pu observer une fois encore, dans le détail, un processus de détoxination particulièrement clair, dont l'échec prolongé infirmait la théorie. Et peutêtre aussi parce que ma gueule sert d'effigie à la démarche dont j'ai pris, bien malgré moi, la responsabilité. Des yeux rouges, ce n'était évidemment pas fameux pour la pub. Même certains végétariens criaient sur les toits: "c'est la preuve que la viande est nocive". Aujourd'hui, je peux leur répondre: "Non, c'est le cempédak qui me manquait"...