Introduction


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Table des matières

 
1. Le pays et la situation économique
2. La population
3. L'économie
4. La pauvreté et la sécurité alimentaire sans les villes
 

1. Le pays et la situation économique
 

La République démocratique du Congo (RDC) s’étend sur une superficie de 2,345 millions de km². Situé au cœur de l’Afrique, la RDC s’ouvre à l’Ouest sur l’océan atlantique et est entouré par la République du Congo, la Centrafrique, le Soudan, l’Ouganda, le Rwanda, le Burundi, la Tanzanie, la Zambie et l’Angola. Au plan administratif, le pays est subdivisé en 11 provinces (y compris la province de Kinshasa).

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2. La population

La population résidente a été estimée en 2001 à 52.5 millions d’habitants[1] (densité de 22 hab/km²), dont environ 30% vivent dans des centres urbains. Le taux d'accroissement de la population est estimé à 3.2% par an et la population totale pourrait atteindre 84 millions en 2015 ([2]).

La population urbaine est en constante expansion au niveau mondial : ce phénomène touche également la République Démocratique du Congo (RDC) où la population urbaine en 2001 fut estimée à environ 20 millions de personnes, ce qui représenterait environ 30% de la population totale du pays. La population de la seule ville de Kinshasa, capitale de la RDC, représente actuellement 6 à 7 millions de personnes et continue à croître à un rythme annuel de 4 à 6 %, soit environ quelque 100.000 personnes supplémentaires par année. Pour les autres grandes villes du pays, les populations urbaines sont estimées en 2002 à 2.5 millions (Mbuji Mayi), 1.25 millions (Lubumbashi), 1 million (Kananga), 600.000 (Mbandaka), 415.000 (Kikwit), 245.000 (Matadi), 235.000 (Likasi), 210.000 (Kolwezi) et 100.000 (Mbanza Ngungu). La population urbaine de ces 10 grandes villes de la RDC est estimée à 14 millions d’habitants.

La population urbaine constitue un groupe éminemment vulnérable qui dépend essentiellement d’un approvisionnement des zones rurales pour lui assurer une sécurité alimentaire et une nutrition équilibrée. En outre, la situation économique et l’insécurité ont accéléré les mouvements de migrations vers les grands centres urbains : ces populations, dépourvus d’emploi et de ressources, s'agglutinent dans des quartiers périphériques aux conditions de vie précaires. Ils constituent depuis une décennie une nouvelle communauté de pauvres dont le pouvoir d’achat moyen est extrêmement faible (64,5 % des Kinois dépensent moins de 0,5 US$ par jour pour se nourrir, 27,5 % dépensent entre 0,5 et 1 US$[3]).

 La RDC a été classée 142ème sur les 162 pays couverts par le rapport mondial sur le développement humain établi par le PNUD pour l’exercice 2001. L’espérance de vie est estimée à 51 ans, le taux de mortalité infanto-juvénile (0-5 ans) à 207 pour mille, le taux d’alphabétisation des jeunes (15-24 ans) et des adultes respectivement à 80% et 60.3%.

Malgré un revenu annuel moyen de 801$EU par personne et an et dû à une répartition très inégale des richesses, une très large frange de la population vit en dessous du seuil de pauvreté (moins d’un dollar par jour), voire même d’extrême pauvreté. A ce titre, les indices de développement humain du PNUD montrent que 61% de la population totale souffrent de malnutrition. Au niveau des enfants de moins de 5 ans, on observe des taux élevés d’insuffisance pondérale (34%) et de retards de croissance (45%).

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3. L’économie

Le PIB du Congo se caractérise par une dégradation continue en termes réels depuis 1994. Le taux de croissance négatif amorcé à cette date s’est amplifié jusqu’à atteindre moins 14,5% en 1999 et moins 15% en 2000. Ainsi, exprimé en USD, le PIB est passé de 5,82 milliards en 1992 à 3,56 milliards en 2000. Illustrant ce déclin, la production de café est passée de 62.500 tonnes en 1994 à 11.000 tonnes en 2000, l’huile de palme de 17.000 tonnes à 4.500 tonnes, le bois de 169.000 m³/an à 25.000 m³/an. Compte tenu de l’effondrement des secteurs secondaire et tertiaire, la part de l’agriculture dans les origines du PIB est passée à 57,9% (chiffres de 1998), tandis que dans les emplois, la FBCF est inférieure à 7%, reflétant le désengagement des organisations internationales et les faibles opportunités d’investissement.

 En 2001 on faisait état d’un taux d’inflation de 540%. Alors que le marché officiel cote le USD à 50 FC début mars 2001 (180 FC sur le marché parallèle), force est de constater que le cours du $EU est passé à 400 en novembre 2002 sur l’ensemble des marchés. L’indice des prix de détail à Lubumbashi montre l’effet de la dépréciation monétaire sur quelques articles de grande consommation[4].

Tableau : Evolution des prix de détail à Lubumbashi

Produits

Octobre 1999

Octobre 2000

Octobre 2002

Variation en %

Céréales en graines

Tubercules transformés

Légumes frais

Légumineuses

Viande porcine

Volaille et œufs

Articles de santé

Transports

499

436

228

337

443

397

552

302

1377

2339

2481

2032

3134

2604

2447

4544

 

176%

436%

987%

502%

608%

556%

343%

1113%

Par rapport à 1998 = 100 – Source : rapport de consultation sur le microcrédit.

 Compte tenu du taux de croissance démographique de 3,2% l’an (Banque Mondiale), le PIB/habitant est, selon les statistiques de la Banque centrale, passé de 167,5 USD en 1992 à 99,1 USD en 2000. Cela signifie que chaque habitant dispose de 0,27 USD/jour alors que le seuil de pauvreté est communément fixé à 1 USD/jour/personne. Les écarts dans l’échelle sociale se sont fortement élargis et il n’existe pratiquement pas d’élasticité pour d’éventuelles mesures d’austérité. Selon EIU, 53% des Congolais étaient plus pauvres en 1995 que 30 ans auparavant. Le solde primaire du Budget de l’Etat est négatif de 50% des dépenses en 2000, la réalisation des recettes n’ayant pas dépassé 60% des prévisions. Les salaires sont en moyenne payés avec un, voir parfois plusieurs mois de retard, et ne reflètent pas la dépréciation du pouvoir d’achat.

 La part de l’informel dans le PIB, qui n’est plus évaluée depuis 1992 où elle représentait déjà 78%, doit actuellement dépasser les 85%, dont 50 à 55% d’activités de pure subsistance, selon les organisations impliquées dans l’aide humanitaire. Rien n’indique que la situation puisse se modifier prochainement, même en tenant compte du retour de l’aide internationale au développement, laquelle est liée à la réalisation des accords de Lusaka.

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4. La pauvreté et la sécurité alimentaire sans les villes

L’Afrique connaît, ces 25 dernières années, le même phénomène d’urbanisation accentuée que les autres continents du monde avec un taux qui est passé de 10 à 30 %. La RDC est parmi les pays d’Afrique où l’urbanisation est galopante : les populations de Kinshasa et Lubumbashi ont plus que doublé en 15 ans.

La sécurité alimentaire des populations urbaines implique une disponibilité suffisante, accessible aux populations locales et de qualité acceptable sur le plan nutritionnel (habitudes de consommation). A ce titre les trois dimensions indispensables pour que soit assurée la sécurité sont la disponibilité (soit par la production, l’importation et/ou l’aide alimentaire), la distribution et l’accessibilité des populations locales (adaptation au pouvoir d’achat).

Dans le contexte de pauvreté généralisée d’une large frange de la population urbaine, la recherche d’une ration alimentaire minimale devient une activité prioritaire (surtout pour les femmes) et la débrouillardise légendaire des kinois la règle. Les légumes, en particulier les légumes-feuilles riches en protéines, constituent dans bien des cas le seul met d’accompagnement[5] des plats à base de manioc et de riz.

Pour faire face à la demande croissante en légumes et fruits frais, la population urbaine et périurbaine a réagi en mettant en valeur des superficies importantes, tant au niveau de parcelles éparpillées qu’au niveau de périmètres ou de bas-fonds ; cette horticulture joue aujourd’hui un rôle essentiel dans l’approvisionnement journalier de la ville, d’autant plus que l’approvisionnement de l’intérieur du pays est rendu difficile par la dégradation du réseau routier, le manque de moyens de transport et l’insécurité.

Les statistiques de production et de consommation sont inexistantes, voir biaisés.

Ville

Population

Besoins théoriques

(tonnes/an) /a

Besoins théoriques par jour (tonnes)

Besoin total minimal /jour (50%)

% de satisfaction

KINSHASA[6]

7.500.000

750.000

2083

1042

 

MBUJI-MAYI

2.500.000

250.000

694

347

 

LUBUMBASHI

1.250.000

125.000

347

174

 

KANAGA

1.000.000

100.000

278

139

 

MBANDAKA

600.000

60.000

167

83

 

KISANGANI

600.000

60.000

167

83

 

KIKWIT

415.000

41.500

115

58

 

MATADI

245.000

24.500

68

34

 

LIKASI

235.000

23.500

65

33

 

KOLWEZI

210.000

21.000

58

29

 

NBANZA NGUNGU

100.000

10.000

28

14

 

Total

13.755.000

1.465.500

3904

1952

 

/a : à raison d’une consommation minimale nette de 80 kg/hab/an (considérant en moyenne 25% de pertes entre la production brute et la consommation nette, y compris la pourriture, invendus, l’épluchage, etc.)

Kinshasa (5-6 millions d'habitants en 1999) est le principal centre de consommation de fruits et légumes du pays (85.000 tonnes en 1995). Environ 65% de la consommation en légumes sont assurés par les productions obtenues dans le tissu urbain et périurbain de la capitale. La part des importations a diminué (de 13% en 1985 à seulement 3% en 1995). La consommation moyenne par habitant s’est réduite de 55 gr/jour en 1985 à 50 gr/jour en 1995 et la consommation actuelle n’atteint que 40% des niveaux de consommation recommandés (80-100 grammes par jour et par habitant). La ville reste donc déficitaire en fruits et légumes et pourrait consommer une quantité additionnelle de 135.000 tonnes par an.

Considérant la situation économique, les kinois consomment surtout les produits les moins chers et la demande en légumes se limite à un assortiment très réduit. Ce sont principalement les légumes feuilles, le pili-pili, les oignons, les tomates en boîtes qui constituent des produits bon-marché vendus avec un minimum de services supplémentaires, ne nécessitant pas d’emballage et avec un minimum de standardisation. Dans ce contexte, la consommation des feuilles de manioc représente plus de 50% la consommation totale de légumes. L'offre est caractérisée par i) des fluctuations excessives, ii) des prix élevés compte tenu du pouvoir d'achat des citadins et iii) des marges de commercialisation élevées qui peuvent atteindre 100% du prix au producteur. Beaucoup de petits commerçants tirent désormais leurs revenus de la vente journalière de petites quantités de fruits et légumes.

Les fruits sont souvent importés tels que pommes et oranges d’Afrique du Sud, avocats de Zambie et parfois du Kenya. Seule la production locale de mangue, qui représente 80% de la production fruitière de la région, est excédentaire en saison de production. Avocatiers et papayers sont souvent plantés sur des parcelles de case : les man­guiers sont souvent utilisés pour délimiter les parcelles alors que le goyavier, le papayer, etc. ne sont présents que sporadiquement.

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[1] Source : PNUD F

[2] Source IDH 2001, PNUD.F

[3] Source : L’état actuel de la Sécurité Alimentaire en RD Congo, Tollens, 18 février 2003. Papier présenté lors de l’atelier sur la Sécurité Alimentaire en RDC F

[4] Ce type d’information ne semble pas publié pour Kinshasa.F

[5] Les produits animaux (viandes et poissons) sont en pratique inaccessible et réservés pour les jours de fête : les légumes constituent en quelque sorte la ‘viande du pauvre’.F

[6] Source Tollens et all, 2001. F

 


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