A l'image du Mali, Bamako se sent à l'étroit. Des rives du fleuve
où s'étaient établis des pêcheurs, ses premiers habitants, la ville s'est étendue
vers le nord, avant d'être arrêtée par les murailles de grès des collines qui la
protègent des vents desséchants venus du désert ou du Sahel. Ces falaises érodées
n'atteignent que de faibles altitudes :
- Koulouba, 404 m ;
- Farakoulou: 463 m ;
- Koulimagnikoulou: 483 m :
- Point G Koulou (qui offre une vue exceptionnelle sur la ville): 493 m;
- Lassakoulo: S04 m.
C'est dans les grottes au pied des collines que trouvèrent refuge aux temps
préhistoriques les premiers nomades, sans doute venus du désert oriental. Sous le point
G Koulou, au nord du stade omnisports, des peintures rupestres témoignent encore de ces
premiers établissements. Gravées sur une paroi longue d'environ 30 mètres des scènes
de chasse. des dessins d'outils d'animaux et d'hommes retracent la fabuleuse histoire de
la lutte pour la survie au bord du grand fleuve Niger.
Les fouilles ont permis de mettre au jour des objets marquant le passage
de la civilisation de la, chasse a celle de l'agriculture : aux couteaux de silex sont
venus s'ajouter hachettes. meules et même bijoux en schiste.
Au pied de la colline de Koulouba, la découverte de nouvelles grottes, elles aussi
couvertes de fresque gravées dans le grès autorise a supposer qu'à l'ère
paléolithique ce qui devait devenir. quelque treize millénaires plus tard, la ville de
Bamako constituait déjà une petite agglomération. Sous les autres collines, des tombes
souterraines attestent également que voici trois ou cinq mille ans -- durant l'ère
néolithique -- les premiers Bamakois n'étaient déjà plus des nomades, mais des
sédentaires.
Ensuite, toute trace disparaît pendant plusieurs millénaires. Dans l'histoire des grands
empires de l'Ouest africain, Bamako n'occupe aucune place. La ville passera sans
transition de l'ère préhistorique à l'époque coloniale, pour devenir la tête de pont
de la pénétration française vers l'intérieur de l'Afrique à la fin du XIXe siècle.
C'est tout juste si la tradition orale a conservé l'origine du nom de Bamako, Venant des
terres arides du Sahel, autour de Nioro-du-Sahel (dans le Nord), des migrants. dirigés
par un certain Seribadian Niaré. s'installèrent ici vers le milieu du XVIIe siècle. A
la suite de mésententes familiales.
Seribadian et les siens décidèrent de gagner le Sud. Au cours de leur périple, ils
s'arrêtèrent à Ségou. où régnait alors Biton Coulibaly. qui donna pour épouse au
chef du clan sa soeur Soumba. De cette union devait naître un fils, Diamoussadian Niaré.
Il sera le fondateur de Bamako.
Initialement installés à Grigoune au pied des monts Manding (au sud-ouest de l'actuelle
capitale), les nouveaux venus attendaient la réalisation d'une antique prédiction : les
Niarés devaient être les premiers membres d'une dynastie appelée à régner sur un
grand royaume. dont le centre serait établi près d'un « marigot du caïman ». Un jour.
au cours d'une expédition de chasse. Diamoussadian Niaré tua un caïman. « le »
caïman de la prophétie : celle-ci s'était réalisée.
Des monts Manding, les Niaré émigrèrent sur les bords du «
marigot du caïman » (Bammakô) ; la Ville était née. Les descendants des Niaré, qui
prirent le nom de Touré, s'emploieront à organiser et à peupler la cité qui incarne
leur destinée. Les deux familles initiales partagent le village en deux quartiers
(Kinda), sis à l'est de l'agglomération actuelle. Les Niaré, fondateurs de la dynastie,
créent Niarela ; au nord, les Touré lignée matriarcale de la famille) s'installent dans
un périmètre qui, d'abord dénommé Tourela, deviendra plus tard le quartier de
bagadadji. Mais Niaré et Touré etaient avant tout des chasseurs. convertis à
l'agriculture par les aécessités de la survie. Du flcuve Niger (appelé alors le
Djoliba). ils avaient pouvoir tirer certains profits, or ils ne connaissaient rien à la
pêche. Ils firent donc venir dela région de Ségou (plus préciséments de Nyamina) des
pêcheurs Bozo qui, en compagnie de leurs serviteurs somono, fondèrent le quartier
Bozola, au bord du fleuve.
Ensuite viendront de nouveaux immigrants, les Dravé, qui créeront Dravéla. L'ensemble.
qui prit le nom de Bammakô. deviendra un carrefour commercial, attirant candidats à la
vie urbaine et marchands de sel venus des déserts du nord en quête des amandes de
karité ou des noix de kola des forêts du sud.
Au XIXe siècle, Bammakô était déjà un gros bourg six cents habitants. Les
Conquérants français comprendront rapidement rapidement que ce centre commercial qui
commande les routes de l'interieur constituerait une place forte de choix. En 1883, une
colonne. conduite par le colonel Borgnis-Desbordes, s'y installe. Durant dix-huit ans, les
Français vont tenir Bammakô (devenu Bamako), afin de barrer les pistes permettant le
ravitaillenient des troupes de l'irréductible Saimory -- le dernier grand chef de guerre
qui s'opposera à la colonisation jusqu'en 1898. Les renforts destinés au corps
expéditionnaire affluaient du Sénégal, mais Bamako n'était encore qu'un avant-poste.
La ville de Kayes était provisoirement la capitale des territoires soumis du
Haut-Sénégal et du Niger.
Ce n'est qu'en 1904, quand le chemin de fer devant relier Dakar au coeur de l'Afrique
sahélienne parvint à Bamako et s'y arrêta!), que la décision fut prise de transférer
l'ensemble des services coloniaux dans la nouvelle ville. La colonisation était ainsi
parachevée. Le chemin de fer demeurera inachevé, s'interrompant à Bamako, car devenu
sans objet.
Depuis, l'histoire de la ville aura été essentiellement coloniale.
D'une simple place forte militaire, Bamako deviendra le quartier général des forces
d'occupation du Sahel, rebaptise Soudan français.
L'architecture demeure elle-même marquée par le souci colonial d'asseoir avant tout
l'administration.
Aujourd'hui encore, Bamako est assurément la seule ville du Mali qui doive son cachet à
son aspect colonial ». La colline de Koulouba, aménagée en 1908, était destinée à
abriter au sein de sa fraicheur. les administrateurs et leurs services. Au centre de la
ville, quelques initiatives heureuses ont fait surgir de tres beaux édifices, inspirés
de l'architecture de villes historiques telles que Djenné ou Tombouctou.
Le village artisanal s'est à ce point développé qu'il a débordé
jusqu'aux abords de la grande mosquée. Dans des ateliers-boutiques en bois, bijoux
songhoï et armes tamasheq voisinent avec la brocante et les plantes médicinales.
Sommaire
Le marché central de Bamako, appelé Marché rose, qui passait pour être l'un des plus
beaux d'Afrique, avec ses échoppes qui n'étaient pas sans rappeler les souks du Maghreb,
a malheureusement brûlé en juin 1993. Il ne reste plus que les deux colonnes roses
d'architecture néo-soudanaise qui en avaient fait la renommée.
Après deux années d'incertitude, la première pierre pour la reconstruction du marché a
été posée, en mars 1995. En attendant, les commerçants se sont installés autour des
ruines faisant encore de ce haut lieu l'endroit le plus anirné et le plus coloré de la
capitale. Véritable caverne d'Ali Baba où l'on trouve toutes sortes d'étoffes
(bogolans, batik, pagnes. couvertures tissées, etc.), calebasses, bijoux, sacs, artisanat
touareg. Le flâneur ne pourra être que séduit par toutes les variétés de couleurs et
d'odeurs planant sur le marché où il sera souvent invité à s'arrêter pour le «
plaisir des yeux ».
L'alimentation et les « pièces » en tout genre sont concentrées au marché de Dibida
non loin du grand marché, de l'autre côté de l'avenue Modibo Keita. Un autre grand
marché, le marché de Médine, s'étend sur plusieurs centaines de mètres entre le stade
et le quartier de l'hippodrome.
A l'est de la grande mosquée, la vieille ville a conservé tout son
caractère. Séparés par des rues perpendiculaires entre elles -- dont personne ne
connaît le nom officiel -- les blocs de bâtiments (dits aussi « carrés ») sont
toujours organisés, à Bagadadji comme à Niaréla ou à Bozola, suivant le système
communautaire hérité des fondateurs de la ville. Chaque « carré », véritable village
fermé par un mur extérieur, abrite plusieurs familles, soit parfois plus de cent
personnes.
Bâties en banko comme à Bozola, ou en dur comme à Bagadadji, les maisons servent
seulement d'abris pour la nuit. Car, à Bamako comme partout ailleurs au Mali, tout le
monde vit dans la cour commune, à ciel ouvert.
Ne pas manquer la traversée à pied du pont des Martyrs, ainsi baptisé en hommage aux
victimes des événements de 1991. La faire de préférence tôt le matin pour éviter
l'affluence du trafic quotidien, ou à la tombée du jour où la ville se tamise. Ce n'est
qu'ainsi que l'on peut sentir la splendeur et la puissance qui émanent du fleuve Niger.
Derrière chaque enceinte ou parfois autour d'un manguier, il n'est
pas rare que des jeunes passent des journées entières à discuter en sirotant leurs
éternels verres de thé.
Ces séances, auxquelles sont invites à participer tous les visiteurs de passage (y
compris ceux qui se sont trompés de « carrés »). entretiennent: l'espèce de vie
villageoise qui prevaut toujours a Bamako même dans le quartier residentiel de
badalabougou de l'autre cote de pont de plus de 800m de long, sur la rive méridionnale du
Niger, ou les villas mitoyennes ont supplanté les
« carrés », les hommes d'affaires et les hauts fonctionnaires maliens y vivent en
communauté, sacrifiant toujours à la coutume du thé. La tradition est à ce point
vivace que des établissements. particuliers au Mali, et appelés bars, se sont ouverts en
vue d'abriter les grins, ces longues séances de discussion qui se prolongent jusque très
avant dans la nuit. Ces bars ne sont pas tout à fait ce que sont les pubs pour les
Londoniens ou les cafés pour les Parisiens. Ils sont nécessairement pourvus d'un patio
et l'on y sert à boire comme à manger -- bière et thé, poulet et dibi, brochettes de
boeuf ou de mouton qu'on peut également trouver à tous les coins de rue de Bamako et en
particulier, au marché de Dibida.
C'est tout cela qui constitue l'ame de la capitale malienne.
Absence de la saga des grands empires et véritablement née avec la Colonisation, Bamako
n'en pas moins devenue le symbole de la résistance culturelle des Maliens.
Ici, la vie urbaine n'a pas dépersonnalisé les habitants, restés des villageois. Les
grands hôtels de classe internationale ou la multitude de night-clubs n'ont pas vidé les
bars : l'alcool n'a pas détrôné le thé. C'est sans doute pour cette raison qu'à
Bamako plus qu'ailleurs, les visiteurs en quête d'un simple exotisme géographique se
sentent désorientés. Et si Bamako, en dépit de constructions modernes tels le bâtiment
de l'Assemblée nationale ou l'impressionnant Palais des congrès, n'est pas devenue l'une
des clinquantes et ostentatoires vitrines du tourisme international, elle le doit avant
tout aux Bamakois.
|
 |
|
L'Institut national des Arts
en est le plus beau fleuron ; derrière ses murs roses. un véritable village : perpétue
la science d'une caste millénaire d'artisans. Ici se retrouvent les tailleurs de pierre
dogon. les tanneurs peul et les sculpteurs bambara. |
|
|
|
|
|
|
|
Le siège de la BCEAO,
inauguré en avril 1994, situé au bord du fleuve, intrigue avec sa longue colonne sur
laquelle est perchée une étonnante couronne. |
|
Le Musée National se
trouve au nord de la ville sur la route de Koulouba, la colline où se trouvent le Palais
d'Etat résidence du président de la République et le siège du gouvernement. Son
architecture évoque celle des maisons de terre du district de Djenné. Ici sont
regroupés les objets caractéristiques (masques, couvertures de mariage. parures, outils)
des différentes ethnies du pays. Autant de témoignages de la richesse culturelle et
historique du Mali, accompagnés de photos qui les replacent dans leur contexte. |
|
|