Cindy la comédie musicale

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Le lundi 21 janvier 2002

Cannes - On peut reprocher n'importe quoi à Luc Plamondon sauf de ne pas savoir flairer l'air du temps. À quelques heures de la présentation de Cindy, aujourd'hui au Midem (Marché international du disque et de l'édition musicale) de Cannes, rarement le mythe de Cendrillon n'a été aussi présent en France. De Loft Story à Star Academy, deux émissions de téléréalité, les médias regorgent de petites orphelines qui rencontrent leur prince charmant. Sans oublier le concours de Miss France dans le jury duquel siégeait Luc Plamondon.

Car la Cendrillon de notre parolier, dont une dizaine de chansons seront dévoilées aujourd'hui à la presse et aux professionnels, a déjà tous les accents de cette machine à rêves. Limousines et hôtels de luxe ont remplacé carrosses et châteaux. On ne pouvait rêver mieux que la jeune «beure» Lââm aux cheveux blond platine pour interpréter cette sage Pygmalion du showbizz. Ses amis la surnomment la «Cendrillon des cités» à cause de sa popularité chez les enfants issus de l'immigration, mais aussi parce qu'elle a été élevée pendant quelques années par l'assistance publique.

Ces derniers jours, l'achèvement de la nouvelle comédie musicale a pris des allures de course contre la montre. Les dernières chansons ont été terminées il y a quelques jours (les rumeurs disent qu'elles ne le sont pas encore), la sortie du disque a dû être reportée, le décorateur semblait inconnu au bataillon et des changements de distribution avaient encore lieu quelques heures avant la présentation au MIDEM.

La recette gagnante que le producteur Charles Talar avait appliquée à Notre-Dame de Paris (lancée ici même il y a quatre ans) sera elle aussi rigoureusement suivie. Elle consiste à imposer le disque avant le spectacle. Le producteur a investi 10 millions de dollars dans l'aventure. Cindy ne prendra l'affiche que dans huit mois, le 25 septembre, au Palais des congrès de Paris après quelques représentations au Zénith de Caen. D'ici là, il faudra monter à l'assaut des palmarès. D'où le battage médiatique pour une comédie musicale que personne n'a encore vue.

Il faut s'appeler Luc Plamondon et jouir d'une gigantesque machine publicitaire pour vendre 40 000 billets avant même qu'une seule note de Cindy n'ait retenti, alors que la distribution n'est pas complètement arrêtée et qu'un nouveau metteur en scène vient d'être nommé au pied levé pour remplacer en catastrophe celui qui travaillait au projet depuis un an et demi.

Il y a quatre ans, Luc Plamondon était parvenu à convaincre le talentueux metteur en scène Gilles Maheu, de Carbone 14, de mettre en scène Notre-Dame de Paris. Il n'a pu réussir le même exploit cette fois puisque la réputée chorégraphe Karine Saporta lui a échappé pour cause de différend artistique et de manque de temps. Il y a deux ans, Saporta a, comme par hasard, monté une Cendrillon hip-hop avec des jeunes du 14e arrondissement de Paris. En septembre, elle a mis en scène un «essai sur la mystique rock», sur des textes de Jim Morrison, intitulé Le Garage. Elle était donc toute désignée pour Cindy.

«Quand j'ai parlé à Luc de réaliser une Cendrillon, il a été touché car il travaillait sur ce thème avec Michel Berger quand ce dernier est mort», a-t-elle déclaré. La directrice du Centre chorégraphique de Caen avait réussi à imposer son décorateur, Jean Bauer. Elle voulait donner plus de place à la danse, remplaçant notamment la pantoufle de vair par une gigue écossaise. Mais la danse, celle du moins qui ne se résume pas à quelques déhanchements sexy, passe mal au petit écran dont les exigences semblent incontournables dans ce genre de mégaproduction. La chorégraphe a confié avoir été éberluée par l'argent investi dans Cindy. «C'est surtout attristant. Jugé à l'aune de la qualité artistique», a-t-elle déclaré au journal Le Monde.

Luc Plamondon s'est donc rabattu sur son vieux complice, le musicien et réalisateur Lewis Furey. L'auteur du film Rats and Rabits avait fait la mise en scène de la version de Starmania présentée au théâtre Mogador en 1993. Une mise en scène plutôt convenue et sans grande originalité.

Comme pour Notre-Dame de Paris, Luc Plamondon a choisi pour la musique un compositeur italien. Au lieu de Richard Cocciante, il s'agit cette fois de Romano Musumarra, un habitué du top-50 italien. Musumarra a aussi travaillé pour plusieurs vedettes françaises ainsi que Céline Dion et Garou. Il a notamment composé pour ce dernier la musique de Seul.

La distribution semble programmée sur mesure pour faire un malheur chez les adolescentes. Le coffret du «single» est d'ailleurs d'un rose qui rappelle étrangement les célèbres poupées Barbie. C'est le Français Frank Sherbourne qui enfilera à Lââm sa pantoufle de vair. Sherbourne est un vieux routier de Starmania puisqu'il a interprété Ziggy pendant cinq ans et Johnny Rockfort pendant trois ans. Le comédien et chanteur Murray Head est aussi un habitué des comédies musicales comme Hair et Jésus-Christ Superstar. La jeune chanteuse de Bromont qui fait carrière en France, Judith Bérard, incarnera la fiancée du prince devenue top-model.

Plamondon a même offert un rôle à la jeune Karine, une «vraie» Cendrillon celle-là puisqu'elle est sortie finaliste de l'émission Star Academy, une émission de téléréalité de TF1. La première chaîne (privée) de télé française fait d'ailleurs partie des commanditaires de Cindy.

Sortant du Palais des congrès, la ministre québécoise de la Culture, Diane Lemieux, se plaignait du fait que toute la documentation du Midem était en anglais. Elle ne semblait pas avoir vu l'immense affiche de Cindy sous laquelle on pouvait lire un minuscule Cendrillon en tout petits caractères.
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