Intervention de
Pierre-André Comte, député-maire de Vellerat, à la 25ème Fête
du Peuple fouronnais, le dimanche 16 septembre 2001.
Chers amis fouronnais,
Permettez-moi de vous saluer fraternellement au nom de mes compatriotes de
Vellerat, lesquels sont de tout cœur avec vous et vous assurent de leur entière
solidarité. Je vous apporte également le soutien des militants jurassiens qui
se sont retrouvés par milliers, dimanche passé à Delémont, à l’occasion
de la 54e Fête du peuple jurassien. Je voulais partager avec vous le
succès extraordinaire de notre rendez-vous des 7, 8 et 9 septembre dans les
rues de la capitale jurassienne. Cela avec d’autant plus de plaisir que la réception
officielle, qui réunit les corps constitués de l’État du Jura, ses représentants
fédéraux et les délégués des communes, et qui ouvre traditionnellement le
volet politique de notre manifestation, a été relevée par le discours de
notre ami Jean-Louis Xhonneux et la présence d’une délégation d’une
quinzaine de personnes des Fourons.
Ainsi, au gré d’un scrutin qui ne restera manifestement pas dans les mémoires
comme un modèle-type de démocratie, les francophones sont minoritaires au
Conseil communal des Fourons. Ainsi s’est installée au pouvoir une majorité
nouvelle, flamande si l’on en reste à une dénomination institutionnelle,
flamingante, si l’on s’applique à qualifier ses agissements. Ainsi la
culture et la langue française, l’identité et l’appartenance francophones
sont-elles sérieusement mises en danger dans les Fourons. Vu du Jura, et de
Vellerat en particulier, mais aussi du Val d’Aoste et du Québec, on ne peut
évidemment pas rester indifférent à cette situation. Certes, adresser des
remontrances à M. Broers et à ses amis, et dénoncer leurs actes frappés de
stupidité, d’intolérance et de mauvaise foi, est une nécessité. Je le fais
donc avec force et invite ces Messieurs-Dames à bien vouloir réviser leur
manuel de démocratie. Ce qu’ils font n’échappe à personne : il
s’agit bien d’une action systématique visant à la flamandisation des
Fourons. C’est tout, il n’y a rien à dire d’autre et, où accepter cette
fatalité et disparaître, où la combattre et vivre.
Bien sûr, les regards sont aujourd’hui tournés vers un ailleurs où se
jouent d’autres drames infiniment plus dramatiques. Qu’adviendra-t-il du
monde si la vie humaine n’y est plus considérée que comme un objet de
profanation, si les hommes et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes y
sont impunément bafoués ? Quel que soit l’endroit où l’on se trouve,
quelle que soit la gravité de la question, nous avons à réfléchir et à
agir. Notre liberté et notre dignité en dépendent et, au bout du compte,
notre survie.
Une lutte est engagée ici dans les Fourons, pour le respect des droits
fondamentaux des Fouronnaises et Fouronnais francophones. Elle dure depuis trois
décennies, et semble s’enliser. D’où l’interpellation que l’on ne peut
s’empêcher d’adresser aux plus hauts responsables politiques de la
Wallonie, lesquels, à mes yeux, ne sont pas exempts de responsabilités dans
cet enlisement.
Vous me connaissez, et vous n’imaginez pas une seconde que j’hésiterai
à vous poser quelques questions, Messieurs les Ministres du Gouvernement
wallon, en toute amitié et en toute honnêteté. En faites-vous assez pour les
fouronnais francophones, le respect de leurs droits et la prise en compte de
leurs légitimes revendications ? Je n’en n’ai pas l’impression. J’écoute
vos discours et ne vois pas vos actes. Et je vous le dis, sans fard ni complexe.
Où le Gouvernement wallon se range derrière les Fourons et obtient pour eux un
statut d’appartenance bi-régionale - cette solution n’étant pour moi
qu’une solution transitoire -, et il remplit son devoir et s’assure la
confiance du peuple fouronnais, où il tergiverse et n’assume pas toutes ses
responsabilités morales et politiques, et il se disqualifie aux yeux de ce même
peuple. Vous n’avez pas d’autres choix.
Hier soir à la télévision, j’entendais M. le Ministre-Président Van
Cauwenberghe en appeler à la mobilisation des Wallons pour le développement de
la Wallonie. Je lui suggère humblement d’en appeler à la mobilisation de son
gouvernement pour la défense des droits des Fouronnais. Les dernières négociations
institutionnelles ont, que je sache, abouti au fait que vous disposiez des
moyens nécessaires pour peser significativement sur l’avenir des Fourons.
Vous avez entre les mains les instruments qui vous permettent de contrecarrer le
sort mauvais réservé à vos compatriotes. Peut-être me reprocherez-vous de mêler
de ce qui ne me regarde pas. Mais mon ami José Happart reconnaîtra immédiatement
qu’il en fit de même jadis en Suisse, au plus grand bénéfice de la commune
de Vellerat. Les attitudes attentistes face à des Flamands bien décidés, eux,
à s’imposer, ne sont pas acceptables. Dès lors, nous savons tous ce qu’il
reste à faire : se dégager de toutes considérations partisanes, privilégier
la cause de tous et uniquement celle-là, et se battre à tous niveaux avec détermination.
Nous connaissons tous la recette du succès. Je ne vous apprends donc rien, et
je ne veux pas croire que son rappel était absolument indispensable.
Chers amis fouronnais, nous sommes unis par un acte de jumelage que nul ne détruira.
Nous sommes frères dans la lutte et le resterons. Rassemblez-vous, et nous
surmonterons l’adversité. Vivre en français dans les Fourons, c’est un
droit imprescriptible. S’engager pour le retour des Fourons à la Province de
Liège en est un aussi.