Chant d'ouverture liturgique
à la Semaine Sainte
 
par Henry Montaigu
© La Place Royale Editions, 1997

 

INSTITUTION
 
 
Pâques Fleuries est le jour d'allégresse de l'entrée de Notre-Seigneur à Jérusalem,
Fête des palmes et des fleurs,
Fête du Règne de Jésus, fils de David,
Sur l'Israël des Nations
Et la Ville Essentielle,
Fête du Saint-Esprit qui révèle
Et de la Sagesse qui perçoit,
Fête des fleurs et des feuillages,
Fête de l'Enfance,
Fête du Roi !
- Honneur et Gloire à Celui qui vient au nom de l'Eternel prendre possession de la Ville !
- Le Nom de l'Eternel soit béni.
- Nous acclamons la Gloire de son Envoyé qui a voulu régner sous le soleil, dans la lumière d'un jour du monde, avant que tout s'accomplisse !
- Qui a pris possession de la Ville,
- Et qui a marché sous une voûte de saules et de buis, de palmiers et d'oliviers,
- Suivi par les sages et les enfants !
Il a été fidèle au rendez-vous, le Fils de David,
Et il n'a pas témoigné en vain le Prophète qui annonçait :
Dites à la fille de Sion :
Voici votre Roi qui vient à vous dans un esprit de douceur
Monté sur une ânesse,
Et sur l'ânon de celle qui est sous le joug !
 
Saint Matthieu : Et les disciples y allèrent
Faisant ce que Jésus leur avait commandé.
Ils amenèrent l'ânesse et son ânon,
Et les ayant couverts de leurs habits,
Ils firent monter Jésus dessus.
Alors, une grande multitude de personnes
Etendirent leurs manteaux sur le chemin,
D'autres coupaient des branches d'arbres,
Et les répandirent par où Jésus devait passer.
Et les troupes du peuple qui marchaient devant Lui
Et celles qui suivaient
Criaient toutes :
Hosanna au Fils de David.
Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur,
Hosanna au plus haut des Cieux !
 
(Gloire et louange vous soient rendus, ô Jésus notre Sauveur et notre Roi : Nous célébrons votre triomphe dont les enfants ont témoigné en ce jour par leurs hymnes et leurs acclamations)
 
Car le Dimanche des Rameaux est le jour d'allégresse
De l'entrée du Roi dans sa Ville
Et les disciples transportés de joie
Louèrent Dieu pour toutes les merveilles qu'ils avaient vues
Et disaient :
Béni soit le Roi qui vient au nom du Seigneur
Paix dans le ciel
Et gloire au plus haut des cieux.
Car il est le véritable Roi d'Israël
Le rejeton précieux de la Maison de David !
Et il est le Roi béni dans tous les siècles
Et nous chantons !
Les Anges dans les Cieux
Les hommes sur la terre
Et toutes les créatures
Se sont réunies pour chanter sa louange
 
Et nous chantons !
En ce jour
Le peuple Hébreux est venu au-devant de lui
Avec des palmes
Et en ce jour nous aussi
Nous lui présentons nos prières
Nos hymnes et nos voeux
Et nous chantons !
 
(Honneur et louanges soient rendues au Roi de Gloire ! Nous célébrons sa venue dans les coeurs dont les enfants ont témoigné.)
 
 
Et le Célébrant a frappé trois fois à la porte de l'Eglise,
Avec le bois de la croix,
Avec le sceptre de la croix,
Avec le bâton de la croix,
Avec l'arbre de la croix,
Et il a dit :
Princes de la Céleste Cité
Ouvrez les portes !
Et vous, portes éternelles
Ouvrez-vous
Et le Roi de Gloire entrera !
- Mais quel est-il ce Roi de Gloire ?
Et il a dit :
Le Seigneur
Le Dieu fort et puissant
Le Dieu des combats
Devant lui
Que s'ouvrent les portes de la Cité Céleste !
- Mais qui est-il ce Roi de Gloire ?
Et il a dit :
Le Seigneur
Le Dieu des forces d'En-Haut lui-même
Est le Roi de Gloire
A sa venue,
Les Princes de la Cité Céleste
Ouvrent les portes.
- Et les portes de l'Eglise s'ouvrent !
Seigneur,
Car ils ont honoré votre Nom par leurs cantiques,
Car ils ont loué votre main victorieuse et puissante,
En ce jour
Ou la Sagesse a ouvert les bouches des muets
Donné de l'éloquence aux langues des enfants !
Et il a dit :
Car tout le peuple a crié :
Béni soit le règne de notre père David
Que nous voyons arriver !
Béni soit la gloire qui est au milieu de nous
Et l'éternelle Sagesse !
 
 
CHRONIQUE
 
 
Et il y eut un grand silence dans l'espace des hommes,
Et il y eut un temps d'arrêt dans la grande tribulation,
Car ce saint jour est le jour du miracle des coeurs
Le jour de la paisible allégresse
Et du consentement.
 
Le Théologien : Ayant soupé à Béthanie chez Simon le Lépreux,
Six jours avant Pâques,
Il s'achemina le lendemain
Pour se rendre à Jérusalem...
 
Marie d'Agreda : Et le Seigneur se dirigea vers Jérusalem
Accompagné d'une grande multitude d'anges
Qui glorifiaient sa charité.
 
Le Théologien : Comme il était près de Bethphagé, vers la Montagne des Oliviers, à environ
une demi-lieue de la ville, il donna ordre à deux de ses disciples d'aller dans
ce village. Sitôt que vous y serez entré, leut dit-il, vous y trouverez une ânesse
liée et son ânon, qui n'a encore porté personne. Vous les prendrez au nom du
Seigneur, et on les laissera aller, car il faut accomplir la prophétie de l'Ecriture.
Cependant, beaucoup de gens qui étaient arrivés de différents endroits pour la
fête de Pâques, ayant appris que Jésus venait à Jérusalem, allèrent au devant de
lui, et prirent des branches de palmier pour lui faire honneur.
 
Marie d'Agreda : Et a lui qui venait sur un petit ânon,
Sans pompe d'aucune sorte,
La foule criait :
Béni soit le roi qui vient au nom du Seigneur !
Car c'était de volonté divine
Qu'en ce jour
La fête soit dans les coeurs.
Et sur toute la terre
En Palestine, en Egypte et ailleurs,
Tous ceux qui avaient quelque connaissance de Jésus-Christ
Reçurent la lumière et la réjouissance.
Et nul ne mourut en ce jour,
Et les démons furent précipités dans l'abîme.
 
Le Théologien : Lorsqu'il fut arrivé au pied de la montagne des Oliviers, tous les disciples,
transportés de joie, voulurent rendre témoignage pour toutes les merveilles
qu'ils avaient vues, et ils disaient :
La paix soit dans le Ciel
Et la gloire dans les lieux les plus élevés !
Et la multitude criait :
Hosanna au fils de David qui est enfin parmi nous !
Hosanna au plus haut des cieux
Car voici le règne de notre père David !
Et les disciples disaient :
Il est devant vous
Celui qui a ressuscité Lazare
Et changé l'eau en vin !
Alors les Pharisiens qui étaient là et qui ne pouvaient souffrir ces clameurs
joyeuses, s'adressèrent à Jésus et lui dirent :
Maître ! Faites taire vos disciples !
Mais Jésus leur répondit :
Je vous déclare en vérité que si ceux-là se taisent en ce jour, les pierres elles-
mêmes crieront !
 
 
Marie d'Agreda : Et dans l'enfer,
Les démons demeurèrent deux jours
Eperdus de honte et de rage.
Car le temps viendra du paisible consentement
Et les humbles palmes de ce dimanche de Palestine
Se changeront en étendards de lumière
Marqués du Signe et du Sceau de Dieu.
Gloire au saint jour de la Préfiguration du Règne
Et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté
Qui ont vécu dans l'attente,
Et qui n'ont pas oublié la gloire
de Celui qui s'est ménagé un temps
Dans la grande Tribulation !
 
 
BENEDICTION DES RAMEAUX
 
 
L'Homme Divin revêt la pourpre incomparable
Et le temps est venu que s'élève le Roi
Dans l'extrème rigueur de l'éternelle Loi
Voici le reposoir sur la vivante voie
L'avant-dernier soleil se levant sur les sables
 
Le Secours est le Nom et le Coeur de Jésus
Et ce Nom est donné aux grandes multitudes
Et la sainte Sagesse et la divine Etude
Ont partagé la sapiencielle plénitude
Avec un peuple qui ne l'avait jamais sue
 
Après le temps des monts voici le temps des plaines
Car le Dieu qui arrive est le Roi des enfants
Et le prince de Gloire est le Pauvre et l'Infant
Et le pauvre est béni au matin triomphant
De la Semaine Sainte et de la Grâce pleine.
 
 
- Et le peuple a chanté le grand secours divin
Et l'humble multitude a reconnu son prince
Et sur le grand chemin de Jérusalem
Elle s'est dépouillée de ses vêtements
Et elle a fait un pavement multicolore
A Celui qui venait atténuer les Temps.
 
- Et les anges du Ciel, les prophètes et les patriarches
Et tout le peuple de la Lumière
Tendaient au-dessus du chemin des hommes
Les étendards du Roi du Ciel.
Car il était venu de loin et de très haut
Car il avait quitté la très pure lumière
Car il avait traversé les mondes
Car il s'était abimé dans l'homme
Afin de le relever
Car il s'était immergé dans le monde de la poussière
Afin de tout ramener vers lui.
 
- Et nous sommes venus avec des rameaux et des palmes
- Pour que tu les bénisses
Comme nous te bénissons
- Hosanna au plus haut des cieux !
- Notre secours est dans le nom du Seigneur
- Qui a fait le ciel et la terre.
 
 
(Et voici que s'avance l'Officiant - pour la prière de Bénédiction)
 
Oremus.
O Dieu, dont le Fils unique est descendu sur la terre
pour le salut du genre humain
et a voulu
lorsque le temps de sa Passion approchait
entrer à Jérusalem monté sur un âne
être appelé Roi
et honoré en cette qualité par une multitude de peuple,
Daignez bénir ces Rameaux et ces Palmes
Et combler tous ceux qui les porteront
De l'abondance de vos grâces
Afin qu'après avoir surmonté
La Tentation de l'Ennemi ancien
ils vous soient en retour présentés
comme le fruit des bonnes oeuvres
Le rameau de la grâce
et la palme de la victoire.
- Amen.
 
 
LIVRE DES VISIONS D'ANNE-CATHERINE EMMERICH
 
 
Tout d'abord
Les disciples préparent le chemin du Seigneur.
Le matin de très bonne heure
Jésus fit venir Erémenzear et Silas
Pour qu'ils se rendent à Jérusalem
Non par la grande route
Mais par le chemin de Bethphagé
A travers les jardins et les champs.
Et je les vis
Qui frayaient un passage neuf
Qui ouvraient les haies et les barrières
Et qui ôtaient de la Voie ainsi tracée
Tout ce qui faisait obstacle.
Je les vis ainsi jusqu'au Temple
Ou ils retrouvèrent les marchands
Que le Seigneur avait chassés
Et a qui ils ordonnèrent de se retirer
En annonçant la bonne nouvelle du retour du Maître.
Et ensuite je les vis
Erémenzear et Silas
Prendre la grande route pour revenir à Bethphagé
Où ils retrouvèrent Jésus.
Et je le vis
Dans un riche jardin planté d'arbres
Qui enseignait l'ordre du cortège
Avec les Disciples, les Apôtres et les Sept Femmes
Qui avaient Marie à leur tête.
Et Jésus dit aux Apôtres de marcher
Dès ce moment comme après sa mort
A la tête du cortège
Comme à la tête des fidèles
Et il les fit marcher devant lui deux par deux
Pierre était seul et marchait le premier
Et les derniers
Proches de Jésus
Marchait Jean, dans la compagnie de Jacques le Mineur.
 
Et Jésus revêtit la blanche robe des jours de fête
Et tous se préparèrent à partir pour Jérusalem
Par la route nouvelle
Que les disciples venaient de tracer.
 
Et tous tenaient en main des rameaux de palmiers
Et chantaient des cantiques.
 
Puis je vis
Fermant le cortège de ceux qui étaient avec le Seigneur
Marie, Mère de Jésus
Suivie des saintes Femmes
Qui allaient deux par deux.
 
 
Et tous les chemins étaient remplis de voyageurs
Juifs et étrangers
Qui se rendaient à Jérusalem
Et partout
Dans les rues, dans le Temple et sur les chemins
Tous se mirent à décorer la Voie du Seigneur
De feuilles et de fleurs
Et d'arcades de branches
Afin qu'il marche sur un tapis
Et sous un dais
De guirlandes, de voiles et de manteaux
Tout cela
Dans un grand tumulte joyeux
Et les chants d'allégresse
Et les cris des enfants
Qui avaient déserté leurs écoles malgré leurs maîtres
Et qui joignaient leurs acclamations
A celles de la multitude.
 
Et ceux qui étendaient leurs vêtements
Et ceux qui jetaient des branches
Feraient le sacrifice de leurs biens
Mais ceux qui offraient à la fois
Des branches et des vêtements
Engageraient leur personne au service de Dieu.
 
Et je vis
Que plus on approchait du Temple
Et plus la décoration était riche et belle
Et des deux côtés du chemin
Bondissaient les agneaux sans tache
Et les petits animaux
Du sacrifice de la Pâque.
 
 
Et il y avait tant de foule
Et tant de malades que Jésus guérissait
Que le cortège mit trois heures
Pour se rendre de la porte de la Ville
A la porte du Temple.
 
 
LARMES
 
 
Et il se fait ici un grand silence parmi les hommes
Car le Seigneur arrive près de Jérusalem
Et pleure.
Il pleure sur la ville à la vue des malheurs
Qui devaient l'accabler
Pour n'avoir pas connu le temps
De la Divine Visite
De Celui qui est Roi
Dans les siècles des siècles.
 
- Jésus versa des larmes et les apôtres pleurèrent aussi quand il dit que beaucoup de ceux qui
maintenant l'acclamaient si joyeusement, l'accableraient bientôt d'outrages, et que l'un d'eux
le trahirait.
En même temps, il regarda la ville et pleura sur sa destruction prochaine.
 
O Destin suspendu sur la pourpre des villes
Le Dieu Vivant n'est-il que ce simple docteur
Et le fils de David ce prophète débile
Et le Roi d'Israël ce doux triomphateur
 
Tu ne l'as pas voulu, Jérusalem, ce Roi
Et le Dieu a pleuré aux portes de la ville
Le chemin de la gloire ouvre un chemin de croix
Et le Christ a pleuré sur le règne d'argile
 
Quand il est arrivé aux portes de la ville
Le Seigneur a pleuré sur toi, Jérusalem
Et Jésus a pleuré sur la fête fragile
Et sur le chant de joie qui se change en blasphème
 
Et le peuple chantait dans les rues de la ville
Car le temps était beau et l'avenir certain
Et le Seigneur pleurait sur les prêtres hostiles
Sur le faible disciple et l'apôtre assassin
 
Et le Messie pleurait sur la cité stérile
Et sur l'apostasie de toutes les cités
Sur la longue agonie des peuples versatiles
Et sur l'horreur sans nom du Royaume insulté
 
Il pleurait sur le sang de la guerre civile
Sur la cendre et le feu, les ruines et les croix
L'absurde et lourd fardeau des actes inutiles
Et sur l'hypocrisie qui s'arme de la Croix
 
Il pleurait sur les temps et les siècles d'exil
Sur les vicaires fourbes et les rois incertains
Sur l'Apôtre endormi au plus fort du péril
Et sur la longue nuit dont il clôt le destin.
 
Jérusalem, hélas, Jérusalem, ma Ville...
 
 
OFFICE DE LUMIERE
 
 
- Le Seigneur soit avec vous.
- Et avec votre esprit.
 
- O Jésus Médiateur de la Nouvelle Alliance
Ceux qui sont appelés reçoivent l'héritage éternel
Qui leur a été promis.
- Les princes m'ont injustement persécuté
Mais mon coeur s'est soumis
Et j'ai accompli votre Parole
Car tout arbre qui ne produit pas de bons fruits
Sera coupé et jeté au feu.
- Car le Seigneur est le Roi des coeurs
Le maître de l'Alliance nouvelle et éternelle.
- En ce jour de liesse
Devant tout le peuple assemblé
Mon Père
Glorifiez votre nom.
- Et aussitôt, une voix se fit entendre dans le ciel :
- Je vous ai glorifié
Et je vous glorifierai de nouveau.
- Car le Dieu qui me justifie est à mes côtés
Et qui pourrait me confondre ?
- Et vous êtes venu au nom de Dieu
Pour toute tribu et pour toute langue
Pour chaque peuple et chaque nation.
 
Que la Gloire du Seigneur
Habite les demeures terrestres
Comme au dimanche de l'avènement
Comme à l'entrée du Roi dans sa ville
Sous les dais de palmes
Et les étendards de feuillage
Dans la compagnie des saints
Et des prophètes
Et au milieu des clameurs de louange
Du peuple de Dieu.
 
- Toutes les saisons de l'année
Seront couronnées de vos bénédictions
Seigneur
Et votre héritage
Sera rempli de toutes sortes de biens
Les vallées et les collines
Porteront en abondance
La vigne et le froment
Dans la joie des actions de grâce
Et le chant des saints cantiques.
 
(Jésus prit les pains et, ayant rendu grâces, il les rompit les donna à ses disciples, et ses disciples les distribuèrent au peuple. Tous en mangèrent et furent rassasiés.)
 
- Le Seigneur répandra sa bénédiction,
- Et notre terre donnera son fruit.
 
- Seigneur notre Dieu
Répandez vos bénédictions sur votre peuple
Et sur tous les fruits de la terre
Afin qu'après les avoir recueillis
Nous nous en servions
Pour l'honneur et la gloire de votre nom
Selon les desseins de votre miséricorde
Par Jésus-Christ notre Seigneur.
- Ainsi soit-il.
 
Nous célébrons la gloire du Seigneur
Qui habitera les demeures terrestres
Comme au royal dimanche de sa Passion.
 
 
CHANT DE DESESPERANCE
 
 
Royauté du Seigneur, éternelles épines
Songe à marcher debout jusqu'à la fin du jour
Rêve à nourir les fous du Dieu qui est amour
En dépit du rébus de la sainte machine
 
Royauté du Seigneur, fête à Jérusalem
Hérode vit encor, et le grand-prêtre acerbe
Continue de vomir des mandements superbes
Sous le nom et le dais du Dieu de Bethléem
 
Royauté du Seigneur, espace de la Rose
Rivage reporté toujours un peu plus loin
Je suis las de porter la promesse de l'Oint
Et d'annoncer le jour de la métamorphose
 
Royauté du Seigneur, étranges étendards
Lointaine panoplie d'armes et de chimères
Le monde est le tombeau d'une grâce éphémère
Fête sans lendemain, étrange traquenard
 
Royauté du Seigneur, le temps est un mensonge
Crève Ponce Pilate, et crève l'Intendant
Les princes de tes prêtres et les rois trop prudents
Et le scribe maudit que l'enfer roule et ronge
 
Royauté du Seigneur ! Espace des Rameaux !
Le Désolateur chante et saccage la Vigne
Et je suis seul pleurant le désespoir des signes
Avec de pâles songes, avec de pauvres mots.
 
 
CHANT D'ELOIGNEMENT
 
 
Chanter la prairie légère
Au milieu du monde à l'envers
Et vainement prier le Père
Etrange et fastidieux Pater
 
S'entourer soi-même d'un fil
Se mettre en croix sur les chemins
Contempler César de profil
Ou prendre son coeur à deux mains
 
Livre d'image, pieux mensonge
Le monde est saoul de nostalgie
Et dans les ténèbres s'allonge
La dette de nos léthargies
 
Verte fête du Roi de Gloire
Anges, grabuge de lauriers
Il est bien facile de croire
Et facile de renier
 
Fête perdue, mais vers quoi tendre
Jérusalem où êtes-vous
Il est difficile d'attendre
Sans motif et sans rendez-vous
 
Rois d'Epinal, les trois rois mages
Suivaient l'étoile dans la nuit
Nous n'en pouvons plus des voyages
Dans la nuit mate de l'ennui
 
 
Printemps pluvieux, Pâques stériles
Le pape dort, je suis mouillé
Statues de gloire puérile
Moisies sur l'autel oublié
 
Où allons-nous, frères très chers
L'orateur sacré se console
Et traverse l'âge de fer
Sans astrolabe ni bousole
 
A quoi bon mesurer les temps
Traduire les chants et les modes
L'Inaccessible Dieu attend
L'Heure et le Jour, fin d'épisode
 
Avant de rentrer dans sa ville
Il pleure sur Jérusalem
Ce qui détruit Jérusalem
Avant qu'il rentre dans la ville
 
Ville neuve, frères très chers
Il faudra faire ville neuve
Le roi nous coûtera très cher
Frères très chers, ferons peau neuve
 
Et je m'en vais en chantonnant
Prairie légère, autre naufrage
Attendre Jupiter Tonnant
A bout de chant, à bout d'images.
 
 
CHANT DE CERTITUDE
 
 
Ordre lyrique, marge, inutile replis
L'archange lentement déplace les sept lignes
Jésus de Nazareth hérite du grand lys
Prend possession des temps, des sources et des signes
 
Que font les peines et les doutes
Songe triste du lourd remord
Le Roi remorque sur la route
La grande horde des corps morts
 
Arbre immobile, mer, étiage du couchant
La grande vague vient bénir le roc suprème
Eau de grande merci aux bornes de nos champs
La divine Aventrue a dévoilé le thème
 
Jésus, Jésus, Miséricorde
A bout de peine, à bout de voix
Jésus Seigneur Divine Corde
Abrégez les jours de la Loi
 
Prière stratagème, inutile poème
Espace de Rigueur, tout est prédestiné
Et je ne chante cici que l'immobile emblème
Par l'ange de l'Appel jour après jour dicté.
 
 
LE TEMPLE
 
 
Selon Matthieu :
Jésus étant entré dans le Temple de Dieu
Il en chassa
Tous ceux qui achetaient et qui vendaient
Et renversa les tables des changeurs
Et le siège de ceux
Qui se livraient au trafic des colombes
Car il est écrit, dit-il :
Ma Maison est une maison de prières
Et vous en avez fait une caverne de voleurs !
Alors, vinrent à lui, dans le Temple
Des aveugles et des boiteux
Et il les guérit.
Or, les princes des prêtres
Les scribes, les maîtres de la loi
Voyant les merveilles qu'ils faisaient
Et les enfants qui criaient dans le Temple
A pleine voix :
Hosanna au fils de David !
Lui demandèrent indignés :
Entendez-vous les cris de ces enfants ?
Oui, dit Jésus, Mais avez-vous jamais lu
L'Ecriture :
C'est par la bouche des enfants et des tout petits que vous faites votre louange.
Alors, il les laissa
Et s'en alla hors de la Ville à Bethanie
Pour loger jusqu'au lendemain.
 
Selon Marc : Jésus étant ainsi entré à Jérusalem
Il alla droit au Temple.
Où il considéra toutes choses
Et le soir étant venu
Il se retira avec les Douze
A Bethanie.
 
Selon Luc : Jésus contempla Jérusalem et la pleura en disant :
O si toi au moins
Tu pouvais connaître ce jour favorable
Pour toi et les tiens
Et Celui qui se présente
Pour te donner la Paix !
Mais non
La Vérité te demeure cachée
Et il viendra un jour malheureux
Où les ennemis t'encercleront
Où tu seras assiégée de toutes parts
Et détruite
Sans espérance de salut
Parce que tu n'as pas reconnu
Le Temps de la Visite.
Lorsqu'il fut entré dans le Temple
Il en chassa tous les marchands
Selon la parole de l'Ecriture
Ma maison doit être une maison de prières
Elle est devenue par vous
Une caverne de voleurs.
Et depuis, tous les jours, il enseigna dans le Temple
Et les Princes des prêtres, les scribes et les principaux du peuple cherchaient les
moyens de le perdre.
Mais ils ne savaient comment s'y prendre
Car tout le peuple
Etait suspendu à sa Parole.
 
Selon Jean : Voici l'heure venue
Où doit être glorifié le Fils de l'Homme.
Car en vérité
Si le grain tombé en terre ne meurt pas
Il demeure seul et sans fruits
S'il meurt, il donne la vie
Et ses fruits seront nombreux.
Celui qui aime sa vie la perdra
Celui qui méprise sa vie
La sauve éternellement.
Et celui qui prétend me servir
Qu'il me suive
Car là où je suis
Là sera mon serviteur
Car le Père élèvera le serviteur
Avec Celui qu'il a servi.
 
Mon âme est à présent dans le trouble
Et je ne puis dire :
Père, délivrez-moi de cette heure
Car c'est pour cette heure que je suis venu.
 
Alors, il vint une voix du Ciel qui dit :
Je l'ai glorifié
Et je le glorifierai encore.
Et les assistants disaient que c'était le tonnerre,
Et d'autres
Que c'était un Ange qui venait de parler.
Mais Jésus répondit :
Ce n'est pas pour moi que cette voix est venue
C'est pour vous :
Le Jugement du monde va se faire
Le Prince de ce monde sera chassé dehors
Et quand je serai élevé de terre
J'attirerai toutes choses à moi.
Alors quelqu'un répondit d'au milieu de la foule :
Nous savons par la Loi
Que le Messie doit durer toujours
Comment peux-tu dire que le Fils de l'Homme
Doit être élevé ?
Et quel est-il, ce Fils de l'Homme ?
Jésus dit alors :
La Lumière n'est plus parmi vous
Que pour peu de temps.
Marchez tant que vous avez la Lumière de peur d'être surpris par les ténèbres
Car il ne sait pas où il va
Celui qui va dans les ténèbres.
Pendant que vous avez la Lumière
Croyez et marchez vers elle
Ainsi
Vous déviendrez des enfants de lumière.
 
Ayant ainsi parlé
Jésus se déroba d'au milieu d'eux
Et se tint caché.
 
 
LA PORTE D'OR
 
 
Pâques Fleuries
Puissant rameau de la verte Espérance
Voici le jour admirable
Du règne mystérieux et paisible
Du fils de David au milieu du monde.
 
Car la ville essentielle
S'est animée pour un jour
A la vue du Roi de Gloire
Et les coeurs se sont ouverts
Et ce jour entre tous les jours est béni.
 
Car les hommes sur la terre
Et Dieu dans le Ciel
Lui ont rendu témoignage
En cet unique jour
Du Consentement.
 
Car il est entré dans le Temple
Et s'est établi
Devant la Porte d'Or
D'où il a considéré la Maison du Seigneur
Et sondé toutes choses.
 
Dimanche d'alliance et de consolation
Mais aussi
Dimanche du jugement visible
Car il a chassé les marchands
Et condamné les prêtres aveugles.
 
Car il est rentré dans la Ville
Par une route nouvelle et éternelle
Par le chemin mystérieux du règne
Qui est et qui sera
Par la voie cachée.
 
Dimanche d'allégresse et de certitude
Fête de l'Enfance
Ménagée au milieu
De la vieillesse du monde
Et de la désolation.
 
Jour unique
Où Satan est lié
Par le triomphe du fils de l'Homme
Millénaire de la grâce du Saint-Règne
Ainsi soit-il.
 
 
JUDAS
 
 
- Est-ce le Messie, celui qui se borne à considérer
Toutes choses
Et à chasser les marchands du Temple ?
Qu'a à faire le sauveur des Juifs
D'écouter les louanges des enfants
Qui ne savent ce qu'ils disent ?
Les Ecritures ont-elles annoncé
Que le roi d'Israël
Etait un rebouteux
Au service des infirmes ?
Est-ce le fils de David
Qui se contente pour toute gloire
Du dais de feuillage
Et d'arriver monté sur l'ânon de l'ânesse ?
J'ai servi un prophète ridicule
Dont les sages et les docteurs
Se moquent entre eux !
Qui parle obscurément de la Lumière
Et du Royaume
Comme s'il était un autre royaume
Que celui de notre père David
Et comme si la Lumière
N'était pas à demeure dans le Temple
Eternellement !
Quelle honte quelle amertume
De rester ici dans ce Temple
Au milieu des clameurs des imbéciles
Et des étrangers
Au lieu de profiter des ovations
Pour soumettre la Ville !
Et s'il n'a pas besoin de porter les armes
Ni de recevoir d'autre onction
Que celle des huiles et des parfums
De Marie de Magdala
Du moins peut-il faire autre chose
Que des rester à discourir
Devant la Porte d'Or !
Que dit-il
Du Prince de ce monde qui va être expulsé
Et qui ajoute
Que la lumière n'est plus parmi nous
Que pour peu de temps ?
Cela ne heurte-t-il pas le sens commun
Et la Tradition ?
Tantôt il annonce son règne
Et l'expulsion de Satan
Dont il promet monts et merveilles
Et tantôt
Il nous menace de la perte de la lumière
Du joug de l'ennemi
Et de la confusion de Babel !
Je hais l'énigme
Et l'impitoyable douceur
Du visage de cet homme.
La fête de ce jour est une illusion
Dénuée de sens
Et je suis bien le seul à y voir clair !
A quoi bon cette entrée dans la ville
A quoi bon se faire saluer du titre de roi
Et de fils de David
Si l'on n'en fait pas les oeuvres
Et pourquoi sommes-nous ici
En ce jour ?
Voilà qui démontre combien je me suis laissé abuser
Car en suivant cet homme
J'ai trahi le Temple et l'Autel.
 
 
LE ROI CACHE
 
 
Et la Disposition demeure cachée
Car le Royaume
N'est pas maintenant de ce monde.
 
Car il fallait consommer
L'abomination
Et la Gloire de la Croix.
 
Car il fallait qu'il se revêtit
De pourpre dérisoire
Et qu'il saigne la couronne d'épines.
 
Car il fallait porter
Sa chair et son sang
Sur toutes les terres et sous tous les cieux.
 
Car il fallait que le temps
Du Prince de ce monde
Vienne et s'achève.
 
Car il fallait que Celle qui fût un Jour Marie
Se révèle en sortant de la blanche montagne
Et prépare la Voie.
 
Et le Roi demeure caché
Jusqu'au jour de Justice
Et d'universelle bénédiction.
 
 
CHANT DE SACRE
 
 
Chant de Joie
Nuit des temps
Demeures Eternelles !
Fleuves inouïs des saintes chroniques
Vouées à l'enfer bourbeux des vaines images
Ma Royauté
Est la première et la dernière
Car je suis le commencement et la fin
Car je suis le verbe qui crée
Et le Sauveur qui relève
Et je ne vous ai jamais abandonnés.
 
Chant de recouvrance
Mémorable onction !
Comment les montagnes peuvent-elles se dérober
A la vue des hommes
Et comment disparaitraient-ils
Les envoyés de ma bénédiction !
Sièges profanes
Monarques faits à mon insue
Puissances chimériques !
Je vous avais donné des rois de ma main
Vous en faites d'autres
Qui me sont inconnus
Et vous vous plaignez !
 
Voûtes magistrales
Fête des Etendards qui portent mes couleurs
J'ai règné avec les lys d'or et les aigles
Avec le lion du Juda et le cèdre du Liban
Car le sceptre et la couronne
Sont à l'image de ma couronne
Et de mon sceptre !
Mais voilà que bouge le sacré refuge
Et que s'ouvre la caverne
Des richesses nouvelles et éternelles
Que la préparation s'achève
Et que retentit dans les demeures divines
Le chant de joie des saintes chroniques
Et voici le temps
Où s'épanouit sur le monde
La gloire universelle de la Fête des palmes
Et le Jour du Roi de Paix.
 
 
 

 
© La Place Royale Editions, 1997

 


Henry Montaigu

La Place Royale