TANTRISME |
Le tantrisme est l'art d'utiliser toutes les réserves d'energies existant en l'être humain, jusqu'aux énergies les plus basales, pour construire l'échelle qui le conduira jusqu'à son ciel. |
Les tantriques "chevauchent le tigre",
ils apprennent à maîtriser la vitalité animale, pour l'intégrer, grâce à un processus de transmutation des énergies au travers de leurs chakras, vers des niveaux de plus en plus subtils. |
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Les yogis tantriques sont initiés grâce à toutes sortes de pratiques dévotionnelles et rituelles comme les mantras, les mudras, à l'eveil de la force profonde qui gît, endormie à la base de la colonnne vertébrale : le serpent lové de la kundalini. Cette force cosmique une fois réveillée grâce à l'initiation donnée par un guru, chemine dans le corps subtil jusqu'à permettre à l'être de se fusionner à sa source divine. |
L'énergie sexuelle au lieu d'être le sujet d'un interdit comme dans beaucoup de traditions ascétiques, est au contraire intégrée, canalisée, transmuée, pour servir de moteur d'élévation. Les hommes tantriques pratiquent l'injaculation, et les femmes tantriques canalisent leurs orgasmes jusqu'à atteindre des paroxysmes. | ![]() |
"L'homme ne se libère qu'à l'instant où Dieux et démons se
sont fusionnés en lui" |
"Pour comparer le yoga classique au yoga tantrique : le yoga classique prépare à l'auto-contrôle de l'être humain, à tous les niveaux, jusqu'au bout, jusqu'à l'impossible. Même les couches inconscientes sont pénétrées, étudiées, analysées, et après avoir fait tout cela, on parvient au déconditionnement. Par contre, dans le yoga tantrique, il s'agit uniquement de se laisser porter par les forces naturelles, et de toujours lutter pour ne pas être dévoré par ces forces. Cela veut dire qu'il faut préserver ces forces, qu'il ne faut pas s'en décharger. C'est cela que certains appellent la haute obéissance, ou le haut abandon." Conférence de Jerzy Grotowski. 4 juin 1978 |
"Celui qui capte l'émission d'un Dieu offre à son corps le plus grand pouvoir de régénération qui soit." IJP Appel Guéry |
"Quant au yoguin qui, le sexe érigé mais faisant remonter
en lui-même sa semence, marque son front de l'ûrdhva-pundra, il atteindra
le séjour d'en haut, s'il possède la science du yoga d'en haut constitué
des quatres éléments verticaux.." |
"Ma vie tient en trois mots : j'étais cru, j'ai été cuit, je suis brûlé." Djalâl ad-Din Rûmi |
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Extraits du livre Les fous de l'absolu de Prithwindra Mukherjee. " Selon une très ancienne tradition ésotérique, transmise notamment par le système de Yoga (communion mystique) qu'observent les partisans de Gorakhnâch, de Kahir et de nombreuses communautés de Fakir (qui s'inspirent du Soufisme), l'ascèse fondamentale consiste à sublimer l'énergie séminale afin de "mûrir" le corps (le "réceptacle") et de le rendre digne de recevoir, de stabiliser et de perpétuer la Joie spirituelle dans l'être intégral. Donc, quelle que soit leur origine de naissance et de croyance - différentes couches de la société hindoue, bouddhiste ou musulmane - ces fous de l'Absolu, connus comme Bâuls, ignorent toutes distinctions relatives aux "castes". Persuadés que ce corps humain est, lui seul, la base indispensable de leur quête, ils se livrent à une des disciplines prescrites par leurs maîtres - détenteurs de certains secrets d'ordre alchimique - visant à "raffermir" la chair conformément aux exigences de l'Esprit. (.....) L'orthodoxie brâhmanique, selon les Védas, reconnaît les procédés de la nature comme un artifice pour la procréation et préconise de façon formelle une continence absolue en faveur de la Délivrance. Partisans des pratiques popularisées par les Tantras, les Bâuls rejettent la coercition sexuelle et accordent une importance primordiale à la relation homme-femme comme moyen indispensable pour vaincre et sublimer le désir au profit de l'Amour. Renversant ainsi les injonctions védiques, les Bâuls font de la copulation une ascèse à travers la jouissance. Jouissance qui, jusqu'à certaines limites, recevait les titres de crédit dans les Upanishads (textes issus des Védas) où le Suprême ou l'Un se dédouble en l'Homme (Krishna ou Shiva) et la Femme (Rädhä ou Shakti) cosmique pour son propre plaisir. C'est au nom de la puissance que chaque homme phénoménal dissimule l'éternel Krishna ou Shiva au cœur de son psychisme, qui est son vrai Moi. De même, chaque femme phénoménale dissimule l'éternelle Femme par l'intermédiaire de la chair des chercheurs et par-delà leur désir charnel, fonde dans le cœur des Bâuls comme la Mort-en-vie : mort de la volupté des sens au sein même de la vie, mort qui annonce pour eux le début de la Vie spirituelle. (.....) D'une façon plus nuancée, les Bâuls croient que l'Un qui se dédoubla, à l'origine de la création, habite chaque être individuel en deux aspects simultanés et complémentaires en tant que l'éternel Homme et l'éternelle Femme. Pour s'unir l'Un à l'Autre, le Suprême a besoin de quitter le siège transcendant du Lotus-aux-mille-pétales pendant les trois journées des règles de la femme physique et s'installer au niveau du placenta, nommé le Lotus-de-Râdhâ. Moments appelés la Nouvelle Lune, que les Bâuls jugent opportuns pour tendre le piège-à-la-Lune, pour saisir l'Insaisissable, pour se livrer au Jeu à travers l'union du sperme avec l'ovule. Par une série de disciplines appartenant au registre du Hatha Yoga (Ha = le vecteur lunaire ou Idâ ; tha = le vecteur solaire ou Pingalâ), le Baûl et son épouse visent à réabsorber - lors de l'éjaculation - ce mélange "du lait et de l'eau", de le contenir et de l'orienter vers le plexus nommé lotus-à-deux-pétales, situé entre les sourcils. A force de "mûrir" cette force séminale, le corps des Bâuls parvient à une immunisation contre les maladies et la sénescence, atteignant une luminosité sereine. Psychologiquement, à force de jouir avec un détachement de plus en plus total envers le corps, les Bâuls établissent en eux-mêmes l'union de l'éternel Krishna avec l'éternelle Râdhâ qu'ils hébergent dans leur moi profond. Devenus ainsi parfaitement hermaphrodites, ils cessent d'avoir recours à la copulation physique et, sur commande, ils jouissent d'une éjaculation interne et ascendante dans le circuit hermétique de leur propre corps. C'est apparemment la phase ultime du Grand Jeu dans leur ascèse. (......) Il s'agit là d'une conception typique et fondamentale des Bâuls. Dans les Tantras bouddhistes, le chercheur doit unir les forces véhiculées par les deux vecteurs - gauche et droit - et leur donne une poussée ascendante à travers le vecteur central, afin de se perdre dans l'expérience du Suprême sous forme de la Vacuité au sommet de l'être. Ceci correspond à une négation du multiple pour s'évader du cycle causal composé d'actes, de rétributions agréables de ces actes, et de réincarnation pour en vivre les conséquences fastes ou funestes. Par contre, le Bâul cherche l'expérience du Suprême sans pour autant nier le multiple : il guette, par conséquent, la descente du Suprême jusqu'au placenta pour s'identifier à Lui. Ainsi, au centre même de la vie, le Bâul en jouit sans nulle obsession, sans passion rebelle, sans obscurcissement. Pour les Bâuls, le corps humain est le théâtre même de toute leur quête. C'est là, dans ce microcosme, que le Suprême réside avec ses multiples manifestations. Corps humain (et vie sur cette terre) que toutes les divinités, elles-mêmes, attendent d'assumer afin d'atteindre la réalisation suprême. Selon le Bâul, puisque le Suprême habite à l'intérieur de ce corps, à quoi bon le chercher à Bénarès ou à la Mecque ? C'est là, dans lui-même que le Bâul doit effectuer l'union parfaite avec l'Absolu et connaître la Joie absolue, au paroxysme de son extase. Lâlan décrit dans un de ses chants la peau et le squelette comme formes d'or où déferlent sans cesse des vagues de la Félicité. Ouvertement, il recommande le culte seul du corps comme l'infaillible moyen de tout accomplissement spirituel. C'est cette superficie corporelle de quatorze "quarts" (trois coudées et demie) qui, pour les Bâuls, est le terrain de prédilection. Par "connais-toi", ils comprennent la prise de conscience patiente et progressive de ce microcosme où se réunissent les sept paradis, les sept enfers, les sept océans, les cinq éléments. Le système pileux, la peau, les nerfs, la chair, l'os y représentent la terre ; les déchets, l'urine, le sperme, les humeurs, le sang - l'eau ; la soif, la faim, le sommeil, l'attachement et le répit - le feu ; les heurts, l'expansion, la contraction, la rétention, et la satisfaction - le vent ; la passion, l'envie, les obsessions, la peur et la honte - le ciel. Les cinq souffles externes (apâna au sacrum ; samâna au nombril ; prâna, au coeur, udâna à la gorge ; vyâna qui pénètre tout l'organisme) en abritent cinq autres, plus subtils, qui animent les plexus neuropsychiques. C'est dans ce corps que les Bâuls, fidèles aux Tantras, découvrent les enfers : atala sous la plante des pieds, vitala aux chevilles, sutala aux genoux, tala aux aines, talâtala dans l'orifice génital, rasâtala à l'extrémité du sexe, pâtala aux extrémités des pieds et au nombril. De même, s'y trouvent les paradis bhûh au nombril, bhuvah au coeur, svah à la gorge, mahah dans les yeux, jana aux sourcils, tapa sur le front, satya aux sutures du crâne. Dans ce microcosme, les océans ont le goût : du sel dans l'urine, de la crème dans le sperme, du lait caillé dans la moelle, du beurre clarifié dans la peau, de l'eau dans la graisse, de la canne à sucre dans le sang lombaire, du vin dans le sang partout ailleurs. Il y a également l'énumération des neuf planètes qui ont chacune leur siège dans ce corps. La méditation des Baûls consiste à parcourir ces symboles pour parfaire leur connaissance de ce théâtre de la comédie divine. Cette théorie des Baûls concernant le microcosme en tant que temple (ou mosquée) de l'absolu, porte l'emprunte de plusieurs couches de pratique ésotérique : celle qui relève du védânta (ou des Upanishads) ; celle des tantras (hindous et bouddhistes) ; celle de la mystique soûfi. Certaines proclament cette demeure charnelle de l'esprit comme le palais de l'absolu (Brahma-pura), muni de ses onze portails : les yeux, les oreilles, les narines, la bouche, le nombril, les orifices d'excréments et d'urine ; les sutures du crâne. L'habitant de ce pûra (palais) s'appelle le Purusha (l'Ame suprême). (........) C'est une évocation de la pratique particulière des Bâuls qui n'excluent pas la vie du couple dans leur quête spirituelle, contrairement aux injonctions de l'orthodoxie hindoue ou bouddhiste. Cette place d'honneur accordée à la femme depuis les tantras caractérise également le monde des Bâuls. La femme qui, au départ, n'est que partenaire du jeu érotique finit par gagner la stature de la Femme absolue. (......) S'inspirant des leçons de Hatha Yoga, les Bâuls maîtrisent le souffle vital (prânâyama) par l'inspiration (pûraka), avec la narine gauche tout d'abord, puis avec la droite, la rétention (kumbhaka) et l'expiration (réchaka), avec la narine droite d'abord, puis l'inverse, successivement huit, seize, trente-deux et soixante-quatre fois. C'est à l'aide de la rétention qu'ils arrivent à stabiliser l'organisme et propulser les énergies vitales à travers le sushumnâ. Ces entraînements du souffle s'accompagnent de différentes postures prescrites par le Hatha Yoga et s'appliquent au moment de la copulation pour expulser, "impulser" et conserver l'énergie séminale à l'aide de l'organe génital. a/ mûla-bandha en position assise, les jambes croisées un peu comme en tailleur avec la cheville droite fortement appuyée contre le périnée (posture connue comme le siddhâsana). A l'aide d'un travail du souffle, le chercheur vise à sentir distinctement la dissociation des régions anales et génitales. b/ açvinî-mûdra en posture du diamant (vajrâsana) à genoux, le derrière posé sur les talons, consiste à contracter et détendre le rectum en vue d'éveiller la kundali. c/ shakti-châlani-mûdra, assis en tailleur, serrant la hanche gauche à l'aide du talon droit et la hanche droite avec le talon gauche, réunissant les deux mains devant le sexe, le chercheur redresse le torse et la tête verticalement (posture nommée gomukhâsana). Accompagnée du contrôle du souffle, cette posture suit la montée de la puissance kundalini le long de la colonne vertébrale. De même il existe des postures vajroli, mûla-bandha-mudrâ, mahâbedha mudrâ, jalandhara-bandha- courantes du système hathayogique qui enseignent l'absorption du mélange sperme-ovule par l'organe génital. Les "six" représentent les égarements psychologiques qui entravent le progrès spirituel : la passion, la colère, la convoitise, l'obsession, la vanité, l'autoritarisme. Les "dix", en plus des cinq facultés de la connaissance et des cinq organes d'action signifient les stations propices à la concentration (dhâranâ ou néhâra) : sur le nombril, sur le plexus solaire, dans le coeur, sur la gorge, sur la bouche, sur le bout du nez, dans les yeux, à la gabelle, sur le front et sur la tête. La syllabe mystique (mûla-mantra ou bîja-mantra) : poussant une investigation spécifique jusqu'à l'extrême, les docteurs indiens, dès la plus haute antiquité, avaient analysé la psychologie de la puissance évocatrice du son (composé d'entités vocaliques et consonantiques des phonèmes) et avaient élaboré un système utilitaire pour l'ascèse. Ce dosage avisé du son (mantra) s'accompagnait de gestes significatifs (mûdra), du contrôle du souffle (prânâyâma) et de diagrammes "occultes" (yantra) capables de délimiter le champ magnétique nécessaire pour le culte en tant que théâtre de communion entre le chercheur et sa divinité pour faire accroître les chances d'accomplissement dans la quête. (....) En passant par les Tantras, cette utilisation rituelle du mantra- et ses accessoires : gestes etc. continuent à animer les pratiques ésotériques des Bâuls." |