Rubaiyat - Quatrains
X. Qu'il est vil, ce cœur qui ne sait pas aimer, qui ne peut s'enivrer d'amour! Si tu
n'aimes pas, comment peux-tu apprécier l'aveuglante lumière du soleil et la douce
clarté de la lune?
XXXIX. Vieux monde que traverse, au galop, le cheval blanc et noir du Jour et de
la Nuit, tu es le triste palais où cent Djemchids ont rêvé de gloire, où cent Bahrâms
ont rêvé d'amour, et se sont réveillés en pleurant.
LII. Si tu as greffé sur ton cœur la rose de l'Amour, ta vie n'a pas été inutile, ou
bien si tu as cherché à entendre la voix d'Allah, ou bien encore si tu as brandi ta
coupe en souriant au plaisir.
LX. Nous tomberons sur le chemin de l'Amour. Le Destin nous piétinera. Ô jeune
fille, ô ma coupe enchanteresse, lève-toi et donne-moi tes lèvres, en attendant que
je sois poussière!
LXXIII. Pourquoi tant de douceur, de tendresse, au début de notre amour?
Pourquoi tant de caresses, tant de délices, après? Maintenant, ton seul plaisir est de
déchirer mon cœur... Pourquoi?
CIV. La voûte du ciel ressemble à une tasse renversée sous laquelle errent en vain
les sages. Que ton amour pour ta bien-aimée soit pareil à celui de l'urne pour la
coupe. Vois... Lèvre à lèvre, elles se donnent leur sang.
CXIX. L'amour qui ne ravage pas n'est pas l'amour. Un tison répand-il la chaleur
d'un brasier? Nuit et jour, durant toute sa vie, le véritable amant se consume de
douleur et de joie.
CXXIX. Que l'homme est faible! Que le Destin est inéluctable! Nous faisons des
serments que nous ne tenons pas, et notre honte nous est indifférente. Moi-même,
j'agis souvent comme un insensé. Mais, j'ai l'excuse d'être ivre d'amour.
CLXII. Tu ne vois que les apparences des choses et des êtres. Tu te rends compte
de ton ignorance, mais tu ne veux pas renoncer à aimer. Apprends qu'Allah nous a
donné l'amour comme il a rendu certaines plantes vénéneuses.
CLXVII. J'ai reçu le coup que j'attendais. Ma bien-aimée m'a abandonné. Quand je
l'avais, il m'était facile de mépriser l'amour et d'exalter tous les renoncements. Près
de ta bien-aimée, Khayyâm, comme tu étais seul! Vois-tu, elle est partie pour que
tu puis ses te réfugier en elle.
