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Si le but que se fixait Gilles Vigneault au moment où il a écrit les paroles de sa chanson "Mademoiselle Émilie" était de susciter l'intérêt de l'auditoire ou de piquer sa curiosité, on peut, sans aucune possibilité d'erreur, dire qu'il a atteint son objectif.
Vigneault a développé un personnage qui ne peut absolument pas laisser indifférents les gens qui le rencontrent ou en entendent parler, à travers ses mots.
Il décrit Mademoiselle Émilie comme une personne plutôt retirée, qui craint les bavards et s'en tient très éloignée, dans la crainte d'être atteinte par leurs calomnies ou leurs médisances. Elle semble avoir connu une existence assez austère au coeur d'un petit village où tout le monde paraît se connaître et n'avoir aucun secret à cause des bons offices du "bedeau" qui, semble-t-il, n'a pas la langue dans sa poche. On en vient à se demander si cette charmante vieille jeune demoiselle a vécu une existence soit-disant normale, si elle a connu la vie et l'amour aussi...
Quand Malherbe DesChamps a fait sa connaissance, un vif sentiment de compassion pour cette femme s'est réveillé dans son coeur, et je crois qu'il s'en est follement épris. Il a décidé de mettre un peu de piquant dans cette vie qui paraissait, à tout le moins, monotone et quelque peu dénudée d'intérêt. Avec tout le respect et l'admiration qu'il dédie à Gilles Vigneault, il a voulu apporter une réponse à la question fatidique que se posent tous ses admirateurs...
Puisqu'elle devait malheureusement mourir dans des ciconstances aussi obscures... Comment et pourquoi? Qui est donc Mademoiselle Émilie?...
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Mademoiselle Émilie vivait seule en sa maison, avait été très jolie en de lointaines saisons. Les photos qui restent d'elle sont passées par les ciseaux, elle tenait une ombrelle, et c'était sur un bateau. Elle recevait peut-être, à tous les deux ou trois mois, un colis ou une lettre qui l'étonnait chaque fois, elle qui n'écrivait jamais... Fut-il amoureux? Fut-elle fidèle? On ne sait rien d'elle, on ne sait rien d'eux...
Dure et frêle silhouette qui traversait les hivers, en chapeau gris à voilette et en manteau de drap vert. Pour parler de politesse, elle disait "décorum", ne manquait jamais la messe, elle touchait l'harmonium. Mais manquait-elle à l'église, quelqu'un allait s'informer à la vieille maison grise, aux volets toujours fermés, elle qui ne manquait jamais... Fut-il amoureux? Fut-elle fidèle? On ne sait rien d'elle, on ne sait rien d'eux...
Puis un dimanche en automne, l'harmonium resta muet, on se retourne, on s'étonne, on chuchote, on est distrait. Sitôt la messe finie, on fut devant sa maison... Mademoiselle Émilie est assise en son salon, vêtue comme un jour de fête, chapeau, voilette et renard, sa valise toute prête, comme on attend un départ... Elle qui ne sortait jamais... Fut-il amoureux? Fut-elle fidèle? On ne sait rien d'elle, on ne sait rien d'eux...
Sa cousine Véronique hérita de son piano et des cahiers de musique avec l'album de photos. À Manon, la robe blanche, à Mathilde, le trousseau. C'est assez de quatre planches pour retrouver le berceau, mais prière de remettre à sa soeur qui reste loin, un petit coffret de lettres, cachetées avec grand soin. Elle qui n'écrivait jamais... Fut-il amoureux? Fut-elle fidèle? On ne sait rien d'elle, on ne sait rien d'eux...
Quelque dimanche après Pâques, avec les premiers bateaux, on le sait d'après Jean-Jacques qui sait tout, c'est un "bedeau," est passé au cimetière, un grand homme assez âgé, on voyait par ses manières que c'était un étranger. Il a déposé des roses, en silence comme on prie, sur la tombe où se repose Mademoiselle Émilie. Personne ne saura jamais... Fut-il amoureux? Fut-elle fidèle? On ne sait rien d'elle, on ne sait rien d'eux...
(Gilles Vigneault)
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Longtemps après qu'elle se soit assoupie, après même que l'on se soit partagé tous ses effets, M. le curé, dans le but d'agrandir le stationnement de l'église où elle avait autrefois touché l'harmonium, se porta acquéreur de la propriété qui, jusque là, lui avait appartenue.
Il allait donc falloir, pour y parquer des voitures, que soit démolie la petite maison grise où s'était écoulée sa vie et où aussi s'étaient évanouis ses rêves passés. C'est alors que les ouvriers embauchés pour défaire son nid découvrirent ce qui jusqu'à ce jour, caché derrière les volets toujours fermés, devait avoir porté le nom de "secret"...
Tombé du grenier sans doute, c'est à tout le moins ce que l'on a cru, entre le mur du fond et la cheminée, un grand carton à dessins contenant de vieilles photos dont certaines avec une mention derrière, et aussi, des lettres qu'elle avait sûrement dû recevoir jadis...
Il aurait fallu la mieux connaître, Mademoiselle Émilie, elle qui avait été si discrète tout au long de sa vie, pour arriver à pouvoir interpréter avec justesse les photos qui restaient d'elle et qui devaient à l'époque, lui remémorer de bien doux moments.
Sur l'une d'elles, on voyait un immense champ de blé avec à l'horizon, tout au fond, une forêt de conifères. Sans qu'on puisse dire pourquoi, elle avait broché à cette image un beau ruban vert. A l'endos, il était encore possible de lire: "LA SAPINIERE 17 JUILLET..." L'année elle, avait été emportée par l'humidité et les ans.
Une autre représentait un vieux marin qui pêchait tout en tirant sur sa pipe, au bord de la rivière où était ancré un petit bateau dont on pouvait à peine lire le nom sur sa coque. C'était le "Clo-Jo," que personne ne semble avoir connu, évidemment. Il y en avait aussi quelques autres qui, toutes, contribuaient à démontrer à quel point elle avait pu vivre en harmonie avec la nature.
On y voyait aussi un grand jardin avec un étang, des oiseaux et des fleurs. Il y avait des rivières, des ruisseaux, un sentier, une biche même, et finalement un très bel arc-en-ciel aux couleurs de l'automne, peut-être durant l'été indien. En-dessous de toutes ces photos plus que fatiguées et recollées (car elles avaient fini par se couper par suite des nombreux pliages et dépliages auxquels elles avaient été soumises), les fameuses lettres qui avaient donné naissance à tellement de ragots au village. Bien que jaunies par les ans, elles demeuraient cependant encore très lisibles.
À suivre...
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Émilie, mon tendre amour...
Ce soir votre absence me pèse beaucoup, j'ai un petit creux comme on dit et je vous avoue que ça me dérange quelque peu, car je suis sensé être un vieux routier que ni les kilomètres, ni les jours ne sont supposés troubler... Je m'ennuie cependant beaucoup de vous et pour tromper cet ennui qui tente de rider la surface de mon lac, je me suis confortablement installé dans le moelleux de mes rêveries, où je savais vous trouver.
Nous serons en effet beaucoup mieux là où ni l'espace, ni le temps ne sont réels et où encore, tout est relatif... Je vous revois, en cette fameuse veille, alors que vous étiez au bout du quai, où se pressaient les gens... Au cours d'un délicieux moment d'abandon, nous avions fermé nos yeux et perdu de vue pendant ces courts instants que nous aurions voulu voir durer toujours, les feux d'une morale qui impose le collier et les chaînes.
L'émotion me remplit quand je revis en pensées ces merveilleuses minutes où nos lèvres se sont prises pendant que nos corps étaient étroitement enlacés et que mes mains caressaient votre dos et glissaient le long de vos flancs, explorant chaque centimètre de votre chère personne. Je suis fou de joie, à l'idée d'avoir connu votre poitrine et d'avoir pu l'aimer, le temps d'un baiser. Il se fait maintenant très tard, mon Émilie chérie, et comme dans cette partie du monde les matins viennent avant que la nuit ne soit tout à fait partie, je me dois de souffler la lampe, en vous redisant dans le vent, combien je vous aime.
Bonne nuit, faites de beaux rêves et à très bientôt, je l'espère.
Walyter
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Chère Émilie...
Une fois de plus, c'est de très loin que je vous écris, dans le but de partager avec vous les sentiments qui habitent sous ma casquette et ma chemise. Il est bien inutile que je vous dise la détresse qui tente de s'installer au milieu de mon coeur, depuis le moment où vous êtes sortie de mes bras pour retourner à vos réalités, car je crois que vous la connaissez déjà et que vous l'avez aussi ressentie en votre âme. Non, je veux plutôt que vous puissiez participer à cet espoir qui grandit en moi de jour en jour, faisant s'accroître l'amour que j'entretiens pour vous et ce malgré toute la distance et la dimension de l'océan qui coule entre nous...
Je vous aime tendre Émilie. Vous êtes, je le répète, le grand amour de toute une vie. Je vous dis "merci, mon amour" pour chacun de ces instants que vous me permettez de partager. Chaque fois où il m'est donné de pouvoir prendre un repas en votre seule compagnie, je suis si bien que j'ai peur de me sentir mal. Le charme que dégage naturellement votre délicieuse personne n'a d'égal que l'amour qui brille dans vos yeux.
Vous êtes, ma douce Émilie, l'être le plus extraordinaire qu'au cours des années il m'ait été donné de connaître. Comprenez bien, merveilleuse compagne, que je vous aime à tel point que, si ce culte n'était réservé qu'à Dieu, je serais bien capable de vous adorer.
Émilie mon amour, j'ai soif de vous, de vos lèvres, de vos larmes et de vos mots. J'ai faim aussi, de vous, de vos mains, de vos épaules, de votre cou et de tout votre être. Ballotté au gré de ces flots où me conduisent les vents, c'est de vous, c'est à vous que je pense sans cesse. J'entends votre voix me chanter toutes ces choses si merveilleuses qui se passent en vous. Il me semble même vous apercevoir, appuyée au bastingage, quand les nuits sont claires. Je contemple alors votre dos, où déferlent des vagues de lune, et je rêve de naufrage au creux de vos reins.
Mes mains vous cherchent fébrilement et je finis par m'endormir sans pouvoir sentir la chaleur de votre corps penché sur le mien. Vous me manquez beaucoup et c'est pourquoi plusieurs de mes nuits sont fraîches et agitées. Quand elles perdent leur noirceur, je m'illusionne en étreignant mon oreiller. Je suis heureux que vous occupiez autant d'espace dans mon univers que je veux aussi être le vôtre, Émilie. Oui, j'éprouve beaucoup de bonheur que vous soyez là.
Les océans et les rivières qui séparent les continents et font naître les îles, alors qu'elles coulent entre nous, ne pourront jamais nous séparer. Elles ne font que nous empêcher de devenir des acquis, ne permettant ni à la monotonie ni non plus à la routine de s'installer dans nos amours. Elles nous communiquent aussi le goût de les traverser, ou même d'en modifier le cours afin de se chercher, se découvrir, se retrouver, s'apprécier, s'aimer, se le dire, se l'écrire et se le chanter...
Je vous aime profondément et je vous embrasse tendrement. Tendresse, baisers, caresses et affection vous suivent tout au long et tiennent votre main.
Je vous aime, à très bientôt.
Walyter
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Ma très chère Émilie...
Encore quelques lignes pour vous dire avec des mots qui n'arriveront jamais à décrire avec justesse la grandeur réelle de l'amour que j'éprouve pour vous, mon Trésor. Je n'ai pas la prétention de vous posséder, je veux tout juste que vous soyez dans ma vie, mon monde, mes rêves, nos secrets et notre univers.
Vous avez su devenir au fil des ans ma plus grande amie, mon refuge face à de nombreuses inquiétudes, ma consolation au milieu des peines, mon soleil des jours pluvieux, la verdure dans mes hivers et le pittoresque dans tous mes paysages. Oui, je vous aime Émilie, j'avoue que je suis follement amoureux de vous, de vos yeux, de vos lèvres, de vos mains, de votre voix et de toute votre merveilleuse personne.
Je vous aime pour votre sourire et pour votre humour, votre sensibilité et votre grandeur d'âme. Je vous aime aussi pour vos griefs et vos soupirs, vos nombreux succès, vos rares défaites, vos approbations et vos refus, vos humeurs, vos larmes et vos faiblesses, qui parfois me rendent fort. Je saurais difficilement me passer de vos baisers, vos caresses et vos élans. Il me semble que la vie serait insupportable sans la chaleur de votre main, l'éclat de vos yeux et la douceur de votre joue.
Acceptez, Émilie, que je vous redise encore et encore que vous êtes la plus merveilleuse de toutes les personnes qu'il m'ait été donné de connaître. Je vous aime, vous êtes mon Émilie. Je vous embrasse très affectueusement, vous qui n'écrivez jamais, et je vous souhaite une excellente nuit.
Longue vie, Émilie.
Walyter
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Tendre Émilie de mon coeur...
En fin de journée, j'ai sarclé mon calendrier, duquel j'ai arraché trente jours en papier. Le temps déboule, les canards semblent vouloir emporter l'été ailleurs, tandis que l'automne qui arrive tout rouge de plaisir avec, semble-t-il, de l'hiver plein ses valises, ne demande pas mieux que de les voir partir. Le fond de l'air devenant plus cru, j'ai décidé de le réchauffer un peu et j'ai allumé la bougie...
J'ai dressé la table comme si vous y étiez, j'ai approché votre chaise, j'y ai mis des oreillers, comme vous aimez, et je vous ai regardé, tout comme si vous y étiez. J'ai aussi goûté votre bouche, caressé vos cheveux et tenu votre main, tout comme si vous y étiez.
Je vous ai serrée contre moi très fort et encore, j'ai pris vos lèvres que j'ai embrassées avec tendresse, mieux que si vous y étiez.
Je pense très fort à vous ma douce, et je brûle de l'ardent désir de vous revoir bientôt. L'éclat qui brille dans vos yeux, le goût de vos lèvres, la moiteur de vos mains, la douceur de votre peau, vos gestes, vos paroles, vos regards et votre attitude ont vite fait de moi votre amoureux. Je vous aime aussi parce que je vous sais fidèle, mon Émilie.
Je vous embrasse chaleureusement, mon Émilie, et je vous désire de tout mon coeur, comme si vous y étiez.
À très bientôt, je l'espère.
Walyter
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Très chère petite Émilie de mon coeur...
Ayant reçu une lettre de vous, qui n'écrivez jamais, j'imagine que les choses doivent tout de même être assez sérieuses en ce qui a trait à votre état et je partage aussi vos craintes. Face à ce que vous me racontez, votre inquiétude devient la mienne et me ramène au temps où j'avais songé quitter la Marine Marchande, à cause de la maladie dont vous étiez alors atteinte. J'étais demeuré dans l'anxiété jusqu'à ce qu'enfin, le docteur Cohen nous assure que tout danger était alors écarté...
Je voudrais pouvoir rentrer immédiatement, afin d'être à vos côtés et pouvoir mieux veiller sur vous, mais vous savez déjà que "quand on est capitaine au sein de la Marine Marchande, on doit toujours être le dernier à quitter le bateau". Je ferai quand même le nécessaire pour obtenir un congé sans solde au cours des prochaines semaines, et nous verrons ensemble quels sont nos recours face à nos appréhensions.
Dans l'immédiat, je ne suis pas tranquille de vous savoir seule et isolée dans votre campagne. Compte tenu de votre fragilité, je considère que la situation est précaire et je vous sens vulnérable si vous êtes laissée à vous-même en ces lieux que je trouve quand même assez éloignés des services essentiels dont vous pourriez peut-être avoir besoin, et je suggère que vous alliez passer quelque temps chez votre cousine Véronique, avec laquelle vous partagez tellement d'affinités. Je suis certain qu'elle se ferait un plaisir de vous accueillir chez elle pour un moment, et de mon côté, je vous y sentirais plus en sécurité. S'il fallait que le mal mystérieux se soit réveillé de nouveau...
La décision demeure cependant vôtre, et j'espère que vous me ferez bientôt savoir ce que vous aurez décidé de faire à ce sujet. Je vous embrasse tendrement et j'attends avec impatience le moment de vous serrer de nouveau sur mon coeur et de chuchoter à votre oreille: "Je vous aime, Émilie".
Au revoir ma Chérie, prenez bien soin de vous.
Walyter
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