«Je ne cherche pas à changer les règles du jeu, mais le jeu lui-même.» : c'est une phrase, empruntée à André Breton, qu'ils aimaient bien mettre en exergue dans leurs revendications. Mis en examen et écroués, les Francs-Tireurs et Partisans qui avaient revendiqué onze attentats anti-FN à Marseille depuis 1991, n'ont changé ni le jeu ni les règles. C'est mercredi 13 octobre 1999, à 7 heures du matin, que les inspecteurs du SRPJ de Marseille ont déboulé chez Yves, 40 ans, infirmier, et chez William, 38 ans, technicien-journaliste. Longue filature: Selon nos informations, la brigade criminelle marseillaise pistait Yves depuis belle lurette, via notamment les Renseignements généraux, qui le filaient depuis le début de l'année. De source judiciaire, on indique même que la PJ attendait un hypothétique attentat pour l'interpeller en flagrant délit. Mais ce dernier ne passe pas à l'acte, et la police attend. Plusieurs mois. Jusqu'aux interpellations de mercredi. Lors de sa garde à vue, en tout cas, l'autoproclamé «résistant actif» se sera montré fidèle aux textes revendicatifs des FTP. Fidèle, aussi, à ses engagements depuis ses 20 ans. Aux enquêteurs, Yves a ainsi affirmé que c'est bien par «idéologie antifasciste» qu'il a agi, celle-là même qui l'avait conduit à expliquer, dans différents textes siglés FTP: «historiquement le fascisme ne s'est jamais combattu dans les urnes. Par contre, les fascistes sont souvent arrivés au pouvoir par les urnes»; et à justifier sa lutte, qu'il ne voulait pas exemplaire, par ces mots: «[Les fascistes] ne reviendront pas plastronner cyniquement sur le perron des institutions républicaines qu'ils haïssent.» Selon les premières déclarations d'Yves, c'est donc à lui, et à lui seul, que reviennent les onze attentats commis à Marseille. Comme le premier, le 14 juillet 1991, contre le siège du FN (cocktails Molotov); celui, raté, du 3 avril 1995 contre la villa du secrétaire départemental du FN («en riposte à l'assassinat d'Ibrahim Ali par les fascistes», stipulait le communiqué); celui du 24 octobre 1998 contre le bureau d'un conseiller municipal FN, qui avait abrité l'association DGL (pour D'Ambrogio, Giglio, Lagier, les trois colleurs d'affiches du FN condamnés pour le meurtre d'Ibrahim Ali); ou, enfin, le dernier, du 28 octobre 1998, contre le Stadium de Vitrolles, qui s'apprêtait à programmer trois groupes de «rock identitaire». Autre précision policière: jamais ni les cocktails Molotov, ni les bombes artisanales des FTP n'ont été fabriqués pour tuer.