Toujours dans le but de jouer intelligent et maintenant que la noblesse existe en jeu, que des terres peuvent être acquises que ... et que ... (les habitués rempliront vite les blancs), il nous a semblé utile d'apprendre ce qu'était la vassalité. Plus long que d'habitude, cet article se veut descriptif des us et coutumes, mais aussi des conséquences de cet acte. En espérant que vous le trouverez aussi intéressant que cela nous a été de faire des recherches.
Le lien de vassalité est double : il y a le lien personnel entre vassal et seigneur, et le lien réel né de la concession d'un fief. À partir du deuxième quart du XIe (1025-1050), ces deux liens sont presque toujours jumelés et on ne rencontre plus guère, sauf chez de très jeunes gens, de vassaux sans fief.
1. La vassalité
La vassalité résulte d'un contrat par lequel un homme, le vassal, devient le dépendant d'un autre homme, le seigneur. Cet engagement engendre des obligations de part et d'autre.
Ce contrat est un contrat archaïque, ce qui implique qu'il est formaliste et oral. C'est donc un véritable rite, excellent moyen d'en conserver le souvenir, l'écrit n'étant qu'accessoire à l'époque.
Déroulement.
L'hommage. Le vassal, généralement à genoux, met ses mains dans celles du seigneur qui est debout et dit : "Je deviens votre homme". Le seigneur répond "Je vous reçois et prends à homme". Il y a parfois un rite supplémentaire qui va créer une affinité encore plus étroite : le seigneur, en relevant le vassal, le baise sur la bouche. C'est l'osculum. Ici se terminait le rite mérovingien, qui ne comprenait aucune partie religieuse.
Le serment de fidélité. Le vassal s'est relevé et la main sur les livres saints ou une châsse contenant des reliques, il prête serment d'être fidèle à son seigneur ; il lui jure fois et sûreté. Ce serment, de valeur religieuse, s'il était violé ferait du vassal un parjure soumis aux peines ecclésiastiques. De plus, ce rite implique que les deux participants soient chrétiens.
Les obligations
De l'hommage. Pour le seigneur, il s'agissait de protéger et soutenir le vassal; pour le vassal, servir le seigneur. Ces expressions ont une portée bien plus morale que juridique. Dans les faits, un vassal est devenu l'homme de son seigneur, il le sert de tout son corps, de toute son âme, de toute sa générosité. En contrepartie, le seigneur fait vivre le vassal : à l'origine en l'accueillant chez lui, en le nourrissant et en le vêtissant; plus tard, en lui donnant un fief. Ce dernier a beaucoup contribué à faire évoluer les choses. En effet, il a accru, chez le vassal, le sentiment d'intérêt, et il a également éloigné les deux protagonistes, ceux-ci ne vivant plus sous le même toit. D'où le serment de fidélité, venu combattre ces tendances au relâchement.
Du serment de fidélité. En 1020, l'évêque Fulbert de Chartres écrit au duc de Guillaume d'Aquitaine : "Celui qui jure fidélité à son seigneur doit toujours avoir à l'esprit les choses suivantes. : qu'il ne doit pas causer de dommages à la personne de son seigneur, qu'il ne doit pas nuire non plus à son trésor ou à ses châteaux forts, à sa justicia – c'est à dire ses droits de la puissance publique, également à ses possessions, à ses domaines. Le vassal ne doit pas rendre difficile à son seigneur le bien que celui-ci pourrait aisément faire, ni lui rendre possible celui qui eût été possible. Le seigneur doit en toutes choses, rendre la pareille à son vassal sous peine d'être à bon droit taxé de mauvaise fois."
2. Le fief
Dans la chanson de geste de Raoul de Cambrai (voir l'article suivant), Bernier étant un vassal non châsé, il précise à sa mère ce qu'il a reçu de Raoul : "Raoul est mes sires, cheval me donne et dras (habit) et garnemens (harnachement) et pailes de Baudas (beau manteau à franges d'or)". Ces vassaux nourris, non châsés, on en trouve encore au XIe siècle, voire au XIIe, mais de moins en moins. Le cas le plus courant devient celui qui en échange de ses services a reçu de son seigneur un fief. Déjà vers 1020, Fulbert de Chartres, après avoir énuméré les obligations négatives du vassal, ajoute : "C'est justice que le vassal s'abstienne de nuire à son seigneur, mais ce n'est pas ainsi qu'il mérite de son fief, car il ne lui suffit pas de s'abstenir de faire le mal, il lui faut encore faire le bien. Il importe dont qu'il fournisse à son seigneur le conseil et l'aide s'il veut paraître digne de son fief ..."
Le fief est souvent une terre, mais dans la seconde moitié du XIe siècle, des seigneurs se sont mis à concéder en fief des rentes, c'est-à-dire le droit de percevoir annuellement un revenu fixe.
L'aide du vassal. Elle est militaire ou pécuniaire. L'aide militaire est essentielle : le monde des seigneurs est un monde de combattants. Elle consiste d'abord en un service de garde au château où les vassaux des châtelains encadrent les hommes de la poesté tenus d'y monter la garde. Mais le service majeur est celui d'"ost et chevauchée" que le vassal acquitte – le mot l'indique – en combattant à cheval.
Le service d'ost et de chevauchée a été limité : une règle coutumière prévaut au XIIe siècle d'après laquelle l'ost ne saurait durer plus de quarante jours de suite. Cette règle était favorisée par l'Église et par la royauté, soucieuses d'ordre et hostiles aux guerres seigneuriales.
L'aide militaire est graduée quant à l'importance du fief. Il y a d'abord au degré mineur, les fiefs de chevaliers – au sens restreint du mot – ou fiefs de haubert, ainsi nommés parce que le chevalier arrive seul avec son armure ou haubert. Puis les fiefs de châtelains, de barons, de vicomtes, de comtes, dont les titulaires sont tenus de venir, non plus seuls, mais avec un nombre de suivants qui croit avec la dignité. C'est par ces catégories de fiefs, fondés sur l'aide militaire, que l'on en est arrivé à établir une hiérarchie de dignités nobiliaires.
L'aide est également pécuniaire. Le vassal doit aider son seigneur, selon l'importance de son fief, dans certaines circonstances de la vie du seigneur justifiant un soutien ou un cadeau (on retrouve là le lien affectif des débuts). Il contribue ainsi au paiement de la rançon si le seigneur est fait prisonnier, au paiement de l'armure du fils aîné armé chevalier, au mariage de la fille aînée ; à partir de la fin du XIe siècle, il finance également le départ du seigneur pour la croisade. La coutume s'est finalement limitée à ces quatre cas.
Le conseil. Le vassal doit conseiller son seigneur, cette obligation consistant essentiellement à siéger à la cour du seigneur, à lui "faire sa cour". Si le seigneur les convoque, les vassaux sont tenus d'y assister. D'extrême variation ont existé quant à l'application de ce principe, aussi bien au travers des temps que suivant l'importance des seigneurs.
Le rôle de la cour est double, elle conseille le seigneur et elle juge. La cour doit conseiller le seigneur sur toutes les questions que ce dernier lui soumet. En fait, cela dépend de nouveau beaucoup de l'importance du seigneur. Dans le cas du roi ou de princes territoriaux, la cour conseille d'office en matière de politique, d'octroi de diplômes, ... Lorsque les vassaux sont ainsi près du seigneur, ils constituent une cour ; entre eux ils sont sur un pied d'égalité, ils sont pairs.
La justice féodale s'oppose à la justice seigneuriale. Cette dernière s'applique aux hommes de la poesté. Sa nature est plutôt publique. La justice féodale est née du contrat vassalique. La cour féodale est compétente pour toucher tout ce qui touche au fief, à la qualité de vassal, aux obligations réciproques du vassal et du seigneur, aux manquements à ces obligations.
3. Les sanctions
Au profit du vassal, on a organisé la procédure de désaveu. Le vassal saisit le seigneur de son seigneur, son suzerain. Il désavoue son seigneur. Celui-ci est jugé par ses propres pairs. S'il est condamné, il devient le vassal direct de son suzerain, tout en gardant fief puisqu'il n'est pas fautif.
Au profit du seigneur, lorsque le vassal n'a pas exécuté ses obligations, une procédure a été organisée de saisie temporaire et surtout de confiscation, la commise. L'affaire se jugeait à nouveau devant la cour féodale.