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[Plusieurs mois passèrent. L'hiver et la neige
s'installèrent sur la Chire tel un tapis de pellicules dans le fond de la
tête d'un vieux facteur roux. Frotteux et Scram ne parlèrent jamais à
personne du cockring. Les deux mongols de cousins de Frotteux, Ptit Pine et
MerryChristmas, rôdaient fréquemment autour du trou de marmotte de Frotteux,
attirés là par les cris et les hurlements des films de cul que Frotteux y
écoutait trente-six heures par jour, bandé comme une panthère. Mais jamais
ils ne surent vraiment ce qui se passait d'anormal dans ce trou infesté,
sinon que Frotteux n'en sortait jamais, lui qui, pourtant lorsqu'il était
jeune, se vantait d'avoir de la graine d'aventurier comme son oncle Bimbo
(mais il s'avéra dans ce cas bien précis que c'était plutôt la graine de son
aventurier d'oncle Bimbo qu'il avait quelque part).
Quoi qu'il en soit, le 18 décembre 2002, Frotteux Backins sortit enfin de sa
maison qui empestait le fruit de sa complaisance. Ce jour était très spécial
pour lui car il marquait la sortie en salle du film qu'il attendait avec
impatience depuis un an, la suite du Seigneur des anneaux : the tomb towers.
Il avait fallu beaucoup d'efforts à Frotteux pour convaincre Scram d'aller
au cinéma avec lui car dans le passé, à chaque occasion où ils y avaient été
ensembles, Frotteux l'avait couvert de honte par ses comportements bizarres
et gênants, et cette fois-là ne s’était pas avérée différente.
À la fin du film, les employés du cinéma avaient eu la surprise de leur vie
de constater que Frotteux avait les culottes baissées jusqu'au sol, et qu'il
s'était englué de sperme dans le banc de la rangée d’en avant.
Frotteux essaya de se défendre du mieux qu’il put après s’être fait
surprendre alors qu’il avait son gros sexe enflé entre ses mains.]
Frotteux : Hé! Le film était trop bon. C'était jouissant, je n'ai pas pu me
retenir.
[Les employés durent avoir recours aux mâchoires de vie pour le déprendre.
Par la suite, ils ne se gênèrent par pour les chasser tous les deux du
Chiréplex Odéon à l’aide de grands coups de pied au cul. Il était minuit et
cinq et les deux grosbits étaient à l'extérieur du cinéma. Scram suggéra de
courir en direction du boulevard.]
Scram : Si on se grouille, on devrait être bon pour attraper le bus de dix
heures et demi qui va nous ramener chez nous.
Frotteux : J’en doute. Le bus de dix heures et demie ne passera sûrement pas
avant minuit et demi, comme d’habitude.
Scram : On sait jamais.
Frotteux : Criss que c'était hot le film, hein ? Moi, c'est les Ents qui
m'ont fait le plus triper.
Scram : Moi aussi, surtout quand ils attaquent Orthanc.
[Tout en continuant de parler du film, ils coupèrent à travers un petit bois
qui menait au boulevard. À un moment donné, ils ressentirent sur eux la
brise d’un vent particulièrement glacial et ce même si les branches des
arbres dénudés étaient parfaitement immobiles.]
Frotteux : Oh mon Dieu!
[Les grosbits virent soudainement sortir de nul part le
personnage le plus incroyable qu'ils avaient vu de leur vie. Il s’agissait
d’un géant de sept pieds de haut couvert d’un drap noir sur la tête. Il
s’avança et se présenta à eux d’une belle voix d’annonceur de télé.]
Créature étrange : Pardon, maître Backins, auriez vous l'obligeance de me
suivre, s’il vous plaît.
Scram : Hein, un Nazgul ! Crisse, c'est comme dans le film. C'est cool en
tabarnak.
Frotteux : Wow! C’est quoi ton nom, Nazgul ?
Nazgul : Mon nom est Benoît, maître Backins.
Scram : Où est ce que tu veux que Frotteux te suive comme ça, Ti-Ben ?
[Le Nazgul, dont on ne voyait pas le visage sous le capuchon du drap noir
qui lui recouvrait la tête et une bonne partie du torse, ne sembla pas
particulièrement heureux de se faire appeler de la sorte. Il continua
néanmoins d’une voix calme et posée.]
Ti-Ben : Dans un endroit chaud et sulfureux, tout au Sud d’ici, cher ami.
Scram : Cher ami ? Ayoye. Vous êtes tous aussi polis les Nazguls ? C'est que
vous donnez plutôt l'impression de grosses bêtes féroces, immondes, puantes
et sans cervelle.
Ti-Ben : Je sais, je sais, les gens se fient tellement aux apparences de nos
jours. Mais vous savez, depuis que notre maître bien-aimé a échoué dans sa
dernière quête, nous nous sommes recyclés dans l'industrie mortuaire. C'est
moins fatiguant et surtout bien plus payant.
Frotteux : Pourquoi est-ce que tu veux m’emmener dans cet endroit ?
Ti-Ben : Quelqu’un de très important vivant là-bas et pour qui je travaille
aimerait bien vous rencontrer, maître Backins.
Frotteux : Ouin ! Il pourrait pas venir me rencontrer ici à la place. C’est
que moi les endroits chauds, je n’aime pas tellement ça, surtout que le
soleil me donne des méchantes taches de rousseur.
Ti-Ben : J’ai peur que ce ne soit impossible. Mais ne vous inquiétez pas
pour l’exposition au soleil, là où nous irons vous n’en verrez pas le
moindre rayon durant toute la durée de votre séjour. Et de toute façon, mon
patron vous accueillera dans son magnifique château qu’il vient tout juste
de faire rénover.
Frotteux : Wow ! Ça commence à m’intéresser de plus en plus ta proposition
mon Ti-Ben. Mais est-ce que Scram pourrait m’accompagner là-bas. C’est que
je ne voyage jamais sans deux choses : Scram, ici présent, ainsi que ma
carte de crédit du cercle des fermières ogresses.
Scram : Wo minute ! J’ai jamais dit que je voulais aller en voyage, moi.
Frotteux : Bon et bien reste ici d’abord, petit couard.
Scram : Dis, est-ce que tu vas me prêter ton cockring pendant que tu vas
être en voyage. T’en auras sûrement pas besoin.
[En entendant prononcer le mot de ‘cockring’, le Nazgul frétilla
d’excitation comme s’il était en train de se faire tirer la pipe de sa vie
en dessous de son drap.]
Frotteux : Je t’ai dit de la fermer avec ça, sale crétin. Si tu penses que
je te le laisserais. Fi! T’es pas du tout sur tes gardes et tu viens de me
le prouver encore une fois de plus. Tu te le ferais piquer par le premier
venu, j’en suis certain.
Scram : T’es chien avec moi, Frotteux.
[D’une voix commençant à marquer une légère pointe d’impatience.]
Ti-Ben : Bon, alors vous m’accompagnez oui ou non ?
Frotteux : Je ne vois aucune raison pour ne pas le faire.
[Tout en disant cela, Frotteux se remémora la dernière conversation qu’il
avait eue avec Glandalf lorsque celui-ci était venu lui rendre visite dans
son trou de marmotte le lendemain du départ de Bimbo. Il lui semblait que le
vieux sorcier l’avait mis en garde contre quelque chose, mais il ne se
souvenait plus exactement de quoi. La seule chose qu’il se rappelait avec
exactitude était la taille démesurée du mouton dans le film de cul qu’il
avait écouté toute la journée, cette fois-là. De toute façon, Glandalf
n’était plus l’ombre de ce qu’il avait été et sa sénilité n’était plus
seulement contenue dans les couches pour adultes qu’il portait à l’extérieur
de ses atours mais semblait se répandre un peu partout, pensait le Grobit.]
Frotteux : Non vraiment aucune raison.
Ti-Ben : Très bien. Dans ce cas, suivez-moi, maître
Backins.
[Frotteux et le géant habillé d’un drap noir se mirent en route lorsque
Scram s’insurgea en gueulant comme un âne.]
Scram : Wo! Gang de crisse. Vous allez pas partir de même sans moi, osti de
tabarnak.
Frotteux : Tu viens juste de dire que tu ne voulais pas y aller.
Scram : Oui mais j’ai bien réfléchi à mon affaire dans les dernières heures
pis j’ai décidé d’y aller, en fin de compte.
[Le Nazgul, découragé devant autant de stupidité, se prit le visage à deux
mains, bien qu’il était impossible de savoir ce que cela impliquait. Scram
sembla remarquer son impatience à son endroit.]
Scram : Quoi, est-ce que ça te pose un problème que j’accompagne Frotteux ?
Ti-Ben : Pourquoi devrais-je m’offenser d’une présence aussi charmante que
la vôtre ?
Scram : Hein ? Qu’est ce que tu racontes osti de drap vide, je comprends
rien quand tu parles, calisse.
Ti-Ben : Êtes-vous obligé d’employer constamment un langage aussi vulgaire,
maître Gamchi ?
Scram : Ça se peut bien, tabarnak. Pourquoi tu veux savoir ça, osti de
siboire ?
Ti-Ben : Vous commencez à me taper sur les nerfs. Voilà pourquoi.
Scram : Ah pis crisse, mange donc une osti de bus de marde. Moi qui pensais
que les Nazguls étaient cools. Viens t-en Frotteux, on sacre notre camp
d’ici. J’entends justement l’autobus qui s’en vient, si on court on devrait
être bon pour la rattraper.
[Sans trop savoir pourquoi, Frotteux fit un pas en direction de Scram, son
vieil ami, mais le Nazgul s’interposa et lui empoigna l’épaule droite avec
force.]
Ti-Ben : Je ne saurai autoriser cette fuite, maître Backins.
Scram : Je voudrais bien te voir essayer de nous empêcher de décrisser, mon
grand crisse de maigre. Je vais aller chez nous chercher l'épée du
Witch-King qu’ils m’ont donnée en promotion chez Mcdo pour avoir mangé mon
cinq millième cheeseburger sans fromage.
Ti-Ben : Cette épée a été confisquée par l'un des neuf dans votre salon,
tout à l'heure. Elle ne vous appartient pas, maître Gamchi. Elle appartient
au capitaine de mon équipe de polo, Rich King.
Scram : Ah ben, tabarnak de calisse, ça se passera pas comme ça.
Ti-Ben : Désolé, mais c'est ainsi.
Scram : Mon tabarnak, tu vas m'emmener tout de suite à cet osti de Burger
King là ! Pis ça presse. Je veux ravoir mon épée. J'ai pas encore coupé de
tête d’écureuil avec.
Ti-Ben : Ca tombe bien, c'est justement là où nous nous dirigions.
Scram : Au Burger King ?
Ti-Ben : Non, à Merdor.
Frotteux et Scram : Merdor !!! COOOOOOOOL !!!!
Ti-Ben : Hein ?
Frotteux : Tu aurais du nous le dire plutôt que c’était à Merdor que tu
voulais m’emmener. J’ai toujours voulu visiter la région.
Scram : Ouin, moi avec. Paraîtrait qu’y a ben des volcans en activité dans
ce coin-là.
Ti-Ben : Décidément, y a plus rien pour faire peur à tous ces jeunes
morveux, aujourd’hui. C'est vraiment plus comme c’était dans le bon vieux
temps.
Frotteux : Bon ! Assez perdu de temps. En route !
Ti-Ben : Allons-y, c’est par là.
[Scram se tourna en direction de Frotteux avec un large sourire de dents
jaunes.]
Scram : Merdor ! C’est vraiment trop cool. High five mon pote !
[Frotteux vint pour taper dans la main garnie de déchets nasaux de son
fidèle compagnon quand il s’aperçut avec horreur qu’il était incapable de
lever sa propre main droite.]
Scram : Qu'est-ce qui se passe, Frotteux ? Tu veux pas faire un high five
avec ce bon vieux Scram ?
Frotteux : Crisse, je peux plus bouger ma main droite. Elle est comme
pétrifiée.
Scram : Ah non! Ça doit être quand Ti-Ben t’as pogné
l’épaule. Les Nazguls ont un touché paralysant. J’ai lu ça quelque part dans
un vieux numéro d’Allo Police - spécial morts-vivants.
Frotteux : C’est vrai qu’il avait la main froide en crisse.
Scram : Imagine si ta main reste paralysée pour toujours. T’es pas
ambidextre toi, comment tu vas faire pour continuer à jouer à la pétanque le
samedi après-midi ?
Frotteux : Tabarnak, pire que ça, comment je vais m’y prendre pour me
branler dix fois par jour sans ma foutue main droite ?
[Le Nazgul éclata d'un petit rire narquois.]
Ti-Ben : Maître Backins, vous m'en voyez terriblement désolé.
[Le géant vint pour compatir aux malheurs du pauvre Grobit en lui donnant
une claque amicale sur l’épaule gauche mais Frotteux s’esquiva tout juste à
temps.]
Frotteux : Touches moi pu, mon tabarnak.
Ti-Ben : Oups ! Veuillez me pardonner.
Frotteux : Correct. Mais essaie de faire attention. Je n’ai pas envie de me
ramasser paraplégique.
Scram : On devrait arrêter quelque part pour aller manger. Ça va peut-être
redonner des forces à ton bras droit.
Frotteux : S’arrêter quelque part. Hum ! Nous ne sommes même pas encore
partis.
Ti-Ben : Suivez-moi, messieurs.
[Les deux grosbits se mirent en route à la suite du Nazgul qui avançait très
rapidement et de façon si fluide qu’il donnait l’impression de ne pas
toucher le sol.]
Scram : Siboire ! Y marche pas, y vole le gringalet.
[Scram semblait être en mesure de suivre la cadence effrénée du géant mais
Frotteux, qui devait traîner le boulet d’un bras complètement paralysé,
peinait énormément à le faire. Ti-Ben les fit traverser plusieurs kilomètres
de sous-bois (ils furent d’ailleurs attaqués par une horde de pic bois
affamés), puis ensuite il les guida à travers les rues achalandées d’un
village fantôme où le Nazgul s’arrêta quelques instants pour prendre des
nouvelles de quelques uns de ses cousins. Finalement, après deux heures de
marche ininterrompue, ils arrivèrent enfin à proximité d’un restaurant, le
Da Giovomi, qui se trouvait tout près du motel LaBree.]
Scram : Regardez, il y a l’enseigne lumineuse d’une étoile, à l'ouest.
Ti-Ben : C’est la cote de ce restaurant. Mais je suggère tout de même que
nous arrêtions pour y faire halte, messieurs.
Scram : Bonne idée ça mon Ti-Ben.
Frotteux : Ah non ! Ça me tentes pas.
Scram : Voyons, t’as pas arrêté de chialer que t’étais écoeuré de marcher
depuis tantôt.
Frotteux : Je sais. Mais si on continue encore un peu, on va être bon pour
atteindre le Folichorc avant les premières lueurs de l'aube.
Scram : C’est vrai, le Folichorc. Ce fameux bar de danseuses est pas très
loin d’ici. On pourrait peut-être aller se rincer l’œil.
Ti-Ben : Il n'est pas bon d'aller se promener dans ce coin, maître Gamchi.
Il y a des orcs qui patrouillent cette région, la nuit.
Scram et Frotteux : Des Orcs !?
Ti-Ben : Oui, ils ont de longues barbes, des tatous mystérieux et montent
des chevaux sur deux roues qui font un bruit épouvantable.
Scram : Ah, des motards, tu veux dire. Les Orck Machines.
Ti-Ben : Qu'importe, nous allons au Da Giovomi. Regardez Maître Backins peut
à peine tenir sur ses jambes. D’ailleurs son bras est devenu tout bleu.
Frotteux : Je veux aller au Folichorc, moi, calisse.
Scram : Ah non! Je repense à ça. On est mercredi aujourd’hui.
Frotteux : Et alors ?
Scram : Le mercredi au Folichorc, c’est la soirée spéciale Troll et
ogresses. Si tu penses que j’ai envie de voir ça. Yark !
[Frotteux frissonna d’horreur à la pensée d’une grosse ogresse menstruée
dansant aux tables pour une gorgée de bière et un top de cigarette.]
Frotteux : Oublions le Folichorc pour ce soir.
[Les trois comparses arrivèrent devant la file du Da
Giovomi. Ils passèrent devant tout le monde en recevant au passage une pluie
d'injures et de postillons de colère.]
Client 1 : Heille le bras bleu, fait la file comme tout le monde !
Client 2 : Ouin, toé itou avec le drap sale !
Client 3 : Ouin, ça fait des heures que j’attends pour manger ma portion de
pâté mal cuit avec une tite sauce rose suspecte sur le dessus.
[Le groupe resta sourd aux protestations des autres clients et se faufila au
début de la file, là où ils furent arrêtés par le portier qui se nommait
Henri.]
Henri : Stop ! Heille les fin-finauds, où c'est que vous pensez aller comme
ça ?
Ti-Ben : Salut Henri, on ne se souvient plus de ses vieux amis maintenant ?
On a la mémoire courte ?
Henri : Tabarnak ! Benoît ? C'est ben toé !? Euh. Allez-y ! Passez messieurs
! Je vous en prie. Euh ! *chuchotements* J'espère que tu fais tout pour que
je me fasse pas prendre au moins.
Ti-Ben : Inquiète toi pas mon Henri, je veille sur toi comme une maman
hamster sur ses petits qu’elle s’apprête à dévorer.
[Henri les laissa passer au grand dam des clients dans la file.]
Client 1 : Heille c'est quoi cette affaire là ? Y en a qui ont des
traitements de faveurs !
client 2: Ouin ! Mon pâté frette va être frette si je le mange pas tout de
suite !
Scram: Merci Henri, en passant tu l'as tué avec quoi ta femme ?
[Un policier en civil qui attendait son tour dans la file surprit la
conversation.]
Policier : Henri, tiens, tiens. Ça me rappelle quelque chose. Henri Dubé, ben
oui ! On n’a jamais trouvé le coupable pour le meurtre de votre femme. Je
pense que je vais t'embarquer pour un petit interrogatoire.
[Le policier arrêta Henri qui, la bouche pleine d'écume de mer, lança un
regard meurtrier à Scram. Celui-ci s'enfuit en courant. Le portier n'étant
plus là pour faire respecter la file, l'anarchie s'empara des clients qui
étaient écoeurés d'attendre comme des vaches à l'abattoir. Tous et chacun se
précipitèrent sur les tables vides pour s'empresser de commander. Ceux qui
ne trouvèrent pas de place violèrent les serveuses, tandis que les autres
pissèrent ou vomirent sur le comptoir à dessert. C'est dans cette anarchie
totale que nos compagnons prirent place à la table du fond en peinant pour
ne pas glisser sur le plancher sale et boueux du restaurant.]
Frotteux : Calisse. Maintenant, non seulement je ne sens plus mon bras, mais
là ça monte jusque dans l'épaule.
Scram : Arrête donc de te plaindre pour rien, maudite moumoune. Tu l'as dit
toi même, j'ai tellement envie que quelque chose de gros m'arrive pour une
fois !
Frotteux : T'as rien compris, j'ai dit que j'ai tellement envie, que j'ai
quelque chose de gros de pris dans le cul et que j'ai hâte que ça arrive une
fois pour toute.
Ti-Ben : Il fait plus noir que dans les sombres mines de la Morvia dans ce
restaurant.
Serveuse : Salut les beaux bruns ! Moé c'est Margot, pis
mon chiffre fini dans quinze minutes faque faites ça vite s.v.p.
Scram : Siboire, je suis même pas capable de lire le menu tellement y a pas
d’éclairage dans ce trou à rat. On peut pas avoir une chandelle au moins ?
Margot : T'aimes mieux pas voir ce qui y a d’écrit là-dessus, fie toi sur
moi, mon beau.
[Ti-Ben le Nazgul regarda longuement Margot au point où un léger filet de
bave s’échappa de sous son capuchon. Il était visiblement tombé sous le
charme de cette serveuse aux jambes et au menton mal rasés qui se tenait
devant lui. Cette femme à l'allure débraillée, avec sa robe de serveuse à
l'allure d'un linge à vaisselle, sa permanente défraîchie et sa teinture
ratée d'une couleur difficile à cerner. Frotteux et Scram, pour leur part,
ricanaient entre eux comme deux vieux bossus dans une salle de quilles aux
dépens de la serveuse qui était plus poilue qu'un coureur-des-bois revenant
d'une expédition de trois mois dans la forêt profonde.]
Scram : Osti qu'elle est laite.
Frotteux : Mets-en, son nom ça doit être Marco, pas Margot.
Scram : Margot, le jour. Marco, la nuit.
[En entendant les mots de dérision portés à l’endroit de la serveuse, le
Nazgul bondit de son siège comme une poule qui vient de chier un poussin et
d’une voix furieuse commanda une côtelette de veau arrosée au vin rouge.]
Margot : Désolé mon beau, mais y'a pas de c't'affaire-là au menu,
aujourd'hui. Par contre, on a une omelette au navet qui est pas piquée des
vers.
Ti-Ben : Zut ! Moi qui voulait une côtelette.
Scram : Hé Ti-Ben ! Tu sais-tu qu’est-ce qu’on dit d’un Nazgul comme toi qui
a pas ce qu’il veut ?
Ti-Ben : *soupirs* Non ! Mais je sens que je vais le savoir bientôt.
Scram : On dit qu’il est dans de beaux DRAPS. Hé! Hé! Hé!
[Frotteux pouffa de rire la moitié de son verre d’eau directement à
l’intérieur du capuchon du géant. Pas une seule goutte ne réapparut à la
lumière du jour.]
Ti-Ben: Je vais y aller pour cette ‘fameuse’ omelette, madame. Où est-ce
mademoiselle ?
Margot : Ce soir j’ai mal à tête faque ça va être madame.
[Sans élaborer davantage, la serveuse prit ensuite la
commande des deux grosbits qui y allèrent, comme tout bon habitant de la
Chire qui se respecte, pour ce qu’il y avait de moins cher sur le menu.
Margot disparut ensuite dans les cuisines, suivie du regard par Ti-Ben qui
arborait d’ailleurs une bosse d’une belle vigueur sous son drap. Un peu plus
tard, alors qu’ils attendaient leurs entrées en suivant avec un intérêt
mitigé les bus-boys se faire assaillir à coup de steaks trop cuits par des
clients insatisfaits, Scram pointa dans un coin du restaurant en direction
d'un drôle de personnage qui était assis seul à une table, qui fumait la
pipe et qui portait une vieux k-way tout crotté avec le capuchon sur la
tête.]
Scram : Check c'te gars-là, Frotteux. Depuis tantôt qu'il arrête pas de te
regarder.
[Frotteux se tourna en direction de l'étranger, tout en se demandant s'il
n'aurait pas du se laisser tenter par les têtes d’escargots en entrée plutôt
que par les biscuits soda avec du beurre de peanuts.]
Frotteux : Qu'est-ce qui te fait dire que c'est moi qu'il regarde ?
Scram : Rien. Si ce n'est qu'il a son télescope de poche braqué sur ta face
depuis dix minutes.
Frotteux : C'est quoi son criss de problème à ce gars-là ? Heille Ti-Ben, tu
peux-tu aller lui demander c'est quoi son criss de problème ?
Ti-Ben : À vos ordres, maître Backins.
Frotteux : Excellent ! Moi pendant que tu vas lui régler son compte, je vais
aller larguer une bombe atomique dans les toilettes. J’ai l’anus dilaté ben
raide. C’est prêt à sortir.
[Le Nazgul se leva et se dirigea en direction de l'homme en question.]
Ti-Ben : Excusez moi, je ne sais pas ce que vous cherchez exactement mais ce
grobit n’est pas à vendre.
[Avant même que le Nazgul n’ait eu le temps de finir sa phrase, l'homme lui
empala le genou à l'aide d'une vieille épée brisée.]
Ti-Ben : Aw ! Espèce de fou. Je ne suis même pas vacciné contre le tétanos !
Aw !
[Le Nazgul se roulait à terre, pas de douleur, mais simplement par plaisir.
Il avait toujours envié les porcs de sa jeune enfance (avant qu’il ne
devienne un mort-vivant) qui se roulaient dans la boue à la ferme familiale.
Pendant ce temps l'homme mystérieux empoigna Scram et Frotteux comme deux
grosses poches de patates de piètre qualité.]
Homme : Allez messieurs, suivez-moi ! Il n'y a pas de temps à perde. Il ne
nous reste que quelques minutes avant que le Nazgul ne se rende compte qu'en
tant que mort-vivant, il est immunisé au tétanos.
Frotteux : Non ! Il faut que j’aille chier moi crisse. Laisse-moi partir.
Homme : Pas le temps pour cela. Vous êtes en grand danger.
[Le mystérieux personnage fonça à toutes jambes en direction de la sortie de
ce sordide établissement en entraînant les deux grosbits avec lui.]
Scram et Frotteux: Nooooooooon !!! Ti-Beeeeen !!!! Au secours !!!
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