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Ours esprit

   
         
   

Les vieux ont raconté que l’homme décharné était plus effroyable à voir que le corps disséqué à côté de lui. Pour la deuxième fois Ajijak se retrouva bien en chair et il se redressa en hurlant. Sous l’apparence d’un ours il s’approcha à quatre pattes du corps découpé, renifla en cherchant autour de lui et lécha de temps à autre du sang. Comme l’ours ne trouvait rien, il recula et se coucha sur le dos, sur la peau.

   
   

Pour la troisième fois le souffle le quitta et la chair disparut. Peu après on entendit la voix d’ Ajijak surgir des profondeurs et réhabiliter son corps. Son souffle revenant; la chair regonfla. Par friction des paumes des mains, Ajijak surgit des profondeurs et alors il ne fut pas possible, pour une raison inconnue, de le regarder très longtemps. Il était à nouveau possédé par les esprits.

   
    Ajijak se redressa et se leva. Restant debout près des restes saignants de sa femme, il dit:    
      - Eh, elle se fait souffrir elle-même.      
   

Ensuite il se pencha sur les morceaux tranchés et commença à envoyer le souffle d’esprit à travers la trachée. Il se passa ainsi un petit moment, puis les morceaux se mirent à trembler, et sans être touchés par une main, les morceaux se rapprochèrent en glissant. 

   
   

Dès qu’ils se touchaient, ils fusionnaient sans laisser la moindre cicatrice. Bientôt la femme d’Ajijak fut entière mais elle demeurait inerte.

   
   

Ajijak se mit à souffler de l’esprit dans la région du cœur en même temps qu‘il avançait la main gauche vers sa tête.

   
   

 Il continua ainsi pendant longtemps, jusqu‘à ce qu ‘un tremblement traverse le corps de la femme dont les muscles du ventre se contractèrent. Puis elle respira très faiblement mais Ajijak continua de souffler de l’esprit sur son côté jusqu‘à ce que la respiration devienne normale.

   
   

Alors la femme pleura comme un nouveau-né. Ajijak se leva et la contempla. Au moment où la femme reprit entièrement connaissance, les âmes lâchèrent leur emprise sur Ajijak et il se retrouva lui-même normal.  

   
   

Ajijak, toujours nu, reprit alors ses vêtements et demanda à son frère d’apporter des peaux à l’intérieur de la tente. Il prit ensuite, lui-même, le couteau entre ses dents et souleva sa femme dans ses bras.

   
   

 Il demeura ainsi un moment en regardant la foule. Puis il se tourna et entra dans la tente pour ne plus apparaître de la journée. La foule se dispersa dans un profond silence. Un jeune homme nommé Avko se sépara du groupe et partit la tête baissée. Beaucoup de personnes étaient affaiblies après les évanouissements et devaient être conduites par la main.

   
   

Au troisième jour, la femme d’ Ajijak mourut; emportée par son propre Tupilec. Ajijak l’enterra près de la tente. Les vieux qui ont rapporté ces paroles pour les générations futures et qui ont eux-mêmes assisté à la possession d’Ajijak en ce jour ensoleillé près d’Iterdeq disent :

   
     

- C’était terrible de voir un corps humain disséqué mais ce n’était rien comparé à la peau vibrante de l’homme décharne.

   
   

Très profondément dans le fjord d’Angmassalik, près de Qingeq, à proximité d’Iterdeq reste comme un témoin étrange le cercle des pierres de la tente d’ Ajijak et le tombeau de dalles de sa femme

   
         
         
   

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