LES COMMÉRAGES DE JACK O'NEILL (6)
Sam fait de la télé

© Xeen (mai 2002)

genre : parodie/humour (si vous préférez comprendre quelque chose, je vous conseille de lire les précédents !)
disclaimer : Stargate-SG1 - Metro-Goldwyn Mayer Inc. / UA - MGM Worldwide Television - Gekko Corp - Double Secret Productions - Scifi Channel - all rights reserved
résumé : Sam  et Jack  retrouvent une vieille connaissance…
statut : complète
spoilers : 1969, Secrets, Window Of Opportunity, The Children of The Gods

note de l'auteure : allez vite lire les merveilleuses histoires de Wendy Parkinson :

Attention !! Pour les besoins de cette histoire, j'ai utilisé les identités de deux personnes. Bien évidemment, il s'agit d'une fiction et les faits rapportés sont le fruit de mon imagination et ne se sont donc jamais produits  ;)

Merci à Choupette pour son aide !!


***

Le major Samantha Carter adressa un bref salut à son supérieur hiérarchique, le colonel Jack O'Neill, qui venait de la rejoindre et entra dans l'ascenseur sans ralentir. Elle appuya sur le bouton et les diodes indiquèrent que l'ascenseur s'élevait dans le complexe souterrain.
La gêne des deux militaires était palpable.
Sam s'absorba dans la contemplation des numéros en tirant machinalement sur la veste de son uniforme de parade tandis que Jack passait un doigt dans le col de sa chemise en se raclant la gorge.
Il laissa échapper un soupir et se tourna vers Sam en grimaçant.
"Je suis désolé, voilà !" dit-il d'un ton forcé. Ses mains s'agitèrent brièvement dans l'air et retombèrent. "Vous êtes contente ?!"
Le silence suivit cette remarque. Finalement Sam leva la tête et le regarda droit dans les yeux d'une manière glaciale. "Contente, mon colonel ? Vous pensez peut-être qu'il vous suffit de présenter des excuses, mais pas cette fois-ci, et certainement pas de cette façon," conclut-elle d'une voix sourde.
La porte de l'ascenseur s'ouvrit.
"Excusez-moi, monsieur," dit–elle en essayant de sortir en contournant O'Neill qui lui barrait le passage.
Elle lui accorda un autre regard polaire mais il fit mine de ne pas s'en apercevoir et étendit les bras sur les côtés pour l'empêcher de passer.
"Nous serons en retard," constata le major sans le quitter des yeux.
"Ca m'est égal," lâcha-t-il d'une voix enrouée. "Je n'aurais jamais dû dire ça Carter, j'ai dépassé les bornes, je suis désolé," répéta-t-il en baissant les bras.
Elle s'engouffra dans le couloir d'un pas décidé, O'Neill sur ses talons.
"C'est trop facile, mon colonel," lança-t-elle d'une voix de plus en plus courroucée. "C'est déjà assez difficile pour moi de travailler au SGC avec une bande machistes primaires, sans que vous vous sentiez obligé d'y ajouter votre grain de sel. Je pensais que vous étiez au-dessus de ça. Vos excuses n'y changeront rien cette fois-ci… à moins qu'elles ne soient publiques !"
"Publiques ?"
"Absolument," confirma-t-elle sans ralentir.
"Mais enfin Carter !" plaida-t-il, "ce n'est qu'un film !"
Elle s'arrêta net et se retourna. Ses yeux bleus brillaient d'un éclat inhabituel. La colère durcissait ses traits.
"C'est bien le problème monsieur ! Sous prétexte qu'il s'agit de fiction, vous vous permettez de faire des commentaires désobligeants et sexistes !"
"Moi, j'ai fait ça !?"
"Mon colonel, vous savez très bien ce que vous avez dit !" fulmina Sam en se remettant à marcher. "En réalité, nous le savons tous les deux, alors arrêtez tout de suite votre petit jeu. Vous ne m'aurez pas cette fois-ci."
"Je suis désolé major, je ne le ferais plus !" dit-il pour la troisième fois.
"Vous me prenez vraiment pour une imbécile ! Arrêtez votre cinéma d'enfant gâté ! Bien sûr que vous le referez, et à la première occasion ! La manière dont vous avez osé vous moquer du personnage de l'archéologue dans le film et les sifflements à l'apparition des femmes de la tribu sur Abydos, franchement, mon colonel, j'ai honte pour vous."
O'Neill se garda bien d'intervenir. Faisant profil bas, il essaya de prendre l'air le plus humble possible et il la laissa poursuivre espérant qu'elle finirait par se calmer.
"En tout cas, cela cadre parfaitement avec la série qui a été créée à partir de ce film dans la réalité alternative. Quand j'ai visionné la scène où le colonel embrasse son second parce qu'ils sont coincés dans une boucle temporelle, j'ai senti mon sang bouillir dans mes veines ! Elle ne réagit même pas !! Que quelqu'un essaye de me faire ça au SGC, il ne sera pas déçu," ajouta-t-elle en le regardant. "Quand est-ce qu'on arrêtera de prendre les femmes pour des objets de…"
"Carter ! Nos sommes arrivés," intervint le colonel fort à propos.
Le major Carter détourna les yeux de son supérieur et rencontra ceux d'un inconnu qui s'avançait vers eux la main tendue. A ses côtés se tenait un homme grand, habillé de manière décontractée qui l'observait avec un sourire en coin.
"Bonjour ! Je suis Michael Greenburg !" annonça l'homme d'une voix claironnante. "Je vous remercie d'avoir accepté de m'accorder un peu de votre temps précieux."
Sam fut immédiatement séduite par ses manières directes. Elle échangea une ferme poignée de main et se tourna vers le deuxième homme.
"Je vous présente mon associé. Je pense que vous le connaissez déjà," ajouta-t-il en désignant son compagnon. "Ne serait-ce que de vue !"
"Major Samantha Carter."
Sam adressa un sourire éclatant à l'associé et lui serra la main en rougissant.
"Monsieur Anderson, je suis une de vos fans," dit-elle. "Je pense avoir vu tous les épisodes de Legend au moins une douzaine de fois ! D'ailleurs j'ai même téléphoné à la chaîne pour protester quand ils ont annulé la série et…"
Elle s'arrêta à bout de souffle et rougit de plus belle.
"C'était donc vous," s'exclama Richard Dean Anderson en clignant de l'œil. Il garda sa main entre les siennes un peu plus longtemps que nécessaire et se pencha pour lui murmurer quelque chose à l'oreille.
O'Neill observait son manège d'un air pincé. Ce type devait avoir eu mention très bien en drague à la fac. C'était bien la première fois qu'il voyait son second se comporter comme une midinette.
Comme à regret, Sam se recula, lâcha la main de l'acteur et se tourna vers O'Neill.
"Monsieur Greenburg, Rick," dit-elle en se trémoussant comme une collégienne, "permettez-moi de vous présenter le colonel Jonathan O'Neill de l'US Air Force."
"Enchanté," dit Jack d'une voix qui démentait clairement ses propos. Il jeta à Sam un regard noir. Elle savait qu'il détestait ce prénom. Elle l'avait fait exprès. "Venons-en aux faits, messieurs. Vous nous avez laissé entendre que vous désiriez tourner une série qui aurait notre complexe de Cheyenne Mountain pour site ?" commença-t-il en les entraînant vers une salle de réunion.
"Tout à fait," répondit Anderson. "MGM m'a contacté en me proposant de tenir le rôle d'un militaire qui effectuerait des missions, disons, inhabituelles. Vous voyez ce que je veux dire, le genre top secret, Roswell, E.T. et tout le bataclan."
Il sourit en enfonça les mains plus profondément dans ses poches.
"Alors j'ai tiré quelques ficelles et l'armée américaine est prête à nous apporter son concours," plaisanta-t-il.
"Vraiment ?" commenta O'Neill en leur faisant signe de prendre place. "Et c'est là que j'interviens ?"
"J'ai pensé que vous pourriez certainement me donner un coup de main pour aborder le personnage de l'officier. Vous savez l'armée, ce n'est pas ma tasse de thé !" sourit l'acteur.
Jack le regarda d'un air méprisant. Pour l'amour du ciel ! Il avait autre chose à faire que de coacher un acteur dans la base. Pourquoi son visage lui était-il familier ? Il n'arrivait pas à mettre le doigt dessus. Carter n'avait pas l'air d'être dérangée par ses cheveux décolorés en tout cas. Après lui avoir servi ces discours féministes ad nauseam, la voilà qui se pâmait pour un acteur de série B sur le retour…
Ah, les femmes !!…
Enfin, Hammond lui avait donné des consignes, il irait au bout de cette histoire.


"Colonel, j'ai une mission un peu particulière à vous confier," avait commencé prudemment le général. "En l'absence du docteur Jackson et de Teal'c, je ne peux pas envoyer votre équipe offworld. Je vous demanderais de bien vouloir servir de liaison à deux producteurs d'Hollywood."
"Mon général," avait protesté O'Neill, "vous ne croyez pas que quelqu'un d'autre pourrait s'en charger ?"
"Jack, c'est une mission de confiance, je vous assure que j'ai vraiment besoin de vous deux sur ce coup-là. Sinon le Président risque de me taper sur les doigts."
"Nous deux ? Vous voulez dire moi et Carter ?"
"A moins que le major Carter ne fasse plus partie de SG-1, colonel… Vous allez comprendre…"



"A votre disposition, messieurs," dit-il d'un ton neutre en évitant de regarder son second. "Que voulez-vous savoir ?"
"Vous avez peut-être vu le film Stargate ?" interrogea Greenburg. "C'est l'histoire d'un…"
"Je connais le film, messieurs," l'interrompit O'Neill.
Décidément, il était maudit. Quand est-ce qu'ils allaient arrêter de le martyriser avec ce film. Il jeta un coup d'œil à Carter, toujours béate.
"Un café ?"
"Non, merci, je préférerais du thé, s'il vous plaît, mademoiselle," dit le producteur à l'enseigne qui les avait rejoints. "Sans lait ni sucre… La série serait la suite du film. Nous avons imaginé que des extraterrestres envahissent la base où est stockée la porte des étoiles et le gouvernement diligente une enquête. Qu'en pensez-vous ? Je crois que c'est jouable."
"Vous avez besoin de conseillers techniques ?" intervint Carter.
Elle observa O'Neill à la dérobée puis décida de se focaliser sur les deux producteurs. Décidément, cette histoire avait un succès fou, c'était plutôt drôle de constater que les mêmes idées existaient et étaient développées dans les deux réalités. Autant faire en sorte que leur série soit aussi fidèle que possible aux spécifications militaires et éviter que le véritable stargate ne devienne chose publique. Elle sourit et attendit.
"Tout à fait. Je n'ai aucune idée des règlements de l'armée américaine. Pourtant j'ai bien failli servir au Vietnam, mais j'ai eu une péritonite deux jours après être arrivé à Saïgon et j'ai passé le reste de mon incorporation à l'hôpital en convalescence à cause des complications," expliqua-t-il en souriant. "Tout ce que j'ai appris, c'est jouer aux cartes !"
"Vraiment ?" dit platement O'Neill.
"Oui. J'avais dans l'idée de déserter, mais il s'est passé quelque chose de bizarre quelques jours avant que je ne passe au Canada et finalement j'ai quand même rejoint mon unité. En fait, j'avais prévu d'aller à Woodstock avec ma copine et de passer au Canada, mais on a pris des drôles de mecs en stop…"
"Ah…" commenta O'Neill en le regardant d'un air extrêmement ennuyé.
Il commença à jouer avec son stylo, son regard allant alternativement de l'un à l'autre des deux hommes. Ce n'était pas possible ?! Est-ce que ce type pouvait être le même Michael ? Si c'était le cas, il fallait arrêter ce cirque tout de suite.
"Très intéressant…" murmura-t-il en jetant un regard en coulisse à Sam.
Il fit une grimace derrière sa main, mais elle ne réagit pas.
"Désolé," s'excusa Greenburg, "je suis un bavard impénitent. Excusez-moi, est-ce que je vous connais ?" demanda-t-il en se penchant vers O'Neill. "J'ai l'impression qu'on s'est déjà rencontré. C'est curieux j'ai une très bonne mémoire des gens d'habitude, mais là, ça m'échappe."
Il le dévisageait ouvertement, l'air interrogateur.
Jack grommela quelque chose d'inaudible et le fusilla du regard, cherchant machinalement le secours de Carter.
"Ce projet me tient énormément à cœur," intervint Anderson. "Je vous serais très reconnaissant de toute l'aide pratique que vous pourrez nous apporter. Nous pensons incorporer une femme et un extra-terrestre à l'équipe… disons pour équilibrer un peu les choses. Un militaire de carrière et un archéologue, ce n'est pas un projet très télégénique. En fait, il nous faudrait quelqu'un comme le major Carter."
"Sam," le corrigea-t-elle.
O'Neill sursauta et fit une grimace en direction de son second. De mieux en mieux !
"Sam," sourit Anderson en hochant la tête.
"Le lieutenant Simmons vous a déjà fait faire le tour du propriétaire je crois," intervint froidement le colonel.
Le comédien acquiesça, mi-figue, mi-raisin.
"Un tour restreint…".
Il haussa les épaules.
"Sans doute vos ficelles ne sont-elles pas assez longues pour que l'armée de l'air américaine vous dévoile ses installations secrètes," grinça O'Neill en fixant le comédien.
Un ange passa. Carter dissimula à grand peine un sourire. Elle adorait quand Jack était jaloux. O'Neill se rengorgea. Elle n'était plus fâchée.
"Sans doute," répliqua le comédien sans se démonter. "Colonel O'Neill, expliquez-moi comment faire pour être vous," dit-il avec sincérité.
O'Neill se raidit.
Aïe, pensa Carter. Mauvaise tactique. Ce n'est pas en passant de la pommade au colonel qu'il va l'amadouer, bien au contraire ! Elle jeta un coup d'œil en direction du colonel et se rendit compte qu'elle avait raison.
Devant le sourire de Sam, O'Neill finit par se détendre et commença ses explications à contre cœur. Anderson s'appuya contre le dossier de sa chaise et se concentra, les mains posées sur le bureau, les doigts croisés.
Sam observait les deux hommes à la dérobée en discutant avec le producteur. Elle n'aurait jamais eu l'idée de faire jouer le rôle d'un militaire à MacGyver, oups ! Anderson… Mais maintenant qu'elle les avait en face d'elle ensemble, elle reconnaissait que c'était plutôt une bonne idée. Une fois, les cheveux coupés, le comédien pourrait incarner un colonel convaincant.
Restait un problème de taille. Comment faire pour que Greenburg ne mette pas les points sur ses "i" ?

*

"Mon général, cela risque de poser un problème si jamais la mémoire lui revient," insistait Sam.
Le colonel fit une moue direction de Hammond et leva les yeux au ciel.
"Franchement, mon général. Je suis persuadé qu'il n'y a aucun risque que le scénario catastrophe du major Carter ne se produise," dit-il d'un ton badin. "Il y a prescription !"
Il haussa les épaules.
"Comment pourrait-il se souvenir de nous ? Ca s'est passé il y plus de trente ans… pour lui, je veux dire ! D'ailleurs je ne l'avais pas du tout reconnu. Et pourtant, moi, ça ne fait pas si longtemps… C'est idiot, je n'ai rien dit, mon général. Evidemment, si Carter insiste, on devrait sans doute les obliger à laisser tomber l'idée," lança-t-il avec espoir.
"Si je l'ai reconnu, il le peut aussi mon général. Il serait plus raisonnable qu'une autre équipe soit assignée à cette mission."
"Major Carter, avec la meilleure volonté du monde, cela risque d'être impossible. Toutes nos équipes sont en mission, quant à Teal'c et au docteur Jackson, je doute qu'ils soient très représentatifs de l'armée américaine," conclut Hammond avec un soupçon de sarcasme. "Je suis plus inquiet sur le contenu de cette série. L'Etat Major est enthousiaste et il n'est pas question de laisser tomber, colonel."
O'Neill soupira et leva les bras au ciel.
"C'est surréaliste, mon général ! Il est encore temps de tout arrêter !"
"On estime en haut lieu que la série sera une excellente vitrine pour l'armée de l'air. Il est impératif que vous surveilliez le bon déroulement des opérations. L'armée mettra son veto sur certains scénarii, si besoin est."
Teal'c haussa un sourcil et ne fit aucun commentaire. Daniel commença à s'agiter sur sa chaise.
"Il marque un point, Jack ! Excusez-moi général… heu… je ne voulais pas dire ça… enfin…"
"Je crois au contraire que c'est exactement ce que vous vouliez dire," commenta le général, très pince sans rire. "Docteur, vous avez l'opportunité de finir vos classifications et en outre, je vous donne l'autorisation de rejoindre SG12 sur P4X-213. Teal'c, vous êtes libre de suivre le docteur Jackson ou de faire ce que bon vous semble. Cette discussion est close," dit le major général Hammond en se levant, montrant ainsi clairement sa détermination à mettre un terme au briefing.
L'exercice n'était jamais de tout repos avec SG1. L'insubordination caractéristique du colonel semblait déteindre sur toute l'équipe. Jack se leva et repoussa la chaise d'un geste brusque. Sam se rapprocha et pencha la tête.
"Alors mon colonel ?"
"Et bien Carter, j'imagine que le général ne nous laisse pas d'alternative. Si jamais ce Michael Greenbaum nous reconnaît, on improvisera."
"Burg, mon colonel."
"Peu importe ! Greenberg, Greenbaum, Greenburg… Admettez que c'est insensé ! Il faut que nous tombions sur le seul individu avec lequel nous avons eu un contact en 1969…"
"Nous avons parlé à pas mal de gens pendant ce voyage dans le temps mon colonel. C'est un risque calculé. Il suffit de ne rien dire ou de ne rien faire qui lui donne à penser qu'il nous connaît bel et bien."
"Facile à dire ! J'ai bien peur de l'avoir influencé," dit-il d'un air penaud. "Vous savez, on avait un peu parlé…".
"Mon colonel ?" demanda Carter en croisant les bras sur la poitrine.
"A propos du Vietnam… Il voulait déserter, je ne pouvais pas…"
"Je croyais que j'avais été assez claire pourtant," s'énerva Sam.
"Mais je ne lui pas dit d'où on venait, ni rien !" s'excusa-t-il penaud.
"N'en dites pas plus. Allons nous préparer. Nous mettrons au point les détails dans l'avion."
"Les détails de quoi ?"
"Mon colonel ?"
"C'était de l'humour Carter !"

*

"Installez-vous," dit le régisseur à voix basse. "Vous avez de la chance. Nous mettons en boîte des scènes de studio. Avec le temps qu'il fait, je vous assure qu'on est mieux à l'intérieur !"
Il s'éloigna en parlant dans un walkie talkie.
Les deux militaires se regardèrent et firent quelques pas sur le plateau. La pagaille qui régnait sur le plateau était impressionnante. Ils s'avancèrent timidement, assourdis par les bruits stridents des scies, les coups de marteau, les hurlements des accessoiristes et les conversations qui se mélangeaient.
"Si je devais travailler dans un chaos pareil, je deviendrais cinglé," hurla O'Neill à l'oreille de son second.
Sam se garda bien de lui faire remarquer qu'il pouvait déjà passer pour un cinglé en bon nombre d'occasions. Elle hocha la tête et lui désigna du doigt un objet énorme qui encombrait le passage.
"Regardez mon colonel, c'est incroyable…"
"Un sarcophage ?" demanda le colonel incrédule en passant la main sur la maquette grandeur nature. "C'est du contreplaqué… Pas mal fichu. On dirait presque un vrai. Ca fout les jetons," grimaça-t-il en se frayant un chemin vers les caméras.
"Major Carter, mon colonel, je vois que vous nous avez trouvés !" s'exclama Greenburg en leur broyant la main. "Sam, excusez-moi, Sam… Il faut que je m'habitue ! Ca ira mieux quand vous serez en civil. L'uniforme… enfin !  Venez que je vous présente votre double."
"Mon double ?"
"La comédienne qui interprète le rôle de la militaire, maj… Sam."
"Oh… Oui, c'est vrai. Excusez-moi, tout cela est nouveau pour moi. Je dois avouer que je ne suis pas très à l'aise," admit-elle avec un sourire.
"Vous venez avec nous colonel ?" proposa le producteur.
Jack fit un signe de dénégation. "Non, merci, pas cette fois. Je voudrais faire le tour du propriétaire et discuter un peu. Histoire de tâter le terrain. C'est possible ?"
"Evidemment, faites comme chez vous ! Cindy vous donnera un script, elle doit être dans le coin. Hugh, t'as pas vu Cindy ?"
"Ne vous inquiétez pas je vais me débrouiller. Carter, amusez-vous bien ! On se retrouve plus tard," dit-il avec un sourire forcé.
Il resta un petit moment immobile à les regarder s'éloigner vers le plateau et entreprit de faire sa ronde.

*

"Ca s'est bien passé ?" demanda O'Neill en s'approchant de Sam accoudée au bar de l'hôtel.
"Oh mon colonel, je ne vous avais pas vu arriver ! Ca vous ennuie si on dîne tout de suite ? J'aimerais bien retourner sur le plateau ce soir…"
"Ce soir ? Mais pourquoi ?" dit O'Neill en attrapant sa bière.
"Ils n'ont pas fini la journée… heu… Rick m'a proposé de jouer un des personnages du pilote, pour que je puisse me rendre compte…"
"Rick ?!"
"Richard Dean Anderson, c'est lui qui joue le rôle de l'officier supérieur."
"Oui, je sais," s'exclama O'Neill. "Ce qui m'étonne, c'est que vous ayez accepté ! Vous oubliez que vous êtes officier de l'Air Force Carter !"
"Vous êtes en train de me dire que vous allez m'empêcher de le faire ? S'il vous plaît, mon colonel. Ca va être tellement drôle, vous ne pouvez pas refuser !" supplia-t-elle en s'asseyant à table en face de lui.
Elle le regardait avec un air totalement irrésistible et il sentit ses bonnes résolutions mollir. Il s'absorba dans la lecture du menu et se mit à réfléchir. Après tout, Hammond les avait fourrés dans ce guêpier, il n'avait pas son mot dire. Si jamais il essayait de s'en prendre à Carter, il ferait écran. Il savoura sa position jusqu'au dessert. Sam était sur les charbons ardents mais elle le connaissait suffisamment pour ne pas essayer de pousser sa chance. Il mit un deuxième sucre dans son café et la regarda droit dans les yeux.
"C'est d'accord Carter. Seulement je serais là pour mettre le holà, si j'estime que c'est nécessaire. Nous sommes bien d'accord ?"
"Nous sommes d'accord monsieur ! Est-ce qu'on peut y retourner tout de suite, je suis déjà en retard…"
"Vous aviez accepté avant de m'en parler ?"
"Je ne pouvais pas faire autrement !" s'excusa-t-elle en sortant précipitamment de la salle de restaurant.
Le serveur fit signer le reçu à O'Neill et ils s'engouffrèrent dans un taxi.
"En tout cas, s'ils veulent reconstituer Abydos à Vancouver, je leur souhaite bien du courage ! Comme trouver les acteurs qui accepteront de venir se geler toute l'année sous la pluie ? Je me demande pourquoi ils ont besoin de l'aval de l'armée américaine s'ils finissent par tourner la série au Canada."
"Je crois que cela revient moins cher, mon colonel. Et puis Rick a l'habitude…"
"Ah oui Rick… je l'avais oublié celui-là ! Il vous a promis un rôle alors vous vous jetez à sa tête comme une lycéenne, je n'en reviens pas major. C'est bien vous qui nous avez assommés de discours féministes depuis des années… ou je me trompe ?"
"Ce n'est pas pareil mon colonel," se défendit Sam. "Je serais aux premières loges pour me rendre compte si l'USAF doit apporter sa logistique ou au contraire faire pression pour faire arrêter le tournage… Et puis ce n'est que le pilote," conclut-elle.
"Le pilote ? Qui est pilote ? …. Rick ?"
Elle éclata de rire.
"Mon colonel, le premier épisode que les producteurs proposent aux studios s'appelle le pilote. Si les studios apprécient l'épisode, on tourne le reste de la série… enfin quelques épisodes."
"Alors, je n'ai aucun souci à me faire…" murmura O'Neill.
"Vous croyez que je n'ai pas entendu, monsieur ? Vous n'arriverez pas à me faire changer d'avis. Je vous assure que je m'amuse comme une petite folle."
"Et puis il y a Rick," grinça Jack.
Sam ne prit même pas la peine de relever.

*

Jack la vit s'avancer vers lui avec gêne. Il essaya de se retenir mais sans succès. "Alors, vous êtes redevenue première classe Carter ? Quel effet ça vous fait ?"
"Je ne suis pas première classe, je suis sergent."
"Si vous le dites, Carter. Les uniformes ont changé depuis mon époque…et les sardines aussi. Bah, ce n'est qu'une série non ? Vous jouez un bidasse ?"
"Je vais être enlevée par Apophis, mon colonel !"
"Wow !! J'ai raté le début ?" plaisanta Jack.
"Non, non ! La porte des étoiles est stockée dans un hangar quelconque de l'armée au Nevada…"
"Près de Nellis (*) ?" glissa O'Neill.
Sam faillit s'étouffer. "Monsieur, c'est une série, ils sont obligés de faire référence à des choses que le public connaît !"
"Comme la mythologie égyptienne et les bases secrètes de l'armée américaine…" continua Jack, "je comprends. Ca ne m'explique pas pourquoi vous êtes déguisée en soldat…"
"Je garde la porte des étoiles."
"Ah oui, bien sûr, avec vos petites mains," lança-t-il narquois.
L'arrivée d'un machiniste les interrompit.
"Mademoiselle, le metteur en scène est prêt. Vous devriez venir. Il pique sa crise aujourd'hui…"
Sam le suivit avec un regard d'excuse à Jack qui leur emboîta le pas.
"Mon commandant, je ne suis pas sûr que vous ayez le droit d'entrer," glissa le technicien.
"Colonel, s'il vous plaît. Je suis le conseiller militaire de la production. Bien sûr que j'ai le droit d'entrer," s'exclama Jack. "Elle a bien le droit elle !"
"Mon colonel, ce n'est pas une vraie militaire," expliqua le machiniste en baissant la voix. Il mit un doigt sur ses lèvres et leur fit signe de ne plus bouger. "Le rouge est mis," murmura-t-il.
"Ca explique tout," souffla O'Neill.
Tous les trois assistèrent à la fin de la prise sans bouger puis Sam fut happée par un tourbillon.
Quelques heures plus tard, elle commençait à regretter d'avoir accepté. Ce qui lui avait semblé une si bonne idée se transformait en quelque chose très proche de l'idée qu'elle se faisait d'un cauchemar éveillé. Rester là à ne rien faire pendant que tout s'agite autour de vous jusqu'à ce qu'il faille faire semblant d'être terrorisée par de faux jaffas qui empestaient la colle néoprène, ce n'était pas du tout ce qu'elle avait espéré. Evidemment les acteurs prisonniers de leur costume en plastique étaient plus à plaindre qu'elle.
Elle s'enfonça dans le noir au fond du plateau, guidée par des ronflements réguliers qu'elle aurait reconnus n'importe où dans la galaxie.
"Mon colonel, on s'en va," dit-elle en le secouant.
O'Neill ouvrit les yeux immédiatement. "Déjà ? Je commençais à m'amuser," dit-il d'une voix pâteuse. "Quelle heure est-il ?" ajouta-t-il en tapant sur le verre de sa montre. "Une heure et demie !?"
"L'heure de rentrer à l'hôtel, monsieur," acquiesça-t-elle en l'aidant à se relever. "Je dois être sur le plateau à 5 heures. Ils vont tourner ma grande scène."
"Vraiment ?" bailla O'Neill en se frottant la joue. "Et ça sera ?… Vous pouvez peut-être me donner une idée ?"
"C'est une surprise !"

*

Le major général Hammond appuya sur la télécommande et ralluma la lumière. Une lueur sarcastique brillait au fond de ses yeux. Le sourcil gauche de Teal'c atteignait des sommets. Quant à Daniel, il continuait de fixer l'écran éteint la bouche ouverte et le regard vide.
"Est-ce que vous avez des explications à me donner major Carter," demanda froidement Hammond.
Sam, rouge comme une pivoine, ouvrit la bouche mais aucune son cohérent n'en sortit.
"Si vous permettez, général," intervint O'Neill, "je peux vous fournir une explication. Evidemment, vous n'êtes pas forcé de me croire."
"Evidemment," ponctua Hammond qui résistait à son envie de rire devant l'air piteux de la jeune femme.
"Le major Carter a cherché sur mon ordre à s'infiltrer dans l'équipe de tournage afin de déjouer les pièges de la production."
"Qu'est-ce que c'est que ce charabia colonel ? Si vous voulez me convaincre qu'il était nécessaire que le major Carter, un officier de l'armée de l'air américaine, tout comme vous, dois-je vous le rappeler, colonel O'Neill," martela Hammond, "qui, sous votre commandement, effectuait une mission de routine, se retrouvât entièrement nue à l'écran dans une scène particulièrement longue d'une série de science-fiction à trois sous, cela va être difficile !" continua-t-il sans rien perdre de son sérieux.
"Il semblerait que ce programme soit diffusé sur le câble, général," dit soudain Teal'c.
"Ce qui signifie Teal'c ?" Le général haussa la voix d'un ton.
"Heu... Je pense que Teal'c veut dire que… heu… probablement… pas grand monde ne l'a vu," marmotta Daniel.
"Et en plus, c'est un pilote !" ajouta O'Neill avec un grand sourire.
"Messieurs, vous êtes en train de vous payez ma tête," fulmina Hammond. "Je vous demanderai de vous taire. Major, auriez-vous l'obligeance de bien vouloir m'expliquer ce strip-tease ?"
"Mon général, ce n'était pas comme ça quand on l'a tourné !"
"Votre explication risque d'être intéressante major. Je sais que les trucages permettent pas mal de choses, or si j'en crois le tatouage que j'ai aperçu à l'image, vous n'avez pas été doublée."
Sam lança un regard désespéré à O'Neill qui sourit de toutes ses dents et ne pipa mot.
"Ils m'ont fait une blague mon général," bafouilla-t-elle. "Je ne sais pas qui a pu leur donner une idée pareille, mais Rick m'avait promis qu'ils ne le monteraient pas. Ils ont dû changer d'avis…"
"Rick ?" Le général hésita. "En vérité, major, je ne sais pas quelles sanctions prendre."
"Mon général, son nom n'est pas crédité au générique," plaida Daniel qui reprenait des couleurs.
Il jeta un œil à Sam, comme s'il la découvrait sous un nouveau jour.
"Vous avez raison docteur, mais ça n'est pas une explication. J'ai envoyé deux de mes officiers superviser le tournage d'une série, pas se donner en spectacle et encore moins faire la danse du ventre !"
"Mon général, j'étais présent sur le tournage et j'avais le script dans les mains. Je peux vous certifier que la scène en question n'était pas écrite de cette façon. D'ailleurs je vous ai apporté le script pour que vous puissiez en juger par vous-même."
Hammond se plongea dans la lecture des pages incriminées, le sourcil froncé.
"En effet, je ne vois rien de ce qui a été effectivement diffusé hier soir."
"Ca a été diffusé ?" demanda nerveusement Sam.
"Oui, major. La cassette m'a été remise par porteur spécial avant-hier pour que je puisse donner mon aval à la diffusion. Il semblerait qu'elle ait d'abord fait le tour de la base avant de me parvenir… trop tard pour que puisse mettre mon veto."
D'écarlate, Sam passa à une couleur indéfinie du spectre.
"Je suis désolée mon général. Si vous acceptez ma démission, elle sera sur votre bureau dans l'heure qui vient."
"Refusé !" dit Hammond d'un ton péremptoire. "En revanche, je vous demanderais de garder profil bas, major."
Elle acquiesça.
"Permission de me retirer mon général ?"
Sans attendre la réponse, elle se leva en repoussant bruyamment la chaise et s'enfuit plutôt qu'elle ne sortit. Le général soupira. La discipline se relâchait sérieusement à Cheyenne Mountain.
"Vous pouvez disposer," dit-il au dos de ses collaborateurs qui quittaient eux aussi la salle de conférence sur les talons de Sam. "Jack, j'aurais deux mots à vous dire."

Jack s'installa dans le fauteuil en face du général et attendit. Il avait du mal à déterminer si Hammond se gourmandait de la situation ou s'il était réellement furieux. Il croisa les jambes et prit à tout hasard un presse-papier sur le bureau. La voix de Hammond le fit sursauter.
"Jack, je ne sais pas quoi faire," commença Hammond sur le ton de la confidence. "Il me semble que la situation vous ait échappé, je me trompe ? Ou est-ce qu'il s'agit d'une de vos petites plaisanteries ?"
"Mon général, jamais je n'aurais fait une chose pareille… monsieur !"
"Bien, vous venez de confirmer ce que je soupçonnais colonel. La question suivante est : pourquoi ?"
"Heu …Vous savez que Carter a des accès de féminisme et qu'elle peut être très virulente…"
"Une emmerdeuse ?"
"C'est le mot que je cherchais mon général. Alors j'ai pris la liberté d'en discuter avec les producteurs. Des gens charmants. Au fait, Michael Greenburg n'a jamais retrouvé ni où, et plus important, ni quand il m'avait rencontré !"
"Je suis heureux de l'apprendre," s'énerva Hammond, "Jack, n'abusez pas de ma patience !"
"Vous savez aussi que nous nous faisons des soirées pizza avec les autres équipes SG ?" Le général hocha la tête. "Nous avons visionné un film de science-fiction il y a quelque temps de cela et Carter a trouvé que mon attitude n'était pas politiquement correcte… monsieur."
"Je vois," sourit Hammond. "L'armée est un drôle d'endroit quand on est une femme, colonel, même l'USAF. Donc vous avez décidé de mettre le major Carter dans une situation embarrassante?"
"Oui," reconnut-il. "Avec l'aide de Anderson et du chef-op'. Les habilleuses ont fait le reste. Mais, elles, il a fallu que je les soudoie," ajouta-t-il avec un clin d'œil. "Je reconnais que ce n'est pas très sympa pour Carter, mon général… En réalité, c'est Anderson qui l'a persuadée. Il sait tout à fait se faire passer pour un imbécile et faire le joli cœur en même temps."
"Vous pensiez avoir le monopole colonel ?"
Jack sourit et continua.
"Ils m'avaient promis que ça resterait dans les tiroirs."
"Colonel, vous êtes sans doute le seul à ne pas vous être aperçu que la plastique impeccable de votre second ferait tilt à l'image, mais eux s'en sont rendus compte !! La presse spécialisée renchérit sur le sujet depuis hier soir," dit-il en jetant Variety et quelques autres périodiques sur son bureau. "Est-ce que vous savez que c'est la première fois qu'un personnage se dénude ainsi dans une série ? Est-ce que vous savez que grâce à cet artifice, la série va probablement continuer ?"
"Je suppose, mon général," dit Jack en baissant la tête.
Il hésita en faisant passer le presse-papier d'une main dans l'autre.
"Je vous ai rapporté les scripts des épisodes à venir, monsieur. Les scénarii sont bons, et qui sait…"
"… si le projet Stargate venait à devenir public…"
"C'est bien ce que je voulais dire," confirma O'Neill.
"Colonel, je laisse tomber les sanctions pour cette fois. Je demanderais à quelqu'un d'autre de superviser la série. Le major Samuels sera ravi de reprendre le collier à votre place. Il semble que vous n'étiez pas fait pour cette mission, ni vous ni le major Carter."
O'Neill se leva d'un bond, un large sourire aux lèvres. "Merci mon général ! Permission de me retirer ?"
"Accordée."
Jack salua et ouvrit la porte. La voix du général l'arrêta dans son élan. "Colonel ? Vous n'oubliez pas quelque chose ?" dit le général en désignant le presse-papier que Jack emportait avec lui.
"Oh, désolé."
"Encore une chose colonel. Je compte sur vous pour me remettre les négatifs avant ce soir."
"Les négatifs ?"
"Ne jouez pas à ce petit jeu avec moi Jack."
Le général sortit une chemise de son tiroir et la posa devant lui.
"Vous ne savez pas ce qu'il y a là ?" dit-il en posant la main à plat sur le document.
Il observa la réaction de son second qui renonça à feindre.
"Vous les avez vues ?"
"Oui."
"Ne dites rien à Carter, elle me tuerait si elle voit ces photos," supplia Jack.
"Je vous promets de ne rien dire, mais ce sera beaucoup plus difficile de faire taire les 368 personnes qui ont déjà eu ces photos en main…"
Jack pâlit.
"Je suis mort," murmura-t-il.
"Je pense que oui colonel," dit Hammond avec un grand sourire. "Est-ce que je vous ai dit qu'il y a déjà des auto-collants ?"
Jack tomba sur la chaise et se prit le visage dans les mains.
"Je suis vraiment mort," gémit-il.


FIN


* La Nellis Air Force Base est chargée du contrôle de la fameuse zone 51 (Area 51) au Nevada (90 miles au nord de Las Vegas).
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